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29/07/2014 | FRANCE | N°13/09384

France | France, Cour d'appel de Lyon, Sécurité sociale, 29 juillet 2014, 13/09384


AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE



COLLÉGIALE



RG : 13/09384





[T]

[T]

[T]

ayants droits de M. [R] [T] décédé le [Date décès 1] 2007



C/

FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante de BAGNOLET

du 15 Septembre 2008

RG : 07-44534-0







COUR D'APPEL DE LYON



Sécurité sociale



ARRÊT DU 29 JUILLET 2014













APPELANTS :



[O] [T],veuve de M; [R] [T] décédé le [Date décès 1] 2007

née le [Date naissance 2] 1955

[Adresse 3]

[Localité 2]



représentée par Me Michel RIVA de la SCP M A MAURICE-M RIVAT ET F VACHERON, à la Cour substituée p...

AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : 13/09384

[T]

[T]

[T]

ayants droits de M. [R] [T] décédé le [Date décès 1] 2007

C/

FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante de BAGNOLET

du 15 Septembre 2008

RG : 07-44534-0

COUR D'APPEL DE LYON

Sécurité sociale

ARRÊT DU 29 JUILLET 2014

APPELANTS :

[O] [T],veuve de M; [R] [T] décédé le [Date décès 1] 2007

née le [Date naissance 2] 1955

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Michel RIVA de la SCP M A MAURICE-M RIVAT ET F VACHERON, à la Cour substituée par Me Raphaëlle CADET, avocat au barreau de LYON

[T] [Q], fille de M. [R] [T] décédé le [Date décès 1] 2007

née le [Date naissance 1] 1980

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Michel RIVA de la SCP M A MAURICE-M RIVAT ET F VACHERON, à la Cour substituée par Me Raphaëlle CADET, avocat au barreau de LYON

[T] [L], fils de M. [R] [T] décédé le [Date décès 1] 2007

né le [Date naissance 3] 1978

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Michel RIVA de la SCP M A MAURICE-M RIVAT ET F VACHERON, à la Cour substituée par Me Raphaëlle CADET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 4]

représenté par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS

PARTIES CONVOQUÉES LE : 09 décembre 2013

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Juin 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Catherine PAOLI, Conseiller

Assistées pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Juillet 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

[R] [T] a souffert d'un cancer broncho-pulmonaire primitif qui a été reconnu par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie comme étant une maladie professionnelle ; le 9 mai 2007, il a saisi le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante d'une demande d'indemnisation ; il est décédé le [Date décès 1] 2007 en cours d'instruction de son dossier ; son épouse, [O] [T], a repris la demande ; le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante lui a fait une offre et a précisé qu'en cas de l'acceptation de l'offre, il engagerait une action en reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur ; [O] [T] a accepté l'offre du Fonds et a perçu les sommes correspondantes ; par lettre du 21 septembre 2010, le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante a informé [O] [T] que l'action en reconnaissance de faute inexcusable était prescrite.

[O] [T], veuve d'[R] [T], [Q] [T] et [L] [T], fille et fils d'[R] [T], ont intenté devant le tribunal administratif de LYON une action en responsabilité contre le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante ; par jugement du 13 mars 2012, le tribunal administratif s'est déclaré incompétent; le 4 avril 2013, la cour administrative d'appel a rendu un arrêt confirmatif, précisant que le litige relevait de la compétence du juge judiciaire ; cet arrêt est définitif.

Par déclaration reçue au greffe le 4 décembre 2013, [O] [T], veuve d'[R] [T], [Q] [T] et [L] [T], fille et fils d'[R] [T], ont saisi la Cour.

Par conclusions visées au greffe le 3 juin 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, les consorts [T] :

- arguent de la recevabilité de leur action devant la présente Cour et soutiennent que leur action en responsabilité n'est pas forclose car la prescription quadriennale est la seule applicable et n'était pas acquise lors de la saisine du tribunal administratif le 9 juin 2011,

- reprochent au Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante son inertie à introduire une action en reconnaissance de faute inexcusable de l'employeur et d'avoir laissé prescrire l'action alors qu'ils lui avaient adressé de multiples relances,

- affirment que le Fonds a l'obligation d'exercer l'action en reconnaissance de faute inexcusable ou à tout le moins devait les informer qu'il n'engagerait pas cette action dans le délai qui leur aurait permis d'agir,

- qualifient l'inaction du Fonds de dysfonctionnement fautif,

- prétendent qu'une telle action aurait prospéré et leur aurait permis d'obtenir une indemnisation complémentaire et qu'ils ont donc subi un préjudice,

- réclament :

* au bénéfice d'[O] [T] la somme de 470.816,92 euros en réparation de la perte de la majoration de la rente, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine du tribunal administratif et capitalisation des intérêts, et la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral,

* au bénéfice de [Q] [T] la somme de 8.000 euros en réparation de son préjudice moral,

* au bénéfice de [L] [T] la somme de 8.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- au subsidiaire, souhaitent la mise en oeuvre d'une expertise pour chiffrer le préjudice financier d'[O] [T] et l'allocation à son profit d'une provision de 10.000 euros à valoir sur son préjudice moral,

- sollicitent la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 3 juin 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante :

- au principal, soulève l'incompétence matérielle de la Cour au profit du tribunal administratif de LYON et, à cet effet, fait valoir qu'il est un établissement public administratif, que la loi des 16-24 août 1790 a posé le principe de la séparation des pouvoirs, que la dérogation apportée à ce principe par la loi du 23 décembre 2000 vise uniquement les offres d'indemnisation qu'il fait à une victime de l'amiante, doit être interprétée strictement et ne peut s'étendre à une action en responsabilité exercée postérieurement à l'acceptation de l'offre d'indemnisation,

- au subsidiaire, oppose l'irrecevabilité de la requête pour être prescrite, et prétend que le délai de saisine de la Cour expirait le 20 juillet 2009,

- à titre plus subsidiaire, est au rejet des demandes au motif qu'il n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité qui soit en lien direct et certain avec les préjudices allégués et observe qu'il a la faculté et non l'obligation d'agir en reconnaissance de faute inexcusable, que les consorts [T] ont été intégralement indemnisés et qu'il n'est pas certain que leur action en reconnaissance de faute inexcusable aurait connu une issue favorable,

- à titre infiniment subsidiaire, demande que le montant des dommages et intérêts soit ramené à de plus justes proportions et qualifie le préjudice allégué de perte de chance.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence :

Le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante est un établissement public administratif.

Il a été institué par la loi n 2000-1257 de financement de la Sécurité Sociale pour 2001 du 23 décembre 2000 ; l'article 53-V de cette loi dispose : 'Le demandeur ne dispose du droit d'action en justice contre le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante que si sa demande d'indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée...ou s'il n'a pas accepté l'offre qui lui a été faite. Cette action est intentée devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle se trouve le domicile du demandeur' ; ainsi, le législateur a, dans un même texte, d'une part, créé le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante, et, d'autre part, défini la procédure applicable concernant les demandes d'indemnisation présentées contre le Fonds ; le législateur a déféré à la seule Cour d'Appel de l'ordre judiciaire la connaissance du contentieux pouvant naître entre une victime de l'amiante ou ses ayants-droit et le Fonds à l'occasion de la réparation du préjudice lié à l'exposition à l'amiante.

Les consorts [T] intentent à l'encontre du Fonds une action en responsabilité pour n'avoir pas exercé l'action en reconnaissance de faute inexcusable contre l'employeur de leur auteur et les avoir privés de l'indemnisation résultant d'une telle faute.

[O] [T] réclame l'indemnisation des préjudices directement causés par l'exposition de son défunt mari à l'amiante ; les demandes de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'absence d'action en reconnaissance de faute inexcusable présentées par les consorts [T] sont connexes ; la finalité de l'action des consorts [T] est d'obtenir un complément de l'indemnisation du préjudice résultant de l'exposition à l'amiante de leur auteur ; l'action s'inscrit donc dans la loi précitée.

La loi n 2000-1257 de financement de la Sécurité Sociale pour 2001 du 23 décembre 2000 s'applique à la cause ; en effet, l'action rentre dans son cadre et aucun principe supérieur n'interdit sa mise en 'uvre.

Le législateur a expressément désigné la Cour d'Appel de l'ordre judiciaire comme juridiction compétente.

Le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante ne demande nullement que la cause soit renvoyée devant le tribunal de grande instance.

Le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante ne discute pas plus la compétence territoriale de la Cour.

En conséquence, la présente Cour doit se déclarer compétente pour connaître de l'action en responsabilité intentée par les consorts [T] contre le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante.

Sur la prescription de l'action

Les textes instaurent une prescription et une forclusion ; la prescription née de la loi porte sur la saisine du Fonds relativement à l'indemnisation des préjudices et la forclusion issue du règlement porte sur la saisine de la juridiction en cas de litige avec le Fonds.

A la date du 21 septembre 2010, la réforme de la durée de la prescription introduite par la loi n 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la Sécurité Sociale pour 2011 ne s'appliquait pas ; aussi, la saisine du Fonds en vue de l'indemnisation des préjudices était soumise à la prescription quadriennale. L'article 25 du décret n 2001-963 du 23 octobre 2001 dispose : 'Le délai pour agir devant la Cour d'Appel est de deux mois. Ce délai court à partir de la notification, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, de l'offre d'indemnisation ou du constat établi par le fonds que les conditions d'indemnisation ne sont pas réunies'.

Le 21 septembre 2010, le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante a avisé [O] [T] qu'il ne pouvait pas agir en reconnaissance de faute inexcusable car l'action était prescrite ; la forclusion de l'action en responsabilité introduite par les consorts [T] contre le Fonds en raison de son inaction fautive a commencé à courir du jour où ils ont été informés que le Fonds n'agirait pas car ladite action était prescrite, et donc à compter du 21 septembre 2010 ; en application de l'article 25 du décret n 2001-963 du 23 octobre 2001, les consorts [T] devaient saisir la Cour dans les deux mois du courrier précité.

L'article 2241 du code civil dispose que la demande en justice même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente interrompt le délai de prescription et le délai de forclusion et en vertu de l'article 2242 du même code, cet effet interruptif se poursuit jusqu'à l'extinction de l'instance ; cependant, les consorts [T] ont saisi le tribunal administratif de LYON le 9 juin 2011, soit après la forclusion de leur action ; la saisine des juridictions administratives n'a pas pu faire renaître le délai d'agir qui était déjà expiré.

En conséquence, l'action intentée par [O] [T], [Q] [T] et [L] [T] doit être déclarée irrecevable pour cause de forclusion.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

[O] [T], [Q] [T] et [L] [T] qui succombent doivent être déboutés de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 31 du décret du 23 octobre 2001, les dépens de l'instance doivent être mis à la charge du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Se déclare compétente pour connaître de l'action en responsabilité intentée par les consorts [T] contre le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante,

Déclare irrecevable l'action intentée par [O] [T], [Q] [T] et [L] [T],

Déboute [O] [T], [Q] [T] et [L] [T] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens de l'instance à la charge du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Malika CHINOUNE Nicole BURKEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 13/09384
Date de la décision : 29/07/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°13/09384 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-07-29;13.09384 ?
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