AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
R.G : 13/05829
[V]
C/
Me [S] [D] - Commissaire à l'exécution du plan de SARL ACLINA
Me [X] [P] - Mandataire judiciaire de SARL ACLINA
SARL ACLINA
AGS CGEA DE [Localité 4]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 17 Juin 2013
RG : F 10/04841
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 09 JANVIER 2015
APPELANT :
[L] [V]
né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 5] (69)
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par M. [F] [R] (Délégué syndical ouvrier)
INTIMÉES :
Me [D] [S]
Commissaire à l'exécution du plan de SARL ACLINA
[Adresse 1]
[Localité 1]
non comparant
Me [P] [X]
Mandataire judiciaire de SARL ACLINA
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Cécile LAMBERT-FOUËT, avocat au barreau de LYON
substitué par Me Alexis MARCHAL
de la SELARL SEIGLE ET ASSOCIES - PRIMALEX, avocat au barreau de LYON
AGS CGEA DE [Localité 4]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 4]
représenté par Me Jean-claude DESSEIGNE
de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON
substituée par Me Sarah ACHAHBAR, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUÉES LE : 14 Mars 2014
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 12 Décembre 2014
Présidée par Christian RISS, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Jean-Charles GOUILHERS, président
- Christian RISS, conseiller
- Vincent NICOLAS, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 09 Janvier 2015 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
Monsieur [L] [V] a été embauché pour une durée indéterminée à compter du 21 mai 2008 par la société ACLINA SàRL en qualité d'agent de service.
La société ACLINA a été déclarée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 8 juillet 2008.
Monsieur [V] a sollicité par lettre du 14 mai 2010 la rupture conventionnelle de son contrat de travail. Celle-ci a été acceptée par son employeur, mais la DIRECCTE Rhône Alpes a refusé de prononcer son homologation le 8 juillet 2010.
Suite à l'engagement d'une deuxième procédure de rupture conventionnelle du contrat de travail de Monsieur [V], la DIRECCTE a procédé à son homologation le 27 août 2010.
Monsieur [V] a cependant appris postérieurement par une correspondance de l'URSSAF en date du 23 septembre 2010 en réponse à sa demande qu'il n'avait fait l'objet d'aucune déclaration de la part de son employeur lors de son embauche, et qu'en outre les déclarations individualisées de salaire au titre des années 2008 et suivantes n'avaient pas davantage été effectuées auprès des organismes sociaux.
Dans ces conditions, il a saisi le 13 décembre 2010 le conseil de prud'hommes de Lyon afin de voir prononcer la nullité de la rupture conventionnelle intervenue entre les parties et condamner la société ACLINA à lui payer les sommes de :
- 5175 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé
- 1.752,20 € à titre d'indemnité de préavis,
- 175,22 € au titre des congés payés sur l'indemnité de préavis,
- 5.175,00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
La société ACLINA s'est opposée à ses demandes et a sollicité l'octroi d'un montant de 1.500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile .
Par jugement rendu le 17 juin 2013, le conseil de prud'hommes de Lyon, section commerce, a :
- Pris acte que, lors des débats, la SàRL ACLINA a confirmé être in bonis;
- Mis de ce fait l'AGS - CGEA de [Localité 4] hors de cause ;
- Pris acte que, lors de l'appel des causes, la SàRL ACLINA avait confirmé avoir remis ses pièces et conclusions le vendredi 19 octobre 2012 ;
- Écarté de ce fait l'ensemble des pièces de la SàRL ACLINA pour non-respect du contradictoire;
- Dit que les demandes de Monsieur [V] étaient recevables ;
- Dit que Monsieur [V] percevait un salaire moyen de 977,00 brut ;
- Dit que Monsieur [V] avait une ancienneté de deux ans, trois mois et quatre jours au moment de la fin de son contrat de travail ;
- Constaté que la SàRL ACLINA n'a pas versé à la Caisse Régionale d'Assurance Maladie Rhône Alpes l'intégralité des cotisations sociales pour les années 2008, 2009 et 2010 de Monsieur [V] ;
- Dit que de ce fait, la SàRL ACLINA a causé obligatoirement un préjudice à Monsieur [V];
- Pris acte de ce que la SàRL ACLINA a déclaré lors des débats ne pas avoir souscrit de déclaration préalable à l'embauche concernant Monsieur [V] et ne l'a déclaré à l'URSSAF qu'en 2012 ;
- Dit que de ce fait la SàRL ACLINA a causé obligatoirement un préjudice à Monsieur [V];
- Constaté également que la SARL ACLINA à procéder à du travail dissimulé ;
- Dit que, par conséquent, le consentement de Monsieur [V] a été vicié ;
- Prononcé à ce titre la nullité de la rupture conventionnelle homologuée par la DIRECCTE le 27 août 2010 ;
- Dit que de ce fait la rupture du contrat de travail de Monsieur [V] et abusive ;
- Dit que l'indemnité compensatrice de préavis est due à Monsieur [V] par la SàRL ACLINA;
- Condamné à titre la SàRL ACLINA à payer à Monsieur [V] les sommes de :
' 5.175,00 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, outre intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement;
' 5.175,00 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, outre intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement;
' 1.752,20 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
' 175,22 € brut au titre des congés payés afférents,
outre intérêts au taux légal à compter de la saisine;
- Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire autre que celle de droit ;
- Fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de Monsieur [V] à la somme de 977,00 € brut ;
- Condamné la SàRL ACLINA à payer à Monsieur [V] la somme de 1.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Débouté Monsieur [V] du surplus de ses demandes ;
- Condamné la SàRL ACLINA aux entiers dépens de l'instance.
Par lettre recommandée en date du 10 juillet 2013 enregistrée le lendemain au greffe, Monsieur [V] a interjeté appel de ce jugement en reprenant oralement à l'audience du 12 décembre 2014 par l'intermédiaire de son Conseil les conclusions qu'il a fait déposer le 25 novembre 2014 et auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de ses prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, et tendant à :
Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Le rendre opposable à l'AGS - CGEA de [Localité 4] , après déduction des sommes payées au titre du préavis et des congés payés afférents, du fait de la liquidation judiciaire de la SàRL ACLINA prononcée par le tribunal de commerce de Lyon le 22 novembre 2012.
Maître [P], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société ACLINA, a pour sa part formé un appel incident en faisant reprendre à cette audience par l'intermédiaire de son conseil les conclusions qu'il a fait déposer le 2 décembre 2014 et auxquelles il est pareillement référé pour l'exposé de ses prétentions et moyens, aux fins de voir :
Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon le 17 juin 2013 en toutes ses dispositions;
Débouter Monsieur [V] de l'intégralité de ses demandes;
A titre subsidiaire,
Statuer ce que de droit s'agissant de la demande d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de dommages-intérêts pour licenciement abusif dans la limite des sommes réclamées et après déduction des sommes déjà perçues par Monsieur [V];
Débouter Monsieur [V] de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;
Débouter Monsieur [V] de sa demande d'intérêts au taux légal;
Fixer les dépens.
Enfin, l'AGS - CGEA de [Localité 4] a déposé des conclusions à l'ouverture des débats qu'elle a développées à l'audience tendant à :
Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes le 17 juin 2013 en toutes ses dispositions ;
Débouter Monsieur [V] de l'intégralité de ses demandes ;
Très subsidiairement,
Si par extraordinaire, la cour devait prononcer la nullité de la rupture conventionnelle:
Statuer ce que de droit s'agissant de la demande d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et de dommages-intérêts pour licenciement abusif dans la limite des sommes réclamées et après déduction des sommes déjà perçues par Monsieur [V] ;
Débouter Monsieur [V] de sa demande de dommages-intérêts au titre du travail dissimulé;
En tout état de cause,
Dire et juger hors garantie de l'AGS les demandes de dommages-intérêts et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6 et L. 3253-15 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19 , L. 3253-20, L. 3253-21 et L. 3253-15 du code du travail et L. 3253-17 du code du travail ;
Dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;
Mettre les concluants hors dépens.
SUR CE,
La Cour,
Attendu que par jugement du 22 novembre 2012, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la résolution du plan de redressement dont faisait l'objet la société ACLINA et a déclaré cette dernière en liquidation judiciaire, désignant Maître [P] en qualité de liquidateur judiciaire ;
que l'intervention du CENTRE DE GESTION ET D'ÉTUDES AGS (CGEA) de [Localité 4] est dès lors fondée;
que les dispositions du présent arrêt lui sont en conséquence opposables ;
Attendu que Monsieur [V] a expressément sollicité la rupture conventionnelle de son contrat de travail à durée indéterminée par lettre datée du 14 mai 2010 remise en main propre à Monsieur [O], gérant de la société ACLINA qui l'employait depuis le 21 mai 2008 ;
que la société ACLINA lui ayant fait part de son accord pour mettre en 'uvre une telle procédure sur le fondement de l'article L. 1237-11 du code du travail, les parties se sont rapprochées et ont toutes deux signé le 7 juin 2010 une convention de rupture du contrat de travail de Monsieur [V] ;
que son homologation a été refusée le 8 juillet 2010 par la DIRECCTE Rhône Alpes au seul motif que la date de la convention de rupture était antérieure à l'expiration du délai légal de 15 jours dont disposait l'administration pour mener son instruction ;
que Monsieur [V] et la société ACLINA ont en conséquence régularisé une nouvelle convention de rupture qui a été homologuée cette fois le 27 août 2010 avec effet au 25 août 2010 ;
qu'il en ressort que la rupture conventionnelle n'a pas été imposée par l'une ou l'autre des parties, mais que celles-ci y avaient au contraire consenti librement et sans contrainte ;
Attendu que pour prononcer la nullité de cette dernière convention de rupture ainsi intervenue, le conseil de prud'hommes a considéré que le consentement de Monsieur [V] lors de sa signature avait été vicié au motif qu'il ignorait que son employeur avait omis de souscrire une déclaration préalable à son embauche et ne l'avait finalement, selon ses dires, déclaré à l'URSSAF qu'en 2012, alors « que selon le principe constant la rupture conventionnelle ne peut pas intervenir en cas de litige entre les parties » ;
Mais attendu que non seulement ce principe est inexistant, mais qu'en outre les parties n'avaient aucun différend entre elles lors de la signature de la convention ;
que ce n'est que postérieurement à la signature de la convention de rupture que l'URSSAF du Rhône a informé Monsieur [V] par lettre du 23 septembre 2010 de l'absence de déclaration le concernant souscrite par son employeur auprès des organismes sociaux;
que cette information n'est pas en soi constitutive d'un vice du consentement susceptible d'entacher de nullité la rupture conventionnelle préalablement intervenue entre les parties ;
que Monsieur [V] ne démontre en outre en aucune façon que son consentement aurait été vicié par le seul fait qu'il ignorait son absence de déclaration par son employeur aux organismes sociaux ;
Attendu dans ces conditions que sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la rupture conventionnelle de son contrat de travail n'est pas fondée ;
qu'il importe des lors d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes et de débouter Monsieur [V] de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, et de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;
Attendu que Monsieur [V] n'établit pas davantage que son employeur se serait abstenu intentionnellement et frauduleusement de le déclarer aux organismes de protection sociale, de sorte que l'infraction de dissimulation d'emploi salarié n'est pas caractérisée en l'espèce ;
qu'il doit des lors être débouté de sa demande en paiement de l'indemnité pour travail dissimulé qu'il sollicite sur le fondement des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail ;
Attendu par ailleurs que l'appelant, qui ne voit pas aboutir ses prétentions devant la cour, ne peut obtenir l'indemnité qu'il sollicite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et supporte la charge des entiers dépens ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement par arrêt rendu public par mise à disposition des parties, après que ces dernières aient été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi,
DÉCLARE recevable l'intervention CENTRE DE GESTION ET D'ÉTUDES AGS (CGEA) DE [Localité 4] ;
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 juin 2013 par le conseil de prud'hommes de Lyon ;
et statuant à nouveau ,
DÉBOUTE Monsieur [L] [V] de l'ensemble de ses demandes ;
LE CONDAMNE aux entiers dépens de première instance et d'appel .
Le Greffier, Le Président,
Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS