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04/12/2014 | FRANCE | N°13/00641

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 04 décembre 2014, 13/00641


R.G : 13/00641









Décision du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse

Au fond du 19 novembre 2012



RG : 11/01111





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 04 Décembre 2014





APPELANTE :



GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE LA FENONIERE (GFA)

[Adresse 2]

[Localité 1]



représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocat au barreau de

LYON

assistée de la SCP REFFAY ET ASSOCIES, avocat au barreau de L'AIN







INTIMEES :



Groupement FONCIER AGRICOLE ETANG DE FENONIERE

[Adresse 3]

[Localité 3]



représentée par Maître Charles-Henri BARRIQUAND, avoc...

R.G : 13/00641

Décision du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse

Au fond du 19 novembre 2012

RG : 11/01111

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 04 Décembre 2014

APPELANTE :

GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE LA FENONIERE (GFA)

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE, avocat au barreau de LYON

assistée de la SCP REFFAY ET ASSOCIES, avocat au barreau de L'AIN

INTIMEES :

Groupement FONCIER AGRICOLE ETANG DE FENONIERE

[Adresse 3]

[Localité 3]

représentée par Maître Charles-Henri BARRIQUAND, avocat au barreau de LYON

assisté de la SELARL ROUSSET-BERT TERESZKO LAVIROTTE, avocat au barreau de LYON

SA D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL RHONE ALPES (SAFER) précédemment dénommée SAFER ALPES CEVENNES

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Maître Charles-Henri BARRIQUAND, avocat au barreau de LYON

assistée de Maître Carole GUYARD DE SEYSSEL, avocat au barreau de L'AIN, substituée par Maître Catherine TERESZKO, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 18 Mars 2014

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 18 Septembre 2014

Date de mise à disposition : 20 novembre 2014, prorogée au 04 Décembre 2014, les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier aliéna du code de procédure civile

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Michel GAGET, président

- François MARTIN, conseiller

- Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Philippe SEMERIVA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La société d'aménagement foncier et d'établissement rural Rhône Alpes (la SAFER) et le Groupement foncier agricole Etang de la Fenonière (le GFA de l'Etang) ont assigné le Groupement foncier agricole de la Fenonière (le GFA de la Fenonière) aux fins de voir juger qu'est parfaite la vente résultant d'une promesse acceptée portant sur un étang, des bois et une petite construction lui appartenant.

La SAFER agissait ainsi en tant que bénéficiaire initiale de cette promesse, et le GFA de l'Etang, comme étant aux droits de M. [H], substitué à la SAFER selon la faculté stipulée au contrat.

*

Après avoir écarté les moyens de défense pris notamment de la nullité de la promesse, du défaut de qualité et de capacité de ses signataires, les consorts [I], et de sa dénonciation, le jugement entrepris statue en ces termes :

- prononce au profit du GFA de l'Etang de la Fenonière le transfert de propriété des parcelles sises sur la commune de [Localité 3] (Ain) cadastrées section A n° [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] pour une superficie de 38 ha 01 a 11 ca,

- ordonne la publication à la Conservation des hypothèques des conditions et des modalités de publicité foncière, l'identité du vendeur, la description et de l'origine de propriété des différentes parcelles ainsi que le prix et les modalités de paiement tels que décrits dans le dispositif de l'assignation qui sera annexée au présent jugement et auquel il est expressément renvoyé,

- dit que la remise du prix par le notaire et du règlement des frais se feront dès que le jugement constatant et prononçant le transfert aura acquis force de chose jugée et aura été publié au Bureau des hypothèques,

- condamne le GFA de la Fenonière à payer au GFA de l'Etang la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts et 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne le GFA de la Fenonière à supporter la majoration des droits d'enregistrement survenue entre la date du procès-verbal de carence du 29 octobre 2010 et la date à laquelle la décision à intervenir aura acquis force de chose jugée,

- condamne le GFA de la Fenonière à payer à la SAFER la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamne le GFA de la Fenonière aux entiers dépens, avec droit de recouvrement direct.

*

Au soutien de son appel, le GFA de la Fenonière fait valoir :

- que les biens faisant l'objet de la promesse lui appartiennent, et non pas aux consorts [I], vendeurs, et qu'aucun procès-verbal d'assemblée générale du GFA n'a autorisé la vente des biens par les gérants,

- que cette promesse est imprécise et incomplète,

- que M. [K] [I], porteur de parts dans le GFA, ne l'a pas signé en même temps que les autres,

- qu'[Z] [I], décédé depuis, et Mme [E] [I], signataires, n'étaient pas, en raison de leur état de santé, en mesure de contracter valablement,

- qu'il ne pouvait être question de céder les biens à M. [H], de sorte que la substitution opérée en sa faveur, combinée à l'absence de publicité du projet de cession, procède de manoeuvres dolosives,

- que la demande adverse en paiement de dommages et intérêts n'est pas justifiée,

- qu'il a, au contraire, subi un dommage, dans la mesure où il avait donné des autorisations de chasse à des tiers.

Au visa des articles 1108, 1109, 1116, 1852 et suivants et 1861 du code civil, le GFA de la Fenonière demande en conséquence de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions,

- faire sommation à la SAFER d'avoir à justifier de l'appel public de candidature qu'elle évoque, de l'examen collégial des candidatures recueillies par le comité technique départemental, de l'avis émis par le comité technique départemental, de l'approbation de son projet d'attribution par les commissaires du gouvernement, et de ce qu'elle a donc attribué la propriété au GFA de l'Etang en respectant les dispositions du code rural et de la pêche maritime,

- faire sommation au GFA de l'Etang de produire ses statuts,

- dire et juger que l'acte de promesse de vente n'est pas valable et que les consorts [I] n'avaient pas la capacité d'engager le GFA de la Fenonière sans respect des dispositions légales et statutaires,

- dire et juger que nulle sommation de passer la vente ni demande judiciaire de décision valant vente ne peut être prononcée contre le GFA de la Fenonière sur la base d'une promesse de vente signée, sans assemblée générale du GFA, mais simplement par des particuliers porteurs de parts, se présentant indûment dans un acte préétabli par la SAFER Rhône Alpes comme propriétaires, de façon erronée et sans vérification aucune de ladite SAFER,

- dire et juger que la promesse unilatérale de vente est nulle comme affectée de vices de forme (discordance des actes) et de fond (absence de capacité des promettants, erreur sur la personne et même dol) et que nulle demande en vente forcée ne peut dans ce contexte être présentée contre le seul propriétaire, le GFA de la Fenonière,

- débouter la SAFER ET le GFA de l'Etang de l'ensemble de leurs prétentions,

- condamner in solidum la SAFER et le GFA de l'Etang à verser au GFA de la Fenonière une somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- en cas d'infirmation du jugement, condamner in solidum la SAFER et le GFA de l'Etang à lui verser une somme mensuelle de 500 euros à titre d'indemnité d'occupation liée à la prise de possession forcée de la propriété, pour la période du 15 novembre 2013 jusqu'à libération des lieux, outre sa remise en état le cas échéant conformément au procès-verbal de constat établi le 15 novembre 2013,

- dire et juger que cette indemnisation est due à titre de dommages et intérêts à concurrence de 500 euros par mois à compter du 15 novembre 2013 jusqu'à libération des lieux, sur la base de l'article 1382 du code civil,

- si, d'aventure, la cour d'appel confirmait la décision déférée en ce qu'elle a ordonné le transfert de propriété,

- dire et juger que les frais de l'acte notarié resteront à la charge du GFA de l'Etang, acquéreur, nonobstant surcoût, et que celui-ci, ainsi que son notaire, devront régler au GFA de la Fenonière le montant du prix de vente consigné, augmenté des intérêts produits depuis son dépôt à la Caisse des dépôts et consignations jusqu'à sa déconsignation, outre intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir jusqu'à parfait paiement,

- condamner in solidum la SAFER et le GFA de l'Etang aux entiers dépens, en ce inclus les frais liés à l'établissement du procès-verbal de constat d'huissier du 15 novembre 2013, dont distraction au profit de la SCP Baufumé - Sourbé, avocats, sur son affirmation de droit.

*

Le GFA de l'Etang et la SAFER concluent en commun.

Ils exposent, d'abord, qu'à la suite de la prise de possession des lieux, en exécution provisoire du jugement, des dégradations ont été perpétrées pour s'y opposer illégalement.

Puis :

- que l'accord du vendeur a été matérialisé dans la promesse de vente consentie par le GFA, représenté par ses associé et gérants, conformément à l'article 1854 du code civil,

- que le prétendu préjudice lié aux accords avec des tiers n'est justifié, ni en son principe, ni en son montant,

- que M. [K] [I] n'était pas associé,

- qu'en tout cas, la prétendue cession de parts dont il se prévaut ne lui est pas opposable,

- qu'[Z] [I], comme Mme [E] [I], étaient en mesure de contracter, notamment puisqu'ils n'étaient, ni l'un ni l'autre, placés sous protection, ni n'étaient en état d'insanité au moment de l'acte,

- que le GFA ne saurait prétendre à une erreur sur la personne de l'acquéreur,

- qu'aucun dol n'est démontré,

- que le GFA de l'Etang subit un préjudice très important en raison de l'opposition à la finalisation de la vente.

Par le dispositif de leurs conclusions, annexé au présent arrêt, le GFA de l'Etang et la SAFER demandent, en substance, de dire que la vente est parfaite, de confirmer le jugement, d'en tirer les conséquences, de condamner le GFA de la Fenonière au paiement du prix des accessoires de la vente, de dire ses demandes irrecevables et de condamner le GFA de la Fenonière à leur payer des dommages et intérêts ainsi que des indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

*

Par conclusions du 26 mars 2014, le GFA de la Fenonière a demandé le rejet de pièces communiquées par les parties adverses le jour de l'ordonnance de clôture.

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

' L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 mars 2014.

Les pièces communiquées par le GFA de la Fenonière ce même jour ne l'ont pas été en temps utile.

Elles sont écartées des débats.

' Les parties ont adressé diverses notes en délibéré :

- le 2 octobre 2014, la SAFER et le GFA de l'Etang demandent la réouverture des débats, au vu de la production de l'acte complet de donation-partage du 12 septembre 2009 et des statuts modifiés dont il s'avère que M. [K] [I] était bien associé du GFA de la Fenonière au moment de la signature de la promesse de vente du 2 avril 2010,

- le 3 octobre, le GFA de la Fenonière s'y oppose, cette question ayant été suffisamment débattue à son sens,

- le 6 octobre, les parties adverses font valoir que, jusqu'à l'audience d'appel, il n'avait jamais été justifié de la qualité d'associé de M. [K] [I],

- le 24 octobre, un courrier d'avocats indiquant être en possession d'une attestation de la SAFER indiquant à quelle date est intervenue la signature de la promesse de vente par M. [K] [I].

' Les conclusions du GFA de l'Etang indiquent que 'M. [K] [I] n'était pas là le 26 avril 2010' (date de la promesse), 'qu'il ne pouvait donc pas signer ce document ce jour-là' ; mais, également, 'qu'il l'a donc signé à une autre date' et que 'M. [K] [I] a ratifié postérieurement l'acte qui lui était présenté'.

La promesse de vente a donc été signée par l'ensemble de ceux qui sont, ou se disent, porteurs de parts de ce GFA, y compris M. [K] [I], peu important le flou résultant de la seule mention d'un acte de donation-partage dans la déclaration de mise à jour des statuts, ou l'absence de publicité de cette qualité nouvelle d'associé.

Quoi qu'il en soit, en effet, sur ces deux points, la décision de vendre l'actif visé dans la promesse résulte du consentement de tous les associés, exprimé dans cet acte ; elle est valablement prise au regard des règles de fonctionnement de la société, en l'occurrence celle que pose l'article 1854 du code civil.

La promesse engage le GFA de l'Etang et le débat poursuivi par les notes en délibéré est sans objet, de sorte qu'il n'y a pas lieu à réouverture des débats.

' Le GFA de la Fenonière fait encore valoir que les époux [I] étaient dans un état de grande faiblesse, tant psychologique que physique, qui les a empêchés de connaître la portée réelle de leurs engagements, les a incités à croire au caractère impératif de l'intervention de la SAFER et les a rendus vulnérables dans le cadre de toute transaction, de sorte qu'au regard de leur état de santé, leur engagement à l'acte ne peut être considéré comme valable.

S'agissant d'[Z] [I] :

La nullité d'un acte pour insanité d'esprit ne peut être prononcée que si les conditions légales en sont réunies.

Ces exigences sont donc dans le débat, du fait même de cette demande, quoique les parties ne les évoquent pas.

Or, [Z] [I] est décédé le [Date décès 1] 2013, sans avoir personnellement introduit, de son vivant, une action en nullité ; par ailleurs, la promesse de vente ne porte pas en elle-même la preuve d'un trouble mental, puisque elle résulte de la signature d'un acte pré-rédigé dans des termes habituels ; il n'est pas prétendu, enfin, qu'aucune des autres conditions posées par l'article 414-2 du code civil serait remplie.

A supposer toutefois, par interprétation de sa volonté, que le défunt ait exercé cette action en nullité, puisque le GFA dont il était associé a pris, avant son décès, des conclusions en ce sens, il ressort des pièces essentielles produites à ce propos :

- selon le docteur [D] (certificat du 29 juin 2011), qui le suivait régulièrement depuis le mois de mars 2009, qu'il a une maladie de Parkinson très évoluée empêchant la marche, associée à un hypotension orthostatique sévère empêchant la station debout et gênant même la station assise prolongée, et qu'il y a toujours chez lui un élément de ralentissement intellectuel et parfois une nette confusion, si bien que, depuis au moins début 2010, il est difficilement à même de prendre avec toutes les garanties nécessaires des décisions d'ordre financier,

- selon le docteur [F] (certificat du 22 octobre 2010), que la santé du patient n'est pas compatible avec la décision d'une promesse de vente datant du 26 avril 2010 en raison d'une maladie de Parkinson extrêmement invalidante, évoluant depuis mars 2008, que l'intéressé est actuellement très handicapé par cette maladie, qui est à l'origine de troubles moteurs majeurs, ainsi que de troubles mnésiques avec lenteur d'idéation [erreur, peut-être sur la lecture de ce dernier mot, quasi illisible, mais cela ne change pas la compréhension du document] rendant difficile la décision d'un acte de vente, le traitement pouvant également être à l'origine d'un état de confusion mentale,

- selon des attestations diverses - peu important qu'elles ne soient pas formellement conformes aux exigences du code de procédure civile dès lors que leur caractère probant découle notamment de leur convergence avec les documents médicaux - qu'[Z] [I] n'avait pas toute sa tête en avril 2010.

Ces éléments précis et convergents montrent que le signataire de la promesse n'était pas toujours en pleine possession de ses moyens intellectuels à cette époque ; en effet, s'ils sont pour la plupart postérieurs à l'acte, ils décrivent un processus de dégradation si avancé, quelques mois après, qu'ils fondent suffisamment la conviction qu'il existait déjà à cette date.

Mais il n'en ressort pas la preuve de l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte lui-même.

En effet, ces troubles mnésiques, cette confusion mentale, impliquent seulement l'existence d'un terrain fragile, mais non celle d'une insanité permanente.

D'ailleurs, [Z] [I] a été signataire de l'acte de dénonciation de la promesse, dont la nullité n'est pas prétendue.

Son insanité mentale ne peut être tenue pour générale, ni établie lors de la signature de l'acte contesté.

Pour toutes ces raisons, le moyen de nullité pris de cette insanité d'esprit ne peut être accueilli.

S'agissant de Mme [E] [I], le docteur [J] atteste, le 14 juin 2011 qu'elle présentait une uvéite bilatérale diagnostiquée en 2004 et que, grâce aux traitements, la vision de l''il droit est remontée à 8/10ème Parinaud 3 faible et 2/10ème avec une correction optique Parinaud 14 au niveau de l''il gauche.

Cette grave inflammation oculaire n'implique pas que Mme [I] ne pouvait prendre la mesure de la promesse qu'elle a consentie, d'ailleurs plus d'un an avant ce certificat.

Il est soutenu qu'en avril 2010, elle ne voyait pratiquement plus ; mais cela ne résulte pas, évidemment et sans autre démonstration, du certificat du docteur [J]

Il est encore prétendu que Mme [I] ne s'est pas fait lire les petites lignes de l'acte contesté ; mais il n'est pas de "petites lignes" ; l'acte est dans une unique police de caractères, sauf diverses mentions en capitales, encadrées ou soulignées.

Il n'est donc aucune raison de retenir que Mme [I] n'a pas eu accès visuel à chacun de ses termes.

La promesse émane ainsi de quatre personnes, dont aucune n'était frappée d'un empêchement démontré.

Les moyens de nullité présentés sur ces divers points ne sont pas fondés.

Selon le GFA de la Fenonière, il était, pour les promettants, hors de question de vendre à leur voisin, M. [H].

Ce serait à ces derniers de le dire, et non au GFA, personne morale pour laquelle la personne de l'acquéreur est indifférente, sauf situation particulière qui n'est pas prétendue, tenant par exemple à une situation de concurrence directe, car la considération de cette personne n'est pas de l'essence du contrat de vente, caractérisé par l'accord sur la chose et sur le prix.

La qualité de ce GFA à présenter un tel moyen n'étant pas contestée, et le débat étant accepté sur le fond, il n'y a cependant pas lieu de relever d'office quelque fin de non-recevoir à ce propos.

En l'espèce, M. [H], puis le GFA de l'Etang ont été substitués à la SAFER, selon le faculté ainsi stipulée dans la promesse : 'en application de l'article L.141-1-II du code rural, la bénéficiaire se réserve la possibilité de se substituer un ou plusieurs attributaires pour réaliser la cession'.

Cette clause est immédiatement compréhensible, claire, simple et inconditionnée, et il en résulte qu'aucune considération particulière relative à la personne du substitué n'a été introduite dans le champ contractuel.

Les promettants n'ayant ainsi exprimé aucune exigence à ce propos, il est prétendu que cela caractérise, précisément, le dol, car, selon les conclusions d'appel :

- le droit de propriété est consacré constitutionnellement et on ne peut forcer la main des propriétaires à céder,

- le dol est évident puisque l'objectif était de céder à une famille à laquelle tout un chacun savait dans la région que les promettants n'entendaient en aucune façon lui vendre leur étang, ce qui est le c'ur du débat,

- la promesse de vente a été présentée aux promettants comme devant passer par la SAFER, à seule raison de sa possibilité de préemption en application des articles L. 143-2 et suivants du code rural,

- il est évident que ces derniers n'auraient pas recouru aux services d'une agence immobilière, si c'était pour vendre à leur voisin.

Mais, d'une part, que tout un chacun sache cela dans la région n'est pas établi par la production de quelques attestations d'intimes, de proches, ou de personnes particulièrement informées ; en toute hypothèse, cela n'implique pas que la SAFER le savait.

Il n'est pas plus de preuve, d'autre part, que les auteurs de la promesse ont été persuadés qu'ils étaient obligés de procéder par cession à la SAFER ; d'ailleurs, cet argument, tel qu'il est formulé, est inintelligible : s'il existe un droit de préemption, c'est qu'il existe un projet de vente, or, il n'est pas prétendu que le candidat préféré des auteurs de la promesse aurait présenté une offre d'achat.

Enfin, désirer vendre n'implique pas d'accepter de vendre à n'importe quel prix, de sorte que le recours aux services d'une agence immobilière afin de rechercher d'autres offres n'implique pas que le vendeur refuse, par principe, de vendre au voisin, si ce dernier fait la meilleure offre.

Il est encore prétendu que la SAFER doit justifier de la régularité de la procédure de substitution.

Celle-ci fait valoir qu'elle n'a pas à discuter, devant la juridiction judiciaire, de l'opportunité de sa décision.

C'est exact, mais il incombe à la juridiction judiciaire de vérifier sa régularité.

Or, la SAFER refuse de communiquer les pièces propres à permettre cette vérification.

Cette situation justifierait de faire droit à la demande que forme le GFA de la Fenonière, si la communication des pièces de la procédure d'attribution présentait un intérêt pour le débat.

Mais, tel n'est pas le cas : la procédure prévue aux articles R.141-11 et suivants du code rural tend à assurer la transparence de la prise de décision d'attribuer le bien à un exploitant, plutôt qu'à un autre, de sorte que seul le candidat évincé dispose d'une action à ce propos.

A supposer même le contraire, le détournement de pouvoir dénoncé par le GFA de la Fenonière supposerait, dans sa thèse, que le projet frauduleux a préexisté à la promesse, recueillie dans le seul but de parvenir à la décision recherchée dès le début.

Or, aucune de ces circonstances, qui prennent leur source dans la connaissance que la SAFER aurait eue de l'opposition des auteurs de la promesse - voire de celle du GFA de la Fenonière - à une vente à M. [H], n'est établie.

L'accusation de fraude ne reposant ainsi sur aucun fait démontré, propre à jeter sur l'opération un soupçon méritant d'approfondir la question, l'examen du détail de la procédure d'attribution est sans intérêt.

Ce moyen de nullité doit être écarté.

' Les autres contestations élevées par le GFA de la Fenonière sont sans effet : que la promesse soit imprécise ou incomplète, notamment quant à la liste des matériels cédés, n'emporte pas de conséquences, dès lors qu'elle a été formalisée en ses éléments essentiels concernant l'étang ; ces détails relèvent de son exécution.

La promesse de vente est valide et engage le GFA de la Fenonière.

' Certes, il l'a dénoncée le 6 juillet 2010.

Mais la levée de l'option était intervenue avant expiration du délai pendant lequel cette promesse ne pouvait être révoquée.

Cette dénonciation est donc inopérante.

' Enfin, le GFA de la Fenonière n'a pas été victime d'un dommage né de l'exécution provisoire du jugement, qui est confirmé.

Sa demande de dommages et intérêts est sans fondement.

Le GFA de l'Etang forme diverses demandes en paiement de dommages et intérêts.

Il s'agit tout d'abord, du report de l'activité piscicole et l'activité de chasse.

Le GFA produit diverses factures portant sur la fourniture de poissons, sans en expliciter le sens, alors qu'il en résulte que l'empoissonnement de l'étang a bien eu lieu.

La demande présentée à ce propos n'est pas fondée, à défaut de preuve d'une intention de se livrer à l'activité piscicole et au vu de cette contradiction entre les pièces communiquées et la demande qu'elles sont censées soutenir.

Il est exact, en revanche, que la pêche et la chasse n'ont pas été possibles durant le cour de la procédure d'appel, dans la mesure où il ressort des pièces et constats que diverses personnes s'y sont opposées.

Il n'est pas prouvé, cependant, que ces actes soient le fait du GFA de la Fenonière.

Enfin, les réclamations sont formée pour des sommes forfaitaires, qui ne reposent sur aucun justificatif, hors les facture précitées, qui ne sont pas pertinentes, et se fondent sur des bases qui sont alléguées sans autre éléments, telles que 12 500 euros par année de chasse et 5 000 euros par année de pêche.

Ces assertions sont dépourvues de toute preuve.

Si donc, le jugement étant assorti de l'exécution provisoire, le retard mis à la délivrance du bien vendu a causé un préjudice, l'évaluation qui en a été faite par le tribunal est adéquate.

Par ailleurs, la majoration des droits d'enregistrement procède de la résistance indue du vendeur et doit être supportée par ce dernier, à titre indemnitaire.

' Il en résulte que le jugement doit être confirmé.

Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

- Dit n'y voir lieu à réouverture des débats,

- Ecarte les pièces communiquées par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Rhône Alpes et le Groupement foncier agricole Etang de la Fenonière sous les numéros 39 à 42,

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, y compris son annexe portant sur les conditions de réalisation de la promesse,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Condamne le Groupement foncier agricole de la Fenonière aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 13/00641
Date de la décision : 04/12/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°13/00641 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-04;13.00641 ?
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