AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 13/07709
[D]
C/
SA KAESER COMPRESSEURS
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 05 Septembre 2013
RG : F 12/00591
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2014
APPELANTE :
[Z] [D]
née le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 1]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
comparante en personne, assistée de Me Malik NEKAA, avocat au barreau de LYON substitué par Me Matthieu ALLARD, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
SA KAESER COMPRESSEURS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Agnès DERDERIAN, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 27 Mai 2014
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Didier JOLY, Président
Mireille SEMERIVA, Conseiller
Agnès THAUNAT, Conseiller
Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 09 Septembre 2014, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
[Z] [D] est entrée au service de la société KAESER COMPRESSEURS pour y effectuer une mission de travail temporaire en qualité de comptable ressources humaines (échelon 1, coefficient 205) du 15 septembre au 17 octobre 2008.
Elle a ensuite été engagée par la S.A. KAESER COMPRESSEURS en qualité de comptable et ressources humaines (niveau V, échelon 1, coefficient 305) suivant contrat écrit à durée indéterminée du 15 décembre 2008 à effet du 1er janvier 2009, soumis à la convention collective nationale des mensuels des industries métallurgiques du Rhône.
Sa rémunération mensuelle brute a été fixée à 2 400 euros pour 35 heures hebdomadaires de travail.
Elle avait notamment les attributions suivantes :
comptabilité, trésorerie, règlement fournisseurs et divers,
état des rapprochements bancaires, plan de trésorerie,
gestion administrative des ressources humaines (embauches, contrats, diverses absences, départs, litiges...),
établissement et gestion des paies, gestion des notes de frais,
établissement des déclarations et charges sociales mensuelles, trimestrielles et annuelles,
tous travaux administratifs liés au fonctionnement du service.
A compter du 1er janvier 2011, la rémunération mensuelle brute de base de [Z] [D] est passée à 2 435 euros.
[Z] [D] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 26 octobre au 2 décembre 2011 à la suite du décès de son père.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 janvier 2012, la société a adressé à [Z] [D] un rappel à l'ordre dans les termes suivants :
Vous avez quitté votre poste, ce jour vers 9h30, en indiquant à votre responsable hiérarchique, [K] [Q] « je ne me sens pas bien ». Il vous a alors demandé d'établir une fiche de mouvement, comme tout salarié. Vous avez refusé, et avez traversé le bureau devant vos collègues en indiquant : « vous demanderez à [G]... ». Votre comportement n'est pas acceptable et dénote d'un manque de respect des procédures, et de votre hiérarchie.
Mr [Q] vous a également demandé si vous aviez effectué les déclarations de charges sociales URSSAF pour le mois de décembre. Sachant que vous disposez des éléments transmis par ADP depuis le 23/12/2011, vous avez répondu par la négative.
Votre attitude démontre du peu d'intérêt et de motivation constaté eu égard à votre travail, depuis votre retour le 5 décembre 2011.
Nous pourrons en discuter très sereinement à votre retour, que nous espérons le plus tôt possible, car, comme vous le savez, le mois de janvier est important dans le domaine social. Si vous deviez vous absentez vous mettriez donc en difficultés le service, avec toutes les déclarations annuelles à effectuer avant le 31/01/2012, et la préparation du bilan de votre responsable qui assurera l'intérim.
Nous restons dans l'attente d'un éventuel arrêt, comme indiqué selon vos dires, ou de votre retour pour justifier de votre absence.
Le 3 janvier 2012, [Z] [D] a envoyé à la S.A. KAESER COMPRESSEURS un avis d'arrêt de travail pour maladie non professionnelle couvrant la période du 3 au 15 janvier 2012. L'employeur a reçu ce certificat médical le 4 janvier.
Par lettre recommandée du 4 janvier 2012 avec accusé de réception du 5 janvier, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement fixé le 19 janvier suivant et mise à pied à titre conservatoire. Elle ne s'est pas présentée à l'entretien.
Le 6 janvier 2012, [Z] [D] a envoyé à l'employeur un avis d'arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle établi le 3 janvier et couvrant la période du 3 au 15 janvier 2012.
Le même jour, elle a déclaré un accident du travail survenu dans son bureau le 3 janvier.
Par courrier du 10 janvier 2012, [Z] [D] a fait part à la société de son sentiment quant à la politique d'éviction qu'elle croyait se profiler à son égard et sur la discrimination dont elle était victime dans l'octroi des primes et des augmentations :
A ce jour, je suis donc en arrêt de travail du fait de mon état de santé qui est, je le répète, directement lié aux pressions incessantes que je subis depuis mon absence liée au décès de mon père, et qui viennent s'ajouter à la discrimination et aux accès de colère injustifiés et persistants depuis plusieurs années.
Ces dénigrements et ces différences de traitement que l'on peut qualifier à juste titre de harcèlement ont eu un très fort impact sur mes conditions actuelles de travail qui sont devenues insupportables mais aussi et surtout sur mon état de santé [...]
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 janvier 2012, la société KAESER COMPRESSEURS a notifié à [Z] [D] son licenciement pour faute grave ainsi motivé:
Mardi 3 janvier 2012, vers 9h30, vous avez indiqué à [K] [Q], que vous ne vous sentiez pas bien et que vous alliez consulter votre médecin. Il vous a alors demandé où en était l'établissement des charges sociales URSSAF qui devaient être établies pour le 5 janvier au plus tard, vous lui avez répondu que vous n'aviez pas eu le temps de vous en occuper.
En présence de vos collègues, Mademoiselle [O] [Q] et Monsieur [B], [K] [Q] vous a demandé alors de remplir une fiche de mouvement en vue de votre absence, ce que vous avez refusé de faire, puis vous avez quitté l'entreprise.
[K] [Q] a ensuite accédé à votre poste informatique en vue de corriger deux avenants que vous aviez faits et qui comportaient des erreurs, et en ouvrant le logiciel word, un fichier intitulé « Amallia 2011» est apparu comme étant le plus récent, ce qui l'a interpellé.
En effet, [K] [Q] est l'interlocuteur de la société avec AMALLIA, organisme qui gère le 1% logement et pour lequel il établit entre le 20 et le 31 décembre la déclaration annuelle obligatoire.
Ne se souvenant pas que récemment un salarié avait fait une demande à ce titre, il a ouvert le fichier et a constaté l'existence d'un courrier adressé à AMALLIA le 26 décembre 2011 au sujet d'une demande d'un salarié mais dont le nom n'était pas précisé, et portant votre signature.
Il a contacté le groupe AMALLIA qui lui a transmis par mail le contenu de la demande que vous aviez faite, et qui vous concernait personnellement.
Ainsi le document intitulé « attestation de l'entreprise » que vous avez rempli manuscritement, est daté du 18 novembre 2011 et porte la signature du Président du Directoire : [G] [E].
Or, à cette date vous étiez en arrêt maladie pour la période du 26 octobre au 2 décembre2011.
Habituellement c'est [K] [Q] qui remplit ces documents et non vous, et qui les signe, ce n'est jamais [G] [E].
Il a donc interrogé [G] [E] qui a alors affirmé ne pas être le signataire de ce document et que sa signature avait été imitée.
Vous avez volontairement commis un faux en imitant la signature de Monsieur [G] [E], sur un document établi à votre profit, faits susceptibles de poursuites pénales.
Il s'agit de faits particulièrement graves qui engendrent une perte de confiance irrémédiable.
Ces faits sont d'autant plus graves au regard des fonctions que vous occupez dans l'entreprise puisque vous êtes affectée au service Comptabilité et Ressources Humaines.
Nous vous notifions donc par la présente votre licenciement immédiat pour faute grave sans préavis ni indemnités, qui prendra effet à compter de la date de ce courrier [...]
[Z] [D] a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 10 février 2012 afin de contester son licenciement.
Le 21 mai 2012, les services administratifs de la Caisse primaire d'assurance maladie du Rhône ont informé la S.A. KAESER COMPRESSEURS de ce qu'ils reconnaissaient la caractère professionnel du 'sinistre' survenu à [Z] [D] le 3 janvier 2012.
L'employeur a saisi la Commission de recours amiable.
*
* *
LA COUR,
Statuant sur l'appel interjeté le 2 octobre 2013 par [Z] [D] du jugement rendu le 5 septembre 2013 par le Conseil de prud'hommes de Lyon (section encadrement) qui a :
- dit et jugé que le licenciement de [Z] [D] est fondé sur une faute grave,
- dit et jugé que les allégations de harcèlement moral ne sont pas fondées,
- débouté [Z] [D] de l'intégralité de ses demandes,
- débouté la SA KAESER COMPRESSEURS de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné [Z] [D] aux entiers dépens ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 27 mai 2014 par [Z] [D] qui demande à la Cour de :
-infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Lyon section encadrement en date du 5 septembre 2013 dans toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
- dire et juger que le licenciement n'est pas motivé par une faute grave,
- dire et juger que le licenciement est nul car motivé par des faits de harcèlement,
- dire et juger que [Z] [D] a subi des faits de harcèlement moral.
En conséquence,
A titre principal:
- condamner la SA KAESER COMPRESSEURS à verser à [Z] [D], eu égard à son statut de cadre :
15 000 € au titre du harcèlement moral,
34 240 € au titre de la nullité du licenciement,
17 124 € au titre des circonstances particulièrement vexatoire de la rupture,
2 045.37 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
8 562 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (3 mois),
856.2 € au titre des congés payés sur préavis ,
9 675 € au titre des rappels de salaire, statut cadre,
967.5 € de congés payés afférents,
« jour du patron » 2008: 139,90 euros,
rappel de salaire sur prime 2009 : 700 euros,
rappel de salaire RTT 2009: 1758, 84 euros,
rappel de salaire sur prime 2010: 50 euros,
rappel de salaire RTT 2010: 1958, 6 euros,
rappel de salaire sur prime 2011: 1802.76 euros,
tickets restaurant octobre 2011: 4 x 3,20 = 12,80€, valeur faciale 8€ soit 32€ ;
tickets restaurant décembre 2011: 20 x 3,20 = 64€, valeur faciale 8€ soit 160€ ;
prime de transport décembre 2011: 64€ ;
heures supplémentaires de 05/2011 à 10/2011 (3,35h) : 67,20€ ;
rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 1 559,08 € et 155,9 € de CP afférents,
rappel de salaire sur congés payés supplémentaires : 590,6 euros,
5 000 € de dommages et intérêts pour la perte financière liée à l'absence de possibilité de bénéficier du 1% logement ;
A titre subsidiaire en l'absence de statut cadre :
- condamner la SA KAESER COMPRESSEURS à verser à [Z] [D] :
15 000 € au titre du harcèlement moral,
31 466.8 € au titre de la nullité du licenciement,
15 733.4 € au titre des circonstances particulièrement vexatoire de la rupture,
2097.8 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
7 866.7 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (3 mois),
786 € au titre des congés payés sur préavis,
« jour du patron » 2008 : 139,90€ ;
rappel de salaire sur prime 2009 : 700 euros,
rappel de salaire RTT 2009: 1 758, 84 euros,
rappel de salaire sur prime 2010 : 50 euros,
rappel de salaire RTT 2010 : 1 958, 6 euros,
rappel de salaire sur prime 2011: 1802.76 euros,
tickets restaurant octobre 2011: 4 x 3,20 = 12,80 €, valeur faciale 8 € soit 32€,
tickets restaurant décembre 2011: 20 x 3,20 = 64 €, valeur faciale 8 € soit 160€,
prime de transport décembre 2011: 64 €,
heures supplémentaires de 05/2011 à 10/2011 (3,35h) : 67,20€,
rappel de salaire sur mise à pied conservatoire : 1559,08€ et 155,9€ de CP afférents,
5 000 € de dommages et intérêts pour la perte financière liée à l'absence de possibilité de bénéficier du 1% logement,
- condamner la SA KAESER COMPRESSEURS à verser à [Z] [D] 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la SA KAESER COMPRESSEURS aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 27 mai 2014 par la SA KAESER COMPRESSEURS qui demande à la Cour de :
- dire et juger l'appel recevable,
- le dire infondé et injustifié.
En conséquence,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
Et en conséquence,
- déclarer la pièce adverse 11 irrecevable, et en conséquence l'écarter des débats,
- dire et juger que le licenciement est fondé sur une faute grave,
- dire et juger que les allégations de harcèlement moral sont totalement infondées et injustifiés,
- débouter [Z] [D] de sa demande en nullité du licenciement pour harcèlement moral,
- débouter [Z] [D] de l'intégralité de ses demandes et prétentions financières, comme non fondées et injustifiées,
- dire et juger que la moyenne des salaires des douze derniers mois s'élève à la somme de 2.395,67 euros brut,
- dire et juger que [Z] [D] ne saurait prétendre à se voir reconnaître le statut cadre et en conséquence, la débouter de toutes ses demandes financières afférentes,
- débouter [Z] [D] de l'intégralité de ses demandes et prétentions contraires,
Si par extraordiniaire la Cour devait considérer que le licenciement ne repose pas sur une faute grave :
- dire et juger que l'indemnité de licenciement en saurait dépasser 1 916.54 euros,
- dire et juger que l'indemnité compensatrice de préavis ne saurait excéder 7 305 € brut (2.435 € x 3) outre 730,50 € brut au titre des congés payés afférents,
- condamner [Z] [D] à payer à la société KAESER COMPRESSEURS la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la même aux entiers dépens ;
Sur la demande de reconnaissance du statut de cadre et le rappel de salaire correspondant :
Attendu que [Z] [D] fonde sa demande de reconnaissance du statut de cadre sur le fait que la salariée qu'elle prétend avoir remplacé avait été engagée comme cadre, position II, coefficient 100 ; qu'effectivement, la S.A. KAESER COMPRESSEURS avait engagé le 10 novembre 2003 en qualité de responsable du personnel une salariée nommée [C] [H] et l'avait classée à la position II coefficient 100 avec le statut de cadre ; que celle-ci était en charge de :
l'établissement des bulletins de paie,
l'établissement des charges sociales, mensuelles et annuelles,
le suivi des dossiers du personnel, gestion sur SAP,
le suivi, déclarations et relations avec les différents organismes sociaux (TA,FC,...),
la tenue et le suivi du plan de formation,
les mises à jour et veille sociale, juridique,
l'élaboration des contrats de travail, avenants,
la mise à jour des différents tableaux de bord internes,
la mise à jour et le respect des procédures ISO ;
Que [C] [H] a démissionné le 24 juin 2008 et quitté la société le 31 août 2008 ;
Que les attributions de cette salariée étaient beaucoup plus riches que celles de [Z] [D], ce qui s'explique par la décision de la maison mère allemande, en août 2008, d'externaliser la paie dans le cadre d'un contrat conclu avec la société ADP ; qu'en outre, le curriculum vitae de [Z] [D] révèle que celle-ci avait suivi auparavant un parcours professionnel de comptable ; que [C] [H], titulaire d'une maîtrise de psychologie et forte de l'expérience acquise à la société BOFROST, disposait d'atouts que son successeur ne possédait pas en matière de gestion des ressources humaines ; qu'elle pouvait aussi assurer en toute autonomie la gestion informatique et la réalisation de la veille juridique et sociale ; que [Z] [D] a succédé à [C] [H] sans la remplacer, les deux salariées n'occupant pas exactement le même poste, ce qui justifiait une différence de classification et de rémunération ;
Qu'en conséquence, les demandes de [Z] [D] sont mal fondées ;
Sur l'octroi discriminatoire de primes et autres avantages :
Attendu que le débat porte sur des augmentations individuelles de salaire et sur des gratifications qui ont le caractère de libéralité ;
Attendu qu'il résulte des dispositions des articles L 2261-22, L 2271-1 et R 2261-1 du code du travail que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés, pour autant qu'ils sont placés dans une situation identique ; que sous cette réserve, l'employeur est libre, dans l'exercice de son pouvoir de direction de l'entreprise de décider pour chaque salarié des augmentations de rémunération qui ne lui sont pas imposées par les contrats individuels ou collectifs ou par la loi ;
Qu'en l'espèce, le motif illicite qu'aurait retenu la S.A. KAESER COMPRESSEURS pour octroyer à [Z] [D] des augmentations individuelles et des primes d'un montant inférieur à celui de nombre de ses collègues n'est pas précisé par l'appelante ; que la S.A. KAESER COMPRESSEURS communique le compte rendu d'entretien d'évaluation de la salariée pour 2011, dont il ressort que celle-ci devait se ressaisir tant dans son comportement que dans l'attention et la rigueur au travail (exemples : SANI, fichier MUT personnel, suivi des acomptes GONIN, CET fichier à revoir) ; qu'une évolution positive était attendue rapidement ; que la disponibilité de [Z] [D] et sa capacité à travailler en équipe étaient insuffisantes ; qu'en 2010 déjà, la qualité du travail rendu était considérée comme moyenne de même que la capacité de l'intéressée à réagir de manière constructive aux critiques dont son supérieur lui a fait observer qu'elles n'étaient pas forcément négatives ; qu'il en résulte que le niveau de la prestation de travail de l'appelante correspondait à peine aux attentes, ce qui ne justifiait pas un témoignage de satisfaction de l'employeur supérieur à celui que critique la salariée ; que la société ayant justifié la différence de rémunération par des éléments objectifs, le jugement qui a débouté [Z] [D] de ce chef de demande doit être confirmé ;
Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral :
Attendu qu'aux termes des articles L 1152-1 à L 1152-3 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que toute rupture du contrat de travail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit ;
Attendu qu'aux termes de l'article L 1154-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l'application des articles L 1152-1 à L 1152-3, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Qu'en l'espèce, [Z] [D] dit avoir eu à subir pendant trois ans les sautes d'humeur, accès de colère et accusations infondées de [G] [E], président du directoire et de [K] [Q], directeur administratif et financier ; que ces agissements répétés ont été dénoncés par la salariée le 10 janvier 2012 seulement, c'est-à-dire après l'engagement de la procédure de licenciement ; que ce point retient l'attention dans la mesure où depuis plus de deux ans, [Z] [D] utilise l'imputation de harcèlement moral comme un écran la dispensant, croit-elle, de toute explication sur le grief qui est contenu dans la lettre de licenciement et qui sera examiné ci-après ; qu'il est également significatif qu'elle ait déclaré l'accident du travail prétendu le lendemain de la réception de sa convocation en vue d'un entretien préalable à son licenciement et substitué le même jour un avis d'arrêt de travail pour accident du travail à un arrêt pour maladie non professionnelle ; qu'au soutien de ses dires, elle communique seulement une attestation de [P] [T], dactylographiée dans les termes suivants :
Je soussigné, Monsieur [T] [P], demeurant [Adresse 2], ancien salarié de Kaeser Compresseurs de avril 1993 à mars 2009, atteste que Monsieur [E] [G] Président du directoire de Kaeser Compresseurs, a eu pendant toutes ces années de travail des comportements colériques envers les salariés plus insistant selon certaines personnes, qui se sont manifestés par des discriminations notamment en matière de primes et augmentation de salaires et des crises de colère liées à du harcèlement moral ;
Que cette attestation, qui ne cite pas [Z] [D], reprend cependant la thématique développée par celle-ci (discrimination en matière de primes et d'augmentations, harcèlement moral prenant la forme de crises de colère), alors que le témoin et l'appelante se sont trouvés ensemble dans l'entreprise pendant sept mois à peine ; qu'il s'en déduit, le comportement colérique de [G] [E] s'étant manifesté pendant 'toutes ces années' que d'autres salariés, que [P] [T] ne nomme pas, auraient eu à en souffrir ; que la S.A. KAESER COMPRESSEURS communique de nombreuses attestations démontrant qu'il n'en est rien ;
Que [Z] [D] n'a pas établi de faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'elle sera donc déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
Sur le motif du licenciement :
Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6,
L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ;
Qu'il résulte en l'espèce des pièces et des débats qu'à la mi-décembre 2011, [Z] [D] a téléphoné à [S] [R], assistante administration des ventes de l'organisme AMALLIA, pour être conseillée en vue du dépôt d'une demande de logement ; que le 26 décembre 2011, la salariée a transmis à AMALLIA, à l'attention d'[S] [R], un dossier de logement par le 1% patronal contenant notamment :
- une demande de logement social au nom de [Z] [D], datée du 1er novembre 2011,
- une 'attestation de l'entreprise du demandeur' complétée par la bénéficiaire elle-même et portant sous la date du 18 novembre 2011 une signature illisible et le timbre de la S.A. KAESER COMPRESSEURS ;
Que cette signature et celle de [G] [E] sont similaires dans leur allure générale, mais un expert en écriture a relevé cependant de fortes dissemblances entre celle de l'attestation et celle du président du directoire ; qu'il n'entre d'ailleurs pas dans les attributions de ce dernier de signer lui-même un tel document ;
Que [Z] [D] se borne à soutenir qu'un doute subsiste sur l'auteur de la signature sans affirmer que [G] [E] en est l'auteur, sans préciser pour quelle raison elle se serait adressée directement au président du directoire, et à quelle date, plutôt qu'au directeur administratif et financier ; qu'il est certain que le 18 novembre 2011, date portée sur l'attestation, la salariée était en congé de maladie et ne pouvait soumettre le document à un représentant qualifié de la société ; qu'il n'y avait d'ailleurs aucune urgence à obtenir une telle signature puisque [Z] [D] a transmis le dossier à AMALLIA le 26 décembre 2011 seulement, alors qu'elle n'était plus en congé de maladie ; que la Cour considère comme établi que la salariée a contrefait la signature de [G] [E], ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas formellement au fil de ses explications fuyantes ; que la gravité de sa faute tient à la confusion qu'elle a réalisée en sa personne, sans habilitation et à l'insu de la S.A. KAESER COMPRESSEURS, entre la bénéficiaire de la demande de logement, la salariée de la S.A. KAESER COMPRESSEURS chargée de transmettre le dossier à AMALLIA et le représentant de la société signataire de l'attestation de l'entreprise du demandeur ; que cette faute rendait immédiatement impossible la poursuite de l'exécution du contrat de travail ; que le licenciement de [Z] [D] pour faute grave était donc justifié ;
Qu'en conséquence, [Z] [D] doit être déboutée de ses demandes de dommages-intérêts, d'indemnités de rupture, de rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire ;
Qu'au soutien de sa demande de dommages-intérêts liée aux circonstances vexatoires du licenciement, [Z] [D] prétend qu'elle n'a pas été en mesure de s'expliquer sur les faits et que la procédure a été dépourvue de tout caractère contradictoire ; que la salariée ne s'est pas présentée à l'entretien préalable auquel elle avait été convoquée et a démontré tant en première instance que devant la Cour qu'elle ne voulait pas s'expliquer ; que dans ces conditions, sa demande de dommages-intérêts sera rejetée ;
Sur les autres demandes :
Attendu qu'en cause d'appel comme en première instance, [Z] [D] se borne à présenter une liste de demandes sur lesquelles elle n'apporte aucune explication bien que le Conseil de prud'hommes ait déjà relevé sa carence sur ce point ; qu'elle en sera donc déboutée ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant :
Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne [Z] [D] aux dépens d'appel.
Le greffierLe Président
S. MASCRIERD. JOLY