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13/05/2015 | FRANCE | N°14/04278

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 13 mai 2015, 14/04278


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 14/04278





[O]



C/

SARL GARAGE SALENGRO







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 12 Mai 2014

RG : F 12/02276











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 13 MAI 2015







APPELANT :



[Y] [O]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 3] (ALGERIE)

[Adre

sse 1]

[Localité 1]



comparant en personne, assisté de Me Eladia DELGADO, avocat au barreau de LYON substitué par Me Florent JOUBERT, avocat au barreau de LYON



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/17620 du 26/06/2014 accordée par le bureau d...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 14/04278

[O]

C/

SARL GARAGE SALENGRO

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 12 Mai 2014

RG : F 12/02276

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 13 MAI 2015

APPELANT :

[Y] [O]

né le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 3] (ALGERIE)

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Eladia DELGADO, avocat au barreau de LYON substitué par Me Florent JOUBERT, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/17620 du 26/06/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMÉE :

SARL GARAGE SALENGRO

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Jean-marc SPORTOUCH, avocat au barreau de LYON substitué par Me Sylvia CLOAREC, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 23 Mars 2015

Présidée par Michel BUSSIERE, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Michel BUSSIERE, président

- Agnès THAUNAT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 13 Mai 2015 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Attendu que M. [O] a été engagé le 2 novembre 2000 par la société Garage Salengro selon contrat à temps partiel en qualité de mécanicien automobile pour une durée hebdomadaire de 20 heures portée à 25 heures par avenant signé le 1er avril 2002 ; que son salaire mensuel moyen brut était de 1155,26 € ; qu'il a été victime d'un accident du travail le 9 septembre 2008 alors qu'il intervenait sur une voiture à côté de la fosse du garage dépourvue d'éléments de sécurité ; qu'il n'a pas pu reprendre le travail et que par arrêt du 22 octobre 2013, la cour d'appel de Lyon a reconnu la faute inexcusable de l'employeur ; que M. [O], ayant refusé de répondre à une convocation régulièrement adressée par l'employeur aux fins d'entretien préalable au licenciement, a reçu une lettre de licenciement datée du 3 février 2010 ainsi rédigée:

«A la suite de vos différents arrêts de travail consécutifs à votre accident du travail, vous avez été déclaré inapte à la reprise de vos fonctions antérieures de mécanicien

Le médecin du travail a cependant formulé des préconisations pour la recherche d'un reclassement.

Par lettre recommandée en date du 22 décembre 2009, nous vous avons informé que nous souhaitions envisager avec vous les possibilités de reclassement.

Vous ne vous êtes pas présenté. Nous n'avons pu examiner ensemble les possibilités de reclassement sur un poste d'ouvrier polyvalent.

Par lettre recommandée du 21 décembre 2009, nous avons constaté votre absence alors que votre arrêt de travail se terminait le 12 décembre 2009.

Par lettre du 4 janvier 2010, vous avez refusé la proposition de reclassement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 11 janvier 2010, nous vous avons convoqué à un entretien préalable en vue d'un licenciement.

Par lettre du 12 janvier 2010, vous nous avez informé ne pas venir à cet entretien.

Parallèlement, vous avez reçu la notification de l'attribution d'une indemnité en capital forfaitaire de 1828,69 €.

Nous sommes donc contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L 1226-14 du Code du travail, vous percevrez l'indemnité spéciale de licenciement.

Dans la mesure où votre inaptitude a été déclarée à la suite d'un accident du travail, vous percevrez une indemnité compensatrice de préavis.

Nous tenons à votre disposition votre reçu pour solde de tout compte, ainsi que les sommes que nous restons vous devoir.

Nous vous informons que vous pouvez faire valoir les droits que vous aurez acquis au titre du droit individuel à la formation sous réserve d'en formuler la demande au cours du délai de préavis de 2 mois non effectué.

Vous bénéficiez, en effet, au titre du DIF d'un volume de 20 heures. Les sommes correspondantes peuvent être affectées au financement d'une action de formation, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l'expérience. A défaut d'une telle demande dans le délai imparti, ce droit sera définitivement perdu »

Attendu que par jugement n° RG F 12/02276 daté du 12 mai 2014, le conseil de prud'hommes de Lyon, section commerce, a statué ainsi :

- Dit et juge que la société Garage Salengro a bien recherché sérieusement et loyalement toutes possibilités de reclassement de M. [Y] [O] suite à son inaptitude partielle professionnelle,

- Dit et juge que, dès lors, le manquement à son obligation de reclassement n'est pas caractérisé, ni démontré, ni établi par le salarié,

- Déboute par conséquent, au titre du manquement à l'obligation de reclassement, M. [Y] [O] de sa demande de dommages et intérêts de 13.900 €, en réparation du traumatisme psychique occasionné et des préjudices moral, d'anxiété, psychologique, vexatoire, professionnel et financier qu'il a subis,

- Dit et juge en revanche que la Société Garage Salengro a exécuté d'une manière fautive et déloyale le contrat de travail et les conditions de travail de M. [Y] [O],

- Condamne par conséquent à ce titre, la Société Garage Salengro à payer à M. [Y] [O] la somme de 2.500 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi,

- Condamne la Société Garage Salengro à payer à M. [Y] [O] la somme de 850 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- Donne acte à Me [X] de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle si, dans les 12 mois du jour où la décision à intervenir est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la Société Garage Salengro la somme allouée et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle,

- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- Condamne la Société Garage Salengro aux entiers dépens de l'instance

Attendu que par lettre recommandée expédiée le 23 mai 2014 et reçue au greffe de la cour le 26 mai 2014, M. [Y] [O] a déclaré interjeter appel du jugement précité à l'encontre de la SARL Garage Salengro ;

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'appelant demande de :

- Dire et juger son appel régulier, justifié et bien fondé,

- Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné le Garage Salengro à lui verser la somme de 2.500 € au titre de l'exécution déloyale et mauvaise foi du contrat de travail,

- Dire et juger que le licenciement notifié à M. [O] le 3 février 2010 est dépourvu de cause réelle et sérieuse, en conséquence,

- Condamner la société Garage Salengro à lui payer la somme de 13.900 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de LYON en ce qu'il a condamné le Garage Salengro à lui payer une indemnité d'un montant de 2.500 € au titre de l'exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail,

- Rejeter la demande reconventionnelle de la société Garage Salengro tendant à le condamner à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- Constater que la Cour d'Appel de Lyon (RG n° 12/08966) a reconnu la faute inexcusable de la Société Garage Salengro par un arrêt du 22 octobre 2013, en conséquence,

- Condamner la société Garage Salengro à payer à M. [O] la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice tiré de la perte de son emploi,

- Condamner la même à payer à la SELARL Delgado Meyer une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'intimée demande de :

- Dire et juger le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence

- Rejeter les demandes du salarié,

- Dire et juger que le préjudice tiré de la perte d'emploi est d'ores et déjà compris dans la demande relative aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en conséquence,

- Rejeter les demandes du salarié,

- Dire et juger qu'aucune exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail ne saurait être imputée à la société Garage Salengro,

- Constater que M. [O] s'est rendu coupable d'une exécution déloyale du contrat de travail, constitutive d'une faute lourde, en conséquence,

- Rejeter les demandes de M. [O],

- Condamner M. [O] à lui payer la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts,

* En tout état de cause,

- Rejeter les demandes de M. [O] et condamner ce dernier à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner le même aux entiers dépens

Attendu que l'affaire a été plaidée à l'audience du 23 mars 2015 ;

Attendu qu'il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions ;

SUR CE

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ;

Sur le licenciement

Attendu que M. [O] soutient que l'employeur étant tenu envers son salarié d'une obligation de sécurité de résultat, il ne peut pas motiver le licenciement par un fait qui lui est imputable et que la seule constatation d'un manquement à son obligation de sécurité de résultat suffit à faire perdre son caractère réel et sérieux à un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, même si l'impossibilité de reclassement est établie ;

Attendu que l'intimée réplique que si l'on considérait que parce qu'il y a eu accident du travail, il y a nécessairement violation par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat et que le licenciement consécutif à l'inaptitude est dénué de cause réelle et sérieuse, cela reviendrait à considérer de manière systématique que tous les licenciements de salarié faisant état d'une inaptitude consécutive à un accident ou une maladie professionnelle seraient dénués de cause réelle et sérieuse ;

Attendu cependant qu'en l'espèce, l'accident du travail dont à été victime M. [O] a pour origine l'absence de protection de la fosse dans lequel il est tombé et que la cour d'appel de Lyon, selon arrêt du 22 octobre 2013, a jugé que l'accident du travail survenu le 9 septembre 2008 à M. [O] est imputable à la faute inexcusable de l'employeur ; que l'inaptitude du salarié à l'exercice de sa profession est établie médicalement, ce qui a motivé son licenciement par la société Garage Salengro ;

Attendu que l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité à l'égard de ses salariés, impliquant la prise de mesures comprenant des actions de prévention des risques professionnels, des actions d'information et de formation et mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ; qu'en l'espèce il est établi que l'accident a pour cause l'absence d'éléments de protection équipant la fosse du garage dans lequel M. [O] est tombé ; que s'agissant d'un accident du travail imputable uniquement à l'employeur, l'inaptitude du salarié et l'impossibilité de le reclasser ne constituent pas une cause réelle et sérieuse et qu'il convient en conséquence de déclarer que le licenciement de M. [O] est sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'au moment de l'accident, le salarié avait plus de deux années d'ancienneté mais que l'entreprise n'employait qu'un seul salarié et que l'article L. 1235-3 du code du travail n'est pas applicable de droit ; que la demande de M. [O] n'a pas pour objet la réparation du préjudice résultant de l'accident du travail mais la réparation du préjudice qui est la conséquence de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui relève de la compétence de la juridiction prud'homale et au second degré de la chambre sociale de la cour d'appel ; que la cour d'appel dispose des éléments suffisants pour fixer à 13.900 € l'indemnisation de M. [O] à ce titre, conformément à sa demande ;

Attendu que la demande d'indemnisation du préjudice lié à la perte de l'emploi est recevable et fondée et que la cour dispose des éléments suffisants pour apprécier la somme de 20'000 € le montant de la réparation due au salarié ;

Sur l'exécution du contrat de travail

Attendu que M. [O] demande la confirmation du jugement lui ayant octroyé la somme de 2500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution de manière fautive et déloyale du contrat de travail par l'employeur et que la société Garage Salengro conteste cette décision ;

Attendu cependant que ce que le conseil de prud'hommes a qualifié d'exécution déloyale du contrat de travail relève en réalité d'un manquement de l'employeur a l'obligation de sécurité de résultat vis-à-vis du salarié et que la réparation des préjudices d'anxiété, psychologique et psychique relève de l'indemnisation au titre de la faute inexcusable et qu'il convient de renvoyer les parties devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, au demeurant déjà saisi, afin de respecter le principe du double degré de juridiction ;

Attendu que la faute inexcusable de l'employeur ayant été retenue par la juridiction de la sécurité sociale, aucune exécution déloyale du contrat de travail ne peut être reprochée au salarié qui en a été victime ; qu'il convient de rappeler que la société Garage Salengro n'a pas été condamnée aux seuls motifs que M. [O] avait été victime d'un accident du travail, mais parce que l'accident du travail a pour origine l'absence de mise en 'uvre par l'employeur, autour de la fosse du garage, des dispositifs de sécurité indispensables pour assurer le travail en toute sécurité, tant pour le salarié que pour l'employeur ; que l'intimée sera déboutée de sa demande à ce titre ;

Attendu que M. [O] est au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Attendu que l'intimée qui succombe à titre principal supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière sociale, en dernier ressort et contradictoirement

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement entrepris en qu'il a :

- Condamné la Société Garage Salengro à payer à M. [Y] [O] la somme de 850 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Donné acte à Me [X] de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle si, dans les douze mois du jour où la décision à intervenir est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la Société Garage Salengro la somme allouée et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle,

- Condamné la Société Garage Salengro aux entiers dépens de l'instance

L'infirme en ses autres dispositions et statuant à nouveau ;

Renvoie les parties devant le tribunal des affaires de sécurité sociale pour qu'il soit statué sur la demande au titre de la violation de l'obligation de sécurité de résultat ;

Dit que le licenciement de M. [Y] [O] par la Société Garage Salengro est sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la Société Garage Salengro à payer à M. [Y] [O] la somme de 13'900 € (treize mille neuf cents euros) à titre de dommages-intérêts ;

Y ajoutant

Condamne la Société Garage Salengro à payer à M. [Y] [O] la somme de 20'000 € (vingt mille euros) au titre de la perte d'emploi ;

Condamne la Société Garage Salengro à payer à la SELARL Delgado Meyer, avocat à la cour, la somme de 2.000 € (deux mille euros) au titre de l'article 700, 2° du Code de procédure civile,

Condamne la Société Garage Salengro aux entiers dépens.

Le greffierLe Président

S. MASCRIERM. BUSSIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 14/04278
Date de la décision : 13/05/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°14/04278 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-13;14.04278 ?
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