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15/01/2016 | FRANCE | N°14/07621

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 15 janvier 2016, 14/07621


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/07621





SA GROUPE PROGRES



C/

[I]

FEDERATION C.F.E. - C.G.C. MEDIAS 20000







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLEFRANCHE-SUR-

SAONE

du 08 Septembre 2014

RG : F 13/00272











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 15 JANVIER 2016







APPELANTE :



SA GROUP

E PROGRES

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Yann BOISADAM de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON





INTIMÉS :



[Q] [I]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Comparant en personne, as...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/07621

SA GROUPE PROGRES

C/

[I]

FEDERATION C.F.E. - C.G.C. MEDIAS 20000

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLEFRANCHE-SUR-

SAONE

du 08 Septembre 2014

RG : F 13/00272

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 15 JANVIER 2016

APPELANTE :

SA GROUPE PROGRES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Yann BOISADAM de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

[Q] [I]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant en personne, assisté de Me Nicolas FANGET de la SELARL VEBER ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Virginie DUBOC, avocat au barreau de LYON

FEDERATION C.F.E. - C.G.C. MEDIAS 20000

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Nicolas FANGET de la SELARL VEBER ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Virginie DUBOC, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 19 Novembre 2015

Présidée par Michel SORNAY, Président, et Natacha LAVILLE, Conseiller, magistrats rapporteurs, sans opposition des parties dûment avisées, qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de Michèle GULLON, Greffier en chef.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Michel SORNAY, Président

Agnès THAUNAT, Conseiller

Natacha LAVILLE, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 15 Janvier 2016, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président, et par Michèle GULLON, Greffier en chef auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Monsieur [Q] [I] est entré au service du GROUPE PROGRÈS le 09 avril 1992 et il y occupe l'emploi de journaliste au grade depuis 2004, de secrétaire général de rédaction, indice 220, statut cadre.

La relation de travail est soumise à la convention collective nationale des journalistes professionnels.

[Q] [I] est titulaire au sein de l'entreprise de différent mandats de représentants du personnel désigné par le syndicat CFE-CGC médias 2000 :

'délégué syndical central d'entreprise, ce qui lui ouvre droit à un crédit d'heures de délégation de 15 heures par mois,

'membres du comité d'établissement, ce qui lui ouvre droit à un crédit d'heures de délégation de 20 heures par mois,

'membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ce qui lui ouvre droit à un crédit d'heures de délégation de 10 heures par mois.

Il est à noter qu'un accord d'entreprise du 12 novembre 2008, ayant un effet rétroactif à compter du 1er avril 2008, relatif au fonctionnement paritaire, prévoit que les heures passées en réunions paritaires sur convocation de l'employeur, en dehors du temps de travail du salarié concerné, seront récupérées ou payées selon le choix de ce dernier, de même que les temps de trajets y afférents

Par ailleurs [Q] [I] est titulaire de plusieurs mandats syndicaux extérieurs à l'entreprise :

' conseiller au collège salariés du Conseil de prud'hommes de Lyon

' administrateur et vice- président de l'URSSAF du Rhône,

' premier vice-président de l'URSSAF Rhône-Alpes,

' membre de l'instance paritaire régionale de PÔLE EMPLOI Rhône-Alpes

' administrateur de L'AGEMETRA.

***

Soutenant que son employeur lui était redevable à compter du mois de mai 2008, en vertu de l'accord d'entreprise précité du 12 novembre 2008, d'heures supplémentaires correspondant à sa participation à des réunions paritaires auxquelles il avait assisté en dehors de son temps de travail, y compris les temps de trajets nécessaires pour se rendre à chacune d'elles ainsi que des frais de transport s'y rapportant, [Q] [I] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône (par application de l'article 47 du code de procédure civile) à l'effet d'obtenir le paiement des sommes dues, outre une condamnation provisionnelle de l'employeur à des dommages-intérêts.

Par arrêt du 7 avril 2011 confirmant partiellement une ordonnance de référé du Conseil de prud'hommes de Villefranche du 11 juin 2010, la Cour d'appel de Lyon a condamné la société GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] les sommes provisionnelles suivantes :

' 7 176,13 euros correspondant au temps passé en réunions paritaires, convoquées à l'initiative de l'employeur, hors temps de travail et trajet pour la période de mai 2008 à décembre 2010 inclus,

' 819,28 euros correspondant aux frais engagés pour se rendre aux réunions paritaires hors temps de travail de mai 2008 à décembre 2010

' 500 € à titre de dommages-intérêt pour atteinte à l'exercice du droit syndical,

'outre 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Cette décision a en outre ordonné à la société GROUPE PROGRÈS de remettre à [Q] [I] des bulletins de salaire rectifiés de mai 2008 à décembre 2010 pour les mois considérés.

[Q] [I] a saisi à nouveau la formation de référé du Conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône le 28 novembre 2011 afin notamment d'obtenir la condamnation du GROUPE PROGRÈS à lui payer de même pour la période de janvier 2011 à mai 2011 les heures supplémentaires correspondant à sa participation à des réunions paritaires auxquelles il a assisté en dehors de son temps de travail ainsi que des frais de transport s'y rapportant.

Par arrêt du 29 mai 2013, la Cour d'appel de Lyon a confirmé l'ordonnance de référé du Conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône du 7 février 2012 en ce qu'elle a condamné la SA GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] la somme de 717,61 euros à titre d'indemnité de congés payés dus sur les heures supplémentaires allouées par l'arrêt précité du 7 avril 2011 au titre des réunions hors temps de travail sur la période d'avril 2008 à décembre 2010 inclus.

Par contre cette décision a constaté l'existence d'une contestation sérieuse sur la demande de [Q] [I] tendant paiement de ces heures supplémentaires pour la période allant de janvier 2011 à juillet 2012, et a en conséquence dit n'y avoir lieu à référé à ce titre.

***

C'est dans ce contexte que [Q] [I] a saisi le 29 octobre 2013 le Conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône, toujours par application de l'article 47 du code de procédure civile, d'une action au fond tendant d'une part à obtenir le paiement des heures supplémentaires auxquelles il pense avoir droit, et d'autre part à obtenir réparation de son préjudice né de la discrimination qu'il estime avoir subie depuis l'année 2004 du fait de ses activités syndicales, discrimination se traduisant selon lui par un retard de carrière et l'attribution d'un niveau de classification et de salaire inférieur à ceux des journalistes responsables de service comme lui-même.

Il considère en effet que le temps consacré à l'ensemble de ses mandats et fonctions extérieures ne lui a pas été correctement rémunéré par la société GROUPE PROGRÈS, qui s'en tient au paiement de la somme mensuelle correspondant à un horaire de travail de

151 h 67 mentionné sur ses bulletins de paie, quelle que soit la durée des activités effectivement exercées par le salarié pendant la période concernée, sachant que les différents organismes remboursent à la société, le temps de travail passé par [Q] [I] dans les diverses réunions auxquelles il participe.

Devant le bureau de jugement, il a en dernier lieu demandé au Conseil de prud'hommes de :

- dire et juger que la société GROUPE PROGRÈS ne l'a pas rémunéré à hauteur de son temps de travail effectué entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013,

- condamner le GROUPE PROGRÈS à lui payer :

27 390,75 € à titre de rappel de salaire pour la période de 2009 à décembre 2013 inclus,

2 739 € au titre des congés payé afférents et intérêts de droit à compter de la demande, avec délivrance des bulletins de salaire rectificatifs sous astreinte,

31 590 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la situation de travail discriminatoire,

- dire et juger que [Q] [I] est victime d'une situation de discrimination syndicale,

- condamner le GROUPE PROGRÈS à lui payer la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination syndicale,

- condamner la société GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] à effet du 1er janvier 2014, la rémunération annuelle moyenne des salariés du panel de comparaison, soit la somme de :

81 413 € afin de faire cesser le trouble manifestement illicite,

2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter les demandes reconventionnelles de la société GROUPE PROGRÈS

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

- condamner le GROUPE PROGRES en tous les dépens et intérêts de droit.

La Fédération CFE-CGC-MEDIAS 2000 est intervenue volontairement en demande, en application de l'article L.2132-3 du code du travail, et a demandé au Conseil de prud'hommes de :

- dire et juger recevable son intervention volontaire,

- condamner la société GROUPE PROGRÈS à lui payer les sommes de :

5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice porté aux intérêts collectifs de la profession,

1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,

- condamner la société GROUPE PROGRÈS aux entiers dépens de l'instance.

Pour sa part, la société GROUPE PROGRÈS :

- concernant les heures supplémentaires, a argué des incohérences existant dans le planning prévisionnel présenté chaque mois par [Q] [I] ,

- concernant la discrimination syndicale, a fait valoir que [Q] [I] a eu une carrière normale et qu'il ne rapporte aucune preuve de la discrimination dont il dit avoir été victime.

La société GROUPE PROGRÈS a donc conclu au débouté de [Q] [I] et de son syndicat de toutes leurs prétentions et a sollicité du Conseil de prud'hommes la condamnation de monsieur [I] à lui payer les sommes suivantes :

* 14 985,26 € au titre de remboursement des condamnations prononcées dans le cadre des procédures de référé.

* 13 799,60 € à titre de retenues sur salaire,

* 2 292,90 € à titre de remboursement des heures réalisées au-delà des heures légales de délégation,

* 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par jugement du 8 septembre 2014, le Conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône a constaté en premier lieu que sur les années 2009 à 2013 inclus, [Q] [I] avait réalisé un temps de travail devant être rémunéré supérieur de 736,62 heures à celui que la société GROUPE PROGRÈS lui avait réellement payé, et ce alors même que l'employeur avait encaissé plus d'argent provenant des mandats extérieurs de monsieur [I] qu'elle ne lui a reversé de salaires.

Ce jugement a par ailleurs relevé que l'évolution du salaire annuel du demandeur était inférieure de plus de 20'000 € à la moyenne des augmentations des salaires du panel comparatif, caractérisant ainsi une différence de traitement au préjudice de Monsieur [I].

En conséquence, le conseil de prud'hommes a :

- Dit et jugé que la société GROUPE PROGRÈS n'a pas rémunéré [Q] [I] à hauteur du temps de travail réellement effectué entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013, pour un total de 736,62 heures ;

- Condamné la société GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] les sommes de :

* 27 390,75 € à titre de rappel de salaire pour la période de 2009 à décembre 2013 inclus, et intérêts de droit à compter de la demande en justice, soit le 29 octobre 2013,

* 2 739 € au titre des congés payés afférents ;

- Ordonné la délivrance des bulletins de paie rectificatifs pour l'ensemble de la période sous astreinte de 10 € par jour de retard et par bulletin de salaire à compter du 10ème jour suivant la notification du présent jugement, dans la limite de 90 jours, le conseil de prud'hommes se réservant le droit de liquider l'astreinte ;

- Condamné la société GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] la somme de 31 590 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la situation de travail discriminatoire, en suite de l'absence de prise en compte par l'employeur de ces heures supplémentaires ;

- Dit et jugé que [Q] [I] est victime d'une situation de discrimination syndicale de la part de son employeur, la société GROUPE PROGRÈS, au plan tant de son évolution indiciaire que des primes et avantages en nature dont il bénéficie ainsi que de l'application de l'accord d'entreprise du 12 novembre 2008 relatif au fonctionnement paritaire ;

- Condamné en conséquence la société GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] les sommes de :

* 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination syndicale,

* 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société GROUPE PROGRÈS à fixer la rémunération annuelle de [Q] [I] , à effet du 1er janvier 2014, à la rémunération annuelle moyenne des salariés du panel de comparaison, soit 81 816 € bruts annuels, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite ;

- Débouté la société GROUPE PROGRÈS de ses demandes reconventionnelles ;

- Déclaré recevable l'intervention volontaire du syndicat C.F.E. C.G.C. Médias 2000;

- Condamné la société GROUPE PROGRÈS à payer au syndicat C.F.E. C.G.C. Médias 2000 au titre de la discrimination syndicale subi par l'un de ses représentants, les sommes de :

* 2 500 € à titre de dommages et intérêts,

* 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- Mis les dépens à la charge du GROUPE PROGRÈS.

Le GROUPE PROGRÈS a interjeté appel de cette décision le 25 septembre 2014.

Il a par ailleurs sollicité du Premier président de la Cour d'appel de Lyon la suspension de l'exécution provisoire assortissant ce jugement. Une ordonnance du Premier président du 8 décembre 2014 n'a fait droit à cette demande qu'en ce qui concerne les condamnations non assorties de l'exécution provisoire de droit.

***

Par ses dernières conclusions, parvenues au greffe les 10 et 16 novembre 2015 (conclusions initiales puis additionnelles), la SA GROUPE PROGRÈS demande aujourd'hui à la cour d'appel d'infirmer le jugement entrepris et en conséquence de :

' débouter monsieur [I] de l'intégralité de ses demandes,

' le condamner au paiement de la somme de 14'985,26 euros au titre de remboursement des condamnations prononcées dans le cadre des procédures de référé,

' le condamner au paiement de la somme de 13'799,60 euros à titre de retenues sur salaire,

' le condamner au paiement de 2292,90 euros à titre de remboursement des heures réalisées au-delà des heures légales de délégation,

' le condamner au paiement de la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouter le syndicat CFE CGC médias 2000 de l'intégralité de ses demandes et de le condamner reconventionnellement au paiement de la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions (conclusions numéro 2), [Q] [I] demande à la cour d'appel de :

'confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône du 8 septembre 2014 en ce qu'il a dit et jugé que le GROUPE LE PROGRÈS ne l'avait pas rémunéré à hauteur du temps de travail réellement effectué entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013, pour un total de 736,62 heures

'confirmer la condamnation de la société GROUPE LE PROGRÈS à lui payer la somme de 27'390,75 euros au titre du rappel de salaire afférent, outre 2739,0 7 € au titre des congés payés correspondant ;

'confirmer la décision du 8 septembre 2014 du conseil de prud'hommes en ce qu'il a dit et jugé que monsieur [I] avait été victime dans son travail d'une discrimination syndicale et en ce qu'il a condamné la société GROUPE LE PROGRÈS à lui payer la somme de 100'000 € nets à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à cette discrimination ;

'confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société GROUPE LE PROGRÈS à fixer la rémunération annuelle de monsieur [I], avec effet au 1er janvier 2014, à la rémunération annuelle moyenne des salariés du panel de comparaison, soit 81'816 € bruts annuels, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite

'rejeter les demandes reconventionnelles de la société GROUPE PROGRÈS

'pour le surplus, réformer le jugement entrepris et condamner la société GROUPE LE PROGRÈS au paiement de la somme de 32'000 € nets en réparation du préjudice subi par monsieur [I] lié à une situation de travail discriminatoire (absence de paiement du temps passé en réunion) ;

'condamner la société GROUPE LE PROGRÈS au paiement de la somme de 20'000€ nets à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié à la discrimination syndicale dont elle a continué à se rendre coupable pour la période du 1er janvier 2014 à ce jour ;

'condamner la société GROUPE LE PROGRÈS à payer au syndicat CFE CGC médias 2000 la somme de 5000 € nets à titre de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession ;

'condamner la société GROUPE LE PROGRÈS à régler à monsieur [I] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en appel ;

'condamner la même à régler au syndicat CFE CGC médias 2000 la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure en appel  ;

'condamner la société GROUPE LE PROGRÈS en tous les dépens et aux frais éventuels d'exécution de la décision à intervenir, outre intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les créances salariales, et à compter du prononcé du jugement (soit le 8 septembre 2014) pour les sommes à caractère indemnitaire.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu'elles ont fait viser par le greffier lors de l'audience de plaidoiries et qu'elles ont à cette occasion expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n'avoir rien à y ajouter ou retrancher.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1.- sur la demande en paiement d'heures supplémentaires:

[Q] [I] sollicite en premier lieu la condamnation de son employeur à lui payer la somme de 27'390,75 euros au titre de 736,62 heures supplémentaires qu'il dit avoir effectuées sans rémunération entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2013, outre une somme de 2739,07 € au titre des congés payés correspondants.

Ces montants incluent les heures supplémentaires prises en compte par les arrêts précités de la Cour d'appel de Lyon des 7 avril 2011 et 29 mai 2013, qui ont alloué à ce salarié les sommes de 7176,13 euros et de 717,61 euros à titre de provision à valoir sur la rémunération d'heures supplémentaires qui lui étaient dues en application de l'accord précité du 12 novembre 2008, au titre de sa participation en exécution de ses mandats internes à l'entreprise à des réunions du comité d'entreprise, du CHSCT et d'une manière plus générale à des réunions paritaires convoquées par l'employeur entre le 1er mai 2008 et le 31 décembre 2010.

La durée légale du travail effectif prévue à l'article L.3121-10 du code du travail constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article 3121-22 du même code.

En l'espèce il n'est pas contesté que la durée du travail de [Q] [I] prévue contractuellement et conventionnellement est de 35 heures par semaine.

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En ce sens, [Q] [I] verse aux débats pour les années 2009 à 2013 des tableaux récapitulatifs listant mois par mois le nombre d'heures dont il était redevable envers son employeur par application de son contrat de travail ainsi que les heures assimilées à un travail effectif qu'il dit avoir consacrées à ses différents mandats tant externes (Conseil de prud'hommes de Lyon, URSSAF du Rhône et de Rhône-Alpes, PÔLE EMPLOI, AGEMETRA) qu'internes à l'entreprise (délégué syndical central, comité d'entreprise, CHSCT).

La société GROUPE PROGRÈS conteste ces tableaux sur de multiples points et sollicite en conséquence le débouté de [Q] [I] de l'ensemble de ses prétentions de ce chef.

***

Il convient de préciser en premier lieu le cadre juridique de prise en compte des heures supplémentaires de monsieur [I] au titre de ses différents mandats.

En ce qui concerne ses mandats internes à l'entreprise GROUPE PROGRÈS, l'accord d'entreprise relatif au fonctionnement paritaire intervenu le 12 septembre 2008, avec application rétroactive au 1er avril 2008, stipule que la participation hors temps de travail aux réunions de C.E., de CCE, de DP, du CHSCT ainsi qu'aux réunions paritaires convoquées à l'initiative de la direction de l'entreprise donne droit aux salariés concernés, à leurs choix :

'soit l'équivalent d'un service de récupération forfaitaire, quelle que soit la durée de la réunion et du trajet pour s'y rendre ,

'soit la rémunération des heures passées en réunions ainsi que du temps de trajet.

Il est constant que [Q] [I] a ici opté pour la rémunération de ces heures passées en réunions et en trajet en dehors de son temps de travail, et c'est sur ce fondement qu'il a sollicité et obtenu en référé dans les arrêts des 7 avril 2011 et 29 mai 2013, les sommes de 7176,13 euros et de 717,61 euros à titre de provision à valoir sur la rémunération de ces heures supplémentaires pour mandats internes.

En dépit d'un certain flou qu'entretient à ce sujet [Q] [I] dans ses écritures, il convient ici de distinguer ses mandats internes des mandats externes exercés par l'intéressé au sein du Conseil de prud'hommes de Lyon, du conseil d'administration et la commission de contrôle de l'AGMETRA, des conseils d'administration de l'URSSAF du Rhône et de Rhône-Alpes et de l'instance paritaire régionale de Pôle Empoi Rhône-Alpes.

En effet si ces organismes sont bien paritaires, les salariés participant à leurs activités ne sauraient solliciter à leur sujet l'application des stipulations de l'accord d'entreprise précité du 12 novembre 2008, qui ne régit les relations entre le GROUPE PROGRÈS et ses salariés que pour l'exécution de leurs mandats syndicaux internes à cette entreprise.

C'est donc à tort que [Q] [I] tente plus ou moins aujourd'hui, implicitement mais avec une mauvaise foi évidente, de se prévaloir de cet accord d'entreprise pour demander à son employeur le paiement en heures supplémentaires du temps qu'il a consacré à des réunions de ces organismes externes en dehors de son temps de travail.

Il convient donc ici d'examiner mandat par mandat le point de savoir si [Q] [I] est en droit de réclamer à son employeur la rémunération des temps qu'il a consacrés aux réunions de ces organismes extérieurs à l'entreprise en dehors de son temps normal de travail, et s'il peut le cas échéant solliciter la majoration de cette rémunération au titre d'heures supplémentaires.

Mandat de conseiller prud'homme salarié au Conseil de prud'hommes de Lyon :

L'employeur reproche ici à [Q] [I] de prendre en compte dans son calcul des heures supplémentaires figurant sur ses tableaux précités la totalité du temps qu'il a consacré à ce mandat sans distinguer entre les vacations effectuées durant son temps de travail et celles effectuées en dehors de celui-ci.

Le GROUPE PROGRÈS estime en effet que l'assimilation, édictée par l'article

L 1442'6 du code du travail, à un temps de travail effectif du temps passé par le salarié à l'activité du Conseil durant ses heures de travail n'est pas applicable aux vacations effectuées au conseil de prud'hommes par [Q] [I] en dehors de ses heures de travail, et en particulier durant ses congés payés ou ses jours de RTT.

Cet article L 1442'6 dispose que :

« Le temps passé hors de l'entreprise pendant les heures de travail par les conseillers prud'hommes du collège salarié pour l'exercice de leurs fonctions est assimilé à un temps de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son contrat de travail, des dispositions légales et des stipulations conventionnelles.

Les absences de l'entreprise des conseillers prud'hommes du collège salarié, justifiées par l'exercice de leurs fonctions, n'entraînent aucune diminution de la rémunération et des avantages correspondants. »

En l'espèce, il n'est pas contesté qu'un nombre certain des vacations de monsieur [I] au conseil de prud'hommes se sont déroulées durant des journées ou demi-journées où ce salarié était en RTT ou en congé.

L'employeur aurait donc pu se prévaloir des dispositions de ce texte pour refuser au salarié l'assimilation de ces heures de mandat prud'homal à des heures de travail effectif.

Force est toutefois de constater qu'il n'a pas estimé utile de le faire, qu'il a au contraire inclu sans distinction ces heures dans ses demandes - adressées mois après mois au conseil de prud'hommes - de remboursement, par application de l'article D 1423'59 du code du travail, des salaires qu'il disait avoir maintenus au bénéfice de [Q] [I], et qu'il ne conteste pas avoir obtenu sans difficulté le remboursement des salaires et charges sociales correspondants.

La société GROUPE PROGRÈS a donc ainsi implicitement mais nécessairement toujours considéré que ces vacations de [Q] [I] au conseil de prud'hommes s'inscrivaient bien dans son temps de travail rémunéré par l'entreprise.

Elle est donc aujourd'hui mal fondée à adopter une position contraire et à refuser la prise en compte de ces heures dans le cadre du calcul des heures supplémentaires dues au salarié.

De même, c'est à tort qu'elle refuse de prendre en considération pour le calcul de ces heures supplémentaires les périodes de congés de formation pris par [Q] [I] en application de l'article L 1442'2 du code du travail.

En effet, par le renvoi exprès de cet article aux dispositions de l'article L3142'12 du même code, le temps de formation des conseillers prud'hommes est assimilé à une durée de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés, du droit aux prestations d'assurance sociale et aux prestations familiales, ainsi que pour l'ensemble des autres droits résultant pour l'intéressé de son contrat de travail, y compris le droit d'obtenir, comme en l'espèce, la rémunération d'heures supplémentaires.

Mandat d'administrateur de l'URSSAF Rhône-Alpes :

En ce qui concerne ce mandat, il y a lieu de rappeler que l'article L231-12 du code de la sécurité sociale dispose que :

Les organismes de sécurité sociale ne peuvent, en aucun cas, allouer un traitement à leurs membres du conseil ou administrateurs. Toutefois, ils leur remboursent leurs frais de déplacement.

Ils remboursent également aux employeurs des membres du conseil ou administrateurs salariés les salaires maintenus pour leur permettre d'exercer leurs fonctions pendant le temps de travail ainsi que les avantages et les charges sociales y afférents.

Et l'article L231-9 du même code dispose que :

Les employeurs sont tenus de laisser aux salariés de leur entreprise, membres d'un conseil ou d'un conseil d'administration d'un organisme de sécurité sociale, le temps nécessaire pour se rendre et participer aux séances plénières de ce conseil ou des commissions qui en dépendent.

Le temps passé hors de l'entreprise pendant les heures de travail par les membres d'un conseil ou administrateurs salariés pour l'exercice de leurs fonctions est assimilé à une durée de travail effectif pour la détermination de la durée des congés payés, du droit aux prestations d'assurances sociales et aux prestations familiales ainsi qu'au regard de tous les droits que le salarié tient du fait de son ancienneté dans l'entreprise.

Les absences de l'entreprise des membres d'un conseil ou administrateurs salariés, justifiées par l'exercice de leurs fonctions, n'entraînent aucune diminution de leurs rémunérations et des avantages y afférents.

Il résulte de ce dernier texte que l'exercice des fonctions d'administrateur au sein de cet organisme de sécurité sociale ne peut conduire à priver ce salarié des avantages résultant de dispositions législatives et conventionnelles sur la durée du travail, et donc en particulier de son droit au paiement d'heures supplémentaires, si les conditions de mise en oeuvre de celles-ci sont réunies.

C'est donc à tort que la société GROUPE PROGRÈS s'oppose aujourd'hui à tout paiement d'heures supplémentaires à [Q] [I] au titre du temps qu'il a passé à l'exercice de son mandat d'administrateur au sein du conseil d'administration de l'URSSAF Rhône-Alpes.

Mandat de membre du collège salarié de l'instance paritaire régionale de PÔLE EMPLOI :

Le GROUPE PROGRÈS s'oppose ici à tout paiement, au motif qu'il n'existerait aucun texte prévoyant une assimilation à un temps de travail effectif, en ce qui concerne la durée du travail et les heures supplémentaires, du temps consacré à l'exercice de ce mandat.

Il résulte des dispositions de l'article L5312'10 du code du travail que PÔLE EMPLOI

'(...) est organisé en une direction générale et des directions régionales et qu'au sein de chacune de ces dernières, une instance paritaire, composée de représentants des employeurs et des salariés désignés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariées représentatives au niveau national et interprofessionnel, veille à l'application de l'accord d'assurance-chômage prévue à l'article L5422'20 est consulté sur la programmation des interventions au niveau territorial.'

Le dernier alinéa de l'article R5312'28 du même code dispose que

« Le mandat de l'instance paritaire est gratuit, sous réserve du remboursement des frais de déplacement et de séjour, ainsi que, le cas échéant, de perte de salaire, dans les conditions prévues par le règlement intérieur de Pôle emploi. »

Enfin le Règlement intérieur des instances paritaires régionales (IPR) de PÔLE EMPLOI, publié au bulletin officiel de PÔLE EMPLOI, comporte un article 10 ainsi rédigé :

'Article 10 - Droits et obligations des membres de l'IPR

Le mandat des membres de l'IPR est gratuit, sous réserve du remboursement des frais de déplacement et de séjour, ainsi que, le cas échéant, de perte de salaire (code du travail, article R. 5312-28, dernier alinéa) ou, pour les membres en activité non titulaires d'un contrat de travail, de perte de revenu.

Les modalités et le barème du remboursement des frais de déplacement et de séjour des membres de l'IPR sont fixés par délibération spécifique du conseil d'administration de Pôle emploi.

Le montant des indemnités versées pour pertes de salaire subies ou pour pertes de revenus à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions correspond, dans le premier cas, au montant des salaires et primes perdus conformément à la délibération spécifique du conseil d'administration de Pôle emploi prise pour l'application du présent règlement intérieur et, dans le deuxième cas, à une indemnité forfaitaire fixée dans les mêmes conditions.'

Il résulte de la combinaison de ces textes, qui existent tout à fait, contrairement aux allégations aussi fantaisistes que tendancieuses du GROUPE PROGRÈS dans ses écritures, qu'ici encore l'exercice de ce mandat syndical au sein de PÔLE EMPLOI ne peut conduire à priver le salarié concerné des avantages résultant de dispositions législatives et conventionnelles sur la durée du travail, et donc en particulier de son droit au paiement d'heures supplémentaires, si les conditions de mise en oeuvre de celles-ci sont réunies.

Mandat de membre du conseil d'administration de l'AGEMETRA :

L'AGEMETRA est un service de santé au travail interentreprises de la métropole Lyonnaise créé par application de l'article L 4622-6 du code du travail et organisé conformément aux dispositions des articles L 4622-11 et D 4622-15 et suivants du même code.

Il est constant que la SA GROUPE PROGRES est adhérente de l'AGEMETRA, que [Q] [I] a été mandaté par son organisation syndicale en qualité de membre du conseil d'administration de cet organisme, et qu'il est à ce titre également membre de sa commission de contrôle prévue par les articles D4622-33 et suivants du même code.

L'article D 4622-43 du code du travail dispose que

'Les membres salariés de la commission de contrôle sont indemnisés intégralement par leur employeur de toute éventuelle perte de rémunération résultant de l'exercice de leur mandat. Cette indemnisation prend notamment en compte le temps de déplacement et les frais de transport.

Le service de santé au travail interentreprises rembourse à l'employeur les frais ainsi engagés.'

La cour constate donc ici encore que, contrairement aux allégations de l'employeur, il existe bien un ensemble de textes organisant les modalités d'exercice de ce mandat à l'AGEMETRA et les conditions de remboursement à l'employeur par cet organisme des salaires maintenus par lui au bénéfice du salarié concerné.

Et ici encore l'exercice de ce mandat syndical au sein de l'AGEMETRA ne peut, en l'état de ces textes, conduire à priver le salarié concerné des avantages résultant de dispositions législatives et conventionnelles sur la durée du travail, et donc en particulier de son droit au paiement d'heures supplémentaires, si les conditions de mise en oeuvre de celles-ci sont réunies.

***

En l'état du cadre juridique ainsi posé, il appartient à la Cour d'appel d'apprécier, au vu des pièces versées aux débats, dans quelle mesure [Q] [I] est matériellement fondé à revendiquer le paiement des heures supplémentaires litigieuses.

Aux termes de l'article L3121'20 du code du travail, les heures supplémentaires se décomptent dans le cadre de la semaine civile, sauf quelques exceptions limitativement prévues par le code du travail, exceptions dans le champ desquelles la société GROUPE PROGRÈS ne rentre pas.

[Q] [I] produit au soutien de sa demande en paiement des heures supplémentaires litigieuses au titre des années 2009 à 2013 inclusivement des tableaux (pièce 37 à 42 du salarié) dans lesquels ces heures supplémentaires sont calculées globalement par mois, par la différence entre d'une part les 151,67 heures par mois (équivalent des 35 heures par semaines, précitées) dues contractuellement par lui à son employeur, et d'autre part le total :

- des heures effectivement remboursées chaque mois au PROGRÈS, sur la demande de ce dernier, par les organismes d'accueil de ses mandats externes (Conseil de prud'hommes, Pôle emploi, URSSAF, AGEMETRA),

- des crédits d'heures de délégation dont il bénéficie au titre de ses mandats internes de délégué syndical, membre du CE et membre du CHSCT,

- du crédit d'heures de formation dont il bénéficie au titre de ses mandats tant internes qu'externes,

- des temps qu'il a passés en participant à des réunions paritaires à la demande de son employeur, pendant et en dehors de son temps de travail,

- et du temps très résiduel qu'il a consacré à son employeur pour la rédaction d'articles de presse.

L'examen de ces tableaux permet de constater :

' qu'en dépit d'une demande aussi expresse que légitime du GROUPE PROGRÈS en ce sens, [Q] [I] n'a pas jugé opportun de verser aux débats des tableaux établis par semaine civile pour permettre le calcul des heures supplémentaires alléguées dans des conditions compatibles avec l'article L3121'20 précité ;

'que contrairement à ce que soutient [Q] [I], il est évident qu'un tel calcul par mois et non par semaine a une incidence directe sur les heures supplémentaires ici revendiquées ;

' qu'ainsi, notamment, [Q] [I] a profité de ces calculs effectués par mois pour déduire ' sans aucun fondement juridique ' des 151, 67 heures par mois qu'il doit à son employeur les jours fériés et de congés payés (convertis en heures sur la base de 7,8 heures par jour) pour déterminer ainsi un seuil de déclenchement des heures supplémentaires artificiellement minoré ;

'et enfin que [Q] [I] a retenu comme des heures de travail effectif l'intégralité des crédits d'heures de délégation dont il bénéficie au titre de ses mandats précités internes à l'entreprise LE PROGRÈS, alors qu'il ne s'agit là que de crédit d'heures et qu'il lui appartient donc de prouver, mois par mois, qu'il les a bien en totalité utilisés.

Force est de constater sur ce dernier point que [Q] [I] ne fournit à la Cour aucune information sur l'utilisation de ses crédits d'heures et sur le temps qu'il a réellement consacré à l'exercice de ces mandats internes.

Par ailleurs, le fait que [Q] [I], qui a un statut de cadre, ne soit pas astreint à des horaires de travail journaliers, ne prive pas ce salarié de son droit à n'effectuer que 35 heures de travail par semaine, ce qui est d'ailleurs le fondement de la revendication d'heures supplémentaires qu'il présente aujourd'hui.

Quoi qu'il en soit, la Cour ne dispose pas en l'état d'éléments suffisants lui permettant de déterminer dans quelle mesure [Q] [I] est susceptible d'avoir accompli les heures supplémentaires aujourd'hui revendiquées, notamment faute par ce salarié de fournir des indications précises sur son utilisation de ses différents crédits d'heures de délégation, utilisation sur laquelle l'employeur n'a aucun droit de regard et ne dispose donc par hypothèse d'aucune information.

Tout au plus la Cour peut-elle retenir comme démontrée l'existence d'heures supplémentaires accomplies au titre des réunions paritaires sur convocation de l'employeur dans le cadre des mandats internes, pour celles de ces réunions que la SA GROUPE PROGRÈS doit payer à [Q] [I] en exécution de l'accord du 12 novembre 2008 dans la mesure où celui-ci y a participé en dehors de son temps de travail.

Ces heures ne peuvent en effet s'imputer sur les crédits d'heures de délégation du salarié et leur calcul peut se faire sur la base de la confrontation des tableaux de [Q] [I] avec les documents produits par les deux parties concernant les réunions effectivement tenues (convocations et feuilles de présence émargées par les participants).

C'est d'ailleurs sur une base similaire que l'arrêt rendu par cette Cour d'appel le 7 avril 2011 a fait droit en référé à la demande de provision présentée au titre de ces heures supplémentaires pour la période de mai 2008 à décembre 2010 inclusivement.

Dans le cadre de la présente instance au fond, la société GROUPE PROGRÈS conteste toutefois cette demande en invoquant une exécution déloyale par [Q] [I] de son contrat de travail dans le cadre de l'accord d'entreprise du 12 novembre 2008.

La société GROUPE PROGRÈS fait valoir en ce sens que :

'l'accord d'entreprise du 12 novembre 2008 n'a d'autre objet que de ne pas pénaliser les représentants du personnel contraints, alors qu'ils sont soit en congé, soit en RTT, d'assister à une réunion paritaire à laquelle ils ont été convoqués par l'employeur ;

'il ne peut s'agir en revanche de permettre à ces mêmes représentants du personnel, connaissant à l'avance la tenue d'une réunion, de positionner postérieurement et volontairement un jour de congé ou une RTT (sauf bien entendu impossibilité de faire autrement) le même jour, puis de participer à ladite réunion,

'il ne peut être admis que l'obligation de l'employeur, née de l'application de l'accord du 12 novembre 2008 et consistant à rémunérer les représentants du personnel amenés à participer à une réunion hors le temps de travail, puisse dépendre de la seule volonté de monsieur [I].

Il apparaît toutefois que cet argument est dénué de sérieux, dans la mesure où il aboutit à reprocher à [Q] [I] d'avoir systématiquement sollicité des jours de congé ou de RTT précisément pour les jours où des réunions paritaires venaient d'être convoquées par l'employeur.

En effet dans cette hypothèse, si [Q] [I] avait connaissance de la date de la réunion en cause, il en allait de même pour l'employeur, qui avait donc la possibilité de refuser de lui accorder le congé ou la journée de RTT ainsi sollicités, ce qu'il n'a jamais jugé utile de faire.

Il en résulte que contrairement à ce que soutient le GROUPE PROGRÈS, le positionnement de ces réunions hors temps de travail par [Q] [I], bien que son caractère quasi systématique paraisse particulièrement surprenant, ne dépendait pas uniquement de la volonté de ce salarié mais aussi et tout autant de la décision de son employeur de faire droit - ou non - à sa demande de congés ou RTT.

Il en résulte qu'aucune preuve d'une exécution déloyale du contrat de travail par le salarié n'est ici rapportée, et cet argument sera donc rejeté comme mal fondé.

Il y a dès lors lieu de faire droit à la demande de [Q] [I] en paiement à titre d'heures supplémentaires de la totalité des temps de réunions paritaires convoquées par l'employeur et auxquelles [Q] [I] a participé durant ses congés et RTT et donc nécessairement en dehors de son temps de travail.

Il résulte des pièces versées aux débats par les parties et notamment des feuilles de présence aux réunions produites par l'employeur, qui concordent avec les réunions paritaires internes mentionnées par [Q] [I] dans ses tableaux annuels, que ce salarié est en droit de revendiquer le paiement au titre de ces réunions paritaires hors temps de travail les heures supplémentaires suivantes (en tenant compte des cumuls horaires par semaines civiles):

en 2009:

69,25 heures de réunion, outre 20 h de temps de trajet.

taux horaire brut en 2009 de 32,51 €, porté à 40,64 € de l'heure après majoration de 25 % pour heure supplémentaire

soit (69,25 + 20) x 40,64 = 3627,12 €

en 2010:

55,50 heures de réunion, outre 15h de temps de trajet,

taux horaire brut en 2010 de 32,51 €, porté à 40,64 € de l'heure après majoration de 25 %

soit (55,5 + 15) x 40,64 = 2865,12 €

en 2011:

27,05 heures de réunion, outre 10 h de temps de trajet, dont des heures majorées à 50 % au delà des 39 h à l'occasion de la réunion du CHSCT du 7 mars 2011 (4 h) et de la réunion du CE du 27 avril (1,3 h)

taux horaire brut en 2011 de 32,51 €, porté à 40,64 € de l'heure après majoration de 25 % et à 48,76 après majoration de 50 %, soit

(32.2 h x 40,64) + (5.3 h x 48,76) = 1308,61 + 258,43 = 1567,04 €

en 2012:

60,75 heures de temps de réunion et de trajet, dont 14,50 heures majorées à 50 % au delà des 39 h (2,25 h le 26 janvier, 5 h les 25 et 29 juin, 4 h les 24 et 27 septembre, et 3,25 h les 3 et 5 décembre)

taux horaire brut en 2012 de 34,70 €, porté à 43,38 € de l'heure après majoration de 25 % et à 52,05 € après majoration de 50 %, soit

(46,25 h x 43,38) + (14,50 h x 52,05) = 3515,78 €

en 2013:

33 heures de temps de réunion et de trajet

taux horaire brut en 2013 de 35,06 €, porté à 43,83 € de l'heure après majoration de 25 %,

soit 33 h x 43,83 = 1446,39 €

La société GROUPE PROGRÈS sera donc condamnée à payer à [Q] [I] au titre de ces heures supplémentaires la somme totale de

3627,12 + 2865,12 + 1567,04 + 3515,78 + 1446,39 € = 13 021,45 €

outre la somme de 1302,15 euros au titre des congés payés y afférents.

[Q] [I] sera par contre débouté comme mal fondé du surplus de sa demande au titre des heures supplémentaires, la réalité de celles-ci n'étant pas avérée.

2.- sur la discrimination syndicale liée à l'absence de paiement du temps passé en réunions:

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

[Q] [I] sollicite la condamnation de la société GROUPE PROGRÈS à lui payer la somme de 32'000 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, faisant valoir que l'employeur depuis 2008 refuse à tort de procéder au règlement de ces heures passées en réunions paritaires hors temps de travail, et en trajet pour se rendre ces réunions.

Par ses dernières conclusions, il demande en outre l'octroi d'une somme supplémentaire de 20'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de cette même discrimination syndicale pour la période postérieure au 1er janvier 2014.

Il résulte des développements qui précèdent que contrairement à ce que soutient l'employeur dans ses conclusions, [Q] [I] n'a pas été rempli ici intégralement de ses droits puisqu'il lui reste dû une somme supérieure à 14'000 € de ce chef, même si doivent bien évidemment être déduites de cette créance les sommes qui ont été versées par l'employeur à [Q] [I] en exécution des condamnations prononcées dans le cadre des procédures de référé précitées.

Il résulte des attestations produites par [Q] [I] émanant de [F] [D], [V] [N], [C] [S], [N] [U], [N] [Z], [L] [W] et [D] [M] que ceux-ci, tous élus ou représentants syndicaux, confirment avoir été systématiquement payés par le GROUPE PROGRÈS sans difficulté pour leurs heures passées hors de leur temps de travail en réunions convoquées par l'employeur, ainsi que pour les trajets y afférents.

Il apparaît donc que monsieur [I] n'a pas été sur ce point traité par son employeur de la même façon que les autres représentants et élus syndicaux.

Il convient toutefois de relever que l'employeur verse aux débats les feuilles de présence de la plupart des réunions litigieuses, dont il résulte que [Q] [I] est en réalité le seul représentant syndical à se trouver systématiquement, au moins depuis 2010, en situation de congés ou de RTT lors de ces réunions, ce qui manifestement ne doit rien au hasard mais relève d'une démarche volontaire de la part de ce salarié.

Il est ainsi manifeste que la cause de la différence de traitement entre monsieur [I] et les autres titulaires de mandats syndicaux ne réside pas dans l'activité syndicale de l'intéressé, mais bien dans sa façon pour le moins curieuse de solliciter des RTT et des jours de congés précisément les jours de réunions paritaires.

Il est d'ailleurs à noter que madame [U], qui appartient également à la CFE-CGC Médias 2000, ne rencontre pas la même difficulté que lui pour se faire payer ses heures de réunions paritaires hors temps de travail, mais qu'elle n'a pas sur ce point adopté la même pratique que le demandeur.

En l'état de ces éléments, la Cour ne peut que constater [Q] [I] ne rapporte en l'espèce aucunement la preuve de l'imputabilité de cette différence de traitement à une discrimination syndicale au sens de l'article L1132-2 précité.

Cette demande de dommages-intérêts sera donc rejetée comme mal fondée.

3.- sur la demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale dans le déroulement de carrière :

Aux termes de l'article L 1132-1 du code du travail aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte telle que définie à l'article premier de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales.

L'article L.2141-5 du code du travail interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

Aux termes de l'article L 1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l'article premier de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, Monsieur [I], au soutien de sa demande en paiement d'une indemnité totale de 120'000 € au titre de cette discrimination syndicale, expose avoir constitué un panel de comparaison composé de journalistes d'ancienneté et d'âge comparables aux siens et disposant de responsabilités identiques de service.

Il considère qu'à compter de 2002, date à laquelle il a été titulaire d'un mandat de membre du comité d'établissement, et de manière accentuée à compter de sa désignation en qualité de délégué syndical central puis de l'arrivée d'une nouvelle direction, il a été victime d'une discrimination syndicale puisque :

'en 2002, il disposait de la 3e rémunération annuelle parmi les salariés de son panel de référence et de la 2e parmi ceux du même indice ;

'en 2013, il a perçu une rémunération annuelle brute d'un montant de 69'816 € correspondant à l'avant-dernière rémunération des salariés pris en comparaison ;

'depuis 2003, Monsieur [I] n'a bénéficié d'aucune prime personnelle, il considère être le seul salarié dans cette situation en comparaison avec le panel mentionné ci-dessus ;

'que la progression de sa rémunération brute annuelle entre 2002 et 2013 n'a été que de 21'488 €, soit une augmentation de 44,46 % qui est la plus basse du panel de comparaison et qui est inférieur de 20'226,29 euros à la seule moyenne des augmentations de salaires des autres salariés pour la même période ;

'qu'il a par ailleurs été exclu de la formation à la prévention des risques psychosociaux, au contraire de l'ensemble des cadres de la rédaction .

Les journalistes mentionnées par Monsieur [I] dans son panel de comparaison étaient à fin 2002 :

'[D] [V], reporter 1er échelon à l'indice 145, exerçant les fonctions de rédacteur Jura

'[V] [O], premier secrétaire de rédaction à l'indice 190, exerçant les fonctions de chef de service Rhône

'[S] [F], secrétaire général de rédaction à l'indice 220, exerçant les fonctions de directeur départemental Ain

'[V] [B], chef de service à l'indice 180, exerçant les fonctions de chef d'agence Ain,

'[E] [G], grand reporter à l'indice 175, exerçant les fonctions de grand reporter Rhône

'[Q] [Q] , sous-chef de service à l'indice 160, exerçant les fonctions de rédacteur sports

'[E] [E], premier secrétaire de rédaction à l'indice 190, exerçant les fonctions de chef de service informations générales,

'et lui-même, [Q] [I], chef de service, à l'indice 180,

En 2013, ces mêmes salariés étaient respectivement devenus :

'[D] [V], secrétaire général de rédaction à l'indice 220, directeur

départemental Jura

'[V] [O], premier secrétaire de rédaction à l'indice 190, exerçant les fonctions de chef de service Rhône

'[S] [F], rédacteur en chef adjoint, à l'indice 250, directeur départemental Loire

'[V] [B], rédacteur en chef adjoint, à l'indice 250, directeur départemental Ain

'[E] [G], secrétaire général de rédaction à l'indice 220, directeur départemental adjoint Rhône

'[Q] [Q] , secrétaire général de rédaction à l'indice 220, directeur des sports

'[E] [E], rédacteur en chef adjoint, à l'indice 250, exerçant les fonctions de rédacteur en chef adjoint,

'et [Q] [I], secrétaire général de rédaction à l'indice 220, rédacteur Rhône

Contrairement à ce que soutient l'employeur, ce panel de comparaison n'est pas dénué de pertinence, puisque les salariés concernés occupaient effectivement en 2002 des fonctions relativement comparables.

Il résulte de l'extrait de la convention collective versée aux débats par l'employeur (pièce numéro 2) que les qualifications et coefficients indiciaires du haut de la pyramide hiérarchique de l'entreprise progrès sont les suivants :

Rédacteur en chef ' Coefficient 300

« est responsable, sous l'autorité de la direction, de la conception et de la réalisation du journal. Il a autorité sur l'ensemble du personnel rédactionnel. »

Rédacteur en chef adjoint' coefficient 250

« assiste ou supplée le rédacteur en chef. »

Secrétaire général de rédaction' coefficient 220

«a pour fonction d'animer et de coordonner les différents services rédactionnels suivant les directives de la rédaction en chef.

Il assure la production et la réalisation du journal. Il est notamment responsable de l'ensemble des mises en page et du respect de leurs horaires. »

Premier secrétaire de rédaction' coefficient 190

« est, à défaut de secrétaire général de rédaction, responsable de la réalisation du journal, c'est-à-dire de l'assemblage de divers éléments et de leur mise en valeur suivant leurs intérêts respectifs. Dans certaines entreprises, il peut être l'adjoint du secrétaire général.»

Chef de service'coefficient 180

«dirige et coordonne de travail d'une équipe de rédacteurs, de secrétaire de rédaction, de secrétaires d'édition, dans un complexe de rubriques diverses. »

C'est au regard de cette grille indiciaire que doivent être appréciées les 2 promotions dont a bénéficié [Q] [I] durant la période où il dit avoir été victime de discrimination syndicale :

' d'une part le 27 janvier 2003, par sa nomination au grade de premier secrétaire de rédaction coefficient 190, l'intéressé affirmant avoir été à ce titre nommé chef de service au service Grand Lyon;

'd'autre part par sa nomination à compter du 1er février 2004 au grade de secrétaire général de la rédaction, fonction affectée du coefficient 220.

Cette dernière nomination s'accompagnait d'une affectation au service « société'fait divers » à la rédaction de Lyon Servient, l'intéressé étant notamment chargé de la couverture de l'actualité militaire, en priorité, et pouvant se voir secondairement confier par la direction de la rédaction des missions particulières et spécifiques.

Le courrier du 27 février 2004 notifiant à [Q] [I] cette nomination et cette nouvelle affectation a été expressément accepté par l'intéressé, qui a signé ce document le 2 mars 2004 en y imposant la mention bon pour accord et sa signature .

Aucun des documents versés aux débats ne laisse à penser que monsieur [I] ait, depuis le mois de mars 2004, tenté de remettre en cause cette affectation en qualité de reporter au service 'société'fait divers' ni sollicité une mutation ou une promotion, l'intéressé ne formulant d'ailleurs aucune allégation en ce sens.

En l'état de ces éléments, la comparaison de la carrière de [Q] [I] avec celle des autres membres du panel qu'il invoque, et en particulier avec celles de [D] [V], [E] [G] et [Q] [Q] permet de constater que l'intéressé se retrouve aujourd'hui au même grade et au même indice que ces derniers.

Les 2 premiers d'entre eux ont été nommés secrétaires généraux de rédaction plus tard que monsieur [I], tandis que Monsieur [Q] a bénéficié de cette promotion la même année que lui.

La SA GROUPE PROGRÈS fait par ailleurs valoir sans être contredite sur ce point qu'en bénéficiant ainsi d'un indice 220, monsieur [I] fait partie du groupe des 12 journalistes les mieux payés de l'ensemble des 265 journalistes de cette entreprise de presse.

Il y a donc lieu de constater que [Q] [I] a bénéficié d'un avancement de carrière tout à fait normal par rapport aux autres membres du panel de comparaison dont il se prévaut et ne justifie pas avoir à ce titre été victime d'une quelconque discrimination en raison de ses activités syndicales.

Il convient par ailleurs de rappeler que le juge n'a pas à substituer son appréciation à celle de l'employeur quant à l'aptitude et aux qualités professionnelles du salarié et notamment que l'avancement au choix relève du seul choix de l'employeur et que si l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'un mandat syndical ne peut être une entrave dans le déroulement de la profession d'un salarié, ils ne peuvent cependant valoir à celui qui l'exerce un droit systématique à promotion, sans considération de sa performance professionnelle.

[Q] [I] se plaint encore de ne pas percevoir les mêmes primes que ses collègues se trouvant aux mêmes grade et indice que lui.

L'examen des pièces versées aux débats permet toutefois de constater que, les coefficients indiciaires de messieurs [I], [V], [G] et [Q] étant similaires, leur différence de revenu annuel résulte uniquement de la perception de diverses primes : primes de nuit, primes de vie chère (ces deux-là étant perçues par Monsieur [V], qui travaillait en dernier lieu à [Localité 2] et de nuit, ce qui n'est pas le cas de monsieur [I] ), primes exceptionnelles, primes d'objectifs, et - pour l'un d'eux seulement- d'un avantage en nature lié à l'usage d'un véhicule de fonction.

En ce qui concerne les primes exceptionnelles et primes d'objectif, monsieur [I] n'apporte aucune explication sur les conditions dans lesquelles ces primes sont allouées par l'employeur et ne justifie en rien de ce qu'il remplirait les conditions pour en bénéficier.

Il s'agit de plus apparemment de primes censées récompenser la performance professionnelle du salarié dont l'octroi relève du seul choix de l'employeur et qu'ici encore, si l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'un mandat syndical ne peut être une entrave à la progression de la rémunération d'un salarié, ils ne peuvent cependant valoir à celui qui l'exerce un droit systématique à de telles primes, sans considération de sa performance professionnelle dans le cadre de son activité au bénéfice de l'employeur.

De même, [Q] [I] ne fournit aucune information sur les conditions d'octroi des véhicules de fonctions dans l'entreprise, si bien que la Cour n'est pas en mesure d'apprécier en quoi le fait qu'il ne bénéficie pas d'un tel avantage en nature pourrait être discriminatoire à son détriment.

Ceci est d'autant plus certain qu'il résulte des tableaux annuels que [Q] [I] verse aux débats au soutien de sa demande d'heures supplémentaires que le temps de travail qu'il a pu consacrer notamment depuis 2010 à son activité journalistique au profit de son employeur est devenu au fil des ans de plus en plus inexistant (35 heures pour toute l'année 2010 ; 15,4 heures pour l'année 2011, zéro heure pour l'année 2012, et 1 heure seulement pour l'année 2013), si bien qu'on ne voit guère à quoi aurait pu lui servir un véhicule de fonctions, que l'employeur ne peut être tenu de mettre à sa disposition pour le seul exercice de ses mandats syndicaux.

Ainsi il apparaît que la différence de rémunération liée à l'absence de perception de primes ou d'avantages en nature s'explique bien par des éléments objectifs exclusifs de toute discrimination syndicale.

Par ailleurs, [Q] [I] ne justifie pas avoir d'une façon quelconque été privé de la possibilité de postuler un avancement ou de solliciter une formation, le fait qu'il n'est pas fait partie de la liste des participants à la formation sur les risques psychosociaux ne laissant en rien présumer d'une discrimination syndicale à son encontre, l'intéressé n'alléguant même pas avoir demandé à y participer.

Enfin les attestations émanant de Messieurs [K] et [L], qui seules font état d'une discrimination syndicale, sont d'évidence à consulter avec une particulière circonspection, leurs auteurs ayant été membre de l'ancienne équipe dirigeante du journal, dont ils ont été évincés à l'occasion du changement d'actionnaire principal de la société.

Elles ne sont, quoi qu'il en soit, pas suffisamment circonstanciées pour rapporter à elles seules la preuve de la discrimination fautive ici alléguée.

Il y a donc lieu de réformer le jugement déféré et de débouter [Q] [I] tant de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale concernant sa carrière que de celle tendant à voir revaloriser sa rémunération annuelle afin qu'elle soit fixée à la somme de 81'816 € bruts annuels, correspondant à la moyenne de la rémunération des salariés membres du panel de comparaison.

4.- Sur les demandes accessoires de [Q] [I] :

Le présent arrêt faisant droit très partiellement à la demande d'allocation d'heures supplémentaires présentée par [Q] [I] , il y a lieu d'enjoindre à la SA GROUPE PROGRÈS de faire établir et délivrer à ce salarié dans le délai d'un mois de la signification qui lui sera faite du présent arrêt des feuilles de paye dûment rectifiée pour tenir compte de ces heures supplémentaires.

Cette injonction n'a toutefois pas besoin être assorti d'une quelconque astreinte et le jugement déféré sera donc réformé sur ce point.

Les dépens de première instance et d'appel seront intégralement supportés par la SA GROUPE PROGRÈS, qui succombe au principal.

Vu les données du litige, il ne parait pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge intégrale des frais de procédure et honoraires qu'elle a dû exposer pour la présente instance.

Il n'y a donc pas lieu en l'espèce de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

5.- Sur les demandes du syndicat CFE'CGC Fédération 'médias 2000" :

Ce syndicat sollicite la condamnation de la SA GROUPE PROGRÈS, sur le fondement des articles L2132'3 du code du travail et 328 et suivants du code de procédure civile à lui régler la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif.

Le non paiement des heures supplémentaires dues à un représentant du personnel pour le temps qu'il a passé en réunions paritaires en dehors de son temps de travail constitue dans les faits une atteinte incontestable à l'exercice du droit syndical.

La cour dispose en la cause d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 1000 € la juste réparation du préjudice né de cette atteinte à l'intérêt collectif .

Vu les données très particulières du litige, il ne paraît pas inéquitable de laisser à ce syndicat la charge des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il a exposés pour la présente instance, que ce soit devant le conseil de prud'hommes ou en cause d'appel.

Sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera donc rejetée comme mal fondée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

RÉFORME le jugement déféré rendu par le conseil de prud'hommes de Villefranche-sur-Saône le 8 septembre 2014 en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

CONDAMNE la SA GROUPE PROGRÈS à payer à [Q] [I] , en deniers ou valables quittance pour tenir compte des règlements déjà effectués en exécution des procédures de référé antérieures, la somme de 13 021,45 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires qui lui sont dues, correspondant aux réunions paritaires convoquées par l'employeur et auxquelles [Q] [I] a participé hors de son temps de travail, outre la somme de 1302,15 euros au titre des congés payés y afférents ;

Rappelle que ces sommes portent intérêts au taux légal à compter du 30 octobre 2013, date de réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation ;

DIT que les sommes allouées par le présent arrêt supporteront, s'il y a lieu, les cotisations et contributions prévues par le code de la sécurité sociale ;

ENJOINT à la SA GROUPE PROGRÈS de faire établir et délivrer à [Q] [I] dans le délai d'un mois à compter de la signification qui lui sera faite du présent arrêt des feuilles de paye dûment rectifiées pour tenir compte des heures supplémentaires qui lui ont été allouées ci-dessus;

DÉBOUTE [Q] [I] du surplus de sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période allant du1er janvier 2009 au 31 décembre 2013 ;

DÉBOUTE [Q] [I] de l'ensemble de ses prétentions indemnitaires au titre de prétendues discriminations syndicales ;

LE DÉBOUTE de même de sa demande en revalorisation de sa rémunération annuelle au titre d'une telle discrimination syndicale ;

CONDAMNE la SA GROUPE PROGRÈS à payer au syndicat CFE'CGC Fédération 'Médias 2000" la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte à l'intérêt collectif des journalistes ;

CONDAMNE la SA GROUPE PROGRÈS aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT

Michèle GULLONMichel SORNAY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 14/07621
Date de la décision : 15/01/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°14/07621 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-15;14.07621 ?
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