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22/04/2014 | FRANCE | N°13/01544

France | France, Cour d'appel de Lyon, Sécurité sociale, 22 avril 2014, 13/01544


AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE



COLLÉGIALE



RG : 13/01544





[Z]

[B]



C/

SA SODEXHO

CPAM DU RHÔNE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Lyon

du 12 Février 2013

RG : 20090637







COUR D'APPEL DE LYON



Sécurité sociale



ARRÊT DU 22 AVRIL 2014

















APPELANTS :



[A] [Z] Monsieur [Z] agissant

tant en sa qualité de concubin de Mademoiselle [W] [B], née [LV] ( décédée) qu'en sa qualité d'administrateur légal de leur enfant mineur [O] [Z].

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



comparant en personne, assisté de Me Pascale REVEL de la SCP REV...

AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : 13/01544

[Z]

[B]

C/

SA SODEXHO

CPAM DU RHÔNE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Lyon

du 12 Février 2013

RG : 20090637

COUR D'APPEL DE LYON

Sécurité sociale

ARRÊT DU 22 AVRIL 2014

APPELANTS :

[A] [Z] Monsieur [Z] agissant tant en sa qualité de concubin de Mademoiselle [W] [B], née [LV] ( décédée) qu'en sa qualité d'administrateur légal de leur enfant mineur [O] [Z].

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Pascale REVEL de la SCP REVEL-MAHUSSIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de LYON, substitué par substituée par Me Emilie CONTE JANSEN, avocat au barreau de LYON

[U] [B] Monsieur [U] [B] en sa qualité d'héritier majeur de sa mère (décédée).

né le [Date naissance 2] 1987 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Pascale REVEL de la SCP REVEL-MAHUSSIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de LYON, substitué par substituée par Me Emilie CONTE JANSEN, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

Société SODEXO sur le site de la société RENAULT TRUCKS sise [Adresse 3].

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Brigitte BEAUMONT de la SELARL CABINET BRIGITTE BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS

CPAM DU RHÔNE

Service des affaires juridiques

[Localité 1]

Représentée par Madame [W] [L], munie d'un pouvoir

PARTIES CONVOQUÉES LE : 22 juillet 2013

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Mars 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Catherine PAOLI, Conseiller

Assistées pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Avril 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre et par malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS ET PROCEDURE

Attendu que madame [B], salariée de la société Sodexo depuis le 17 décembre 2001 en qualité de serveuse, a été promue le 10 juin 2003 chef de groupe et affectée au restaurant d'entreprise de Renault Trucks à [Localité 4];

Attendu que madame [B] s'est suicidée le [Date décès 1] 2007 laissant un mot à ses proches « pardonnez-moi je vous aime et du plus assez forte trop de pression au travail, [J] je t'aime veille bien sur [O] et [U] aussi je vous aime [I] et maman une énorme pensée à ma jumelle et à mes parents bisous

Je veux être incinérée et que mes cendres reposent à [Localité 2] sur le caveau de mes parents. Merci de suivre ma volonté» ;

Que le médecin légiste dans son rapport établi le 7 mars 2007 a mentionné « femme de 41 ans décédée de probable noyade au cours d'un suicide avec possible intoxication médicamenteuse et éthylique surajoutée » « la mort pouvant remonter au [Date décès 1] 2007 » ;

Attendu que ce suicide a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par décision de la CPAM du 31juillet 2008 ;

Que la commission de recours amiable, sur recours exercé par Sodexo , par décision du 25 mars 2009, a déclaré la décision de prise en charge opposable à l'employeur ;

Attendu que le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon, par jugement contradictoire 12 février 2013, a :

- dit que le décès de madame [B] a été justement pris en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Lyon au titre de la législation professionnelle

- déclaré cette prise en charge inopposable à la société Sodexho

- dit qu'il n'y a pas en l'espèce de faute inexcusable commise par la société Sodexho

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

Attendu que la cour est régulièrement saisie d'un appel formé par monsieur [A] [Z] en sa qualité de concubin de madame [B] et d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et par monsieur [U] [B], par lettre postée le 25 février 2013 et réceptionnée au greffe le 26 février 2013, appel limité uniquement en ce que le jugement a dit qu'il n'existait pas de faute inexcusable commise par la société Sodexo ;

Que l'affaire a été appelée à l'audience du 17 septembre 2013 et sortie du rôle n'étant pas en état d'être jugée ;

Qu'elle a été appelée à l'audience du 11 mars 2014 ;

Attendu que monsieur [A] [Z] agissant tant en sa qualité de concubin de madame [B] que d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et monsieur [U] [B] demandent à la cour par conclusions écrites, déposées le 11 mars 2014 visées par le greffier le 11 mars 2014 et soutenues oralement, de:

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que madame [B] a été victime d'un accident du travail

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de faute inexcusable relative à l'accident du travail dont a été victime madame [B] le [Date décès 1] 2007 à l'encontre de la société Sodexo

- dire et juger que la société Sodexo a commis une faute inexcusable relative à l'accident du travail dont a été victime madame [B] le [Date décès 1] 2007

- porter à son taux maximum la rente due aux ayants droits de madame [B]

- condamner la société Sodexo aux sommes suivantes:

* 80000 euros en réparation du préjudice moral de madame [W] [B]

* 50000 euros en réparation du préjudice moral de monsieur [J] (sic) [Z]

* 50000 euros en réparation du préjudice moral de monsieur [U] [B]

* 50000 euros en réparation du préjudice moral de monsieur [J] (sic) [Z] pris en la personne de l'administrateur légal de l'enfant [O] [Z]

* 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour monsieur [J] (sic) [Z]

* 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour monsieur [U] [B]

*360106 euros en réparation du préjudice économique de messieurs [J] [Z] et [U] [B]

* 5000 euros en remboursement des frais funéraires pour monsieur [J] (sic) [Z] tant en sa qualité de concubin de madame [B] que d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et monsieur [U] [B]

- prendre acte de ce que la CPAM règlera les sommes allouées au titre de l'indemnisation des préjudices

- dire et juger que les intérêts sur les sommes allouées courent au taux légal jusqu'à parfait paiement

- condamner la société Sodexo aux entiers dépens de l'instance;

Attendu que la société Sodexo demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 11 mars 2014, visées par le greffier le 11 mars 2014 et soutenues oralement, de:

- la recevoir en ses conclusions et l'y disant bien fondée

- confirmer le jugement rendu le 12 février 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon en ce qu'il a rejeté l'action en recherche de faute inexcusable initiée par messieurs [Z] et [B]

- dire et juger qu'elle n'a commis aucune faute inexcusable susceptible d'engager sa responsabilité

En conséquence,

- débouter messieurs [Z] et [B], ainsi que toutes autres parties, de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions

- donner acte à la CPAM de ce qu'elle reconnaît que compte tenu de la décision d'inopposabilité intervenue, elle ne pourra pas récupérer auprès de l'employeur les sommes qui seraient allouées au profit des ayants droit de madame [B]

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il lui a déclaré la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident inopposable

- l'infirmer en ce qu'il a confirmé la décision de la commission de recours amiable qui a estimé justifiée la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle

En conséquence,

- dire et juger que la CPAM ne l'a pas informée dans un délai utile de la mesure d'instruction

En tout état de cause

- dire et juger que la CPAM ne pourra pas récupérer auprès de l'employeur les sommes qui seraient versées au profit de messieurs [Z] et [B]

A titre surabondant sur les réclamations:

- déclarer messieurs [Z] et [B] irrecevables en leur demande de condamnation directe à son égard et, en tout état de cause mal fondés et les débouter de leur demande au titre de leur préjudice économique et des frais funéraires

- réduire à de plus justes proportions la demande au titre de leur préjudice moral propre et du préjudice moral de madame [B]

- débouter messieurs [Z] et [B] et, en tant que de besoin toute autre partie, du surplus de leurs demandes, fins et conclusions ;

Attendu que la Caisse Primaire d'Assurance-Maladie du Rhône demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 11 février 2014, visées par le greffier le 11 mars 2014 et soutenues oralement, de:

- lui donner acte de ce qu'elle n'entend pas formuler d'observation sur l'existence de la faute inexcusable et la fixation des préjudices des demandeurs

- prendre acte de ce qu'elle règlera les sommes allouées aux ayant droits au titre de l'indemnisation des préjudices sans possibilité de récupérer les sommes auprès de l'employeur du fait de la décision d'inopposabilité intervenue dans ce dossier ;

Attendu que les parties se sont accordées à reconnaître que le litige est circonscrit à la seule reconnaissance d'une faute inexcusable susceptible d'avoir été commise par la société Sodexo  ;

Que mention en a été portée sur la note d'audience signée par le président et le greffier ;

Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement;

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que la cour, comme les parties l'ont reconnu, n'est saisie que d'un appel limité portant sur l'imputabilité du suicide survenu le [Date décès 1] 2007 à madame [B] à une faute inexcusable commise par son employeur ;

Attendu que monsieur [A] [Z] agissant tant en sa qualité de concubin de madame [B] que d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et monsieur [U] [B] soutiennent que l'accident du travail dont a été victime madame [B] le [Date décès 1] 2007 est imputable à la faute inexcusable commise par la société Sodexo , laquelle conteste avoir commis une telle faute ;

Qu'ils soutiennent que madame [B] s'est vue imposer d'encadrer lors de la création du restaurant d'entreprise au sein de Renault Trucks au lieu de 9 personnes, une vingtaine sans avoir reçu la moindre formation, de faire face à un manque d'effectif permanent, à un turn over de personnel, à une surcharge de travail, a été victime d'insultes et d'humiliation par son chef de site, monsieur [D], conditions de travail ayant altéré sa santé ;

Qu'ils soulignent que madame [B] a été en arrêt maladie pour dépression du 29 janvier au 19 février 2007, s'est vue prescrire des antidépresseurs et somnifères et n'a pas bénéficié d'une visite de reprise ;

Qu'ils affirment qu'elle s'est suicidée le [Date décès 1] 2007 « ne supportant plus la pression subie sur son lieu professionnel » et dénoncent le climat délétère régnant au sein de Sodexo et l'absence de document d'évaluation des risques ;

Qu'ils déduisent de la teneur du mot laissé par madame [B] le caractère incontestable d'une faute inexcusable commise;

Attendu que l'article L. 4131-4 du code du travail accorde de droit le bénéfice de la faute inexcusable de l'employeur au travailleur qui a été victime d'un accident du travail alors que lui-même ou un représentant du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail avaient signalé à l'employeur le risque qui s'est matérialisé ;

Attendu qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ;

Que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Qu'il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié et il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée alors même que d'autres fautes ont concouru au dommage ;

Que le manquement à l'obligation de sécurité de résultat retenu en cas d'accident du travail ne suffit pas à caractériser une faute inexcusable de l'employeur ni même à la présumer ;

Qu'il appartient aux demandeurs d'établir la preuve d'un comportement fautif de l'employeur en relation de causalité avec le fait accidentel survenu ;

Attendu que les consorts [Z] et [B], à qui incombe la charge de la preuve de la faute inexcusable commise, n'étant pas contesté que les conditions d'application de la faute inexcusable de droit ne sont pas réunies, versent aux débats au soutien de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable commise:

- la décision de la commission de recours amiable du 31 mars 2009

- une attestation de monsieur [E], agent de maîtrise, décrivant madame [B] comme une femme « souriante, accueillante, bienveillante, très énergique généreuse et extravertie, « fière » de la réussite de ses enfants, « de la vie de couple et la famille », retranscrivant les confidences reçues de madame [B] sur ses conditions de travail difficiles imputées à « Ice Man », le gérant sur site et « affirmant [W] souffrait au travail elle en parlait fréquemment. Elle évacuait cette souffrance et clôturait souvent la discussion par ces mots « laisse tomber tout cela n'est que le boulot » ou bien « ce n'est pas très important ce n'est que le boulot ». Je sais aujourd'hui que ces phrases étaient des leitmotiv pour s'en convaincre »

- une attestation de madame [P] qui décrit madame [B] comme « une personne extraordinaire et intelligente », « aimée de beaucoup de monde » et pour qui sa famille, son travail étaient « sa grande passion »

- une attestation de monsieur [H], dessinateur, proche de la famille, présentant madame [B] comme « une personne aimant la vie, sa famille, ses amis, son travail », comme « ayant acquis de l'expérience en restauration » et décrivant son travail « c'était la course les absences ou mouvements de personnel étaient nombreux mais malgré cela elle arrivait à faire son travail », indiquant l'avoir trouvée le 3 février 2007 à l'occasion d'une rencontre « inhabituellement silencieuse, semblait très lasse », avoir pensé qu'elle était très affectée par les problèmes de santé de son beau-père et que celle-ci lui a fait part de ses conditions de travail difficiles tenant au manque de personnel qu'elle imputait à monsieur [D]

- une attestation de madame [WH], qui indique exercer comme profession « congés de maternité », qui précise avoir travaillé avec madame [B] « qui était plus exposée que nous aux agressions verbales de [D] » surnommé « le SS » et qui indique « d'après [W], [D] exigeait d'elle plus de productivité au mépris de l'absentéisme important'et je l'ai souvent entendu dire « je peux plus je dois tout gérer c'est pas mon boulot ». [W] semblait redouter d'être appelée par [D] dans son bureau »

- le procès-verbal d'audition par les services de police le 5 mars 2007 de monsieur [D] qui indique que madame [B] encadrait une vingtaine de personnes, qu'elle « était très proche du personnel et avait pas mal de difficultés à se faire entendre » et « ne supportait plus l'organisation du travail et les contestations qui en découlent », avoir appris le 22 février 2007 par d'autres salariées que madame [B] « n'avait pas le moral », avoir pensé qu'elle « n'avait plus envie de travailler avec nous », elle-même lui ayant dit « qu'elle était fatiguée d'entendre le personnel se plaindre », l'avoir entendue se plaindre de ne pouvoir dormir avant son arrêt de travail, d'être « grosse » et l'avoir vue affectée par la mort de son beau-père

- le procès-verbal d'audition par les services de police le 6 mars 2007 de madame [RC], qui a participé à un week-end de thalasso à La grande Motte du 23 au 25 février 2007 avec des amies dont madame [B] qu'elle décrit comme « très lasse et rabâchait ses problèmes de travail » avant leur départ, et qui indique « ceci s'est effacé dès notre arrivée à La Grande Motte. Elle me semblait dépressive et nous lui avons tenté de lui faire comprendre qu'elle avait beaucoup de chance de connaître [A]. A la fin du séjour elle allait bien et a même parlé de retourner en thalasso avec [A] son moral était revenu au beau » et qui conclut « La seule chose qui m'apparaît maintenant était ses difficultés à son travail » pour expliquer le suicide

- le procès-verbal d'audition par les services de police le 6 mars 2007 de madame [P], qui indique avoir connu madame [B] en septembre 2006 lors de sa mutation sur le site de Renault Truck, l'avoir vue pleurer au travail, notamment quand elle sortait du bureau de monsieur [D], ne l'avoir pas entendue se plaindre, et qui la présente comme un « très bon manager »

- le procès-verbal d'audition par les services de police le 6 mars 2007 de madame [WG], qui se présente comme une personne proche de madame [B] au travail, qui indique que madame [B] a été arrêtée 3 semaines en maladie pour chute de tension et difficultés pour dormir, a repris du 19 au 22, est partie en thalassothérapie du 23 au 25 et l'avoir trouvée « joyeuse » au téléphone et qui précise que le 26 février 2007, à son retour « elle m'a paru détendue'Par contre l'après-midi son moral était redescendu. Elle se plaignait, voulait quitter le boulot, être mutée. Son visage était blême, en fin d'après-midi elle était triste. Le lendemain le mardi son visage était identique »

- le procès-verbal de découverte du cadavre de madame [B] le 7 mars 2007 et du mot d'adieu laissé « pardonnez-moi je vous aime et du plus assez forte trop de pression au travail, [J] je t'aime veille bien sur [O] et [U] aussi je vous aime [I] et maman une énorme pensée à ma jumelle et à mes parents bisous

Je veux être incinérée et que mes cendres reposent à [Localité 2] sur le caveau de mes parents. Merci de suivre ma volonté»

- le procès-verbal d'audition par les services de police le 7 mars 2007 de monsieur [E], ami, interrogé au sujet de la disparition de madame [B] écartant toute fugue amoureuse, tout suicide et indiquant « elle semblait faire l'objet de pression dans son entourage au travail »

- le procès- verbal d'audition de monsieur [Z] [A] par les services de gendarmerie le 12 juillet 2007 décrivant sa compagne comme « angoissée » « rongée » par l'exigence du travail à effectuer malgré l'absence de personnel et se plaignant de difficultés relationnelles avec monsieur [D] qui lui donnait des objectifs et indiquant « avec du recul, la pression qu'elle subissait était bien plus importante que je pouvais l'imaginer »

- les pages 2, 3 et 4 d'un procès verbal de synthèse d'un gardien de la paix retranscrivant les auditions recueilles par lui mais non produites aux débats

- le message reçu le 24 avril 2007 de madame [S] mère d'une salariée de Sodexo décrivant la souffrance au travail de sa fille et le harcèlement subi et précisant qu'elle a démissionné de son emploi en octobre 2007 et le procès-verbal d'huissier de justice du 8 juin 2012 retranscrivant des propos tenus par une dame répondant au prénom d'[F] à monsieur [Z] « C'était ma chef de groupe [W] donc c'est vrai qu'elle en avait marre elle n'en pouvait plus elle m'a dit « [F] je vais me tuer j'en peux plus »

- des articles de journaux parus suite à une marche organisée le 4 avril 2007 pour « dénoncer la souffrance au travail et honorer la mémoire d'[W] [B] » et dans lesquels sont retranscrits des propos prêtés au délégué syndical CGT de Sodexo qui dénonce le changement de politique dans l'entreprise depuis 2005 et « il faut toujours plus de résultats, plus de productivité, plus de rentabilité avec moins de salariés » ou à la s'ur de madame [B] concernant les conditions de travail difficiles, « le harcèlement insidieux de la hiérarchie » et un communiqué de presse du 27 janvier 2010 sur la souffrance au travail chez Sodexo

- le contrat d'embauche de madame [B] par Sodexo le 17 décembre 2001 en qualité de serveuse, l'avenant d'affectation du 13 juin 2003 en qualité de chef de groupe à compter du 10 juin 2003 sur le restaurant Renault Trucks à Saint Priest, l'avenant d'augmentation de salaire du 29 mars 2004

- les bulletins de salaire de madame [B] de mai 2003 et de février 2007 sur lequel elle est positionnée Chef de groupe et où elle est mentionnée en maladie du 1er au 11 février, en absences rémunérées les 12 et 13, en congés payées du 14 au 16 février 2007 et en jour RTT le 23 février 2007

- le certificat médical du docteur [G] médecin généraliste et traitant de madame [B] du 18 juillet 2013 qui indique « je l'ai vu en janvier 2007, très anxieuse et dépressive avec d'importants troubles du sommeil. Elle me disait être très mal depuis plusieurs mois. Pour elle, ses problèmes étaient liés à une situation conflictuelle au travail, fin février 2007, ne voyant pas d'amélioration j'ai adressé madame [B] au docteur (mot illisible) psychiatre » ;

Attendu que parallèlement, la société Sodexo verse notamment aux débats :

- les avis d'aptitude sans réserve du médecin du travail des 20 juin 2005, 17 juin 2006 délivrés à madame [B] Chef de groupe

- une attestation dactylographiée datée du 10 juillet 2008 de mesdames [K], [BI], [WG], [GO], [CR], signée par les intéressées et comportant en annexe la photocopie de leurs pièces d'identité qui se déclarent « proches d'[W] [B] » et affirment avoir reçu les confidences de celle-ci à son retour en février « elle nous avait dit avoir d'énormes problèmes familiaux avec l'aîné de ses enfants, la perte d'un parent proche, l'accident de sa maman dont elle se reprochait de ne pas être assez présente auprès d'elle par rapport à la distance'en aucun cas, il n'y a eu de pression dans son travail mais une accumulation de la vie courante. [W] avait déjà travaillé avec monsieur [D] dans un autre restaurant avant de venir sur notre site et, c'était lui qui l'avait recommandée pour son sérieux au poste de chef de groupe et quand il a repris les rênes du site Renault Trucks, il a toujours soutenu [W] dans ses décisions »

- une attestation de monsieur [C] [N], qui a retrouvé madame [B] lors d'une soirée en janvier 2007 organisée par Sodexo au cours de laquelle madame [B] a dansé, est partie dans les dernières et n'a jamais fait part de propos négatifs

- une attestation de madame [Y], responsable régionale chez Sodexo, ayant notamment en charge le site de Renault Trucks qui indique n'avoir constaté aucun « ras le bol » de madame [B] à l'égard de son travail, de sa hiérarchie ou de son équipe laquelle ne l'a nullement alertée ni sollicitée pour une mutation

- une attestation de monsieur [J] délégué syndical qui indique avoir permis à madame [B] de rencontrer le chef de groupe du restaurant France Telecom Gambetta lors de la soirée organisée en janvier 2007 ayant entendu parler de projet mutation et que madame [B] lui a précisé refuser toute intervention de sa part se sentant « bien à Renault Trucks »

- une attestation de monsieur [T], responsable de production, qui date l'installation du nouveau restaurant de Renault Trucks de janvier 2006 avec une organisation de travail différente, souligne que madame [B] n'a eu à manager que 5 personnes en direct sur la zone froide, le restant de l'équipe étant conduit par monsieur [D] et lui et n'avoir jamais laissé madame [B] seule pour manager le personnel

- la déclaration d'accident du travail souscrite le 9 mai 2008 par monsieur [Z] dans laquelle il a noté « contrairement à la veille où comme souvent elle était rentrée déprimée du travail, ce soir du [Date décès 1] 2007, [W] semblait sereine. Vers 19h15, elle est partie de chez des amis chez qui elle a déposé notre fils. C'est seulement le 7 mars que les autorités ont retrouvé son corps'la détermination d'[W] ce soir là me laisse penser que quelque chose s'est passée au cours de sa journée de travail du [Date décès 1] 2007 », les réserves émises par l'employeur par lettres des 2 et 6 juin 2008 et par son conseil le 22 juillet 2008

- le procès-verbal du 5 mars 2007 de police de retranscription de la communication téléphonique avec le médecin traitant de madame [B] qui précise avoir reçu en consultation madame [B] les 5 et 20 février 2007, lui avoir prescrit un arrêt de travail de 8 ou 15 jours pour état dépressif, évoque une possibilité de suicide et indique lors de l'entretien du 20 février 2007, elle a indiqué n'avoir pas pris le traitement prescrit et suivre une psychothérapie

- la lettre de licenciement adressée le 18 octobre 2006 à madame [WH] [F] pour faute grave (absence injustifiée depuis le 1er septembre 2006 malgré mise en demeure)

- une attestation de monsieur [V], directeur des opérations, qui souligne les compétences professionnelles et les qualités humaines de monsieur [D] dans le management de son équipe depuis son affectation sur le site de l'Olympique Lyonnais depuis le 1er novembre 2008 et les comptes-rendus d'entretien annuels d'évaluation de monsieur [D] des 19 avril 2010, 17 novembre 2010

- le compte-rendu d'entretien de madame [B] du 28 novembre 2006 avec monsieur [Q], signé par elle, dans lequel elle indique exercer des fonctions de chef de groupe depuis 2002, manager sur site 25 personnes mais ne fait état d'aucune difficulté rencontrée sollicitant de suivre une formation sur la conduite d'une équipe et demandant une augmentation

- les comptes-rendus des CHSCT des 9 février 2007, 24 janvier 2007, 20 octobre 2006, 7 juillet 2006, 14 avril 2006, 10 février 2006 dans lesquels ne figure aucune référence à une dégradation des conditions de travail sur le site Renault Trucks

- le procès-verbal de réunion extraordinaire du CHSCT du 2 avril 2007, suite au suicide de madame [B] dans lequel :

* le médecin du travail « témoigne d'une amélioration des conditions de travail pour les collaborateurs de Sodexo en termes de bruit, ergonomie, luminosité et de climatisation », souligne l'absence « d'épidémie » d'arrêt maladie »bien au contraire depuis 1an », tout en indiquant que « le changement d'encadrement a créé un certain « stress » dans l'équipe du fait du changement de méthodes de travail et des habitudes de chacun, du fait aussi du nombre de couverts à réaliser et à servir sur le nouveau restaurant et qu'on lui a rapporté lors des visites médicales que l'effectif était « trop juste » et souligne n'avoir pas « d'indicateurs et aucun rapport de salarié pouvant laisser soupçonner des agissements d'harcèlement sur le site »

* les membres du CHSCT ont constaté qu' « au cours des 12 derniers mois le restaurant Renault Trucks a été visité 4 fois par le CHSCT. Aucune annotation liée au stress au travail et à des défauts de management n'a été relevé » et que si « seulement 5 réunions de délégués du personnel ont été organisées en 16 mois d'activité, cependant à toute question une réponse a été apportée et beaucoup de questions ont été résolues »

* les membres du CHSCT ont procédé à des entretiens individuels de l'ensemble des salariés du site qui n'ont fait état d'aucune dégradation des conditions de travail et précisent :

« Quand nous creusons davantage sur les points qui auraient pu générer du stress au travail, nous avons pu récolter les commentaires suivants :

« L'équipe est divisée suivant des affinités. Ce phénomène s'est amplifié depuis le décès d'[W]. L'organisation du travail change souvent et les collaborateurs ne sont informés de leur affectation que le jour même, mais sur un poste et des horaires similaires. Quelques erreurs de management de l'encadrement (mauvaise communication et peu de reconnaissance du travail). Manque de bras parfois quand il y a de l'absentéisme de courte durée. Mauvaise ambiance entre certaines personnes de l'équipe »

- le justificatif de formation à la sécurité suivie par madame [B] le 23 mars 2006 ;

Attendu que la CPAM produit aux débats l'enquête réalisée le 12 juin 2008 aux termes de laquelle la conclusion est qu' « on ne peut pas exclure le lien entre le suicide et le travail » et qui reproduit les auditions réalisées auprès de :

-monsieur [D] 

«Depuis janvier 2006 nous avons déménagé et nous avons, avec les nouveaux locaux .mis en place une organisation avec l'arrivée de nouvelles personnes. Il fallait du temps pour prendre un rythme de croisière.

Moi j'avais déjà travaillé avec Madame [B] et on s'entendait bien.

Elle était perfectionniste, elle avait ses idées, mais elle avait du mal à être contrariée. Elle était véritablement copine avec des personnes de son équipe. Quand elle intervenait, son équipe la voyait plus comme une copine moins comme la chef, on voyait que cela la contrariait. Je précise que son équipe était composée de 5 personnes et non de 20 comme indiqué dans la presse. Donc je voulais l'aider à recadrer avec son équipe mais elle ne le souhaitait pas forcément. Elle avait été affectée par le décès du père de son concubin quelques semaines avant. »

- monsieur [R] chef de cuisine :

«Elle s'impliquait beaucoup dans son travail elle voulait que tout soit parfait. Elle n'arrêtait pas de courir, elle était très vive»

- madame [WG] me déclare:

« Peu de temps avant elle disait qu'elle dormait mal, après avoir effectué une thalasso, je pensais qu'elle irait mieux mais peu avant le 27/02/07, elle pleurait à peine on lui faisait une réflexion. Par exemple, une fois, elle venue pour m'aider dans mes tâches, je lui ai dit d'aller faire autre chose quelle n'avait pas à s'inquiéter qu'on serait dans les temps, elle s'est mise à pleurer. Une fois, Je lui ai dit: tu es sûre que tu es chef toi car t'en fais plus que nous» ;

Attendu que préliminairement, monsieur [A] [Z] agissant tant en sa qualité de concubin de madame [B] que d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et monsieur [U] [B] soulèvent l'irrecevabilité de cette attestation commune à 5 salariés ;

Que les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité ;

Que l'attestation litigieuse, régulièrement communiquée, ne peut être écartée des débats au seul motif qu'elle ne répond pas aux prescriptions légales, la cour devant en apprécier la valeur probante ;

Que l'identité des auteurs de cette attestations étant mentionnée et copie de leur pièce d'identité jointe, il n'y a pas lieu de les écarter des débats ;

Attendu qu'il convient de rappeler les éléments constants, madame [B] a été promue en juin 2003 chef de groupe et a exercé ses fonctions de façon continue jusqu'à son décès ;

Que le restaurant d'entreprise au sein de Renault Trucks, géré par Sodexho, en janvier 2006 a été transféré dans de nouveaux locaux ;

Que ce transfert s'est accompagné d'un changement d'organisation de travail ;

Que monsieur [D] et madame [B] ont travaillé ensemble dans un autre restaurant du 17 décembre 2001 au 10 juin 2003 avant de travailler sur le restaurant de Renault Trucks ;

Que le médecin du travail a reconnu madame [B] apte pour exercer ces fonctions en juin 2005 et juin 2006, soit après la mise en place de la nouvelle organisation ;

Qu'aucun signe d'alerte sous quelque forme que ce soit n'a été lancé ni par la salariée notamment lors de son entretien d'évaluation du 28 novembre 2006 ni par ses collègues de travail sur une dégradation des conditions de travail de madame [B] ou sur une souffrance au travail rencontrée par celle-ci avant son passage à l'acte ;

Que madame [B], à qui un délégué syndical a proposé d'intervenir à sa faveur pour l'obtention d'une mutation dans le cadre d'une « projection dans l'avenir », a même indiqué dans les jours précédents son suicide se trouver bien à Renault Trucks et refuser tout changement ;

Que les institutions représentatives du personnel n'ont été saisies d'aucun signalement ;

Attendu que les appelants soulèvent différents manquements commis par l'employeur :

- le défaut de formation malgré l'évolution du nombre de personnes placées sous son autorité 

Que madame [B] a exercé depuis 2003 la fonction de chef de groupe et du fait de son ancienneté dans la fonction a acquis une expérience certaine ;

Que si madame [B] a indiqué avoir 25 personnes sous sa responsabilité sur son entretien d'évaluation du 28 novembre 2006, monsieur [T] le dément limitant le nombre de salariés à gérer par madame [B] à 5 personnes, les autres étant placés sous son autorité ou celles de monsieur [D] et exclut que madame [B] ait eu à manager seul le personnel ;

Que monsieur [D] le confirme lors de son audition réalisée par l'enquêteur de la CPAM ;

Que d'ailleurs l'organisation décrite par les appelants est remise en cause par l'employeur qui justifie que monsieur [D] occupait les fonctions de directeur d'exploitation, messieurs [J] et [RD], responsables de restaurant supervisant le responsable de production, monsieur [T] et les chefs de groupe au nombre de 4 en charge de service préparations froides (madame [B]), service cafétéria (madame [M]), service caisse (madame [K]) et service club (madame [X]) lesquels au nombre de 4 supervisaient 19 personnes ;

Que par ailleurs, la société Sodexho soutient qu'il y a eu doublement de cadre (messieurs [Q] et [D]) de novembre 2005 à novembre 2006, date de départ à la retraite de monsieur [Q] ;

Que si madame [B] a souhaité disposer d'une formation sur la conduite d'une équipe au quotidien en novembre 2006, qui n'a pu être mise en place avant son suicide, elle-même se reconnaissait compétente en terme d'animation d'équipe ;

Que le fait que la société Sodexho n'ait pas transmis, malgré sommation des appelants, le relevé de formation de madame [B] ou que madame [B] n'ait pas reçu de formation d'encadrement ne démontre nullement que l'employeur n'ait pas respecté l'obligation de sécurité lui incombant, aucune inadaptation au poste occupé par la salariée n'étant démontrée ;

- la surcharge de travail, le turn over et le manque de personnel

Que si madame [B] a pu auprès de ses proches souligner sa charge de travail et le refus opposé par monsieur [D] de disposer d'un effectif plus étoffé, si des déclarations sont reproduites dans des articles de presse, les constatations menées par le CHSCT démentent ces affirmations ;

Que la réalité d'une surcharge de travail n'est pas démontrée ;

Que si les feuillets du registre d'entrée et sortie versés aux débats par la société Sodexho sont difficilement lisibles, il résulte de l'analyse de la note établie par le directeur de la prévention en 2008 comparative entre différents sites que sur le site de Renault Trucks sont positionnés :

* en février 2006 2 cadres/ 3 agents de maîtrise/ 33 employés

* en février 2007 1 cadre/ 4 agents de maîtrise/ 34 employés

* en février 2008 1 cadre/ 4 agents de maîtrise/ 33 employés ;

Que sur cette même note sont comptabilisés 3 ou 4 salariés en contrats à durée déterminée sur la même période ; Que l'effectif est stable et le site de Renault Trucks est noté comme bénéficiant « d'une importante équipe d'encadrement » ;

Que sont également comptabilisés :

* 2004/2005 : 1 entrée/ 0 démission/ 0 départ en cours de période d'essai/0 retraites/0 licenciement

* 2005/2006: 6 entrées/ 0 démission/ 2 départs en cours de période d'essai/2 retraites/3 licenciements

* 2006/2007 : 5 entrées/ 2 démission/ 1 départ en cours de période d'essai/3 retraites/1 licenciement

* 2007/2008: 4 entrées/ 0 démission/ 1 départ en cours de période d'essai/2retraites/0 licenciement ;

Que le turn over de personnel est faible (16 entrées et 18 sorties), les sorties étant majoritairement des départs en retraite;

Que concernant le nombre d'accidents du travail, il est passé de 2 entraînant 441 journées d'arrêt de travail en 2004/2005, à 2 entraînant 416 journées d'arrêt de travail en 2005/2006, à 8 entraînant 181 journées d'arrêt de travail en 2006/2007 ;

Que de ces résultats ne peut être tirée la conséquence de conditions de travail personnellement difficiles pour madame [B] ;

Qu'il n'est pas plus démontré que le fait que le nombre de cadres sur site soit passé de 2 (messieurs [Q] et [D]) à 1 ( monsieur [D]) en novembre 2006 une quelconque répercussion sur la prestation de travail confiée à madame [B];

- les brimades et insultes que faisait subir monsieur [D] à madame [B]

Que les déclarations de la s'ur de madame [B], d'un ami, non présents dans l'entreprise, ou les quelques phrases d'une salariée licenciée pour faute grave interrogée par monsieur [Z] ne sont de nature à établir que monsieur [D] ait adopté à l'égard de madame [B], dont il aurait contribué à la nomination à un poste de chef de groupe, une attitude outrageante ;

Que si certaines salariées ont vu madame [B] pleurer sur son lieu de travail, elles ne retranscrivent aucun comportement précis, attitude adoptée par monsieur [D] dont elles auraient pu être personnellement témoin ;

Que les qualificatifs donnés à monsieur [D] par madame [B] ou une salariée ne peuvent suffire à caractériser une attitude blessante adoptée par ce dernier à leur égard ;

Que lors des auditions réalisées par le CHSCT des différents salariés après le décès de madame [B], ceux-ci n'ont fait état d'aucune difficulté rencontrée avec monsieur [D] ;

Que les documents d'entretien d'évaluation de monsieur [D] ne mettent en évidence aucun problème de comportement managérial posé et plus de 18 mois séparent le suicide de madame [B] et le départ de monsieur [D] du site de Renault Trucks, de telle sorte qu'aucune conséquence ne peut en être tirée ;

Que ce manquement n'est pas établi ;

- l'altération de la santé de madame [B] et l'absence de visite de reprise

Que si les appelants affirment que madame [B] a fait l'objet d'au moins 21 jours pour cause de maladie, ils ne justifient que d'une absence du 1er au 11 février 2007 pour cause de maladie par la production du seul bulletin de salaire de février 2007 ;

Que le médecin traitant de madame [B] auditionné par les services de police avait indiqué avoir prescrit un arrêt de 8 à 15 jours ;

Que l'employeur donne comme date d'absence pour cause médicale du 29 janvier 2007 au 16 février 2007 soit une durée inférieure à 3 semaines ;

Que les appelants ne démontrent aucunement que la société Sodexho n'ait pas respecté les dispositions de l'article R4624-21 du code du travail ;

Que si l'état de santé de madame [B] s'est altéré, il n'est pas établi de lien entre cette altération et les conditions de travail;

- le climat délétère régnant au sein de Sodexho

Que les déclarations figurant dans les articles de presse n'ont pas été reproduites lors des auditions réalisées par le CHSCT ni aucun signalement n'a été transmis ni au médecin du travail ni aux institutions représentatives du personnel et aucune attestation des auteurs de ces déclarations n'est versée aux débats;

- l'absence de document unique d'évaluation des risques

Que l'absence de communication du document unique d'évaluation des risques par l'employeur ne saurait avoir pour effet de suppléer la carence des appelants dans l'administration de la preuve leur incombant d'apporter la preuve d'un comportement fautif de l'employeur en relation de causalité avec le fait accidentel survenu ;

Attendu qu'il n'est nullement démontré que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé madame [B] et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;

Attendu que la juridiction de première instance, tirant les conséquences de la carence dans l'administration de la preuve incombant aux consorts [Z] et [B], les a justement déboutés de leurs demandes de reconnaissance de faute inexcusable ;

Que le jugement entrepris doit être confirmé de ce chef ;

Attendu que les consorts [Z] et [B] doivent être déboutés de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile;

Attendu que les appelants succombant en leur recours doivent être dispensés du paiement du droit prévu à l'article R144-10 du code de la sécurité sociale ;

Attendu que la demande afférente aux dépens est dénuée d'objet, la procédure devant les juridictions de sécurité sociale étant gratuite et sans frais ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt contradictoire et dans la limite de l'appel

Reçoit l'appel

Confirme la décision entreprise en ce qu'elle a débouté monsieur [A] [Z] agissant tant en sa qualité de concubin de madame [B] que d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et monsieur [U] [B] de leur demande de reconnaissance de faute inexcusable

Y ajoutant

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel

Dispense monsieur [A] [Z] agissant tant en sa qualité de concubin de madame [B] que d'administrateur légal de leur enfant commun mineur [O] [Z] et monsieur [U] [B] du paiement du droit prévu à l'article R144-10 du code de la sécurité sociale 

Dit la demande afférente aux dépens dénuée d'objet.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Malika CHINOUNE Nicole BURKEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Sécurité sociale
Numéro d'arrêt : 13/01544
Date de la décision : 22/04/2014

Références :

Cour d'appel de Lyon 51, arrêt n°13/01544 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-04-22;13.01544 ?
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