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26/03/2015 | FRANCE | N°13/02526

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 26 mars 2015, 13/02526


R.G : 13/02526









Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 12 mars 2013



RG : 2011J2960





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 26 Mars 2015





APPELANTE :



SA BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS

Recouvrement et incidents

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par la SELARL ADK, avocat au barreau de LYON

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INTIMES :



[R] [Q] [K] [C]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 5] (LOIRET)

[Adresse 3]

[Localité 1]



représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocat au barreau de LYON



assisté de la SCP DEYGAS PERRACHON ET ASSOCIES...

R.G : 13/02526

Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 12 mars 2013

RG : 2011J2960

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 26 Mars 2015

APPELANTE :

SA BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS

Recouvrement et incidents

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par la SELARL ADK, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

[R] [Q] [K] [C]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 5] (LOIRET)

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

assisté de la SCP DEYGAS PERRACHON ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

[L] [B] [F]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 4] (RHONE)

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

assisté de la SCP DEYGAS PERRACHON ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 13 Mai 2014

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Décembre 2014

Date de mise à disposition : 26 Mars 2015

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Michel GAGET, président

- François MARTIN, conseiller

- Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Philippe SEMERIVA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

MM. [C] et [F] se sont portés cautions envers la Banque Populaire Loire et Lyonnais (la BP2L), en garantie d'engagements souscrits par la société Clemabi.

Cette dernière a fait l'objet d'un redressement, puis d'une liquidation judiciaires ; la banque a agi en paiement à l'encontre des cautions.

Le jugement dont la BP2L relève appel :

- juge manifestement disproportionnés les cautionnements souscrits par MM. [L] [F] et [R] [C],

- prononce la déchéance du droit de la BP2L de se prévaloir des contrats de caution conclus avec MM. [L] [F] et [R] [C],

- déboute la BP2L de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- condamne la BP2L à payer à MM. [L] [F] et [R] [C] la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la BP2L aux entiers dépens de l'instance.

*

La BP2L expose qu'elle s'est fondée, pour l'appréciation de leurs biens et revenus, sur les déclarations des cautions, et qu'elle n'était pas tenue d'investigations complémentaires.

Elle ajoute que la valeur du patrimoine et l'état de leurs revenus leur permet de répondre de leurs engagements, tant au moment de leur souscription qu'à celui où il a été appelé.

Au visa des articles 1134, 1147, 2288 et suivants du code civil, de l'article L. 341-4 du code de la consommation et de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier, elle demande de :

- déclarer ses demandes recevables et fondées et, en conséquence,

- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- en conséquence,

- dire que les cautionnements souscrits par MM. [F] et [C] ne sont pas disproportionnés,

- y ajoutant,

- condamner M. [C] à lui payer la somme de 83 806,31 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2011,

- condamner M. [F] à lui payer la somme de 83 806,31 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2011,

- condamner in solidum les intimés à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- lui accorder le bénéfice de la capitalisation des intérêts, conformément aux termes de l'article 1154 du code civil,

- condamner in solidum les défendeurs aux entiers dépens de l'instance, distraction faite au profit de Maître Kuntz, associé de la SELARL adk, avocat, sur son affirmation de droit.

*

M. [C] et M. [F] ont déposé des conclusions distinctes, mais dont une partie est commune, en ce qui concerne l'exposé des faits et la limitation de la créance prétendue de la banque à la seule somme pour laquelle ils ont donné leur garantie.

Puis, chacun d'eux expose sa situation financière, pour en déduire que son engagement était manifestement disproportionné à ses biens et revenus et que leur état actuel ne permet pas d'y faire face.

Le dispositif des conclusions de M. [C] est ainsi conçu :

- dire recevables et bien fondées les demandes de M. [R] [C],

- à titre préliminaire, dire et juger que la BP2L ne saurait réclamer la condamnation de M. [L] [F], pour un montant supérieur à 83 100 euros, sur le fondement de l'engagement de caution de 2007,

Vu I'article L. 341-4 du code de la consommation ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé manifestement disproportionné le cautionnement souscrit par M. [R] [C] et prononcé la déchéance,

Vu l'article 1244-1 du code civil ;

- à titre subsidiaire, octroyer à M. [R] [C] les plus larges délais de paiement,

- en toute hypothèse, condamner la BP2L au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, distraits au bénéfice de la SCP Aguiraud Nouvellet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

*

M. [F] demande, pour sa part, de dire que sa condamnation ne peut être prononcée pour un montant excédant 83 700 euros, de confirmer le jugement, de lui octroyer, le cas échéant les plus larges délais de paiement, et de condamner la BP2L à lui payer une indemnité de 3 000 euros pour ses frais irrépétibles et à supporter les dépens, distraits au bénéfice de la SCP Aguiraud Nouvellet, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

' S'agissant de M. [C] :

§ Il s'est porté caution à concurrence d'une fraction de l'encours du prêt souscrit par la société Clemabi, pour un montant plafonné de 83 700 euros.

Des conclusions des parties, convergentes sur ce point, il ressort que la disproportion de son engagement par rapport à ses biens et revenus doit être appréciée au regard de ce montant plafonné, qui correspond d'ailleurs à la réclamation en principal de la banque.

A la date du cautionnement, le 29 mars 2007, et selon la déclaration faite à la banque le 31 octobre 2006, dont il n'est pas prétendu qu'elle ne correspondait pas, ou ne correspondait plus, à la réalité, M. [C] disposait d'un revenu personnel mensuel de 2 050 euros, les loyers se montant à 490 euros et les impôts à 220 euros par mois, de sorte que, ramené aux revenus du ménage, le disponible était de 2 560 euros.

M. [C] déclarait un enfant à charge.

Le formulaire est 'néant', quant aux crédits en cours et cautionnements déjà donnés.

Il évoque, à la rubrique 'actif immobilier', un compte auprès de la Banque populaire, dont le numéro est cité, mais non l'état, qui n'est pas plus évoqué par la banque dans le cadre du présent débat.

La BP2L fait cependant valoir que, si M. [C] a pu acquérir un bien immobilier dès le 13 juin 2007, c'est bien que les revenus tirés de son activité le lui permettaient.

Mais la proportionnalité de l'engagement de la caution, au moment où il est souscrit, ne peut être appréciée au regard des revenus escomptés de l'opération garantie.

La BP2L expose encore fait encore valoir que 'M. [C] bénéficiait en outre d'un apport de 60 000 euros lors de l'acquisition de ce bien' ; toutefois, elle ne soutient pas expressément qu'il disposait personnellement de cette somme, apportée par les deux époux, au moment de la souscription du cautionnement.

En conséquence, les éléments acquis aux débats et invoqués par M. [C] ne sont pas utilement déniés par la banque.

Ils montrent que la somme cautionnée correspondait sensiblement, comme l'a retenu le tribunal, à deux années de revenus du ménage, sans même laisser aucun disponible ; il en est ainsi, à plus forte raison, en ramenant cette somme aux seuls revenus de la caution ; par ailleurs, celle-ci ne disposait d'aucun patrimoine mobilier ou immobilier.

M. [C] fait ainsi preuve du caractère manifestement disproportionné de son engagement, à la date de sa souscription.

§ La caution a été appelée en 2011.

M. [C] a produit aux débats ses déclarations de revenus : 17 683 euros en 2011, 30 891 euros en 2012.

Il ressort suffisamment des avis d'imposition (trois parts) que le ménage a désormais deux enfants à charge.

M. et Mme [C] sont propriétaires de la maison acquise en juin 2007, que la banque a fait évaluer à 240 000 euros.

Les engagements souscrits à ce propos par M. [C] n'ont pas à être pris en considération pour l'appréciation de ses revenus, puisqu'ils sont postérieurs à son cautionnement.

Pour autant, la valeur de la maison est grevée du remboursement des prêts finançant son acquisition consentis, pour l'un, sur vingt ans pour un montant de 174 400 euros, avec intérêts annuels de 3,8 % et, s'agissant de l'autre, pour un montant de 19 000 euros, à taux zéro, sur 72 mois.

Il s'agit, en outre, d'un bien dépendant de la communauté conjugale et il ne résulte ni des pièces, ni des conclusions, que Mme [C] a donné son consentement exprès au cautionnement.

Compte tenu des aléas du marché immobilier et de l'importance de la créance du prêteur de deniers, ne serait-ce qu'au titre du capital restant dû, tel qu'il s'apprécie, au vu du tableau d'amortissement, à quelques 150 000 euros, la BP2L ne prouve pas que le patrimoine de la caution, au moment où elle est appelée, lui permet de faire face à son obligation.

Dans ces conditions, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qui concerne M. [C].

- S'agissant de M. [F] :

§ La date et le montant du cautionnement, comme la réclamation de la banque, sont identiques à ceux exposés pour M. [C].

La fiche de renseignement remplie par M. [F] le 3 novembre 2006 mentionne un salaire de 4 930 euros par mois et des dépenses mensuelles, au titre de crédits en cours (1 200 euros), impôts (300 euros) et autres charges (300 euros) pour un total de 1 800 euros, d'où un disponible de 3 170 euros par mois.

Le crédit en question résulte d'un prêt immobilier de 160 000 euros, date de dernière échéance au 7 mars 2020, encours au moment de l'acte : 146 526 euros.

M. [F] soutient qu'en réalité, ces revenus, charges et biens incluent ceux de son épouse, son salaire personnel ressortant à 2 500 euros net, comme le démontrent ses avis d'impôt, et sa propriété, indivise avec cette dernière, ne portant que sur 40 % de l'appartement en question.

Mais ce n'est pas ce qu'il a déclaré à la BP2L et il ne peut se prévaloir de l'inexactitude de ses propres dires, que cette dernière, en l'absence de toute anomalie apparente, n'était pas tenue de vérifier.

Ce sont ces biens et revenus, tels que déclarés, qui doivent être pris en considération.

Cependant, et contrairement à ce que soutient la banque, M. [F] n'a pas dit, dans cette fiche de renseignement, qu'il était propriétaire d'un bien quelconque, puisque la rubrique 'actif immobilier' est restée vierge, ni moins encore, en l'absence de toute mention en ce sens, qu'il était propriétaire d'un bien d'une valeur excédant le montant du prêt contracté pour l'acquérir.

Il se déduit donc seulement de la fiche de renseignements qu'il existait un prêt immobilier de 160 000 euros, et rien ne portait à en conclure que le bien financé était d'une valeur différente.

Il en résulte que le disponible déclaré par M. [F] était de 3 170 euros et que son patrimoine, déduction faite des charges de remboursement, était de l'ordre de 15 000 euros.

En cet état, M. [F] démontre que, lorsqu'il a été souscrit, son engagement couvrait une somme équivalente, même en supposant la réalisation immédiate du bien prétendu et sans conserver aucun disponible, à plus de vingt mois de ses revenus, et qu'ainsi, il était manifestement disproportionné à ces biens et revenus.

§ La caution a été appelée en 2011.

La réalité de sa situation immobilière est désormais connue, qui consiste, comme le montrent les actes d'acquisition et de prêt, en la propriété indivise avec son épouse, d'une part correspondant à 40 % de la propriété indivise d'un appartement dont la valeur totale, selon l'estimation produite par la banque, serait de 630 000 euros.

La BP2L en déduit que la vente de ces parts produit un prix de 126 000 euros, voire de 108 000 euros, si l'on adopte la valeur proposée par M. [F], ce qui permet de régler le cautionnement.

M. [F] objecte cependant à juste raison qu'il faut tenir compte de la valeur de l'immobilier, des droits qu'il détient et des prêts grevant le dit bien.

Or, compte tenu de la créance du prêteur, la valeur du bien, en sa part acquise au patrimoine de la caution, ne représente qu'une fraction de son prix, puisque le prêt souscrit à concurrence de 160 000 euros court jusqu'en 2020 et que la plus grande partie du capital emprunté reste dû.

Par ailleurs, M. [F] justifie que ses revenus sont de l'ordre de 3 000 euros par mois.

Dans ces conditions, il n'est pas établi que le patrimoine de la caution, au moment où elle est appelée, lui permettait de répondre à un engagement, qui reste manifestement disproportionné.

La banque ne peut s'en prévaloir.

' En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé.

Les dépens d'appel sont à la charge de la BP2L, qui succombe en son recours.

Aucune circonstance ne conduit à écarter l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Banque Populaire Loire et Lyonnais à payer à M. [C] la somme de 1 000 euros et à M. [F] la somme de 1 000 euros au titre de l'instance d'appel,

- Condamne la Banque Populaire Loire et Lyonnais aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 13/02526
Date de la décision : 26/03/2015

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°13/02526 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-26;13.02526 ?
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