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27/06/2014 | FRANCE | N°12/07966

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 27 juin 2014, 12/07966


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 12/07966





[M]



C/

SA ASTEN







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 23 Octobre 2012

RG : 11/01365











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 27 JUIN 2014







APPELANT :



[O] [M]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Loca

lité 1]



représenté par Me Pascale REVEL de la SCP REVEL-MAHUSSIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Magali BENOIT, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



S.A.S. ASTEN

[Adresse 2]

[Localité 2]



représentée par Me Christian BROCHARD de la ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 12/07966

[M]

C/

SA ASTEN

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 23 Octobre 2012

RG : 11/01365

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 27 JUIN 2014

APPELANT :

[O] [M]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Pascale REVEL de la SCP REVEL-MAHUSSIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Magali BENOIT, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

S.A.S. ASTEN

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Christian BROCHARD de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUÉES LE : 07 mars 2013

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 17 Avril 2014

Présidée par Marie-Claude REVOL, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Nicole BURKEL, président

- Marie-Claude REVOL, conseiller

- Catherine PAOLI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 27 Juin 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président et par Solène DEJOBERT, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

EXPOSE DU LITIGE

Le 2 janvier 2007, [O] [M] a été embauché par la S.A.S. ASTEN en qualité d'étanchéiste ; le 20 janvier 2009, il a été en arrêt de travail ; à l'issue des visites de reprise du 13 décembre 2010 et du 3 janvier 2011, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude au poste et un avis d'aptitude à un poste sans port de charge lourde ; le 22 février 2011, il a été licencié pour inaptitude.

[O] [M] a contesté son licenciement devant le conseil des prud'hommes de LYON et a réclamé des dommages et intérêts et une indemnité au titre des frais irrépétibles ; en réplique, l'employeur a réclamé le remboursement d'une somme indûment versée et une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 23 octobre 2012, le conseil des prud'hommes a débouté [O] [M] de ses demandes, a débouté l'employeur de ses demandes et a laissé les dépens de l'instance à la charge de [O] [M].

Le jugement a été notifié le 24 octobre 2012 à [O] [M] qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 7 novembre 2012.

Le dossier affecté le 8 novembre 2012 à la chambre sociale section B a été transféré à la chambre sociale section C le 7 mars 2013.

L'affaire fixée à l'audience du 19 septembre 2013 a été renvoyée à la demande des parties et fixée à l'audience du 17 avril 2014.

Par conclusions visées au greffe le 17 avril 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [O] [M] :

- expose qu'il a été victime le 20 janvier 2009 d'un accident du travail et que l'accident du travail et par voie de conséquence son état d'inaptitude trouvent leur origine dans la faute de l'employeur,

- affirme que l'employeur n'a pas informé et consulté valablement les délégués du personnel,

- reproche également à l'employeur d'avoir failli à son obligation de reclassement,

- en déduit que le licenciement est privé de cause et réclame la somme de 55.000 euros nets à titre de dommages et intérêts,

- sollicite la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées au greffe le 17 avril 2014 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.S. ASTEN qui interjette appel incident :

- soutient que, le 20 janvier 2009, [O] [M] a été victime d'une rechute d'un accident du travail dont il avait été victime le 2 octobre 2004 alors qu'il travaillait pour le compte d'un autre employeur et que la suspension du contrat de travail était sans lien avec l'activité salariée,

- conteste que l'inaptitude trouve sa cause dans une faute qu'elle aurait commise,

- souligne qu'elle a réglé à tort des indemnités et réclame le remboursement de la somme de 5.875,08 euros trop versée,

- prétend qu'elle a régulièrement informé et consulté les délégués du personnel et qu'elle a satisfait à son obligation de reclassement,

- estime le licenciement bien fondé et est au rejet des prétentions du salarié,

- sollicite la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation du salarié aux dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement :

Le salarié fournit un certificat médical portant en en-tête 'duplicata' ; il s'agit d'un certificat initial d'accident du travail, mentionnant des lombalgies, daté du 20 janvier 2009 et prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 27 janvier 2009 ; l'employeur verse un certificat médical daté du 20 janvier 2009, prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 27 janvier 2009 et s'intitulant certificat de rechute ; nonobstant cette contradiction, tous les courriers de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du RHONE versés par l'employeur font référence, non à une rechute, mais à un accident du travail survenu le 20 janvier 2009 (courriers du 2 septembre 2010, du 24 novembre 2010 et du 8 avril 2011) ; la notification à l'employeur de la décision de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie relative au taux d'incapacité permanente renvoie également à un accident du travail ; l'employeur ne justifie pas avoir querellé cette qualification retenue par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie devant les instances compétentes ; l'employeur a par ailleurs renseigné une déclaration d'accident du travail le 21 janvier 2009 sans l'assortir de réserves.

Dans ces conditions, l'employeur ne peut soulever utilement que [O] [M] n'a pas été victime d'un accident du travail survenu le 20 janvier 2009.

L'employeur devait donc suivre la procédure protectrice des salariés victimes d'un accident du travail.

Le 13 décembre 2010, le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude au poste et un avis d'aptitude à un poste sans port de charge lourde ; le même jour, [O] [M] s'est vu prescrire un arrêt de travail ; le 3 janvier 2011, le médecin du travail a rendu un avis confirmant celui du 13 décembre 2010 ; le 18 janvier 2011, le médecin du travail a indiqué à l'employeur qu'un poste de conducteur d'engin pouvait être compatible avec l'état de santé de [O] [M].

La lettre de licenciement du 22 février 2011 se réfère à la consultation des délégués du personnel, à l'avis d'inaptitude du médecin du travail et à l'impossibilité de reclassement.

L'article L. 1226-10 du code du travail oblige l'employeur à consulter les délégués du personnel avant de procéder au licenciement d'un salarié déclaré inapte à l'issue des périodes de suspension de son contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle.

L'employeur ne peut suppléer à cette obligation en consultant le comité d'entreprise.

Le 4 février 2011, le comité d'entreprise RHONE-ALPES de la société ASTEN s'est réuni et a donné son accord au licenciement de [O] [M].

Pour qualifier cette réunion de consultation des délégués du personnel, l'employeur verse l'attestation du salarié qui cumule les fonctions de secrétaire du comité d'entreprise et de délégué du personnel ; ce dernier affirme qu'il existe une délégation unique du personnel, qu'en sa qualité de secrétaire du comité d'entreprise il établit les convocations et les comptes-rendus des réunions comité d'entreprise et délégués du personnel, que la convocation est unique pour les deux réunions qui se déroulent successivement, qu'il rédige, transmet et affiche le compte-rendu des réunions et y indique les points abordés durant les deux réunions et que les délégués du personnel avaient lors de la réunion du 4 février 2011 tous les éléments relatifs à la recherche de reclassement, ont pris acte de l'impossibilité de reclasser [O] [M] et ont donné leur accord à son licenciement.

Le procès-verbal du 4 février 2011 s'intitule : 'Compte-rendu du C.E. Rhône-Alpes'.

En première page de ce document il est inscrit :

'1) Ordre du jour :

1/ Approbation du compte rendu de la réunion du 13 janvier 2011

2/ Licenciement de M. [M] [O]

3/ Vêtements de travail

4/ Questions diverses

2) Réunion des délégués du personnel'

A l'article 1 est mentionné l'approbation par les membres du C.E. du compte rendu de la réunion du 13 janvier 2011.

A l'article 4 est rappelé que 'les élections des membres du comité d'établissement auront lieu fin mai 2011'.

L'article 2 est ainsi rédigé : 'Le président du C.E. informe le comité que M. [M] [O] fait l'objet d'une procédure de licenciement faisant suite à son inaptitude. Les démarches administratives ont été faites et la société n'a pas trouvé de poste aux fins de reclassement de l'intéressé. A la vue de ces informations, le comité donne son accord pour le licenciement'.

Sur le procès-verbal est noté que le comité était présidé par [K] [T] lequel a bien signé le procès-verbal en cette qualité ; [K] [T] est le directeur régional de la société ASTEN.

Les énonciations de ce document démontrent que seul le comité d'entreprise présidé par le directeur de la société employeur s'est prononcé sur le licenciement de [O] [M] ; il n'est prévu aucun ordre du jour à la réunion des délégués du personnel et il n'y apparaît pas le compte-rendu de la réunion des délégués du personnel alors que le secrétaire, dans son attestation, déclare qu'il établit un compte-rendu des deux réunions.

Ainsi, l'employeur prouve qu'il a consulté le comité d'entreprise mais non les délégués du personnel.

L'employeur n'a donc pas respecté les exigences de l'article L. 1226-10 du code du travail.

En conséquence, le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

En application de l'article L. 1226-15 du code du travail, [O] [M] à droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire, soit à la somme de 22.240,92 euros ; les éléments de la cause justifient de chiffrer les dommages et intérêts à la somme de 25.000 euros.

En conséquence, la S.A.S. ASTEN doit être condamnée à verser à [O] [M] la somme de 25.000 euros nets devant lui revenir personnellement à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause.

[O] [M] bénéficiait d'une ancienneté supérieure à deux ans et la S.A.S. ASTEN emploie plus de onze personnes ; aussi, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, la S.A.S. ASTEN doit être condamnée d'office à rembourser aux organismes concernés les allocations chômage versées à [O] [M] du jour du licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur la demande en restitution de somme :

Le dernier bulletin de paie et le récapitulatif versé par l'employeur montre que la société ASTEN a réglé à [O] [M] une indemnité compensant un préavis de deux mois et une indemnité de licenciement doublée.

[O] [M] qui avait acquis une ancienneté supérieure à deux ans et dont le licenciement a été jugé dépourvu de cause a droit à une indemnité compensatrice de préavis de deux mois.

Par lettre du 8 avril 2011, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie a informé l'employeur qu'elle n'a pas retenu de lien entre l'inaptitude et l'accident du travail du 20 janvier 2009. Cependant, l'application de l'article L. 1226-10 du code du travail n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du lien de causalité entre l'accident du travail et l'inaptitude ; le salarié a été en arrêt de travail pour cause d'accident du travail et à l'issue des arrêts de travail a été déclaré inapte ; cette continuité entre l'accident du travail, les arrêts de travail et l'inaptitude établit un lien causal entre l'accident et l'inaptitude.

[O] [M] a donc droit à l'indemnité spéciale de licenciement prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail.

En conséquence, la S.A.S. ASTEN doit être déboutée de sa demande en restitution des sommes versées au salarié.

Le jugement entrepris doit être confirmé.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de condamner la S.A.S. ASTEN à verser à [O] [M] en cause d'appel la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La S.A.S. ASTEN qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel et le jugement entrepris doit être infirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la S.A.S. ASTEN de sa demande en restitution des sommes versées au salarié et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles,

Infirmant pour le surplus et statuant à nouveau,

Juge le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

Condamne la S.A.S. ASTEN à verser à [O] [M] la somme de 25.000 euros nets devant lui revenir personnellement à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause,

Condamne d'office la S.A.S. ASTEN à rembourser aux organismes concernés les allocations chômage versées à [O] [M] du jour du licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois d'indemnités,

Invite le greffe à notifier le présent arrêt à POLE EMPLOI,

Condamne la S.A.S. ASTEN aux dépens de première instance,

Ajoutant,

Condamne la S.A.S. ASTEN à verser à [O] [M] en cause d'appel la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.S. ASTEN aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

Solène DEJOBERT Nicole BURKEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 12/07966
Date de la décision : 27/06/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°12/07966 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-06-27;12.07966 ?
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