La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2015 | FRANCE | N°13/08918

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 21 mai 2015, 13/08918


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 13/08918





[T]



C/

SARL COGERA







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 31 Octobre 2013

RG : F 12/00932











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 21 MAI 2015













APPELANTE :



[G] [T] épouse [O]

née le [Date naissance 1] 1953 à
>[Adresse 2]

[Localité 2]



représentée par Me Julien MICHAL,,

de la SELARL MICHAL & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



SARL COGERA

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par Me Pierre LAMY du CABINET PIERRE LAMY ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 13/08918

[T]

C/

SARL COGERA

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 31 Octobre 2013

RG : F 12/00932

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 21 MAI 2015

APPELANTE :

[G] [T] épouse [O]

née le [Date naissance 1] 1953 à

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Julien MICHAL,,

de la SELARL MICHAL & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SARL COGERA

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Pierre LAMY du CABINET PIERRE LAMY ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 27 janvier 2014

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Novembre 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre

Christian RISS, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 21 Mai 2015, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Michèle GULLON, Greffier en chef auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er mars 1972, [G] [T]-[O] a été embauchée par la S.A.R.L. COGERA en qualité de comptable ; le 13 février 2012, elle a été licenciée pour faute grave, l'employeur lui reprochant un manquement à l'obligation de loyauté et une inexécution contractuelle.

[G] [T]-[O] a contesté son licenciement devant le conseil des prud'hommes de LYON et a réclamé l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement, des dommages et intérêts et une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 31 octobre 2013, le conseil des prud'hommes a :

- déclaré que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la S.A.R.L. COGERA à verser à [G] [T]-[O] la somme de 5.732,97 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 573,23 euros de congés payés afférents, et la somme de 22.931,88 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- fait courir les intérêts à compter du 8 mars 2012,

- rejeté les autres demandes,

- condamné la S.A.R.L. COGERA aux dépens y compris les éventuels frais d'exécution forcée.

Le jugement a été notifié le 5 novembre 2013 à [G] [T]-[O] qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 15 novembre 2013.

Par conclusions visées au greffe le 5 novembre 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [G] [T]-[O] :

- explique qu'elle a épousé le dirigeant de l'entreprise, qu'ils se sont séparés, que son mari a pris sa retraite laissant son fils issu d'une précédente union à la tête de la société et que les deux hommes voulaient son départ de la société,

- conteste le premier grief et ajoute qu'il ne peut fonder un licenciement,

- oppose au second grief qu'elle accomplissait les tâches confiées par l'employeur, qu'elle était autorisée à travailler au cabinet de [Localité 4], qu'elle a toujours fourni ses feuilles de temps et qu'elle n'a pas travaillé moins en 2011 qu'en 2010,

- soutient que le licenciement est privé de cause et réclame la somme de 5.732,97 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 573,23 euros de congés payés afférents, la somme de 22.931,88 euros à titre d'indemnité de licenciement et la somme de 45.863,76 euros à titre de dommages et intérêts,

- affirme que le licenciement est survenu dans des circonstances brutales et vexatoires et réclame la somme de 11.465,94 euros à titre de dommages et intérêts,

- sollicite la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'employeur aux dépens.

Par conclusions visées au greffe le 5 novembre 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.R.L. COGERA qui interjette appel incident :

- oppose que les fautes commises par la salariée sont avérées et sont graves,

- considère que le licenciement est bien fondé et est au rejet des prétentions de la salariée,

- chiffre le salaire moyen de la salariée à la somme de 1.910,99 euros bruts et critique les sommes réclamées,

- sollicite la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de la salariée aux dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement :

L'employeur qui se prévaut d'une faute grave du salarié doit prouver l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement et doit démontrer que ces faits constituent une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; dans la mesure où l'employeur a procédé à un licenciement pour faute disciplinaire, il appartient au juge d'apprécier, d'une part, si la faute est caractérisée, et, d'autre part, si elle est suffisante pour motiver un licenciement.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige énonce deux griefs :

* un manquement grave à l'obligation de loyauté résidant dans le fait d'avoir fait entrer en fin d'après-midi au cabinet de [Localité 4] un membre de sa famille qui est expert-comptable et dont le cabinet se trouve à quelques kilomètres,

* une inexécution contractuelle consistant dans le fait de ne plus s'être présentée au cabinet de LYON ni au cabinet de [Localité 4] et d'avoir travaillé seulement 64 heures au cours de l'année 2011.

S'agissant du premier grief :

L'employeur verse l'attestation de [K] [W] qui témoigne qu'un soir d'octobre-novembre 2011, il a vu [U] [T] sortir du cabinet COGERA de [Localité 4]. Il verse également en sa faveur l'attestation d'une de ses employées, [I] [P], épouse [W]. Les deux témoins habitent [Localité 3].

[U] [T] est la soeur de [G] [T]-[O] et exerce une activité d'expert-comptable. Le 27 janvier 2012, [U] [T] a écrit au cabinet COGERA avec copie au conseil régional de l'ordre des experts comptables : 'Je ne peux tolérer que vous me soupçonniez d'aller dans vos locaux pour y espionner vos dossiers. Je vous demande donc de cesser toutes paroles et tout actes diffamatoires pouvant nuire à ma réputation et à mon intégrité conformément à notre déontologie'. [U] [T] a également écrit au conseil régional de l'ordre des experts comptables qu'elle n'avait jamais mis les pieds dans les locaux de COGERA.

Au vu de ces éléments, le grief n'est pas établi.

S'agissant du second grief :

Le temps mensuel de travail de [G] [T]-[O] était fixé à 105 heures. Elle a travaillé 187 heures en 2008,140 heures en 2009, 62 heures en 2010 et 64 heures en 2011. L'employeur ne justifie pas qu'il aurait donné du travail à [G] [T]-[O] et que celle-ci ne l'aurait pas effectué. Aucune demande de travail émanant de l'employeur n'est produite. L'employeur ne prouve pas qu'il a formulé une quelconque observation sur le manque de travail pour l'année 2010 qui n'a pas été plus productive que l'année 2011. Les explications de l'employeur concernant des dossiers sont dénuées de pertinence dans la mesure où aucun dossier nominatif n'est visé dans la lettre de licenciement. L'employeur reconnaît qu'il avait accepté que la salariée travaille sur le site de [Localité 4] et il n'a jamais mis en demeure la salariée de venir travailler au cabinet de LYON.

Le grief n'est pas établi.

En conséquence, le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

[G] [T]-[O] percevait un salaire mensuel brut de 1.910,99 euros ; en sa qualité de cadre, elle a droit à un préavis de trois mois ; l'indemnité compensatrice de préavis se monte à la somme de 5.732,97 euros ; conformément à la demande les congés payés afférents seront accordés à hauteur de 573,23 euros.

En conséquence, la S.A.R.L. COGERA doit être condamnée à verser à [G] [T]-[O] la somme de 5.732,97 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 573,23 euros de congés payés afférents.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

L'indemnité conventionnelle de licenciement est de deux dixième de mois de salaire par année d'ancienneté outre deux quinzième de mois de salaire par année d'ancienneté au delà de dix ans ; le salaire moyen des trois derniers mois qui est le plus favorable se monte à 1.910,99 euros ; à l'issue du préavis, [G] [T]-[O] comptabilisait une ancienneté de 40 ans, deux mois et douze jours, soit 40,20 années ; il s'ensuit une indemnité de licenciement se montant à la somme de 23.059,28 euros ; il est réclamé la somme de 22.931,88 euros.

En conséquence, la S.A.R.L. COGERA doit être condamnée à verser à [G] [T]-[O] la somme de 22.931,88 euros à titre d'indemnité de licenciement.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

La S.A.R.L. COGERA employait moins de onze salariés.

En application de l'article L. 1235-5 du code du travail, [G] [T]-[O] peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi ; elle née en [Date naissance 2], a présenté un état dépressif, a été au chômage et a fait valoir ses droits à la retraite le 1er avril 2013 ; ces éléments justifient de chiffrer les dommages et intérêts à la somme de 30.000 euros.

En conséquence, la S.A.R.L. COGERA doit être condamnée à verser à [G] [T]-[O] la somme de 30.000 euros nets devant lui revenir personnellement à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause.

Les conditions du licenciement sont indemnisées par la somme précédemment allouée et le licenciement ne s'est pas entouré de circonstances brutales et vexatoires susceptibles de donner lieu à une indemnité spécifique.

En conséquence, [G] [T]-[O] doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire.

Sur les intérêts :

En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, les intérêts courent au taux légal jusqu'à parfait paiement sur l'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents et l'indemnité de licenciement à compter du 8 mars 2012, date de réception par l'employeur de la convocation à l'audience de conciliation valant mise en demeure de payer et le jugement entrepris doit être confirmé. Les intérêts courent au taux légal jusqu'à parfait paiement sur les dommages et intérêts liés au licenciement à compter du présent arrêt.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de condamner la S.A.R.L. COGERA à verser à [G] [T]-[O] en cause d'appel la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La S.A.R.L. COGERA qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel et le jugement entrepris doit être confirmé.

Les frais d'exécution forcée sont futurs et éventuels, ne rentrent pas dans les dépens et la question de leur charge relève de la compétence du juge de l'exécution ; il n'y a donc pas lieu, en l'état, de mettre les frais d'exécution forcée à la charge de la S.A.R.L. COGERA et le jugement entrepris doit être infirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la S.A.R.L. COGERA à verser à [G] [T]-[O] la somme de 5.732,97 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 573,23 euros de congés payés afférents, et la somme de 22.931,88 euros à titre d'indemnité de licenciement, en ses dispositions relatives aux intérêts et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens,

Infirmant pour le surplus et statuant à nouveau,

Juge le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

Condamne la S.A.R.L. COGERA à verser à [G] [T]-[O] la somme de 30.000 euros nets devant lui revenir personnellement à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Déboute [G] [T]-[O] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

Juge n'y avoir lieu, en l'état, de mettre les frais d'exécution forcée à la charge de la S.A.R.L. COGERA,

Ajoutant,

Condamne la S.A.R.L. COGERA à verser à [G] [T]-[O] en cause d'appel la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.R.L. COGERA aux dépens d'appel.

LE GREFFIER EN CHEF,LE PRESIDENT,

Michèle GULLONJean-Charles GOUILHERS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 13/08918
Date de la décision : 21/05/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°13/08918 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-21;13.08918 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award