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22/05/2015 | FRANCE | N°14/02726

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 22 mai 2015, 14/02726


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/02726





[Z]



C/

Me [E] [Q] - Commissaire à l'exécution du plan de SAS H2AD

SAS H2AD

AGS CGEA [Localité 1]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 12 Mars 2014

RG : F 12/00577











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 22 MAI 2015











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APPELANT :



[V] [Z]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



comparant en personne, assisté de Me Laurent CHABRY de la SELARL LAMBERT-VERNAY ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON







INTIMÉS :



SAS H2AD

[Adresse 2]

[Adr...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/02726

[Z]

C/

Me [E] [Q] - Commissaire à l'exécution du plan de SAS H2AD

SAS H2AD

AGS CGEA [Localité 1]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 12 Mars 2014

RG : F 12/00577

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 22 MAI 2015

APPELANT :

[V] [Z]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Laurent CHABRY de la SELARL LAMBERT-VERNAY ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

SAS H2AD

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Me [E] [Q] en qualité d'administrateur judiciaire de la SAS H2AD

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Me [B] [O] en qualité de mandataire judiciaire de la SAS H2AD

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentés par Me Jean-pierre COCHET de la SELARL SEDOS CONTENTIEUX, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

AGS CGEA [Localité 1]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représenté par Me Jean-claude DESSEIGNE de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON substituée par Me Sarah ACHAHBAR, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Avril 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Christine DEVALETTE, Président de chambre

Isabelle BORDENAVE, Conseiller

Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Mai 2015, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Christine DEVALETTE, Président de chambre, et par Christine SENTIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [V] [Z] a été embauché selon un contrat à durée indéterminée à temps partiel par la SAS H2AD le 16 février 2010 en qualité de médecin-chercheur régulateur ; sa rémunération était forfaitairement fixée à 3192 € pour un horaire mensuel de 84 heures de travail effectif et son activité s'exerçait par vacation de 12 heures ; la Convention collective applicable est celle de l'aide à domicile.

Il a été convoqué le 3 septembre 2011 à un entretien préalable qui s'est tenu le 15 septembre 2011 et il a été licencié pour cause réelle et sérieuse par lettre du 4 octobre 2011 rédigée comme suit :

1°) Le 2 août 2011, vous avez pris votre poste à 19h00. Contrairement aux procédures en vigueur, vous ne vous êtes pas logué sur le système d'information D2P, ainsi que sur le système d'information téléphonique, et ce durant toute la durée de votre vacation, ceci pouvant mettre gravement en danger la sécurité médicale de notre organisation,

2°) Une alarme nécessitant un traitement de votre part est arrivée sur le plateau médical ce 2 août 2011. La permanencière de garde vous a informé de manière téléphonique alors que vous étiez dans votre chambre de repos, aux environs de 19h20. Vous n'avez pas daigné vous rendre dans la salle de régulation afin d'effectuer les manoeuvres en vigueur.

3°) Le 3 août 2011, sur les suites de la régulation relative au dossier n° 14751, contrairement aux instructions, vous n'avez pas rempli les événements faisant suite à votre conversation téléphonique.

Agissant selon requête du 31 octobre 2012, M. [V] [Z] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Saint-Etienne pour obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein ainsi que le versement des rappels de salaire et de majorations afférents, pour entendre dire qu'il a été licencié sans cause réelle et sérieuse et pour obtenir le versement de divers dommages et intérêts.

La SAS H2AD a été placée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Saint Etienne du 29 mai 2013 ; Maître [Q] a été nommé en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [O] en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 12 mars 2014, le Conseil de Prud'hommes de Saint-Etienne a :

- dit que le licenciement de M. [V] [Z] est justifié,

-fixé les créances de M. [V] [Z] au passif de la SAS H2AD comme suit :

* 2052 € (5h X17.10 € X 24 dimanches)

*400 € à titre de dommages et intérêts pour non information des heures pour recherche d'emploi,

* 1800 € à titre de dommages et intérêts pour non information des droits à portabilité de la mutuelle,

*2000 € à titre de dommages et intérêts pour non suivi médical,

*1000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que Maître [Q] et Maître [O], ès qualités, devront inscrire lesdites sommes sur le relevé de créances ainsi que les éventuels dépens de l'instance,

-que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle sera évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

- déclaré le jugement opposable au CGEA et dit que cet organisme devra sa garantie dans les limites légales et réglementaire,

-débouté M. [V] [Z] du surplus de ses demandes,

M. [V] [Z] a interjeté appel de cette décision le 3 avril 2014.

Aux termes de ses dernières écritures reprises oralement à l'audience, il demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dommages et intérêts alloués pour non information des heures pour recherche d'emploi, pour non information des droits à portabilité de la mutuelle, pour non suivi médical, de le réformer pour le surplus, de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, de requalifier son temps partiel en temps plein et de 'condamner' la SAS H2AD au paiement des sommes suivantes :

* 56572,12 € bruts à titre de rappel de salaire consécutif à la requalification du temps partiel en temps plein,

*5657,21 € bruts au titre des congés payés afférents,

*3819 € bruts au titre des heures supplémentaires de l'année 2010,

*381,90 € bruts au titre des congés payés afférents,

* 2090 € bruts au titre des heures supplémentaires de l'année 2011,

*209 € bruts au titre des congés payés afférents,

*3163,50 € bruts au titre des majorations de dimanches travaillés,

*316,35 € bruts au titre des congés payés afférents,

*1043,10 € bruts au titre des majorations d'heures de nuit,

*104,31 € bruts au titre des congés payés afférents,

*1000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la loi TEPA,

*19152 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

*5000 € pour exécution déloyale du contrat de travail,

*25000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Il demande également la remise sous astreinte des documents afférents à la rupture de son contrat de travail et le versement d'une somme de 2500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir au soutien de son action :

1/ Sur la nullité de la rémunération forfaitaire et ses revendications salariales :

- que la jurisprudence admet la licéité des clauses de rémunération forfaitaire incluant un nombre déterminé d'heures supplémentaires à condition qu'une convention existe entre l'employeur et son salarié, que le forfait ne soit pas défavorable au salarié et qu'il corresponde à un nombre constant d'heures supplémentaires ; que selon l'article L 3123-14 du code du travail le contrat de travail à temps partiel doit présenter un certain nombre de mentions obligatoires et notamment la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine et du mois ; que c'est à l'employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié,

- que son contrat de travail prévoyait une rémunération forfaitaire de 3192 € pour 84 h mensuels (les gardes d'une durée de 12h se déroulant soit de 7h à 19h, soit de 19h à 7h) et que cette convention de forfait est nulle dans la mesure où il était embauché à temps partiel, qu'il devait connaître la répartition de ses horaires de travail et ne pouvait légalement réaliser des heures complémentaires allant au delà de 10 % ; qu'il restait à l'entière disposition de son employeur pendant ses périodes de vacation et qu'aucun suivi du temps de travail n'était réalisé par son employeur, pourtant tenu à l'organisation d'un entretien individuel annuel par l'article L 3121-46 du code du travail,

- qu'il démontre par ailleurs qu'il travaillait certaines semaines plus de 35 heures (parfois 48 heures), au mépris de la législation sur le temps de travail et les repos hebdomadaires, et qu'il est parfaitement fondé à obtenir paiement des heures supplémentaires qu'il a effectuées, ainsi que des majorations afférentes au travail de nuit et aux dimanches, pourtant prévues par la convention collective nationale,

- qu'il est important de rappeler que M. [G] [N] dirigeant de la société H2AD a été condamné par jugement du Tribunal correctionnel de Saint-Étienne du 25 mars 2014 à une peine d'emprisonnement avec sursis pour entrave à la liberté syndicale et à l'intervention de l'inspection du travail ainsi qu'à des amendes pour travail supérieur à 10 heures, heures supplémentaires non payées non déclarées, et travail de nuit.

2/ Sur les dommages et intérêts pour non respect de la loi TEPA et travail dissimulé :

- que la loi du 21 août 2007 a créé au 1er octobre 2007 une exonération d'impôts sur le revenu ainsi qu'un dispositif d'allégement de cotisations sociales pour les salariés au titre de la rémunération des heures supplémentaires, dont il a été injustement privé,

-que la SAS H2AD savait pertinemment qu'il effectuait des heures supplémentaires comme le démontre son planning versé aux débats,

3/ Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :

-qu'en s'abstenant de lui régler les salaires dûs au titre des majorations des heures complémentaires de nuit et de dimanche, la SAS H2AD a commis une faute grave dans l'exécution du contrat de travail qui les lie, et que ceci est d'autant plus vrai qu'il justifie avoir travaillé en 2010 plus de 4 fois 24 h de suite au détriment de sa santé,

4/ Sur son licenciement :

-que son licenciement est totalement disproportionné au regard des faits qui lui sont reprochés qu'il n'a, à aucun moment, mis la sécurité médicale de son organisation en danger, et qu'il a toujours fait preuve de sérieux dans l'exécution de sa mission,

- qu'il est exact qu'il ne s'est pas logué sur le système d'information D2P mais qu'il n'y a pas eu de conséquence dans la mesure où il était présent et joignable, étant au demeurant observé qu'aucune règle n'est clairement posée à ce sujet, et notamment sur le déplacement en salle de régulation, et enfin, qu'il a jugé en sa qualité de médecin que la conversation téléphonique du 3 août 2011 relative au dossier 14751 était anodine et ne nécessitait pas d'observation particulière,

5/ sur les autres demandes :

que la lettre de licenciement ne lui rappelle ni son droit conventionnel à recherche d'emploi, ni la portabilité des droits de la mutuelle santé et prévoyance dont il bénéficie au sein de la société H2AD, et qu'il n'a jamais bénéficié d'une surveillance par un médecin du travail alors qu'en matière de travail de nuit, le code du travail prévoit une visite tous les six mois.

Le CGEA [Localité 1] demande à titre principal sa mise hors de cause, la SAS H2AD qui a bénéficié d'un Plan de redressement homologué le 21 mai 2014 par le Tribunal de commerce de Saint-Etienne, étant redevenue in bonis ; elle soutient subsidiairement que le licenciement de M. [V] [Z] repose sur une cause réelle et sérieuse et observe, encore plus subsidiairement, que l'intéressé n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ses demandes.

La SAS H2AD ainsi que Maître [Q] et Maître [O] ont accepté oralement, lors de l'audience, la mise hors de cause du CGEA [Localité 1] ; ils ont demandé à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté M. [V] [Z] de ses demandes relatives à son licenciement et de ses réclamations salariales ; ils ont également formé appel incident pour entendre dire que ce dernier n'est créancier ni au titre du défaut d'information pour les heures de recherche d'emploi, ni pour le droit à portabilité de la mutuelle ni au titre du non suivi médical

Ils font valoir en réplique :

-que M. [V] [Z] s'était déjà attiré les remontrances de son employeur pour la légèreté avec laquelle il avait traité un fax émanant d'un client le 24 juin 2011, alors qu'il s'agissait de la modification de traitements médicaux et d'un compte rendu d'hospitalisation, et qu'il a néanmoins continué à s'illustrer par la désinvolture avec laquelle il accomplissait sa mission,

- qu'il n'a donné aucune suite à la notification urgente de la permanencière qui lui a été transmise le 2 août à 19h20, alors qu'il était lui même de permanence, et que ce n'est que le 3 août à 7h17 que le médecin qui lui a succédé l'a traitée ; qu'il a également eu en ligne le fils d'une cliente le 3 août 2011 pour échanger des informations qu'il n'a pas retranscrites, que le lendemain son successeur a appelé la belle-fille de la cliente pour prendre des nouvelles, en étant dans l'ignorance du contenu de la communication de la veille, et qu'il s'agit là de négligences incompatibles avec la nature de sa mission,

-que M. [V] [Z] se répartissait ses permanences de 12h avec ses 6 collègues, également médecins, de manière à pouvoir exercer une autre activité professionnelle, qu'il disposait pour les permanences de week-end et de jours fériés, d'un logement de fonction distinct du plateau de travail permanenciers, et que le temps passé dans ce logement ne peut être considéré comme du temps de travail effectif,

- que son contrat de travail prévoyait une rémunération forfaitaire, la Convention collective autorisant à ne pas mentionner la répartition de l'horaire hebdomadaire du temps de travail de sorte que son salaire fixe comprenait également les heures complémentaires qu'il pouvait être amené à effectuer, et que cette convention de forfait parfaitement valable lui est opposable.

Elle ajoute subsidiairement que les documents produits par ce dernier ne font pas apparaître le nombre d'heures travaillées par jour ni par semaine, que les récapitulatifs fournis ne permettent pas d'apprécier la réalité des heures de travail sollicitées et que la seule exécution d'heures complémentaires au-delà de la limite légale prévue par l'article L 3123-17 ne peut en tout état de cause avoir pour effet d'entraîner la requalification du contrat de travail en contrat à temps complet,

Concernant les autres demandes formées par M. [V] [Z] elle souligne que si la Convention collective prévoit effectivement que le salarié peut consacrer une heure par semaine à la recherche d'un emploi, elle ne l'a jamais empêché d'exercer ce droit, et qu'il ne démontre, pour le surplus, l'existence d'aucun préjudice.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens des parties, aux conclusions qu'elles ont soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient préalablement, suite à l'homologation par le Tribunal de commerce de Saint-Etienne d'un Plan de redressement au profit de la SAS H2AD, de mettre le CGEA [Localité 1] hors de cause et de constater que Maître [Q], maintenu dans ses fonctions d'administrateur judiciaire, est également devenu Commissaire à l'exécution du Plan ; Me [O] a été provisoirement maintenu dans ses fonctions de mandataire judiciaire pendant le temps nécessaire à la vérification et à l'établissement définitif des créances.

1/ Sur la requalification du contrat de travail de M. [V] [Z] :

Selon les dispositions de l'article L 3123-4 du code du travail, le contrat de travail à temps partiel doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires, relatives, notamment, à la répartition de la durée de travail du salarié entre les jours de la semaine et du mois.

L'article L 3123-17 du même code précise que le nombre d'heures accomplies par un salarié à temps partiel au cours d'une même semaine ou d'un même mois ne peut être supérieur au 10ème de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévu dans son contrat de travail.

Si l'exécution d'heures complémentaires a pour effet de porter son temps de travail au niveau de la durée légale hebdomadaire ou conventionnelle du travail, le salarié est fondé à obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet ; il en est de même lorsque son contrat ne comporte pas de dispositions suffisamment précises pour lui permettre de connaître à l'avance ses horaires de travail, dans un délai lui laissant la possibilité d'organiser librement sa vie personnelle ou de trouver un autre emploi rémunéré, compatible avec les exigences de son employeur.

Enfin, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'article L 3171-4 du code du travail précise que l'employeur doit présenter les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

L'article 4 du contrat de travail liant les parties prévoit que M. [V] [Z] percevra en contrepartie de sa collaboration, une rémunération mensuelle brute forfaitaire fixe de 3192 € correspondant à un horaire mensualisé sur la base de 84 heures de travail effectif, que des vacations pourront lui être proposées en dehors des périodes de travail susvisées, qu'il pourra accepter ou refuser, et qui lui seront rémunérées sur la base d'un taux horaire brut de 38 € auquel s'ajouteront les majorations légales et /ou conventionnelles le cas échéant ; ce contrat prévoit également que M. [V] [Z] sera informé des dates de vacation au moyen d'un planning remis un mois à l'avance, son employeur s'engageant par ailleurs à le prévenir suffisamment à l'avance en cas de modification de son planning du fait des besoins de la Société.

M. [V] [Z], qui travaillait dans le cadre d'une convention de forfait à temps partiel en sollicite la requalification en contrat de travail à temps plein en soutenant, notamment, qu'il travaillait de manière irrégulière, souvent plus de 35 heures par semaine, en violation des règles édictées par le code du travail concernant les temps de travail et de repos hebdomadaire et que son employeur n'assurait aucun suivi de son temps de travail.

La SAS H2AD n'est pas fondée à prétendre, pour s'opposer à cette demande, que le temps passé par son salarié dans son logement de fonction à vaquer à des occupations personnelles ne saurait être considéré comme du temps de travail effectif alors que durant les heures figurant sur ses plannings, M. [V] [Z] était tenu de rester à la disposition immédiate et permanente de son employeur, afin de pouvoir répondre aux sollicitations des permanenciers, sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles ; que le temps de garde assuré par ce salarié impliquant une présence physique sur le site doit en conséquence s'analyser comme du temps de travail effectif et non comme un temps d'astreinte au sens de l'article L 31 21-5 du code du travail.

M. [V] [Z] produit pour justifier de ses horaires de travail ses plannings pour les années 2010 et 2011, qui ne sont pas contestés par son employeur, ainsi qu'un décompte très détaillé, duquel il ressort clairement qu'il a travaillé à de nombreuses reprises au cours de la période considérée au-delà de 35 heures hebdomadaires, en assurant parfois sans interruption plusieurs vacations de 12h au mépris des règles relatives au repos hebdomadaire.

Son employeur ne justifie ni des conditions dans lesquelles étaient organisées les gardes des médecins ni des délais dans lesquels ils en étaient avisés ; il, ne démontre pas plus avoir assuré un suivi du temps de travail réalisé par l'appelant, à tout le moins pour s'assurer de sa compatibilité avec la réglementation en vigueur et la rémunération versée à ce dernier.

Il convient dans ces conditions d'accueillir sa demande de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein.

2/ sur les demandes de M. [V] [Z] :

Compte tenu de la requalification de son contrat de travail, M. [V] [Z] est fondé en sa demande de rappel de salaire pour la période du 16 février 2010 au 6 décembre 2011 soit sur une période de 22 mois sur la base d'un taux horaire de 38 € bruts, soit la somme de 56'572,12 € augmentée des congés payés afférents à hauteur de 5657,21 €.

Les heures supplémentaires accomplies par M. [V] [Z] au-delà de la durée légale hebdomadaire de travail étant parfaitement démontrées par ses pièces 7 et 8, la SAS H2AD doit être condamnée à lui verser également, pour la même période , une somme totale de 5909 € bruts à titre de rappel de salaire majoré, augmentée des congés payés afférents à hauteur de 590,90 € bruts.

La convention collective applicable prévoit par ailleurs une majoration de 45 % (article 18) au titre du travail de dimanche, soit pour les 24 dimanches travaillés par M. [V] [Z], la somme de 3163,50 € bruts augmentée des congés payés afférents à hauteur de 316,35 € bruts.

Elle prévoit enfin une compensation pour le travail de nuit dont M. [V] [Z] n'a pas bénéficié au titre des 61 nuits au cours desquelles il a travaillé sur la période considérée ; sa demande en paiement à ce titre de la somme de 1043,10 € augmentée des congés payés afférents à hauteur de 104,31 € est en conséquence bien fondée et doit être accueillie par la Cour.

Selon les dispositions des articles L 3122-42 et R 31 22-18 du code du travail, le travailleur doit bénéficier, avant son affectation sur un travail de nuit, puis tous les six mois, d'une surveillance médicale particulière dont il n'est pas contesté que M. [V] [Z] n'a pas bénéficié ; cette défaillance de son employeur a été justement indemnisée, en première instance, par le versement d'une somme de 2000 € à titre de dommages et intérêts.

La loi du 21 août 2007 dite loi TEPA a créé à compter du 1er octobre 2007 une exonération d'impôt sur le revenu ainsi qu'un dispositif d'allégement de cotisations sociales pour les salariés mais a été abrogée par la loi du 16 août 2012 ; M. [V] [Z] ayant été privé du bénéfice de ce dispositif, sa demande en paiement d'une somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts apparaît justifiée.

Ses prétentions indemnitaires fondées sur les dispositions de l'article L 8223-1 du code du travail seront en revanche rejetées, à défaut de démonstration d'une dissimulation intentionnelle de ses heures de travail par son employeur.

3/sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Selon les dispositions de l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Il ne peut être sérieusement contesté que la SAS H2AD, en omettant de verser à M. [V] [Z] les diverses majorations salariales auxquelles il pouvait prétendre, a manqué à son devoir de loyauté et causé à ce dernier un préjudice qui sera justement indemnisé par le versement d'une somme de 2000 €.

4/ sur le licenciement de M. [V] [Z] :

L'article 3 du contrat de travail signé par M. [V] [Z] lui fait obligation de s'assurer que le déroulement technique des opérations d'assistance s'effectue conformément aux impératifs médicaux et aux procédures mises en place dans la Société, d'informer le médecin responsable des problèmes ponctuels rencontrés, de tenir à jour les dossiers médicaux en fonction des différents contacts établis, et de répercuter en temps utile au médecin régulateur lui succédant l'ensemble des informations concernant les assistances en cours ainsi que les transports et accueils organisés ou en cours de réalisation.

Le manuel de formation de la SAS H2AD, dont M. [V] [Z] ne conteste pas avoir eu connaissance, lui faisait obligation de se loguer sur le système informatique et sur le téléphone dès sa prise de poste, de manière à être joignable par la permanencière en cas de difficultés.

Il est acquis aux débats qu'il a omis d'effectuer cette formalité le 2 août 2011 de sorte que l'infirmière de permanence, Mme [K], qui a reçu à 19H20 un appel urgent concernant un client de la société n'a pas été en mesure de lui transmettre immédiatement l'information et que celle-ci n'a pu être traitée que le lendemain à 7H17 par son successeur ; M. [V] [Z] se contente de dire qu'il s'agit là d'un simple oubli n'ayant pas eu de conséquences préjudiciables ce qui, compte tenu du poste qu'il occupait et de la nature de la mission assurée par son employeur, apparaît particulièrement désinvolte.

Il n'est par ailleurs pas contesté que M. [V] [Z] a omis d'établir un compte rendu d'une conversation téléphonique qu'il a eu le 3 août 2011 avec le fils d'une cliente ; qu'il ait estimé, en sa qualité de médecin, ne pas devoir donner de suites immédiates à cette conversation n'appelle aucun reproche, mais il avait en revanche l'obligation contractuelle d'assurer la transmission des informations reçues au profit de son successeur, ce qu'il n'a pas fait au détriment de la qualité de la prise en charge et de l'image de son employeur.

Ce comportement fautif réitéré justifiait le licenciement de M. [V] [Z] qui repose donc bien sur une cause réelle et sérieuse ; le jugement déféré sera en conséquence confirmé sur ce point.

La lettre de licenciement notifiée le 4 octobre 2011 à M. [V] [Z] ne mentionne ni le droit du salarié à la portabilité des droits de la mutuelle santé prévoyance dont il bénéficiait au sein de la SAS H2AD ni les dispositions conventionnelles selon lesquelles le salarié licencié a droit à 1heure par semaine de recherche d'emploi en cas d'emploi à temps partiel ; le jugement déféré sera également confirmé au titre de ces 2 chefs de demande.

5/ sur les demandes annexes :

Il serait contraire à l'équité de laisser M. [V] [Z] supporter seul la charge de ses frais irréductibles,

La SAS H2AD, qui succombe dans la procédure, en supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

Met le CGEA [Localité 1] hors de cause,

Constate que Maître [Q], maintenu dans ses fonctions d'administrateur judiciaire, est également devenu Commissaire à l'exécution du Plan,

Confirme le jugement rendu le 12 mars 2014 par le Conseil de prud'hommes de Saint-Étienne en ses dispositions relatives au licenciement de M. [V] [Z], aux demandes de ce dernier relatives au travail dissimulé, à l'absence d'information sur les heures pour recherche d'emploi, aux droits à portabilité de la mutuelle, à l'absence de suivi médical ainsi qu'aux frais irrépétibles et aux dépens.

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs de décision réformés et y ajoutant,

Dit que le contrat de travail à temps partiel de M. [V] [Z] doit être requalifié en contrat de travail à temps complet,

Condamne la SAS H2AD à verser à M. [V] [Z] les sommes de :

-56'572,12 € bruts à titre de rappel de salaire,

-5657,21 € bruts au titre des congés payés afférents,

-5909 € bruts à titre de rappel de rappel d'heures supplémentaires pour les années 2010 et 2011,

- 590,90 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 3163,50 € bruts à titre de majoration des dimanches travaillés,

- 316,35 € bruts au titre des congés payés afférents,

-1043,10 € bruts à titre de majoration des heures de nuit,

- 104,31 € au titre des congés payés afférents,

- 1000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la loi TEPA,

- 2000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Dit que la SAS H2AD devra remettre à M. [V] [Z] un bulletin de salaire, un solde de tout compte et une attestation Pôle Emploi rectifiés en fonction des condamnations prononcées,

Dit n'y avoir lieu à astreinte,

Rappelle que les créances salariales sont productrices d'intérêts au taux légal à compter de la notification de la demande à l'employeur et celles indemnitaires à compter de la présente décision,

Condamne la SAS H2AD au paiement d'une somme de 1500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS H2AD aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Christine SENTIS Christine DEVALETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 14/02726
Date de la décision : 22/05/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°14/02726 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-22;14.02726 ?
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