La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/04/2015 | FRANCE | N°13/09193

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 02 avril 2015, 13/09193


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 13/09193





SOCIETE MODERN VETEMENTS



C/

[T]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Octobre 2013

RG : F 11/04977











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 02 AVRIL 2015













APPELANTE :



SOCIETE MODERN VETEMENTS

[Adresse 2]

[Ad

resse 2]



représentée par Me Bruno METRAL

de la SCP BALAS & METRAL AVOCATS, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



[R] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



comparante en personne,

assistée de Me Jean-michel LAMBERT, avocat au barreau de LYON



substitué ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 13/09193

SOCIETE MODERN VETEMENTS

C/

[T]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Octobre 2013

RG : F 11/04977

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 02 AVRIL 2015

APPELANTE :

SOCIETE MODERN VETEMENTS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Bruno METRAL

de la SCP BALAS & METRAL AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

[R] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne,

assistée de Me Jean-michel LAMBERT, avocat au barreau de LYON

substitué par Me Sarah ACHAHBAR, avocat au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/34852 du 19/12/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

PARTIES CONVOQUÉES LE : 13 Mai 2014

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Février 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre

Christian RISS, Conseiller

Vincent NICOLAS, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 02 Avril 2015, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Vincent NICOLAS, Conseiller par empêchement du Président de chambre, et par Michèle GULLON, greffier en chef auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

[R] [T] a été engagée par la société MODERN'VETEMENTS, qui exploite un fonds de commerce de vente pour vêtements, en qualité de vendeuse, à compter du 3 avril 2001, selon un contrat à durée indéterminée.

À compter du 23 mars 2011, son médecin l'a mise en arrêt de travail.

Le médecin du travail, dans le cadre de la visite de reprise, l'a déclarée inapte à son poste, par deux avis en date des 10 et 30 août 2008.

[R] [T] n'a pas repris le travail.

Par lettre du 3 octobre 2011, la société MODERN'VETEMENTS l'a convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, et par lettre du 19 octobre suivant, elle l'a licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Le 30 novembre 2011 [R] [T] a saisi le conseil de prud'homme de Lyon en lui demandant de déclarer son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner en conséquence la société MODERN'VETEMENTS à lui payer des dommages-intérêts à ce titre, outre des dommages-intérêts pour harcèlement moral.

Par jugement du 28 octobre 2013, le conseil de prud'homme a :

- dit que l'inaptitude de [R] [T] est consécutive à l'absence de réaction de l'employeur face au harcèlement subi par la salariée ;

- déclaré le licenciement abusif ;

- condamné en conséquence la société MODERN'VETEMENTS à payer à [R] [T] :

* 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

* 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral.

Par déclaration envoyée au greffe le 26 novembre 2013, la société MODERN'VETEMENTS a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 30 octobre 2013.

Vu les conclusions écrites de la société MODERN'VETEMENTS remises au greffe le 16 janvier 2015 et reprises oralement à l'audience, par lesquelles elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement ;

- de débouter [R] [T] de toutes ses demandes.

Vu les conclusions écrites de [R] [T] remises au greffe le 2 février 2015 et reprises oralement à l'audience, par lesquelles elle demande à la cour :

- de confirmer le jugement, sauf sur le montant des dommages-intérêts ;

- de condamner la société MODERN'VETEMENTS à lui payer 28.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 15.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

- subsidiairement, d'ordonner une enquête.

Pour de plus amples relations des faits, de la procédure, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions déposées, oralement reprises.

SUR QUOI, LA COUR :

Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral :

Attendu que pour conclure au rejet de cette demande, la société MODERN'VETEMENTS soutient que l'événement qui a provoqué une altercation avec la salariée le 19 mars 2011est intervenu avec un tiers au contrat de travail ; qu'en outre, avant le 22 mars 2011, elle n'a jamais été saisie d'une difficulté relative à des faits de harcèlement ;

Attendu que pour justifier de cette demande, [R] [T] fait valoir :

- qu'elle a été en arrêt de travail à compter du 23 mars 2011 suite à un accident reconnu comme accident du travail par la Sécurité Sociale ;

- qu'elle a alerté à plusieurs reprises son employeur des difficultés qu'elle rencontrait au

travail ;

- qu'elle a alerté le médecin du travail et l'inspecteur du travail, et l'employeur n'a pas répondu au courrier de ce dernier ;

- qu'il n'a donc pas respecté son obligation de sécurité à son égard ;

Mais attendu qu'en application des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail, il appartient au salarié d'établir la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, et s'ils le sont, il incombe au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, l'employeur doit prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

qu'en outre, le harcèlement moral ne peut concerner un fait unique ;

qu'en l'espèce, la matérialité des faits survenus le samedi 19 mars 2011 n'est pas contestée par la société MODERN'VETEMENTS ; qu'il ressort en effet de la lettre de son gérant, [I] [M] du 7 juin 2011 adressée à la caisse primaire d'assurance maladie que [R] [T] le 19 mars 2011 a eu une altercation avec le père de M.[B], au sujet de sucettes qu'elle aurait donné à une cliente dans le magasin ;

que pour faire la preuve de faits de harcèlement moral , [R] [T] produit un courrier et une attestation du médecin du travail en date des 5 avril et 5 septembre 2011, desquels il ressort qu'au mois de novembre 2010, elle a fait part à ce médecin de difficultés rencontrées avec une personne appartenant à la famille de M.[B] qui exerçait sur elle un forme de pression morale, avec des critiques incessantes ; que le médecin du travail ajoute qu'au mois de mars 2011 il a constaté lors d'un examen de la salariée des signes manifestes de souffrance psychique et celle-ci lui a indiqué avoir eu une altercation à la suite d'une remarque injustifiée de la même personne ;

que [R] [T] produit aussi un courrier de l'inspecteur du travail en date du 22 juillet 2011 reproduisant le courrier envoyé par ce dernier à la société MODERN'VETEMENTS, suite à sa saisine par la salariée, lui rappelant les dispositions des articles L.4121-1 et L.1152-1 du code du travail ;

que cependant, ces courriers et attestation, au demeurant envoyés après la mise en arrêt de travail de [R] [T] au mois de mars 2011, font état des allégations de cette dernière au sujet des faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime avant le 19 mars 2011, sans contenir d'éléments objectifs de nature à corroborer de telles allégations ;

que notamment, le fait que le médecin du travail ait constaté au mois de mars chez [R] [T] des signes de souffrance psychiques ne peut établir les faits de harcèlement moral imputés au père du gérant de la société MODERN'VETEMENTS ;

que ces éléments n'ont donc pas de force probante ;

qu'en définitive, seuls les faits du 19 mars 2011 peuvent être retenus à l'appui d'une demande de harcèlement moral ; que cependant, et à supposer même que ces faits aient été commis par une personne exerçant une autorité de fait sur [R] [T], ce qui au demeurant n'est pas établi, ce seul élément ne suffit pas à prouver le harcèlement, dans la mesure où l'article L.1152-1 du code du travail exige des agissements répétés ;

qu'ainsi, en l'absence d' harcèlement moral constitué, aucun manquement à l'obligation de sécurité de résultat ne peut être reproché à la société MODERN'VETEMENTS ;

que c'est donc à tort que le conseil de prud'homme énonce que cette dernière n'a pas respecté son obligation de résultat et la condamne en conséquence à des dommages-intérêts pour harcèlement moral ; que c'est également à tort qu'il considère que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse au seul motif que l'inaptitude de [R] [T] est consécutive à 'son absence de réaction ' face à ce harcèlement ;

SUR LE LICENCIEMENT :

Attendu que selon l'article L.1226-10 du code du travail lorsque le salarié est déclaré inapte, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ;

que les propositions de reclassement doivent être recherchées non seulement dans l'entreprise où travaillait précédemment le salarié, mais aussi dans toutes les entreprises du groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ;

Attendu en l'espèce que la société MODERN'VETEMENTS est une petite entreprise qui à l'époque du licenciement employait seulement deux personnes, y compris [R] [T] ; qu'elle n'appartient pas à un groupe ; qu'elle a interrogé le médecin du travail, après la notification du second avis d'inaptitude, en vue du reclassement de la salariée, mais ce médecin, dans son courrier en réponse du 23 septembre 2011, contre indique son reclassement dans le seul magasin de l'entreprise, tout en précisant qu'elle serait 'apte à un emploi de vendeuse au sein d'une autre organisation de travail' ;

que dans ces conditions, la transformation du poste de travail de [R] [T], ou l'aménagement de son temps de travail n'étaient pas envisageables, compte tenu des préconisations du médecin du travail, et la société MODERN'VETEMENTS n'ayant pas d'autres établissements qui lui auraient permis d'envisager une mutation, il apparaît que ses recherches de reclassement, compte tenu de ses moyens, ont été sérieuses et loyales ;

qu'ainsi, et en raison de cette impossibilité de reclassement, le licenciement pour inaptitude de [R] [T] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement ;

Et statuant à nouveau,

Déboute [R] [T] de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et harcèlement moral ;

La condamne aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l'aide juridictionnelle

Le Greffier, Pour le Président empêché,

Michèle GULLON Vincent NICOLAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 13/09193
Date de la décision : 02/04/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°13/09193 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-04-02;13.09193 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award