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29/09/2015 | FRANCE | N°14/07436

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 29 septembre 2015, 14/07436


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/07436





SAS CGI FRANCE



C/

[S]

SYNDICAT CGT CGI







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 11 Septembre 2014

RG : F 13/00396











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2015









APPELANTE :



SAS CGI FRANCE

Mme [X], responsable des res

sources humaines

[Adresse 1]

[Adresse 7]

[Adresse 6]



comparante en personne, assistée de Me Bertrand MERVILLE de la SCP LA GARANDERIE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS



INTIMÉS :



[I] [S]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[A...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/07436

SAS CGI FRANCE

C/

[S]

SYNDICAT CGT CGI

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 11 Septembre 2014

RG : F 13/00396

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2015

APPELANTE :

SAS CGI FRANCE

Mme [X], responsable des ressources humaines

[Adresse 1]

[Adresse 7]

[Adresse 6]

comparante en personne, assistée de Me Bertrand MERVILLE de la SCP LA GARANDERIE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

[I] [S]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

comparant en personne, assisté de Me Vincent SCHNEEGANS, avocat au barreau de MARSEILLE

SYNDICAT CGT CGI

[Adresse 4]

[Adresse 5]

représentée par Me Vincent SCHNEEGANS, avocat au barreau de MARSEILLE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Mai 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel BUSSIERE, Président

Agnès THAUNAT, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Septembre 2015, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Attendu que M. [S] a été engagé le 18 octobre 1999 selon contrat à durée indéterminé et à temps complet par la société Unilog, en qualité d'ingénieur analyste (statut de cadre, position 2.1 et coefficient 115 de la convention collective nationale des bureaux d'étude des techniques dite SYNTEC) avec une rémunération mensuelle brute de 2276,52 € outre une prime de vacances et une prime d'intéressement et qu'il a bénéficié du coefficient 120 au mois de mars 2001 ; qu'après la fusion de la société Unilog avec les sociétés Logica en 2006 puis CGI France en 2012, il a bénéficié d'augmentations successives jusqu'en 2011 mais qu'après la suppression de la prime de résultat en septembre 2007 et son intégration dans le salaire de base, il estime avoir été pénalisé car il n'a perçu qu'une prime réduite en 2005 et aucune prime en 2006 ; qu'il a été élu délégué du personnel titulaire en 2005 et qu'à partir de l'exercice 2006, il n'a plus perçu de primes d'intéressement individuel ni de primes exceptionnelles ; qu'élu membre titulaire du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail en 2011, puis désigné comme délégué syndical en 2014, il a estimé faire l'objet de harcèlement moral et d'une discrimination pour des raisons syndicales car sa rémunération n'a pas évolué comme celle de ses collègues ;

Attendu que sur saisine du salarié datée du 30 janvier 2013 et par jugement n° RG

F 13/00396 daté du 11 septembre 2014 le conseil de prud'hommes de Lyon, section encadrement, a statué ainsi :

- dit et juge que M. [S] a été victime de discrimination syndicale

- dit et juge recevable intervention volontaire du syndicat CGT-CGI

- fixe le coefficient de M. [S] à 150 et le salaires mensuels bruts à 3486,23 € à compter de la notification du présent jugement

- ordonne la mise à disposition de M. [S] de formation adéquate à sa fonction et à son évolution de carrière

- condamne la société CGI venant aux droits de la société Logica France à verser à M. [S] les sommes de :

* 49'874,49 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice financier subi

* 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamne la société CGI venant aux droits de la société Logica France à verser au syndicat CGT -CGI les sommes de :

* 1 500 € à titre de dommages-intérêts

* 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonne l'exécution provisoire du jugement à hauteur de 25'000 €

- déboute M. [S] du surplus de ses demandes

- déboute la société CGI venant aux droits de la société Logica France de sa demande reconventionnelle

- condamne la société CGI venant aux droits de la société Logica France aux entiers dépens de l'instance ;

Attendu que par lettre recommandée expédiée le 28 octobre 2014 et reçue au greffe de la cour le 29 octobre 2014, la société CGI France (l'appelante) a déclaré interjeter appel du jugement précité à l'encontre de M. [S] et le syndicat CGT-CGI (les intimés) ;

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'appelante demande de :

- infirmer le jugement doit appel et statuant de nouveau

- constater que M. [S] n'apporte pas d'élément de fait supposant l'existence d'une discrimination syndicale

- constater qu'elle apporte des éléments objectifs étrangers à toute discrimination syndicale

- constater que M. [S] ne démontre en rien être victime d'inégalité de traitement

- constater l'absence de harcèlement moral

- constater la défaillance de M. [S] dans sa capacité à occuper un poste de chef de projet, coefficient 150

- constater la défaillance du salarié à démontrer qu'il subit les conditions du coefficient 130 et en conséquence

- dire et juger que M. [S] ne subit aucune discrimination syndicale et aucune inégalité de traitement

- débouter M. [S] de ses demandes et le condamner au paiement de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Attendu que par conclusions récapitulatives déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, M. [S], intimé, demande de :

- confirmer le jugement entrepris

- à titre subsidiaire fixer le coefficient à 130 à la date du 1er janvier 2012

- ordonner la mise à disposition de M. [S] des formations adéquates

- infirmer le jugement sur le quantum et en conséquence

- ordonner à la société CGI France de lui verser un salaire brut de 4643 € à compter de la notification de l'arrêt et à titre subsidiaire, fixer le salaire brut à 3486,23 €

- condamner la société CGI France à lui verser la somme de 136'500 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice financier subi

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour des faits de harcèlement moral

- condamner la société CGI à lui verser la somme de 30'000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et à titre subsidiaire pour préjudice moral

- ordonner l'anatoscisme

- condamner la société CGI à lui verser la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, y compris le remboursement du timbre fiscal de 35 € réglé en première instance

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, le syndicat CGT-CGI, intimé, demande de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé recevable son intervention volontaire aux côtés de M. [S]

- infirmer sur le quantum

- condamner la société CGI à lui verser la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts en application de l'article 1382 du Code civil

- condamner la société CGI à lui verser la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens

Attendu que l'affaire a été plaidée à l'audience du 11 mai 2015 ;

Attendu qu'il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions ;

SUR CE

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ;

Attendu que le conseil des prud'hommes a retenu :

- une différence de rémunération par rapport aux salariés placés dans une situation comparable à l'embauche dès lors que M. [S] avait conservé le coefficient 120 tandis que ses collègues bénéficiaient d'un coefficient variant entre 130 et 190

- la mise à l'écart des séances de formation en ce qu'il n'a pas pu bénéficier de la formation dite "cycle Orange" sur la gestion des projets

mais que les premiers juges ont écarté les griefs concernant la mise à l'écart pour les missions d'envergure et la différence de traitement dans le cadre de plusieurs missions et mesures prévues par l'entreprise ; qu'au vu des deux premiers griefs, il a été jugé que M. [S] aurait dû bénéficier du coefficient 150 et devait être reclassé à compter de la notification du jugement

Attendu que les premiers juges ont rejeté la demande relative au harcèlement moral mais retenu que M. [S] devait bénéficier de formation adéquate à sa fonction et à son évolution de carrière notamment dans le cadre de l'avenant à un accord de 2007 relatif à l'exercice des mandats de représentation du personnel signé par l'employeur avec les partenaires sociaux en février 2013 ;

Sur l'appel principal de l'employeur

Attendu que pour contester le grief résultant d'une différence de rémunération par rapport aux salariés placés dans une situation comparable à l'embauche, la SAS CGI France rappelle que M. [S], engagé en 1999 avec le coefficient 115, a bénéficié dés l'année 2001 du coefficient 120 et que sa rémunération a constamment progressé puisque de 2400 € en 2001, elle atteignait 2892,44 € en 2015 ; qu'elle produit également un tableau présentant l'évolution de carrière de treize autres ingénieurs embauchés comme analyste entre 1998 et 2001, dontdeux sont toujours au coefficient 115 avec une ancienneté respective de 14 à 13 mois et que onze autres, dont M. [S], sont toujours au coefficient 120 alors que l'un d'eux dispose d'une ancienneté supérieure à celle de M. [S] ; qu'il résulte du même tableau que M. [S] reçoit le troisième salaire de base le plus élevé parmi les treize collègues cités et qu'il apparaît notamment qu'après quatorze ans d'ancienneté, deux ingénieurs ne gagnent pas plus que 2522 € et 2394 € par mois alors que M. [S] perçoit mensuellement 2864 € ;

Attendu que M. [S] produit un tableau comparatif faisant apparaître que des collègues embauchés entre les années 1997 et 2001 bénéficient tous d'un coefficient supérieur au sien, entre 130 et 190, et un salaire également bien supérieur mais que ce tableau ne mentionne pas le coefficient retenu au moment de l'embauche et que les comparaisons produites par le salarié ne sont pas pertinentes ; que l'employeur réplique qu'en réalité les salariés auxquels M. [S] se compare, possèdent des diplômes différents (DESS, doctorat ) et d'une valeur supérieure au sien (DUT) et qu'aucun entre eux n'a été engagé au coefficient 115 ; qu'ainsi les éléments de comparaison produits par l'intimée ne sont pas pertinents ;

Attendu que l'employeur soutient également que le coefficient 150 revendiqué par M. [S] correspond à un niveau de compétence défini par la convention collective SYNTEC de la manière suivante : « ingénieur ou cadre ayant au moins six ans de pratique en cette qualité étant en pleine possession de leurs métiers ; partant des directives données par leur supérieur, ils doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche » et que la capacité d'analyse, la prise d'initiative et l'encadrement d'une équipe font partie des critères participants à l'attribution du coefficient 150 ; qu'elle prétend que la seule pratique professionnelle durant ces années en qualité de cadre, ne justifie pas l'accès au coefficient 150 ; que de même le coefficient 130 exige d'un chargé de projets d'« assurer la responsabilité du management opérationnel et du suivi quotidien d'un projet moyen ou d'un sous-ensemble d'un projet (5 à 10 personnes ) dans un esprit de service » et que M. [S] ne démontre pas remplir ces conditions ;

Attendu que l'employeur reprend les évaluations annuelles de M. [S] faisant apparaître les observations suivantes :

- 2005 : « L'année a été mitigée, EVOLAN a été un projet difficile, [I] a eu beaucoup de difficultés sur les tâches de gestion (trop de tâches). [I] est un bon analyste concepteur, sa mission chez Casino se déroule bien... [I] a eu des résultats inégaux en deçà des attentes, car son poste de chargé de projet a été trop difficile à tenir sur EVOLAN. Cependant son niveau coefficient 120 est conforme, [I] est un bon analyste expérimenté... [I] affiche une forte ambition et je l'en félicite. [I] doit montrer à Unilog qu'il est capable de prendre des responsabilités de gestion de projet... [I] a fait une année mitigée, il doit maintenant faire une très bonne année. Son augmentation de 20 % et son coefficient sont en phase avec sa performance »

- 2006 : « [I] n'a que partiellement atteint ses objectifs, cependant cela n'est pas lié à ses résultats, mais seulement parce qu'il a évolué dans un contexte où les missions ne lui ont pas permis de les mettre en 'uvre. Il est toutefois noté que sur sa mission, le client a été satisfait de sa prestation et qu'il n'était pas forcément opposé à donner à [I] un peu plus de responsabilités, gestion d'une petite équipe. [I] a effectivement fait une bonne année chez Casino, mais sur une mission d'analyse. [I] doit prendre conscience de ce qu'est un chargé des projets au sein d'Unilog. Cette fonction ne couvre pas forcément le même périmètre chez Casino... Il n'en demeure pas moins que [I] a fait une bonne année d'analyste... [I] est très déçu par son augmentation, car il est persuadé d'avoir fait une année exceptionnelle. Il est également très déçu de son non changement de coefficient. Cependant, l'augmentation proposée récompense une bonne année de [I], cette année n'est pas exceptionnelle. [I], s'il veut véritablement se voir confier un projet en gestion doit absolument être proactif... »

- 2007 : « Après un début d'année difficile, de par un contexte tendu sur Carrefour, [I] est depuis juin sur une mission qui lui permet de mieux s'exprimer et de développer ses compétences. [I] réalise des taches d'encadrement, une personne actuellement, puis plusieurs en 2008. Rédaction de dossiers de spécification fonctionnelle, participation aux réunions de pilotage et enfin, expression des besoins MOA. [I] est donc dans l'apprentissage de la gestion de projet. Cette année encore, [I] attendait la reconnaissance du 130, mais cette année encore il reste des points à fortifier afin d'y parvenir. Les objectifs fixés vont dans ce sens, car [I] est toujours très motivé pour cette fonction de chargé de projet. Je pense que [I] à la capacité. Unilog doit l'aider à progresser... »

- 2008 : « [I] a fait une bonne année chez Casino, son volume d'analyse a augmenté, ainsi que ses tâches de gestion de projet. Cependant, [I] n'a pas eu suffisamment d'opportunités pour gérer des projets conséquents qui lui permettraient de développer suffisamment son rôle de chargé de projet. La mission est cependant intéressante et [I] a la confiance du client, ce qui est un avantage certain pour arriver à gagner les projets conséquents. Cette année encore [I] n'a pas su développer suffisamment ses compétences en gestion de projet. Le volume réalisé n'est pas suffisant pour montrer ses capacités, [I] est déçu sur ce point. Il faut qu'il arrive à capter un projet conséquent, formalisé, pour lui permettre de développer son rôle de concepteur fonctionnel. Les objectifs fixés seront élaborés en ce sens.... Il considère le 1% comme une sanction et non comme une politique RH globale »

- 2009 : « Globalement, [I] a réalisé une année correcte sans obstacle, mais qui n'a pas permis d'atteindre pleinement ses objectifs. Malgré tout, [I] a progressé avec l'aspect rédaction de livrables. La mission de [I] se termine à un moment où elle devient vraiment limitante pour son évolution. Sa nouvelle mission lui permettra heureusement de progresser sur de nouveaux axes très utiles.... Il est évidemment déçu de la politique salariale et souhaite vivement que Logica le soutiennent pour la suite, notamment au travers d'une formation SAP et d'un classement dans cette technologie... » ;

- 2010 : « [I] a travaillé sur des missions d'assistance information. Il a, de l'aveu même du DP, très bien travaillé et a donné pleinement satisfaction dans ce rôle d'analyste. [I] a travaillé cette année dans un rôle qui n'est pas le sien, certes il a performé, mais dans un référentiel qui ne peut pas s'appliquer à notre grille d'évaluation. » ;

- 2011 : « [I] a réalisé une année où il a pris naturellement un rôle de formateur sur l'outil Chorus. Il est passé d'un rôle d'assistant à un rôle de formateur. [I] a réalisé une progression de sa performance faible cette année. Il occupe un rôle de formateur et de sachant sur l'outil Chorus. [I] doit éclairer ses choix et agit en fonction de ça. Il doit rencontrer la HBC SAP pour exposer et proposer son expérience. » ;

- 2012-2013 : « Aucun objectif réellement atteint car aucune mission n'a permis de mettre en 'uvre ses compétences. À noter sur Orange, deux axes d'amélioration : la rigueur et le reporting. Sur la mission Orange, à noter l'implication et le sérieux de [I]. CGI attend de [I] qu'il conforte de manière définitive son rôle d'analyste. Des axes d'amélioration sont encore émis alors que [I] a une grande expérience dans sa fonction. La rigueur (relecture des documents avant envoi), la complétude du reste-à-faire, la capacité à alerter son management et à faire un reporting suffisant et régulier sont des compétences qui font partie du savoir-faire de l'analyste. CGI attend aussi un comportement égal d'une mission à une autre : motivation et implication (qui cette année sont bonnes sur la mission Orange) mais qui désormais ne doivent plus varier. Il faut noter que ce manque de linéarité dans les compétences et le comportement ont un impact fort sur le staffing, sur les propositions de mission que CGI veut faire à [I].» ;

Attendu que l'employeur explique qu'au cours de l'année 2012, la mission auprès du client Orange s'est bien déroulée et que l'employeur a proposé une mission à Lyon chez le client ERDF mais que M. [S] a refusé pour des contraintes d'ordre personnel ; qu'en juillet et août 2012 il a effectué une mission de onze jours auprès du client Arkema sans remarque particulière et qu'en octobre il a été affecté auprès du client Carrefour en assistance technique jusqu'au mois de décembre 2012 mais qu'il a sollicité directement une évaluation auprès du client au mépris des règles internes et que le supérieur habilité a confirmé la réalisation très correcte de son intervention ; que la mission proposée en janvier 2013 chez le client Michelin à Clermont-Ferrand a été refusée par M. [S] et que le 24 janvier 2013 il était affecté au projet UMA pour la société Carrefour mais que ce dernier a mis fin à la mission le 12 juin 2013 en invoquant notamment la non livraison d'une spécification fonctionnelle détaillée attendue pour fin mai et non livrée le 12 juin ; que l'employeur rappelle à ce sujet la liberté dont il dispose pour apprécier les compétences, les attentes et l'organisation de l'entreprise ;

Attendu que pour l'exercice 2013-2014, l'entretien révèle : « [I] assurait des travaux de tests sur une grande partie de son année, et les résultats sont conformes aux attendus du projet de par le souci de qualité qu'il porte à ses activités d'analyste. Son démarrage dans son activité de TRA en septembre est positif et doit lui permettre de développer des compétences autour du leadership dans la prise de responsabilité du sujet vis-à-vis des projets concernés. Il doit sur cette nouvelle mission prendre l'autonomie suffisante pour apporter la valeur et les résultats attendus autour de cette activité. » ;

Attendu qu'il en résulte que les appréciations portées sur M. [S] au fil des années, confirme une bonne maîtrise de sa fonction d'analyste correspondant au coefficient 120, mais que manifestement il n'a pas révélé les aptitudes à la fonction de concepteur fonctionnel (branche fonctionnelle de projet) ou de chargé de projet (branche management de projet) qui lui aurait permis une classification au coefficient 130 et que bien évidemment son profil ne correspond nullement aux fonctions de chef de projet au coefficient 150 ; que dans ces conditions, l'employeur établit que sa décision de maintenir M. [S] au coefficient 120 est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'il convient encore de relever que le conseil de prud'hommes a procédé à un repositionnement sans même se référer aux critères professionnels correspondant au coefficient 150 alors que les éléments contradictoirement relevés par l'employeur tout au long de la carrière confirmaient que M. [S] présentait seulement les qualités professionnelles lui permettant d'occuper un poste d'analyste au coefficient 120 ; que sur ces deux points le jugement entrepris sera réformé ;

Attendu que les premiers juges ont retenu également que pour des motifs syndicaux, M. [S] avait été mis à l'écart de séances de formation alors que depuis l'année 2003 il avait demandé à suivre une formation de gestion de projet dite "cycle Orange" ainsi que sur SAP et qu'il n'avait pu suivre que la formation "SAP FICO" en 2010 ;

Attendu que l'appelante justifie de ce que M. [S] a suivi en juin 2010 une formation SAP qu'il avait demandée, le 13 avril 2011 une formation Ton of Voice, le 23 novembre 2011 une formation sur le rôle du CHSCT et une formation sur le handicap ; que le seul fait de n'avoir pas pu suivre la formation "cycle Orange" ne suffit pas à caractériser une mesure de discrimination pour raison syndicale et que le grief doit être écarté et le jugement contesté réformé sur ce point ;

Sur l'appel incident de M. [S]

Attendu que l'intimé reprend sa demande fondée sur la mise à l'écart des missions d'envergure en soutenant qu'il est cantonné depuis plusieurs années à effectuer des missions de courte durée, sans rapport avec son niveau de compétence ; qu'il indique avoir passé 40 % de son temps opérationnel en inter contrat au cours des années 2012 et 2013 ;

Attendu que l'employeur réplique que M. [S] a été très hésitant sur l'évolution de sa carrière comme le mentionne l'entretien du mois de juin 2013 : «J'attends de [I] tout d'abord qu'il confirme définitivement son rôle d'analyste (coefficient 120). Ensuite j'attends de [I] qu'il me donne une vision claire et détaillée de ses souhaits de carrière : carrière de management ' Carrière de consulting IT ' Si oui dans quel domaine fonctionnel. Ces carrières sont totalement différentes et l'accompagnement nécessaire est différent. Cette définition permettra à CGI de bâtir une trajectoire de carrière en fonction des points forts, des acquis mais aussi des axes d'amélioration sur les compétences et connaissances de [I]...» ;

Attendu qu'une mission de neuf mois lui a été proposée à [Localité 2] avec possibilité d'exercer les heures de délégation comme membre du CHSCT mais qu'effectivement le choix par le salarié d'accomplir sa délégation à Lyon les mardis après-midi et les jeudis après-midi ne lui permettait pas d'assurer la mission alors que l'employeur avait proposé de concentrer les heures de délégation chaque vendredi pour que les deux fonctions soient compatibles ; qu'une autre mission lui a été proposée en mai et juin 2012 chez le client ERDF dans le quartier de la Part-Dieu à Lyon et que le salarié a décliné cette offre qui n'était pas en adéquation avec son "organisation privée", soit la garde le matin de ses enfants en bas âge ; qu'une autre mission lui a été proposée à Clermont-Ferrand à l'usine Michelin mais que M. [S] indique ne pas avoir refusé l'admission mais seulement « de façon constructive expliqué les raisons pour lesquelles elle ne lui semblait pas adaptée », ce qui correspond bien à un refus ;

Attendu qu'il en résulte l'employeur a bien proposé à M. [S] d'exécuter des missions dites d'envergure, à [Localité 2] et à Clermont-Ferrand mais aussi à Lyon alors que la lettre d'engagement précisait bien qu'il était rattaché à l'établissement de Lyon situé à [Localité 3] ; que dans ces conditions le grief a été écarté à juste titre par le conseil de prud'hommes et que sur ce point le jugement critiqué sera confirmé ;

Attendu enfin que M. [S] reprend le grief tenant à la différence de traitement subi dans le cadre de plusieurs missions et mesures prévues par l'entreprise, en ce sens qu'il aurait été évalué de manière non objective dans l'analyse des projets Evolan et Chorus ; que l'évaluation de ces dernières missions Orange, Arkema et Carrefour aurait été réalisée par son manager en totale contradiction avec les appréciations des chefs de projet concernés, ce qui l'avait conduit à demander un changement de manager ;

Attendu que l'employeur explique que pour le projet Evolan datant de 2004- 2005, M. [S] a versé aux débats devant le conseil de prud'hommes, une évaluation de mission établie le 7 février 2014, soit deux semaines avant l'audience du 20 février 2014, et près de dix années après la réalisation de la mission ; qu'effectivement si l'évaluateur avait noté : « L'année a été mitigée. Evolan a été un projet difficile. [I] a eu beaucoup de difficulté sur l'étage de gestion », l'appréciation ne révèle aucun signe de discrimination syndicale ;

Attendu que de même pour la mission de contrôle de la facture Gold, réalisée de mai 2007 à mai 2009, M. [S] produit une évaluation de mission établie le 6 septembre 2013, soit cinq années après, par le chargé de projet qui a écrit : « Je n'ai pas retrouvé trace des entretiens de l'époque. De mémoire, travail fourni par [I] de qualité » ; que la fiche d'évaluation pour l'année 2007 mentionne comme objectif pour l'année à venir : « être le point d'entrée pour l'IC sur la partie comptable Gold - disponibilité - remontée d'infos » ; que la fiche d'évaluation pour l'année 2008 ne mentionne pas la mission Gold de même que la fiche d'évaluation de l'année 2009, mais que ces éléments sont insuffisants à caractériser une discrimination syndicale imputable à l'employeur d'autant qu'à la même époque, il était indiqué qu'il avait fait une bonne année chez Casino et que son volume d'analyse avait augmenté ainsi que ses tâches de gestion de projet, d'où une progression constatée dans la fonction d'analyste exclusif de toute discrimination ;

Attendu enfin que M. [S] soutient encore qu'il a été affecté sur le projet Chorus alors qu'il avait des enfants en bas âge et que la majorité de ses collègues affectés sur ce même projet bénéficiaient soit d'un coefficient plus élevé soit d'une augmentation de salaire significative ;

Attendu cependant que l'affectation sur une mission, en présence d'enfants en bas âge, ne révèle aucune discrimination d'ordre syndical ; que la participation de M. [S] au projet Chorus doit être replacée dans l'analyse complète de sa carrière telle qu'elle a été reprise ci-dessus et que la réussite dans cette mission invoquée par l'intéressé ne révèle aucun élément pouvant justifier son aptitude à exercer des fonctions de niveau supérieur relevant du coefficient 130 ; que dans ces conditions, il n'est justifié d'aucun élément pouvant caractériser une discrimination d'ordre syndical ;

Attendu que M. [S] invoque encore, au titre de la discrimination syndicale, la mesure "pouvoir d'achat" instaurée lors de la négociation annuelle obligatoire de 2011, les délais de traitement de sa réclamation suite au vol de son téléphone portable, de sa demande de compensation du temps de trajet et de règlement des heures supplémentaires et que ces éléments ne constituent pas davantage des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale ;

Attendu que l'intimé souligne encore que la société Logica a fait l'objet de plusieurs condamnations en matière de discrimination syndicale mais que ces décisions rendues soit par les conseils de prud'hommes de Grenoble et Bordeaux, soit par les cour d'appel d'Aix-en-Provence et Versailles ne permettent pas davantage de caractériser une discrimination syndicale au détriment de M. [S] ;

Attendu en conséquence que d'une part, pour certains faits l'employeur justifie d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que pour d'autres, les faits en eux-mêmes ne laissent pas supposer l'existence d'une discrimination syndicale ;

Attendu que l'ensemble des éléments ci-dessus analysés ne permettent pas davantage de qualifier des actes de harcèlement moral ainsi que l'a retenu à bon droit le conseil de prud'hommes et ne sont pas constitutifs d'une faute imputable à l'employeur ayant causé un préjudice moral au salarié ; qu'il convient en conséquence d'infirmer les dispositions du jugement entrepris retenant la discrimination syndicale et de confirmer ses autres dispositions ;

Attendu qu'il convient de déclarer recevable, mais non fondée, l'intervention du syndicat CGT-CGI ;

Attendu que M. [S] qui succombe supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière sociale, en dernier ressort et contradictoirement

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [S] de ses autres demandes ;

L'infirme en ce qu'il a retenu que M. [S] a été victime de discrimination syndicale et statuant à nouveau ;

Déboute M. [S] de toutes ses demandes ;

Déclare l'intervention du syndicat CGT-CGI recevable mais non fondée et le déboute de toutes ses demandes ;

Y ajoutant

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties ;

Laisse les dépens à la charge de M. [S].

Le greffierLe président

Sophie MascrierMichel Bussière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 14/07436
Date de la décision : 29/09/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°14/07436 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-29;14.07436 ?
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