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24/10/2014 | FRANCE | N°14/01187

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 24 octobre 2014, 14/01187


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 14/01187





[HL]



C/

ASSOCIAITON [2]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 05 Février 2014

RG : F 13/00496











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2014













APPELANTE :



[LU] [HL]

née le [Date naissance 1] 1961 Ã

  [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 2]



comparante en personne, assistée de Me Jean-pierre COCHET de la SELARL SEDOS CONTENTIEUX, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE







INTIMÉE :



ASSOCIATION [2]

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par Me Pascal GARCIA de la ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 14/01187

[HL]

C/

ASSOCIAITON [2]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 05 Février 2014

RG : F 13/00496

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2014

APPELANTE :

[LU] [HL]

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparante en personne, assistée de Me Jean-pierre COCHET de la SELARL SEDOS CONTENTIEUX, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

ASSOCIATION [2]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Pascal GARCIA de la SELARL CAPSTAN RHONE ALPES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

PARTIES CONVOQUÉES LE : 24 février 2014

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 19 Septembre 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Christine DEVALETTE, Président de chambre

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Chantal THEUREY-PARISOT, Conseiller

Assistés pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 24 Octobre 2014, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Christine DEVALETTE, Président de chambre, et par Christine SENTIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 9 mai 2007, [LU] [HL] a été embauchée par l'association MECS et IME [2] en qualité de directrice de la pouponnière ; le 13 avril 2013, après avoir été mise à pied, elle a été licenciée pour faute grave, l'employeur lui reprochant une gestion désastreuse du personnel, des manquements dans la gestion administrative et budgétaire et l'absence d'information du conseil d'administration sur les difficultés existantes.

[LU] [HL] a contesté son licenciement devant le conseil des prud'hommes de SAINT-ETIENNE ; elle a réclamé le salaire correspondant à la période de mise à pied, la prime et l'indemnité de sujétion spéciale, les astreintes, l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause et pour licenciement vexatoire et une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 5 février 2014, le conseil des prud'hommes a débouté [LU] [HL] de l'ensemble des ses demandes, a débouté l'employeur de sa demande fondée sur les frais irrépétibles et a laissé les dépens de l'instance à la charge de [LU] [HL].

Le jugement a été notifié le 10 février 2014 à [LU] [HL] qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 12 février 2014.

Par conclusions visées au greffe le 19 septembre 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [LU] [HL] :

- critique l'enquête réalisée par l'employeur qu'elle qualifie de partiale,

- relève qu'aucune observation ne lui avait faite avant le licenciement, qu'elle n'a prononcé aucune sanction au cours des deux années ayant précédé le licenciement, que le service de la médecine du travail n'a pas signalé de difficulté, que les arrêts maladie se sont accrus par la survenue de congés maternité, que les départs de salariés sont dénués de lien avec sa gestion et que le conseil d'administration a adopté les comptes le 24 avril 2012 et a approuvé le budget prévisionnel le 25 octobre 2012,

- met en avant les témoignages louant son travail,

- soutient que le licenciement est privé de cause et réclame la somme de 2.697 euros au titre des salaires correspondant à la mise à pied, outre 269,70 euros de congés payés afférents, la somme de 33.342 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 3.342 euros de congés payés afférents, la somme de 7.500 euros à titre d'indemnité de licenciement, la somme de 90.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause et la somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

- indique qu'elle n'a pas perçu en 2012 la prime de sujétion spéciale qu'elle avait touché les années précédentes et réclame la somme de 2.201,50 euros, outre 220,15 euros de congés payés afférents,

- reproche à l'employeur de ne pas lui avoir rémunéré ses astreintes de semaine et réclame dans la limite de la prescription quinquennale la somme de 44.153,68 euros, outre 4.415,37 euros de congés payés afférents,

- sollicite la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 19 septembre 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, l'association MECS et IME [2] :

- fait valoir que les doléances des salariés, les alertes des institutions représentatives du personnel et l'enquête qu'elle a diligentée de manière impartiale démontrent que la directrice mettait en souffrance le personnel par son management abusif,

- estime que la salariée a également commis une faute en n'alertant pas le conseil d'administration sur les difficultés rencontrées avec le personnel,

- reproche enfin à la salariée une mauvaise gestion administrative et budgétaire caractérisée par l'absence d'établissement de document unique d'évaluation des risques, un registre du personnel non tenu à jour, une gestion des emplois du temps et des congés empreinte de favoritisme, un recours abusif à l'intérim,

- prétend que la gravité des fautes légitime le licenciement,

- conteste toutes circonstances vexatoires ayant entouré le licenciement,

- note le caractère exorbitant des réclamations,

- impute à la salariée qui n'a pas transmis les éléments au cabinet comptable l'absence de règlement de la prime de sujétion en 2012 et ajoute que la salariée a touché cette prime de 2008 à mars 2010 alors qu'elle n'y avait pas droit,

- affirme que la salariée a été remplie de ses droits en matière d'astreinte et qu'elle ne prouve pas avoir assuré des astreintes,

- souhaite le rejet des prétentions de la salariée et la confirmation du jugement entrepris,

- sollicite la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prime de sujétion spéciale :

Le contrat de travail stipulait : 'Le Conseil d'Administration a décidé de vous allouer une prime de sujétion spéciale de 50 points en raison des travaux en cours actuellement dans l'établissement ou ceux de l'annexe appelée l'[1] et pour la durée de ces travaux' ; l'association MECS et IME [2] précise dans ses écritures que les travaux de restructuration des locaux se sont achevés le 30 octobre 2012 ; cette prime est donc due pour les dix premiers mois de l'année 2012 ; or, l'association MECS et IME [2] admet dans ses écritures qu'elle n'a pas versé à [LU] [HL] la prime de sujétion spéciale en 2012.

Le montant de la prime qui s'élève à la somme totale de 2.201,50 euros n'est pas discuté.

En conséquence, l'association MECS et IME [2] doit être condamnée à payer à [LU] [HL] la somme de 2.201,50 euros au titre de la prime de sujétion spéciale de l'année 2012, outre 220,15 euros de congés payés afférents.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

Sur les astreintes :

Le contrat de travail stipulait : 'En raison des obligations d'astreintes à domicile auxquelles vous êtes tenues, l'indemnité d'astreintes à domicile sera de 15 jours par mois soit 38 h 50'.

Les feuilles de paie attestent du règlement chaque mois de 38 h 50 correspondant aux heures de permanence à domicile.

En conséquence, [LU] [HL] doit être déboutée de sa demande en paiement des astreintes de semaine à domicile.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

Sur le licenciement :

L'employeur qui se prévaut d'une faute grave du salarié doit prouver l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement et doit démontrer que ces faits constituent une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; dans la mesure où l'employeur a procédé à un licenciement pour faute disciplinaire, il appartient au juge d'apprécier, d'une part, si la faute est caractérisée, et, d'autre part, si elle est suffisante pour motiver un licenciement.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige énonce les griefs suivants :

* une gestion désastreuse du personnel portant atteinte à la santé physique et mentale des salariés,

* des manquements dans la gestion administrative et budgétaire,

* le fait de ne pas avoir alerté le conseil d'administration sur les difficultés rencontrées.

S'agissant du grief tiré de la gestion désastreuse du personnel :

Lors des réunions du conseil conventionnel du 17 janvier 2012, du 7 février 2012, du 13 mars 2012, du 23 avril 2012, du 21 mai 2012, du 18 juin 2012, du 23 juillet 2012, du 4 septembre 2012, du 3 octobre 2012,du 13 novembre 2012 et du 2 janvier 2013 auxquelles participaient la directrice, le chef de service et deux représentants syndicaux, la question de la souffrance au travail du personnel n'a jamais été évoquée.

C'est le 10 janvier 2013 que les délégués du personnel ont envoyé un courrier électronique au président de l'association pour attirer son attention sur le climat régnant au sein de [2] ; suite à une réunion des administrateurs et de la directrice tenue le 6 février 2013, il a été décidé un accompagnement du service de la médecine du travail, une évaluation du risque psycho-social par utilisation du questionnaire [UD] et la réalisation d'un audit externe par un cabinet spécialisé.

Le 19 février 2013, le syndicat CFDT a fait valoir son droit d'alerte en raison de l'état de stress des salariés liés à un climat menaçant et a fait valoir son droit d'alerte du comité d'hygiène et de sécurité des conditions de travail ; le 6 mars 2013, l'employeur a décidé de procéder à une enquête ; il a dispensé d'activité [LU] [HL] du 11 mars au 7 avril 2013.

Le questionnaire [UD] comporte 26 questions fermées à destination du personnel afin d'évaluer les risques psycho-sociaux. L'employeur a posé 11 questions qu'il a sélectionnées ; 51 salariés ont rempli le questionnaire ; 56,8 % ont répondu qu'il leur était demandé une quantité de travail excessive, 49 % ont répondu qu'ils recevaient des ordres contradictoires de la part d'autres personnes, 62,7 % ont répondu que leurs tâches étaient souvent interrompues avant d'être achevées nécessitant de les reprendre plus tard, 70,5 % ont répondu que leur supérieur ne se sentait pas concerné par le bien-être de ses subordonnés, 64,7 % ont répondu que leur supérieur ne prêtait pas attention à ce qu'ils disaient, 60,8 % ont répondu que leur supérieur ne les aidaient pas pour mener leur tâche à bien et 66,7 % ont répondu que leur supérieur ne réussissait pas facilement à faire collaborer ses subordonnés.

Le questionnaire ne permet pas de désigner le supérieur ; ce terme de supérieur ne renvoyait pas obligatoirement à la directrice puisqu'il existait également un chef de service ; or, lors de la réunion référents du 22 janvier 2013 il est indiqué : 'Pour la MECS les DP disent que depuis l'arrivée du nouveau chef de service le climat s'est apaisé'.

[LU] [HL] produit des attestations de salariés ou de collaborateurs extérieurs à l'institution qui lui sont favorables :

Spécialement [JS] [WF] qui a travaillé en qualité de psychologue à mi-temps du 9 mai 2011 au 31 mars 2013 atteste : 'que ce soit dans ses interventions ou dans ses décisions, je n'ai pas été témoin d'attitude nuisible, abusive ou de dysfonctionnement grave de la part de madame [HL] à l'égard du personnel', qu'elle a été amenée à travailler avec monsieur [VN], chef de service de décembre 2012 à fin janvier 2013 et a pu constater l'inadéquation de certaines de ses prises de position avec le projet de l'établissement et certaines directives institutionnelles ; elle témoigne également de ses doutes sur la neutralité de l'enquête.

L'adjointe de [LU] [HL] fournit un témoignage élogieux en faveur de celle-ci et précise qu'elle était présente lors des entretiens d'évaluation annuelle des salariés et que les salariés pouvaient s'exprimer et que leur parole était prise en compte.

Une éducatrice spécialisée, représentante du personnel au conseil de la vie sociale, témoigne qu'elle n'a jamais eu de difficulté avec [LU] [HL] avec qui elle a toujours travaillé dans d'excellentes conditions avec une relation de confiance mutuelle, qui a toujours été à son écoute et qu'elle n'a jamais été témoin de situations, de faits ou de paroles injustes vis à vis des salariés et qui souligne que l'enquête n'a pas été impartiale et a été menée à charge de [LU] [HL].

L'employeur produit les comptes-rendus d'entretien des salariés :

- [ZN] [PU], éducatrice spécialisée, a déclaré qu'elle n'était pas reconnue par la directrice, que la directrice remettait en question tout ce qu'elle proposait, que la directrice ne lui faisait pas confiance, que la directrice lui a tenu des propos disqualifiant à l'égard de certains salariés et que la directrice répondait à ses demandes avec beaucoup d'agressivité,

- [B] [AS], monitrice éducatrice, a déclaré qu'elle n'était pas du tout écoutée par la directrice, que les prestations médicales n'étaient pas effectuées de manière sérieuse, que la directrice tenait des propos déplacés, divulguait des informations sur la vie intime d'autres salariés, colportait des ragots, se mettait en colère de façon injustifiée contre des salariés, lui a dit un jour '[B] vous êtes privée de vacances au mois de février' sans explications et l'a mis en situation humiliante devant un chef de service,

- [HC] [UM], maîtresse de maison, a déclaré que la directrice imposait fréquemment des changement d'horaires, a dit en réunion 'le souffre-douleur, il faut qu'il tourne'et a fait des remarques qui l'ont fait pleurer,

- [GT] [C], AMP, a déclaré que la directrice est toute puissante et agressive,

- [LU] [D], monitrice éducatrice, a déclaré qu'elle n'est pas sereine lorsqu'elle est en entretien avec la directrice qui peut soit faire un reproche soit faire un compliment et qu'à un moment donné elle a été la cible de la directrice,

- [QD] [P], moniteur éducateur, a déclaré que pendant quelques temps il a 'été bien vu' par la directrice et qu'il apportait les demandes de collègues en sachant qu'elles seraient acceptées, que cela a été le cas pour la réparation du frein à main d'un véhicule, que la directrice ne lui faisait pas des reproches directement mais par l'intermédiaire de collègues,

- [B] [TL], monitrice éducatrice, a déclaré que depuis 3 ans ses congés d'été lui étaient refusés au mois d'août et que la directrice lui a déclaré qu'elle pouvait travailler pendant 10 ans et que ses congés lui seraient refusés,

- [E] [Z], éducateur spécialisé, a déclaré que dès l'entretien d'embauche des mises en garde lui ont été faites sur d'autres salariés, que la directrice a une attitude déstabilisante et adopte vite des mécanismes de défense et que les relations sont tendues,

- [V] [U], agent d'entretien, a déclaré que les relations avec la directrice sont correctes car il fait ce qu'elle dit et s'adapte,

- [L] [G], comptable, a déclaré qu'à son retour d'arrêt maladie la directrice n'a pas accepté qu'elle se limite à son travail, donne souvent des consignes contradictoires et ne répond pas à ses questions la renvoyant au président,

- [ZW] [QM], auxiliaire puéricultrice, a déclaré que les relations avec la directrice sont très compliquées, qu'à une demande de changement de poste de nuit en jour pour s'organiser, la directrice a répondu 'ça fait partie de la libération de la femme, débrouillez-vous',

- [I] [FS], monitrice éducatrice, a déclaré que la directrice lui a dénigré une personne lors de l'entretien d'embauche et tient un discours qui n'est pas en cohérence avec les besoins des enfants et qu'il existe un manque de communication,

- [YV] [UV], éducatrice spécialisée, a déclaré qu'elle n'avait pas de problème avec la directrice mais n'arrivait pas à lui parler éducatif car ce n'est pas sa priorité,

- [H] [W], moniteur éducateur, a déclaré qu'il n'avait pas de problème avec la directrice mais qu'elle tient un double discours et que la validation ou non des congés se fait sans explication,

- [BR] [MM], monitrice éducatrice, a déclaré qu'elle entretient des relations privilégiées avec les cadres et que les emplois du temps ont toujours posé problème,

- [DJ] [VW], maîtresse de maison, a déclaré que la directrice ne fait pas confiance, qu'il faut toujours passer par elle, qu'elle lui a fait des remontrances sur son travail, qu'elle ne prend pas en compte ses demandes de congés sans s'expliquer,

- [GK] [Q], éducatrice spécialisée, a déclaré que des tentatives d'échanges ont été faites avec la directrice, qu'elle donne l'impression d'entendre ce qui lui est dit mais que deux mois après, aucune décision n'est prise, qu'il faut toujours argumenter,

- [BN] [VE], moniteur éducateur, a déclaré qu'au départ ses relations avec la directrice étaient trop bonnes, que lorsqu'il a été en désaccord sur certains points il a senti qu'il décevait et les relations se sont tendues et qu'elle a dénigré des salariés de son équipe,

- [TC] [PC], maîtresse de maison, a déclaré qu'il n'y avait pas de communication avec la directrice qui a le plus souvent une façon de parler agressive,

- [LC] [PL], ancienne veilleuse de nuit, a déclaré que la directrice ne répondait pas à ses questions,

- [I] [A], veilleuse de nuit, a déclaré qu'elle évite de rencontrer la directrice car elle ne sent pas à l'aise, que la directrice lui a fait 'des remarques désobligeantes du style si cela ne vous va pas je vous repasse de jour',

- [O] [YM], éducatrice spécialisée, a déclaré qu'elle pouvait s'opposer à la directrice y compris en présence de collègues,

- [OK] [GB], auxiliaire puéricultrice, a déclaré que la directrice a eu des paroles blessantes la traitant de mauvaise professionnelle et l'a réprimandée vertement en présence des enfants et des collègues de travail et qu'elle a vécu l'entretien qui a suivi comme un règlement de comptes,

- [CI] [T], AMP, a déclaré qu'elle avait des relations polies avec la directrice et que la directrice lui a dit à deux reprises dont une en présence de l'équipe :'si vous n'êtes pas compétente vous pouvez partir',

- [JS] [WF], psychologue, a déclaré qu'elle avait des relations plutôt bonnes avec la direction,

- [XU] [S], chef de service, a déclaré que les relations avec la direction fonctionnent bien, que ce n'est pas toujours facile mais qu'elle a la possibilité de s'exprimer,

- [FA] [KK], psychologue, a déclaré qu'il avait de bonnes relations avec l'équipe de direction,

- [YD] [F], éducateur spécialisé, a déclaré que ses relations avec la direction était plutôt bonnes, qu'il faisait ce qu'il voulait, qu'il était entendu, qu'on lui faisait confiance,

- [KT] [ET], agent d'entretien, a déclaré qu'elle n'avait pas de problème avec la directrice, que lorsqu'elle a essayé d'arranger une veilleuse de nuit la directrice lui a dit 'il n'en n'est pas question, elle fera ses nuits',

- [KB] [TU], veilleuse de nuit, a déclaré que la directrice faisait du favoritisme, refusait de la recevoir, les montait les unes contre les autres, critiquait le personnel et n'hésitait pas à faire des réflexions désagréables,

- [LL] [X], éducatrice spécialisée, a déclaré qu'elle a alerté à plusieurs reprises la directrice pour des problèmes de sécurité des enfants et que cela n'a pas été suivi d'effet (enfants debout sur le rebord de la fenêtre, portillon donnant sur la rue ouvert),

- [B] [AI], ergothérapeute, a déclaré que les relations avec la direction étaient tout à fait correctes,

- [LU] [DS], monitrice éducatrice, a déclaré qu'elle n'avait pas trop de soucis avec la directrice,

- [R] [QV], moniteur éducateur, a déclaré que les relations étaient plutôt bonnes avec la directrice avec parfois des difficultés à être entendu sur certains points,

- [L] [RE], infirmière, a déclaré qu'elle n'avait aucun problème avec la direction,

- [OT] [M], AMP, a déclaré que ses relations avec la direction étaient aléatoires,

- trois veilleuses de nuit et un agent de service ont déclaré qu'ils n'avaient pas de contact avec la directrice,

- [OK] [J], médecin, a déclaré qu'elle n'avait pas de problème avec la direction,

- [K] [ZE], adjointe de direction, a déclaré que les relations étaient saines.

Deux des salariés entendus ont précisé qu'ils venaient travailler avec 'la peur au ventre'.

L'employeur verse des attestations de salariés qui avaient été entendus et dont les déclarations ont été précédemment résumées.

L'employeur produit également :

- l'attestation du directeur par intérim du 23 avril 2013 au 4 juillet 2013 qui témoigne d'une désorganisation et qui signale que le décompte des heures de travail instauré par madame [HL] a abouti à des situations paradoxales puisque la moitié des éducateurs effectuait des heures supplémentaires et que l'autre moitié n'effectuait pas la totalité du temps de travail,

- l'attestation de trois administrateurs qui ont procédé aux auditions des salariés et qui déclarent avoir entendu la souffrance au travail de certains salariés,

- la lettre de démission de [MD] [VN] qui occupait le poste de chef de service et qui explique sa démission par les difficultés rencontrées avec la directrice,

- les avis d'inaptitude émis par le médecin du travail en février et mars 2013 concernant [Y] [N], monitrice éducatrice, et le protocole transactionnel conclu entre elle et l'association sur l'indemnisation de son licenciement pour inaptitude dont il ressort que la salariée avait saisi le conseil des prud'hommes en annulation de son licenciement, estimant que son inaptitude trouvait sa cause dans le harcèlement moral infligé par [LU] [HL],

- la lettre du 27 janvier 2011 envoyée par une salariée partant à la retraite à [LU] [HL] dans laquelle elle dénonce la maltraitance qu'elle lui infligeait, refuse le cadeau de départ et souligne qu'en 41 ans de carrière elle n'a jamais dû affronter et subir une telle souffrance au travail,

- un tableau montrant que le nombre de jours d'arrêt maladie a été de 595 en 2011 et de 661 en 2012.

S'agissant du grief tiré des manquements dans la gestion administrative et budgétaire :

La lettre de licenciement ne donne aucune précision ; dans ses conclusions l'employeur fait état de l'absence d'établissement de document unique d'évaluation des risques, d'un registre du personnel non tenu à jour, d'une gestion des emplois du temps et des congés empreinte de favoritisme et d'un recours abusif à l'intérim.

Le 21 février 2011, les services de l'inspection du travail ont écrit à la directrice que lors de leur visite de l'établissement le 6 janvier 2011 il avait été constaté l'absence de document unique d'évaluation des risques. Lors de la réunion du conseil conventionnel du 3 octobre 2012 à laquelle participaient la directrice et deux représentants syndicaux il a été précisé que le document unique de gestion des risques a été élaboré en octobre 2011 et sera de nouveau examiné lors du prochain conseil d'établissement pour un ajustement lié aux risques psycho-sociaux ; lors de la réunion du conseil conventionnel du 13 novembre 2012 à laquelle participaient la directrice et deux représentants syndicaux, les délégués du personnel ont demandé que l'analyse du document unique de gestion des risques soit reporté au mois suivant afin de pouvoir l'examiner de manière approfondie.

Le conseil d'administration a approuvé les comptes le 24 avril 2012 et le budget le 25 octobre 2012.

Le directeur par intérim du 23 avril 2013 au 4 juillet 2013 témoigne que le décompte des heures de travail instauré par madame [HL] a abouti à des situations paradoxales puisque la moitié des éducateurs effectuait des heures supplémentaires et que l'autre moitié n'effectuait pas son temps de travail.

S'agissant du grief tiré de l'absence d'information du conseil d'administration sur les difficultés rencontrées :

L'employeur verse l'attestation :

- d'une administratrice qui témoigne qu'elle avait été alertée à plusieurs reprises par les délégués du personnel dénonçant les agissements autoritaires de la directrice et que celle-ci lui affirmait en retour que tout allait bien et qu'il s'agissait seulement de revendications syndicales abusives,

- d'un administrateur qui témoigne que la directrice disait que tout allait bien,

- d'une administratrice qui témoigne que la directrice n'a jamais informé le bureau des problèmes rencontrés.

Les très nombreux documents produits par l'employeur établissent la réalité des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, et, spécialement celle d'une gestion fautive du personnel, puisque marquée par le refus d'explication et de communication et génératrice d'une souffrance, et du défaut d'information des administrateurs.

La nature et la multiplicité des fautes rendent la sanction du licenciement proportionnée.

L'employeur a agi dans un délai restreint puisqu'il a lancé une enquête dès qu'il a été alerté par les institutions représentatives du personnel.

Il pèse sur l'employeur l'obligation de veiller à la sécurité de ses salariés ; dès lors, nonobstant l'ancienneté de [LU] [HL], les fautes commises par celle-ci dans la gestion du personnel rendait impossible son maintien dans l'entreprise.

En conséquence, le licenciement repose sur une faute grave et [LU] [HL] doit être déboutée de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

Sur la mise à pied :

D'une part, les feuilles de paie de mars et avril 2013 ne font pas apparaître de retenue sur salaire au titre de la mise à pied, et, d'autre part, les fautes légitimaient la mise à pied qui n'avait donc pas à être rémunérée.

En conséquence, [LU] [HL] doit être déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre de la mise à pied.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de condamner l'association MECS et IME [2] qui succombe sur la prime de sujétion à verser à [LU] [HL] en cause d'appel la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'association MECS et IME [2] qui succombe sur la prime de sujétion doit supporter les dépens de première instance et d'appel et le jugement entrepris doit être infirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [LU] [HL] de sa demande en paiement des astreintes de semaine à domicile, a retenu que le licenciement repose sur une faute grave, a débouté [LU] [HL] de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause et de rappel de salaire au titre de la mise à pied et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles,

Infirmant pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne l'association MECS et IME [2] à payer à [LU] [HL] la somme de 2.201,50 euros au titre de la prime de sujétion spéciale de l'année 2012, outre 220,15 euros de congés payés afférents,

Condamne l'association MECS et IME [2] aux dépens de première instance,

Ajoutant,

Condamne l'association MECS et IME [2] à verser à [LU] [HL] en cause d'appel la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'association MECS et IME [2] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Christine SENTIS Christine DEVALETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 14/01187
Date de la décision : 24/10/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°14/01187 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-10-24;14.01187 ?
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