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12/01/2016 | FRANCE | N°14/03082

France | France, Cour d'appel de Lyon, Sécurité sociale, 12 janvier 2016, 14/03082


AFFAIRE SÉCURITÉ SOCIALE



RAPPORTEUR





R.G : 14/03082





[M]



C/

SARL EBHB

MSA SAONE ET LOIRE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Cour de Cassation de PARIS

du 08 Novembre 2012

RG : T1121772



















































COUR D'APPEL DE LYON



Sécurité sociale



ARRÃ

ŠT DU 12 JANVIER 2016













APPELANT :



[Q] [M]

né le [Date naissance 1] 1985

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté par Me Roland DARNOUX, avocat au barreau de VALENCE







INTIMEES :



SARL EBHB

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentée par Me Pascal DURY de la SELAS FIDAL, Avocat au barreau de MACON



MSA SAONE ET LOIRE

[Adres...

AFFAIRE SÉCURITÉ SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : 14/03082

[M]

C/

SARL EBHB

MSA SAONE ET LOIRE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Cour de Cassation de PARIS

du 08 Novembre 2012

RG : T1121772

COUR D'APPEL DE LYON

Sécurité sociale

ARRÊT DU 12 JANVIER 2016

APPELANT :

[Q] [M]

né le [Date naissance 1] 1985

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Roland DARNOUX, avocat au barreau de VALENCE

INTIMEES :

SARL EBHB

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Pascal DURY de la SELAS FIDAL, Avocat au barreau de MACON

MSA SAONE ET LOIRE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non comparante

PARTIES CONVOQUÉES LE : 13 janvier 2015

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 01 Décembre 2015

Présidée par Isabelle BORDENAVE, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Jean-Louis BERNAUD, Président

Isabelle BORDENAVE, Conseiller

Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 12 Janvier 2016 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Louis BERNAUD, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 22 juin 2004, monsieur [Q] [M] , alors âgé de 17 ans, et employé dans le cadre d'un contrat d'apprentissage de bûcheron par la SARL EBHB, a été blessé par la chute d'un arbre sec, provoquée par l'abattage d'un autre arbre.

Cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse de mutualité sociale agricole de Saône-et-Loire.

Monsieur [M] a engagé une procédure en reconnaissance de faute inexcusable dont il a été débouté par jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Mâcon du 17 septembre 2009, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Dijon du 7 septembre 2010.

La Cour de Cassation a cassé cet arrêt le 8 novembre 2012, et a renvoyé l'affaire devant la présente cour d'appel.

Par arrêt du 13 janvier 2015, la déclaration de saisine de la présente cour d'appel par monsieur [M] a été déclarée recevable, le jugement prononcé par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Mâcon a été réformé, et il a été dit que l'accident dont a été victime monsieur [M] était imputable à la faute inexcusable de la SARL EBHB, le capital attribué étant majoré au taux maximum prévu par la loi.

Avant dire droit sur l'indemnisation du préjudice, une expertise médicale de l'intéressé a été ordonnée, et l'affaire a été renvoyée à l'audience du 1er décembre 2004.

Un pourvoi a été formé à l'encontre de cette décision le 13 mars 2015.

L'expert a déposé son rapport le 23 juillet 2015.

Par conclusions après expertise reçues au greffe le 2 novembre 2015, monsieur [M] sollicite condamnation de la société à supporter la majoration de rente au taux maximum, et à lui verser les sommes suivantes :

-au titre de l'incapacité totale de poursuivre ses activités personnelles pendant les périodes d'hospitalisation : 9996 euros,

-au titre de l'incapacité partielle de poursuivre ses activités personnelles jusqu'à la date de consolidation : 609 euros et 6198 euros,

-au titre de l'assistance occasionnelle d'une tierce personne avant la consolidation : 50'000 euros,

-au titre de l'adaptation de sa voiture avec l'installation d'une boule de conduite au volant, d'une boîte automatique et l'adaptation du siège de conduite : 28'541,06 euros,

-au titre de l'aménagement de son logement : 15'000 euros

-au titre de la perte de chance de promotion professionnelle : 900'000 euros

-au titre des souffrances endurées : 35'000 euros

-au titre du préjudice esthétique : 20'000 euros

-au titre du préjudice d'agrément : 5000 euros

-au titre du préjudice exceptionnel : 400'000 euros

-au titre des débours engagés : 7668 euros

Il demande qu'il soit dit que la MSA devra procéder au paiement et garantir les sommes allouées, et sollicite la condamnation de la société à lui verser la somme de 6000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Il rappelle que l'accident est survenu alors qu'il était en contrat d'apprentissage, participant à un abattage d'arbres en compagnie de trois autres salariés, ayant été violemment heurté par un arbre sec qui est tombé.

Il indique que, suite à cet accident, son incapacité totale de travail a été de deux années, du 22 juin 2004 au 21 juin 2006, qu'il a subi plusieurs hospitalisations, que son état de santé a nécessité l'assistance occasionnelle d'une tierce personne avant la consolidation, fixée au 21 juin 2006, que son état justifie une adaptation de son véhicule et un aménagement de son logement.

Il indique subir une perte de change de promotion professionnelle, du fait de l'impossibilité pour lui de devenir bûcheron, précisant que cet accident l'a privé de toute perspective de travail dans le secteur qui lui plaisait, et que sa formation initiale est devenue obsolète, ayant dû entreprendre un reclassement professionnel qui s'avère délicat, tant en raison de son handicap que des difficultés qu'il a toujours rencontrées dans le domaine des études générales.

Il rappelle qu'il avait trouvé un emploi avec un salaire minoré par rapport à ses collègues et qu'à ce jour, en raison de l'accident, il n'a pu conserver son travail et indique qu'il été reconnu handicapé à 90 %.

Il souligne qu'il lui a fallu attendre huit ans avant de retrouver un emploi, que les techniques modernes d'informatique ne lui sont pas accessibles, dans la mesure où il a perdu le bras droit, qu'en raison de son accident il ne pourra jamais exercer d'activité professionnelle en lien avec sa formation.

Il indique qu'il existe un préjudice exceptionnel, dans la mesure où sa vie reste liée à la prise de médicaments, qui le droguent complètement, et engendrent des difficultés de vigilance, alors que le médicament utilisé est préconisé en cas d'épilepsie, avec une liste d'effets indésirables conséquente.

Il précise qu'à ce jour il a été déclaré inapte à son travail, avec un taux d'incapacité de 90% reconnu par le médecin conseil de la sécurité sociale.

********

Par conclusions en réponse reçues le 30 novembre 2015, la société EBHB demande à la cour, vu le rapport de l'expert judiciaire, de ramener à de plus justes proportions les demandes indemnitaires de monsieur [M] au titre de l'incapacité à poursuivre ses activités personnelles, de le débouter de sa demande au titre de l'assistance d'une tierce personne, de ramener à de plus justes proportions la demande indemnitaire au titre d'adaptation de la voiture, de débouter monsieur [M] au titre de l'aménagement de son logement et au titre des frais de scolarité.

La société EBHB sollicite également que les demandes d'indemnisation du pretium doloris et du préjudice esthétique soient ramenées à de plus justes proportions, que la demande au titre du préjudice d'agrément soit rejetée, ou à tout le moins réduite, que l'intéressé soit débouté de sa demande au titre de la perte de chance de promotion professionnelle, de même que de sa demande au titre du préjudice exceptionnel, sollicitant, en tout cas, la réduction de celles-ci à de plus justes proportions, et qu'il soit statué ce que de droit concernant les dépens.

Elle rappelle dans quelles circonstances ce dernier a été victime d'un accident de travail, pour lequel il a engagé une action en reconnaissance de faute inexcusable, dont il a été débouté par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saône-et-Loire par jugement du 17 septembre 2009, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Dijon du 7 septembre 2010.

Elle rappelle que la cour de Cassation, par arrêt du 8 novembre 2012, a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la cour d'appel de Dijon, que la cour d'appel de Lyon, cour de renvoi, a réformé le jugement du 17 septembre 2009, reconnu l'existence d'une faute inexcusable, majoré le capital attribué au taux maximum prévu par la loi et avant dire droit ordonné une expertise médicale.

Elle indique que cet arrêt a fait l'objet d'un pourvoi en cassation, et que l'expert commis a déposé son rapport le 30 juin 2015.

Elle expose qu'au titre de l'incapacité de poursuivre les activités personnelles, l'expert distingue une période d'incapacité totale, pendant les hospitalisations, et une période d'incapacité partielle, avec un taux évalué à 60 % ,puis une période de déficit fonctionnel temporaire partiel, autour de 50 % jusqu'à la date de consolidation.

Elle considère que l'indemnisation sollicitée sur la base de 40 euros par jour

est excessive pour ce qui concerne la période d'incapacité totale, et l'est également pour ce qui concerne la période d'incapacité partielle et la période de déficit fonctionnel temporaire, sollicitant que ces postes de ce préjudice soient indemnisés sur la base de 20 euros par jour.

Concernant la demande au titre de l'assistance d'une tierce personne, la société EBHB indique que, sur la période antérieure à la consolidation, monsieur [M] a bénéficié d'une prise en charge d' auxiliaire familiale à raison de 15 heures par mois conservant à sa charge 2 euros par heure, soit un total de 210 euros.

Pour la demande postérieure à la consolidation, elle précise que l'intéressé a bénéficié d'une prise en charge du 1er août 2007 au 31 janvier 2008 pour 15 heures par mois sans pour autant qui ne justifie du coût qui a pu, le cas échéant, être laissé à sa charge

Elle considère que la demande à hauteur de 50'000 euros est injustifiée, tant dans son principe que dans son quantum, alors que monsieur [M] ne justifie pas de la nécessité d'un recours à une tierce personne.

Concernant la demande d'adaptation du véhicule, elle considère là encore que celle-ci est injustifiée dans son quantum, précisant que l'intéressé omet de rappeler qu'il a bénéficié d'aides financières versées par la MSA en avril 2005 ; pour ce qui concerne l'aménagement du logement, la société précise que l'expert n'a pas noté d'autre gêne que celle de la fermeture des volets à battants, et qu'il n'y a pas nécessité d'envisager la motorisation des volets, faisant par ailleurs observer qu'aucune pièce n'est versée au débat pour justifier du montant de la somme réclamée.

Elle s'oppose à la demande de remboursement des frais de scolarité, en faisant observer que ceux-ci n'ont pas été supportés par monsieur [M], mais par sa mère.

Concernant le pretium doloris, évalué à 5,5/ 7 par l'expert, elle soutient que la somme réclamée de 35'000 euros est excessive, comme celle réclamée au titre du préjudice esthétique, évalué à 4/ 7 par l'expert.

Concernant le préjudice d'agrément, elle précise que pour la période antérieure à la date de consolidation du 21 juin 2006, le préjudice est absorbé par celui découlant de l'incapacité totale de poursuivre ses activités personnelles, pour lequel il sollicite une indemnisation et, pour la partie postérieure au 21 juin 2006, indique que l'intéressé ne pratiquait pas d'activités physiques ni sportives avant l'accident, et que la somme réclamée au titre de la gêne dans l'activité de jardinage est excessive.

Concernant la perte de chance de promotion professionnelle, la société EBHB soutient que la demande est injustifiée, tant dans son principe que dans son montant, alors que, depuis la consolidation, l'intéressé a accompli une reconversion professionnelle en signant un contrat de professionnalisation pour devenir agent d'accompagnement et obtenir un diplôme d'État d'aide médico psychologique ; elle précise qu'il n'est nullement établi que la démission, donnée en mars 2008, soit en lien avec l'accident dont il a été victime.

Elle indique par ailleurs que monsieur [M] justifie de compétences permettant de maîtriser les outils informatiques, qu'il a été engagé par une société le 13 février 2012 comme agent de production, et que, s'il ne peut effectivement plus travailler dans l'activité du bûcheronnage il a effectué avec succès une reconversion, étant salarié d'une société relevant de la même branche d'activité.

Elle considère qu'il n'est pas démontré que la rémunération qui lui est versée serait inférieure à celle qu'il aurait perçue dans une activité de bûcheronnage, ou qu'il connaîtrait une évolution de carrière moins favorable.

Elle indique que si l'accident l'a contraint à un changement de voie professionnelle couvert par le versement d'une rente, celui-ci ne peut être confondu avec l'indemnisation de la perte de chance de promotion professionnelle, laquelle n'est pas démontrée.

Elle précise par ailleurs que si l'intéressé a été placé en arrêt de travail le 30 mars 2015, considéré comme une rechute de l'accident du 22 juin 2004, il n'est pas établi qu'il ait fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude, rien ne permettant de dire qu'à l'issue de cette période de suspension du contrat de travail il ne sera pas déclaré apte ou reclassé.

Elle rappelle que la rente qui est versée s'établit à la somme annuelle de 13'822,11 euros.

Concernant le préjudice exceptionnel évoqué par l'expert, comme lié à l'actuel arrêt de travail, et motivé par des douleurs dorsaux lombaires mais également par des difficultés de vigilance lorsque l'intéressé respecte les posologies de Gabapentine prescrites, la société soutient que ce préjudice n'est pas démontré, et que l'indemnisation sollicitée est totalement disproportionnée.

La caisse MSA, qui n'était ni présente ni représentée lors de la précédente audience n'a pas comparu à l'audience de rappel du dossier.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'il convient de rappeler que monsieur [M], né le [Date naissance 1] 1985, a été victime d'un accident de travail le 22 juin 2004, alors qu'il avait 17 ans et qu'il effectuait un contrat d'apprentissage de bûcheron, étant violemment heurté par la chute de la cime d'un arbre.

Que le rapport de l'expert permet de retenir que suite à cet accident :

-il a été hospitalisé à l'hôpital de [Localité 3] du 22 au 23 juin 2004, puis transféré à l'hôpital neurologique de [Localité 2] puis, le 12 juillet 2004, à l'hôpital [Établissement 1] où il est resté jusqu'au 9 août 2004,

-il a ensuite été transféré au centre de rééducation de [Localité 1] où il a séjourné jusqu'au 9 mars 2005,

-à son retour à domicile il a poursuivi une kinésithérapie à un rythme tri- hebdomadaire en ambulatoire,

-il a de nouveau été hospitalisé, du 16 mai 2005 au 23 mai 2005, pour subir une intervention chirurgicale, puis a continué à suivre une kinésithérapie très régulière.

Qu'il convient de rappeler que le compte rendu d'hospitalisation initial relevait notamment que l'examen clinique retrouvait un patient sédaté, avec une motricité conservée au niveau des membres inférieurs et du membre supérieur gauche, au niveau cérébral une contusion des deux pôles frontaux, un hématome extradural infra-centimétrique en regard du temporal droit, une hémorragie ménagée concernant principalement la fosse cérébrale postérieure, un probable kyste arachnoïdien de la fosse cérébrale postérieure.

Que le scanner mettait par ailleurs en évidence une petite fracture temporale droite et un comblement des sinus maxillaire, sphénoïdal et éthmoïdal à droite, un traumatisme vertébral avec fracture du corps vertébral de D4, et une fracture des apophyses épineuses de C7 à 04, au plan orthopédique une fracture de l'omoplate droite avec disjonction sternoclaviculaire, et un hématome sus claviculaire, sur le plan thoracique, une contusion des 2/3 du poumon droit, ainsi qu'un hémo pneumothorax à droite.

Qu'une intervention chirurgicale était réalisée sur la fracture vertébrale de D4, de même que la réalisation d'une laminectomie décompressive avec ostéosynthèse.

Que concernant la monoplégie du membre supérieur droit; les médecins la reliaient à une paralysie du plexus brachial, aucune intervention chirurgicale n'étant réalisée et la fracture de l'omoplate étant traitée de façon orthopédique avec une immobilisation par attelle de Zimmer au membre supérieur.

Attendu que monsieur [M] a été déclaré consolidé le 21 juin 2006; un taux d'IPP de 90% lui étant reconnu par le médecin conseil de la caisse.

Attendu qu'il convient de rappeler que l'arrêt avant dire droit a majoré le capital ( au regard du taux d'incapacité en réalité la rente ) attribué à monsieur [M] au taux maximum prévu par la loi.

Attendu que l'expert conclut que l'intéressé, suite à cet accident, présente un membre supérieur droit ballant avec un déficit quasi complet au testing musculaire, en dehors de la flexion active, cotable à 3-, des trois derniers doigts droits.

Que l'expert a ainsi retenu les préjudices suivants :

-incapacité totale de travail de deux ans, du 22.06.2004 au 21.06.2006,

-incapacité totale de poursuivre ses activités personnelles, du 22.06.2004 au 11mars 2005 puis du 16 mai 2005 au 23 mai 2005, périodes d'hospitalisation,

-incapacité partielle de poursuivre ses activités personnelles, dont le taux est évalué à 60%, du 12 mars 2005 au 15 mai 2005, puis du 24 mai 2005 au 24 juillet 2005, puis en période de déficit fonctionnel temporaire partiel dont le taux est évalué à 50 %, du 25 juillet 2005 au 21juin 2006 , date de consolidation,

-assistance occasionnelle d'une tierce personne avant la consolidation par la sécurité sociale, évaluée à une heure par jour 7 jours / 7,

- nécessité d'adapter sa voiture, avec l'installation d'une boule de conduite au volant, d'une boîte automatique, et l'adaptation du siège de conduite,

- nécessité d'aménager son logement, seule la fermeture des volets à battants qui ne sont pas accessibles de l'extérieur, justifie leur motorisation,

- perte de chance de promotion professionnelle représentée par l'impossibilité pour monsieur [M] de devenir bûcheron,

-souffrances endurées : 5,5/7,

- préjudice esthétique : 4/7,

-préjudice d'agrément représenté par l'impossibilité de reprendre les activités physiques, sportives ou de loisirs habituelles pour des patients de son âge, et la gène dans les activités de jardinage,

-préjudice exceptionnel représenté par les difficultés de vigilance lorsque monsieur [M] respecte les posologies de Gabapentine qui lui ont été indiquées.

Que le rapport d'expertise, qui présente une analyse satisfaisante des différents préjudices subis par la victime, sera retenu comme base d'évaluation du préjudice corporel de cette dernière.

Que dans ces conditions, il y a lieu de fixer l'indemnisation de Ia victime de la façon suivante, étant rappelé que la majoration de la rente ( par erreur qualifiée de capital ) a déjà été prononcée par l'arrêt avant dire droit :

* Sur les demandes au titre de l'incapacité

Attendu que monsieur [M] a été en période d'incapacité totale de poursuivre ses activités personnelles pendant la durée de ses hospitalisations soit pour une période de 8 mois, 3 semaines et 3 jours, puis a été en période d'incapacité partielle à hauteur de 60% pendant 4 mois et 3 jours, et à hauteur de 50% pour une durée de 10 mois, 3 semaines et 3 jours.

Que sur la base d'un montant de 25 euros par jour de déficit, il lui sera alloué la somme globale de 12 688 euros.

* Sur l'assistance d'une tierce personne avant consolidation

Attendu qu'il ressort du rapport de l'expert que, compte tenu de la perte totale de l'usage de son bras droit, l'état de santé de monsieur [M] a justifié jusqu'à consolidation l'assistance d'une tierce personne pour une aide ponctuelle à la toilette, à l'habillage, ( boutonnage par exemple ) à la cuisine ( découpe de viande par exemple ) ayant reçu une indemnisation très ponctuelle à ce titre pour quelques mois.

Qu'il apparaît, en application des dispositions de l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale, que l'assistance au titre d'une tierce personne pour l'avenir est prise en compte dans le cadre de la majoration de la rente qui lui est allouée, de sorte que monsieur [M] qui, tout en faisant état d'une demande avant consolidation, développe l'existence d'un préjudice qui perdure depuis, ne peut former de demande à ce titre.

Que la cour trouve dans les informations données les éléments pour fixer l 'indemnisation du préjudice au titre de l'assistance d'une tierce personne avant consolidation à la somme de 8 000 euros.

* Sur l'adaptation du véhicule et du logement

Attendu qu'il est établi que l'état de santé de monsieur [M] justifie une adaptation de son véhicule, avec installation d'une boule de conduite au volant, d'une boîte automatique, et une adaptation du siège.

Qu'au regard des devis communiqués quant à l'achat d'équipements spécifiques, lesquels devront être régulièrement changés et au regard de l'âge de l'intéressé, il sera accédé à sa demande à hauteur de la somme de 25 000 euros.

Attendu que si monsieur [M] ne fournit aucun élément quant au coût de la motorisation des volets de son domicile, pour autant son incapacité conduit à retenir que celle ci s'avère indispensable, de sorte que lui sera alloué à ce titre la somme de 10 000 euros.

* Sur les préjudices au titre des souffrances endurées, esthétique et d'agrément

Attendu que les éléments décrits par l'expert et les photographies jointes justifient que ces préjudices soient indemnisés comme suit :

- souffrances endurées, 5,5/7 : 30 000 euros

- préjudice esthétique, 4/7 : 15 000 euros

- préjudice d'agrément, étant noté que le préjudice temporaire est déjà pris en compte au titre de l'incapacité, et que le préjudice permanent est justifié, au vu des attestations produites, par l'abandon de diverses activités, sportives notamment : 3000 euros

*Sur la perte de chance de promotion professionnelle

Attendu qu'il est certain que, suite à son accident et à l'importance de son handicap, monsieur [M] ne pourra jamais mener à terme son projet professionnel de devenir bûcheron.

Attendu qu'il convient de rappeler que ce dernier perçoit désormais une rente annuelle nette de 13 822 euros soit 1151 euros par mois, laquelle a été calculée sur la base de son salaire d'apprenti, étant rappelé que l'accident est survenu alors qu'il n'avait que 17 ans.

Qu'après avoir été sans emploi pendant plusieurs années, il avait retrouvé une activité professionnelle, qu'il déclare ne plus être à même d'exercer.

Attendu qu'il justifie que le salaire moyen d'un bûcheron est nettement plus élevé que

le montant de la rente allouée, de sorte que sa demande au titre de la perte de promotion professionnelle sera déclarée recevable.

Qu'au regard des pièces produites, la cour trouve dans les éléments de la cause les justificatifs pour lui allouer à ce titre la somme de 400 000 euros.

* Sur le préjudice exceptionnel

Attendu que l'expert a retenu un préjudice exceptionnel, caractérisé par le fait que monsieur [M], lorsqu'il prend un traitement médicamenteux nécessité par son état de santé, en subit les incidences qui ont une répercussion importante sur sa vie quotidienne, notamment en terme de vigilance.

Que ce préjudice sera indemnisé par l'attribution d'une somme de 50 000 euros.

* Sur le remboursement des débours

Attendu que monsieur [M] réclame à ce titre la somme de 7668 euros au titre de remboursement de frais de scolarité qui se rapportent à une période très antérieure à l'accident, et qu'il n'a pas lui même déboursé, de sorte qu'il sera débouté de cette demande.

* Sur les autres demandes

Attendu que l'équité conduit à allouer à monsieur [M] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu que la demande relative aux dépens est dénuée d'objet.

PAR CES MOTIFS

La cour,

statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Vu l'arrêt avant dire droit du 13 janvier 2015 et le rapport d'expertise,

Constate que la cour a déjà prononcé la majoration de la rente à son maximum,

Condamne la société EBHB à verser à monsieur [Q] [M] les sommes suivantes

- au titre de l'incapacité temporaire totale et partielle : 12 688 euros

- au titre de l'assistance d'une tierce personne avant consolidation : 8000 euros

- au titre de l'adaptation du véhicule : 25 000 euros

- au titre de l'adaptation du logement : 10 000 euros

- au titre des souffrances endurées : 30 000 euros

- au titre du préjudice esthétique : 15 000 euros

- au titre du préjudice d'agrément : 3000 euros

- au titre de la perte de chance de promotion professionnelle : 400 000 euros

- au titre du préjudice exceptionnel : 50 000 euros

Déboute monsieur [M] du surplus de ses demandes d'indemnisation,

Dit que la caisse MSA SAONE ET LOIRE devra garantir monsieur [M] du paiement des sommes allouées,

Condamne la société EBHB à verser à monsieur [M] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit la demande relative aux dépens dénuée d'objet.

LA GREFFIÈRELE PRESIDENT

Malika CHINOUNE Jean- Louis BERNAUD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 14/03082
Date de la décision : 12/01/2016

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°14/03082 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-01-12;14.03082 ?
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