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07/04/2015 | FRANCE | N°13/05356

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 07 avril 2015, 13/05356


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 13/05356





SAS CENTRE AMBULANCIER ROANNAIS



C/

[D]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 22 Mai 2013

RG : F 12/00039











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 07 AVRIL 2015





APPELANTE :



SAS CENTRE AMBULANCIER ROANNAIS

MR [Q], directeur

[Adresse 2]r>
[Adresse 2]

[Localité 1]



comparante en personne, assistée de Me Cécile BADENIER, avocat au barreau de TOURS substitué par Me Yann BOUGENAUX, avocat au barreau de LYON



Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 13/05792 (Fond), Intimé dans 13/05817 (Fond)



INT...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 13/05356

SAS CENTRE AMBULANCIER ROANNAIS

C/

[D]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 22 Mai 2013

RG : F 12/00039

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 07 AVRIL 2015

APPELANTE :

SAS CENTRE AMBULANCIER ROANNAIS

MR [Q], directeur

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne, assistée de Me Cécile BADENIER, avocat au barreau de TOURS substitué par Me Yann BOUGENAUX, avocat au barreau de LYON

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 13/05792 (Fond), Intimé dans 13/05817 (Fond)

INTIMÉ :

[G] [D]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3] (47)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Sylvain SENGEL de la SELARL SELARL AD JUSTITIAM, avocat au barreau de ROANNE

Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 13/05792 (Fond), Appelant dans 13/05817 (Fond)

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Mars 2015

Présidée par Michel BUSSIERE, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Michel BUSSIERE, président

- Agnès THAUNAT, conseiller

- Vincent NICOLAS, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 07 Avril 2015 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel BUSSIERE, Président et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Attendu que par jugement n° RG F 12/00039 daté du 22 mai 2013 le conseil de prud'hommes de Roanne, section activités diverses, présidé par le juge départiteur a statué ainsi :

- constate le désistement de M. [D] de sa demande visant à dire qu'il n'est pas redevable du remboursement d'une avance sur frais

- condamne la SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [D] la somme de 500 € en réparation des manquements constatés aux obligations relatives au temps réglementaire d'interruption

- CONDAMNE la SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [D] la somme de 500 € en réparation des manquements constatés aux obligations relatives au temps de permanence

- DIT que le licenciement de M. [D] intervenu le 31 janvier 2012 est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- fixe la rémunération brute mensuelle de M. [D] à la somme de 1.495,68 €

- CONDAMNE la SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [D] :

- la somme de 2.991,36 euros à titre d'indemnité de préavis,

- la somme de 299,13 euros au titre des congés payés afférents,

- la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- ORDONNE à la SAS Centre ambulancier Roannais de remettre à M. [D] un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes aux dispositions de la présente décision, et ce sans astreinte ;

- DÉBOUTE M. [D] de l'ensemble de ses autres demandes

- CONDAMNE la SAS Centre ambulancier Roannais à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités chômage ;

- CONDAMNE la SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [D] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

- RAPPELLE que sont exécutoires de droit à titre provisoire les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletins de paie, certificat de travail...) ainsi que les jugements ordonnant le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R 1454-14-2° du code du travail dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,

- DIT n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire pour le surplus,

- CONDAMNE la société SAS Centre ambulancier Roannais aux dépens

Attendu que par lettre recommandée expédiée le 27 juin 2013 et reçue au greffe de la cour le 28 juin 2013, la SAS Centre ambulancier Roannais a déclaré interjeter appel du jugement précité à l'encontre de M. [G] [D] ;

Attendu que par déclaration électronique enregistrée le 10 juillet 2013 et réitérée par lettre recommandée expédiée le même jour et enregistrée au greffe le 11 juillet 2013, M. [D] a interjeté appel incident du même jugement à l'encontre de la SAS Centre ambulancier Roannais ;

Attendu que les affaires ont été jointes par ordonnance du 28 octobre 2013 ;

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'appelant demande de :

- DÉCLARER recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société CAR

- INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de ROANNE le 22 mai 2013 en ce qu'il a fait droit aux demandes de M. [D], s'agissant des manquements constatés aux obligations relatives au temps réglementaire d'interruption et au temps de permanence, et a jugé le licenciement de M. [D] sans cause réelle et sérieuse

- DÉBOUTER M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

- CONFIRMER le jugement rendu pour le surplus

- CONDAMNER M. [D] à verser à son employeur la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance

Attendu que par conclusions déposées au soutien de ses observations orales à l'audience, l'intimé demande de :

- CONSTATER pour les causes sus énoncées que le Centre ambulancier Roannais a manqué à ses obligations relatives à la durée du travail dans les ambulances, a commis des agissements répétés de harcèlement moral, et n'a pas respecté l'obligation de reclassement de l'article L 1226-2

- INFIRMER pour partie le jugement entrepris

- lui donner acte de ce qu'il se désiste de sa demande visant à dire qu'il n'est pas redevable du remboursement d'une avance sur frais, et de sa demande tendant à obtenir une indemnité pour non respect de l'obligation de reclassement des travailleurs handicapés de l'article

L 5213-6 du Code du Travail ;

- CONFIRMER le jugement :

- en ce qu'il a condamné la société SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [G] [D] la somme de 500 euros en réparation des manquements constatés aux obligations relatives au temps réglementaire d'interruption,

- en ce qu'il a condamné la société SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [G] [D] la somme de 500 euros en réparation des manquements constatés aux obligations relatives au temps de permanence,

- en ce qu'il a dit le licenciement de M. [G] [D] intervenu le 31 janvier 2012 dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- en qu'il a fixé la rémunération brute mensuelle de M. [G] [D] à la somme de 1 495,68 €,

- en ce qu'il a condamné la société SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [G] [D] la somme de 2 991,36 euros à titre d'indemnité de préavis et la somme de 299,13 € au titre des congés payés afférents

- en ce qu'il a condamné la société SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [G] [D] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- Infirmer pour le surplus

- condamner la SAS Centre ambulancier Roannais à lui payer la somme de 1 500 € en réparation du harcèlement moral

- CONDAMNER la société SAS Centre ambulancier Roannais à lui payer la somme de

18 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- DIRE que la SAS Centre ambulancier Roannais devra lui remettre un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation POLE EMPLOI conformes aux dispositions de l'arrêt à intervenir, et ce à peine d'une astreinte de 50 € par jour de retard, passé le délai de 15 jours de sa notification ;

- se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte

- condamner la société SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [G] [D], en cause d'appel la somme de 2 500 e au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- condamner la SAS Centre ambulancier Roannais aux dépens

Attendu que l'affaire a été plaidée à l'audience du 2 mars 2015 ;

Attendu qu'il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions ;

SUR CE

Attendu que la recevabilité de l'appel n'est pas contestée ;

Attendu que M. [D] a été engagé par la société Centre ambulancier Roannais en qualité d'ambulancier selon contrat à durée indéterminée du 30 janvier 2006 pour un horaire hebdomadaire de 35 heures et un salaire mensuel brut de 1386,24 euros ; qu'un avenant signé le 3 février 2009 portait sur l'organisation des permanences ;

Attendu que par suite de divers arrêts de travail pour cause de maladie, le médecin du travail concluait le 2 janvier 2012 à l'inaptitude définitive et totale de M. [D] au poste d'ambulancier-taxi et à tout poste comportant de la conduite en longue durée (supérieure à 2 heures en continu) et au port de charges de plus de 10 kg mais que le salarié restait apte à un autre poste en respectant ces contre-indications ;

Attendu que faute de pouvoir procéder au reclassement de son salarié, la société Centre ambulancier Roannais réalisait un entretien préalable le 13 janvier 2012 puis notifiait par lettre du 31 janvier 2012 le licenciement de M. [D] pour inaptitude ; que par décision du 2 mars 2012, l'inspecteur du travail, saisi d'une contestation de l'avis du médecin du travail, décidait que M. [D] était inapte définitivement à son poste d'ambulancier CCA, était soumis aux interdictions de manutention manuelle de charges de plus de 10 kg, de travail de nuit, de conduite routière de plus de deux heures et de pilotage véhicules sanitaires légers mais qu'il pouvait occuper toute fonction respectant ces interdictions y compris des postes de type administratif ainsi qu'une activité de chauffeur de taxi de jour, sur de courtes distances et sans manutention de charges supérieures à 10 kg ;

Attendu qu'il convient d'examiner successivement les demandes de l'appelante ;

Sur l'amplitude de travail

Attendu que le premier juge a retenu que tous les dépassements d'amplitude avaient été compensés par le paiement d'une indemnité de dépassement d'amplitude journalière d'un montant de 75 % ou de 100 % comme en faisait foi les bulletins de salaire de M. [D] et que seule l'indemnisation des manquements relatifs au temps réglementaire d'interruption devait être retenue à hauteur de 500 € ; qu'en conséquence la demande de l'employeur concernant les dépassements d'amplitude journalière ne sont plus recevables puisque que les prétentions du salarié ont été écartées et que ce dernier ne demande que la confirmation du jugement relativement à la réparation des manquements constatés aux obligations relatives au temps réglementaire d'interruption ;

Attendu que le conseil de prud'hommes a constaté une carence en temps réglementaire d'interruption pour les journées des 27, 28 août, 18, 30 septembre, 24 octobre, 25 novembre et 31 décembre 2008 soit pendant sept jours, mais que la preuve n'était pas rapportée pour les 30 & 31 janvier, 30 février, 31 mars, 3 & 10 juin 2009 d'autant que le conducteur n'avait pas travaillé les 31 janvier et 30 février 2009, ce dernier jour au demeurant inexistant ; qu'en fonction des inexactitudes affectant les relevés produits par le salarié et le faible nombre de jours, l'indemnisation des manquements au temps réglementaire d'interruption sera limitée à 250 € ;

Sur les permanences

Attendu qu'après avoir rappelé que les permanences ne doivent pas avoir une durée inférieure à 10 heures, le premier juge retenu quatre jours de permanence d'une durée inférieure soit : 8h10 le 16 février 2008, 8h55 le 26 avril 2008, 9h20 le 21 juin 2008 et 8h le 22 juin 2008 ;

Attendu que l'employeur soutient que la pratique antérieure permettait au salarié qui le souhaitait d'accomplir des permanences inférieures à la durée de 10 h minimum et que M. [D] avait fait ce choix ; que par courrier du 1er août 2008, l'inspection du travail avait rappelé la nécessité de faire tenir des permanences pendant au moins 12 heures prescrites ;

Attendu que les quatre journées litigieuses sont antérieures au rappel de l'inspection du travail et qu'en outre, par avenant au contrat de travail signé le 3 février 2009, M. [D] a demandé expressément à poursuivre les pratiques antérieures visant à effectuer, dans la mesure des possibilités d'exploitation, des permanences d'une durée inférieure à la durée prescrite par la convention collective s'appliquant dans l'entreprise ; qu'il en résulte que M. [D] ne justifie d'aucun préjudice résultant de la tenue, conforme à la pratique antérieure entérinée par avenant postérieur au contrat de travail, des permanences d'une durée inférieure à 10 heures et qu'il sera débouté de sa demande de compensation financière ;

Sur le harcèlement moral

Attendu que M. [D] a été débouté de sa demande à ce titre et qu'il maintient sa prétention en invoquant les éléments suivants :

- en 2006, sa charge de travail était identique à celle de ses collègues, notamment quant à la répartition des transports extérieurs

- le 22 juillet il établissait une attestation en justice au profit d'une collègue licenciée qui avait saisi le conseil de prud'hommes

- à la suite de l'intervention de l'inspection du travail, l'employeur a proposé un avenant au contrat de travail pour que les ambulanciers acceptent de permanences d'une durée inférieure à 10 heures, ce qu'il a refusé

- dès le 25 août 2008, sa charge de travail s'est notablement accrue avec de multiples petits transports, 10 à 15 transports par jour, le plus souvent sur [Localité 7], [Localité 6] et [Localité 5], alors que 80 % du personnel ambulancier et conducteur de taxi effectuait quatre à cinq transports par jour

- des instructions approximatives données par le régulateur sur les adresses des clients

- le décalage des heures du matin le mettant en retard de 10 à 15 minutes

- l'obligation d'aller chercher les bons de transport ainsi que ceux de ses collègues

Attendu qu'il explique qu'après avoir signé le 3 février 2009 l'avenant concernent les permanences, il a retrouvé un exercice normal de son activité à compter de mars 2009 mais qu'il donne le détail de 25 journées de travail au cours desquelles il a effectué pour certaines jusqu'à 15 transports ;

Attendu que la société Centre ambulancier Roannais indique tout d'abord que certains salariés qui ont refusé de signer l'avenant concernent les permanences sont toujours en poste au sein d'entreprises et que l'attestation établie en faveur de Mme [M] n'est pas versée aux débats alors que le licenciement de cette salarié protégée a été validé par l'inspection travail ; qu'elle souligne que si certains jours, les déplacement était limité à la région rouennaise, il y avait les jours suivants ou la veille des déplacement à [Localité 4] ou à [Localité 8] ou à [Localité 9] et que d'autres collègues bénéficient du même régime ; qu'en outre à compter de mars 2009, M. [D] a continué à effectuer des journées avec des transports exclusivement limités au secteur roannais, comme d'autres collègues ; qu'elle explique que la récupération des bons de transport traduit une démarche administrative qui incombait à l'ensemble du personnel, dans le cadre d'une certaine entraide naturelle ; qu'enfin l'employeur souligne que dans une lettre du 21 décembre 2011, le médecin du travail a écrit à M. [D] : « Je connais vos bonnes relations avec votre employeur... » ;

Attendu que le contrat de travail de M. [D] précise qu'il est engagé en qualité d'ambulancier CCA pour occuper un emploi à temps plein, dans le respect des directives du chef d'entreprise ou de son représentant et effectuer le transport des malades, blessés ou patients avec des véhicules sanitaires en assurant la surveillance de la personne pendant le transport ; que l'emploi est décrit comme comportant des opérations telles que la conduite des véhicules sanitaires, le relevage, brancardage, portage et accompagnement de personnes à mobilité réduite, la facturation et l'encaissement ou l'établissement du dossier administratif dans le cadre de la subrogation, le maintien en ordre de marche et l'entretien du matériel de la cellule sanitaire, le nettoyage ainsi que la désinfection du véhicule et du matériel... l'entretien courant des véhicules ;

Attendu en conséquence que le travail ne se limitait pas aux longs déplacements mais pouvait parfaitement s'appliquer à des déplacements dans la région roannaise et ce d'autant que le médecin du travail finira par interdire à M. [D] la conduite de longue durée et donc les longs déplacements, ce qui a contrario devait conduire à privilégier les courses de faible distance ; que dans ce contexte les faits dénoncés par M. [D] ne sont pas des actes de harcèlement moral mais relèvent seulement de l'organisation du travail et que cela est conforme aux attributions du chef d'entreprise ; que la décision du conseil de prud'hommes sera confirmée sur ce point ;

Sur le licenciement

Attendu qu'après un entretien réalisé le 25 janvier 2012, M. [D] a été licencié par lettre datée du 31 janvier 2012 ainsi rédigée :

« Par lettre en date du 13 janvier 2012, je vous ai adressé une convocation à un entretien préalable en vue d'examiner la mesure de licenciement que j'envisageais à votre égard.

Au cours de cet entretien qui s'est déroulé le 25 janvier 2012, je vous ai exposé les motifs de cet éventuel licenciement, et j'ai pris note de vos observations.

Aussi, j'entends par la présente vous notifier votre licenciement pour inaptitude. Je vous rappelle les raisons qui me conduisent à appliquer cette mesure :

Suite à un arrêt de travail pour maladie, vous avez été consulté par le médecin du travail une première fois le 13 décembre 2011, lequel a indiqué à l'issue que vous présentiez un état clinique ne vous permettant pas de reprendre votre poste habituel d'ambulancier-taxi ni tout poste nécessitant de la conduite de longue durée plus de deux heures en continu et/ou du port de charge de plus de 10 kg, et vous a déclaré inapte temporairement. Vous restiez apte à un poste respectant ces contre-indications.

Le 02/01/2012, vous avez été consulté de nouveau par le médecin du travail pour statuer sur votre aptitude définitive.

A l'issue de cet examen, le médecin du travail a estimé que votre état clinique ne vous permettait pas de reprendre votre poste habituel, et vous a déclaré inapte définitivement et totalement à votre poste et à tout poste nécessitant de la conduite de longue durée (plus de deux heures en continu) et/ou du port de charge de plus de 10 kg. Vous restiez apte à un poste respectant ces contre-indications.

Une étude de votre poste et des possibilités de reclassement a été réalisée entre la direction de l'entreprise et le médecin du travail le 22 décembre 2011.

Par courrier en date du 10 janvier 2012, je vous ai notifié notre impossibilité de reclassement à votre égard. Cette impossibilité demeure aujourd'hui, aucun poste respectant les contre-indications du médecin du travail n'étant disponible ou ne pouvant être créé. Nous en sommes d'ailleurs tous deux arrivés à la même conclusion lors de l'entretien préalable.

Votre licenciement sera donc effectif à compter de la date d'envoi de cette lettre, soit le 31 janvier 2012.

Compte-tenu de votre inaptitude, vous ne pouvez pas effectuer de préavis. Aucune indemnité compensatrice n'est donc due à ce titre.

Vous voudrez bien prendre rendez-vous et vous présenter au service paie de la société pour qu'il vous soit remis l'ensemble des documents et règlements liés à cette rupture.

Je vous rappelle que vous avez acquis 61,67 heures au titre du droit individuel à la formation permettant de financer tout ou partie d'une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. Si vous n'avez pas effectué de demande à l'issue du délai légal, je vous informe que ces droits sont transférables soit chez un nouvel employeur, soit au Pôle Emploi le cas échéant. »

Attendu que le premier juge a considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l'obligation de reclassement n'a pas été respectée en raison de la brièveté du délai écoulé entre l'avis d'inaptitude définitive (2 janvier 2012), la date de l'information donnée par l'employeur sur l'échec des recherches de reclassement (10 janvier 2012) et la date du licenciement (31 janvier 2012) soit un mois seulement et qu'en outre aucune recherche concrète personnelle n'est justifiée après la date du 2 janvier 2012 ;

Attendu que l'employeur appelant réplique qu'à la suite de la première visite médicale, l'employeur s'est rapproché du médecin du travail qui est venu dans l'entreprise le 22 décembre 2011 et que les recherches de reclassement ont débuté à cette date et se sont poursuivies par différents courriers des 22 décembre 2011 et 10 janvier 2012 ; que l'emploi de chauffeur scolaire n'était pas envisageable s'agissant de marchés publics relatifs au transport d'élèves et d'étudiants handicapés, ce qui implique le port de charges supérieures à 10 kg et qu'il était impossible de faire une permutation entre chauffeurs puisque ceux qui étaient affectés au transport scolaire ne possédaient pas le diplôme d'ambulancier et que l'activité de taxi est accessoires avec exclusivement des courses de longue durée ; qu'il soutient que le médecin du travail n'a pas proposé un reclassement sur un poste de chauffeur de taxi ; qu'il conteste avoir cessé les recherches en vue de reclassement à la date du 10 janvier 2012 ;

Attendu que M. [D] réplique en reprenant les motifs du conseil de prud'hommes et qu'il soutient que s'il était inapte au poste d'ambulancier et à tout poste comportant de la conduite de longue durée et le port de charges supérieures à 10 kg, il était apte à la fonction de chauffeur scolaire et de chauffeur de taxi comme l'a confirmé l'inspecteur du travail dans sa décision du 2 mars 2012 ;

Attendu que dans son avis du 2 janvier 2012, le médecin du travail indiquait avoir étudié les possibilités de reclassement le 22 décembre précédent « sans trouver de solution satisfaisante pour l'heure » ; que dans une note du 25 avril 2012, le même médecin du travail rappelait qu'à la suite d'un arrêt de maladie ordinaire survenu entre le 30 novembre 2009 et le 20 juillet 2010, il avait demandé un aménagement du poste de travail sans brancardage mais que malgré cela, M. [D] avait dû arrêter son travail ; qu'au cours de l'année 2011 des solutions ont été recherchées en prévision de la reprise du travail avec notamment l'aide du SAMETH et que la proposition de mise en place d'un siège ergonomique s'est révélée insuffisante ; qu'enfin entre les deux dernières visites médicales, de nouvelles possibilités ont été étudiées, notamment l'exercice de la seule fonction de chauffeur de taxi ce qui n'a pas été possible compte tenu de la limitation aux courtes distances ne permettant pas de fournir un emploi à temps plein d'autan que la fonction de chauffeur nécessite également de porter les bagages des clients qui peuvent excéder 15 ou 20 kg ; qu'il résulte de cet avis médical que l'employeur avait donc étudié les solutions de reclassement très en amont de l'avis médical du 2 janvier 2012 et qu'il avait du étudier toutes les possibilités pour que dès le mois de juillet 2010, M. [D] puisse reprendre son travail dans de bonnes conditions ; qu'au cours de l'année 2011, il avait même été fait appel à un organisme spécialisé, ce qui confirme que l'employeur s'est employé avec un grand sérieux à rechercher des solutions permettant de garder M. [D] à son service ; qu'il ne saurait être reproché à l'employeur d'avoir anticipé sur la décision d'inaptitude et d'avoir dès les premières alertes au cours de l'année 2010 envisagé des mesures destinées à préserver l'emploi de M. [D] ; qu'il est ainsi démontré que l'employeur a effectué une recherche très sérieuse en vue du reclassement du salarié ;

Attendu qu'il est certain que le transport scolaire réalisé par la société Centre Ambulancier Roannais concernait un marché pour élèves et étudiants handicapés et qu'il était notamment prévu un transport allongé lorsque l'état de santé l'imposait, ce qui suppose que le chauffeur soit suffisamment robuste pour aider l'étudiant dont la masse devait excéder 10 kg ; qu'en outre la fonction de chauffeur de taxi exige la prise en charge des bagages qui donnent lieu à une surfacturation et que les passagers devant prendre l'avion ont forcément des bagages excédant une masse de 10 kg ; qu'en conséquence l'employeur justifie de ce que les emplois revendiqués par M. [D] n'étaient pas conformes aux prescriptions de l'inspecteur du travail puisque dans son avis du 2 mars 2012, il est bien précisé que M. [D] ne peut exercer une activité de chauffeur de taxi que de jour, sur de courtes distances et sans manutention de charges de plus de 10 kg, ce qui est totalement irréalisable sauf à demander aux clients de manipuler eux-mêmes leurs bagages pour les placer dans le coffre de la voiture ;

Attendu en conséquence que l'employeur justifie bien de ce qu'il a accompli toutes les diligences nécessaires pour assurer le remplacement de M. [D] dans une fonction adaptée à son état mais qu'aucun poste adapté n'était disponible dans l'entreprise, étant rappelé que la société Centre Ambulancier Roannais a pour objectif principal le transport de personnes malades ou blessées qui nécessitent une manutention excédant les limites fixées par le médecin du travail et que l'activité de taxi suppose également la manutention de bagages d'un poids excédant 10 kg ; que dans ces conditions le licenciement de M. [D] pour inaptitude a été prononcé avec une cause réelle et sérieuse et qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement par l'employeur de sommes avancées par Pôle Emploi ;

Attendu que l'employeur explique à juste titre que l'activité de chauffeur de taxi étant une activité annexe à son emploi principal d'ambulancier, il n'était pas nécessaire de le mentionner sur les bulletins de salaire et documents contractuels liés au licenciement ; qu'en outre la qualification retenue est conforme au contrat de travail ;

Attendu que l'intimé qui succombe principalement supportera les dépens de l'instance ;

PAR CES MOTIFS

Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière sociale, en dernier ressort et contradictoirement

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement entrepris en qu'il a :

- constaté le désistement de M. [D] de sa demande visant à dire qu'il n'est pas redevable du remboursement d'une avance sur frais

- condamné la SAS Centre ambulancier Roannais à payer à M. [D] la somme de 500 € en réparation des manquements constatés aux obligations relatives au temps réglementaire d'interruption

- fixé la rémunération brute mensuelle de M. [D] à la somme de 1.495,68 €

L'infirme en ses autres dispositions et statuant à nouveau ;

Déboute M. [D] de sa demande d'indemnisation au titre des obligations relatives au temps de permanence ;

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

Dit que le licenciement de M. [D] intervenu le 31 janvier 2012 repose sur une cause réelle et sérieuse et le déboute de toutes autres demandes à ce titre ;

En tant que de besoin, donne acte à M. [D] de ce qu'il se désiste de sa demande visant à dire qu'il n'est pas redevable du remboursement d'une avance sur frais, et de sa demande tendant à obtenir une indemnité pour non respect de l'obligation de reclassement des travailleurs handicapés de l'article L 5213-6 du Code du Travail ;

Y ajoutant

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties ;

Condamne M. [D] aux entiers dépens.

Le greffierLe Président

S. MASCRIERM. BUSSIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 13/05356
Date de la décision : 07/04/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°13/05356 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-07;13.05356 ?
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