AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 12/07270
SARL APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE
C/
[V]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de prud'hommes - Formation de départage de LYON
du 18 Septembre 2012
RG : F 10/03131
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 13 DECEMBRE 2013
APPELANTE :
SARL APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Bernard VERRUE, avocat au barreau de LYON
Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 12/08352 (Fond)
INTIMÉ :
[B] [V]
né le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 3] - CAMEROUN
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 1]
comparant en personne, assisté de Me Thierry BRAILLARD de la SELARL JUSTICIAL AVOCATS, avocat au barreau de LYON
Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 12/08352 (Fond)
PARTIES CONVOQUÉES LE : 13 mars 2013
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Octobre 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Nicole BURKEL, Président de chambre
Marie-Claude REVOL, Conseiller
Catherine PAOLI, Conseiller
Assistés pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 13 Décembre 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre, et par Christine SENTIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Le 14 mai 2007, [B] [V] a été embauché par la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE en qualité d'électricien ; le 6 août 2010, il a saisi le conseil des prud'hommes de LYON d'une action en résiliation du contrat de travail ; le 13 septembre 2010, il a été licencié pour des fautes commises dans l'exécution de ses fonctions constitutives d'une cause réelle et sérieuse.
[B] [V] a demandé des dommages et intérêts pour résiliation du contrat de travail ou subsidiairement pour licenciement sans cause, des dommages et intérêts pour prélèvements indus d'acomptes sur son salaire, le règlement des heures supplémentaires, le règlement des heures de trajet, des dommages et intérêts pour discrimination et une indemnité au titre des frais irrépétibles.
Par jugement du 24 avril 2012, le conseil des prud'hommes, en sa formation de départage, a ordonné, avant dire droit, l'audition de quatre témoins, [X] [P], [D] [N], [W] [C] et [U] [L].
La mesure d'instruction a été effectuée le 28 juin 2012.
Par jugement du 18 septembre 2012, le conseil des prud'hommes, en sa formation de départage, a :
- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur,
- condamné la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE à verser à [B] [V] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination, la somme de 7.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause et la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles,
- ordonné l'exécution provisoire,
- rejeté les autres demandes,
- condamné la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE aux dépens.
Le jugement a été notifié le 20 septembre 2012 à la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 9 octobre 2012 ; la société a limité son appel aux dispositions du jugement relatives aux dommages et intérêts pour discrimination et aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause.
[B] [V] a interjeté appel incident sur les dispositions du jugement non querellées par l'employeur par lettre recommandée adressée au greffe le 21 novembre 2012.
Le dossier attribué le 12 octobre 2012 à la chambre sociale section B a été transféré à la chambre sociale section C le 13 mars 2013.
Une ordonnance du 14 mars 2013 a joint les procédures.
Par conclusions visées au greffe le 18 octobre 2013 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE :
- précise qu'elle a réglé 264,38 heures supplémentaires le 2 avril 2010, conteste l'accomplissement d'autres heures et observe que le salarié globalise ses heures et ne fournit aucun élément,
- subsidiairement, chiffre le montant des heures supplémentaires résiduelles à la somme de 220,62 euros,
- dénie également devoir des heures de trajet et oppose au salarié l'absence de tout justificatif,
- s'agissant des heures supplémentaires et des heures de trajet, observe que le document du salarié est affecté d'une erreur de pagination, qu'elle n'en n'a jamais eu connaissance avant l'instance et qu'il lui est donc inopposable,
- indique qu'elle effectuait des retenues sur les indemnités de déplacement à hauteur des avances qu'elle avait faites au titre des frais de déplacement,
- oppose à l'accusation de discrimination que [B] [V] a saisi la HALDE, qu'il a varié dans ses dénonciations, que le 28 juillet 2010 sa plainte a été classée et qu'elle a embauché [B] [V] pour lui permettre de régulariser son séjour en FRANCE et d'obtenir la nationalité française,
- ajoute que [B] [V] a également saisi les services de l'inspection du travail et que son action n'a pas prospéré,
- soutient qu'elle n'a pas commis un manquement justifiant la résiliation du contrat de travail à ses torts et que des faits anciens ne peuvent pas être retenus,
- expose, que [B] [V] s'est vu infliger deux avertissements, le premier le 2 avril 2010 pour retard et le second le 8 juillet 2010 pour insulte à l'encontre de monsieur [A],
- soutient que le licenciement est légitime au regard des fautes commises par le salarié qui ne remettait pas ses relevés d'heures de travail, qui a attendu le 17 août 2010 pour adresser son arrêt maladie du 30 juillet 2010, qui refusait d'exécuter son travail dans les règles de l'art et qui a commis sur un chantier une erreur grave et susceptible d'avoir des conséquences dangereuses,
- demande le rejet des prétentions du salarié et sa condamnation à lui verser la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à acquitter les dépens.
Par conclusions visées au greffe le 18 octobre 2013 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [B] [V] :
- prétend que toutes ses heures supplémentaires ne lui pas été payées et réclame la somme de 710,98 euros, outre 71,09 euros de congés payés afférents,
- affirme que ses heures de trajet ne lui ont pas été réglées et réclame la somme de 259,32 euros, outre 25,93 euros de congés payés afférents,
- soutient qu'il a été victime de discrimination en raison de ses origines, en veut pour preuve les propos racistes tenus à son encontre, précise qu'il a vainement alerté l'employeur et réclame la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- relève que l'employeur s'est remboursé par des prélèvements sur son salaire et que leurs montants excédaient les sommes pouvant être dues et dépassaient a quotité saisissable et réclame la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des acomptes prélevés indûment,
- demande, compte tenu des manquements de l'employeur, la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et réclame la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- subsidiairement, conteste les fautes que l'employeur lui a imputé pour le licencier, allègue la prescription du grief tiré des retards au travail, estime le licenciement privé de cause et réclame la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts,
- souhaite les intérêts au taux légal,
- sollicite la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de l'employeur aux dépens.
A l'audience, le salarié, par la voix de son conseil précise qu'à titre subsidiaire il demande que le licenciement soit jugé comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse et réclame la somme de 12.000 euros à titre de dommages et intérêts ; les parties s'accordent sur l'application de l'article L. 1235-5 du code du travail s'il était fait droit à la demande du salarié.
Mention des déclarations a été portée sur la note d'audience signée par le président et le greffier.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la discrimination :
L'article L. 1132-1 code du travail prohibe toute discrimination directe ou indirecte en raison de l'appartenance du salarié à une ethnie, une nation ou une race ; en application de l'article L. 1134-1 du code du travail, il appartient au salarié qui allègue d'une discrimination de présenter des éléments de faits laissant supposer l'existence de la discrimination et il appartient à l'employeur de prouver que ses agissements et ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le conseil des prud'hommes a procédé à des auditions le 28 juin 2012.
[X] [P], ancien chef d'équipe au sein de la société employeur entre décembre 2008 et mi-janvier 2010, a déclaré qu'il avait travaillé avec [B] [V] durant 6 à 8 mois, qu'il était respectueux, honnête et sincère, qu'il se faisait beaucoup engueuler, que l'ambiance était exécrable et malsaine, que [B] [V] subissait les agressions verbales de monsieur [A], que monsieur [A] lui a présenté [B] [V] en disant 'il est noir', 'le camerounais', 'broyer du noir', que monsieur [A] tenait des propos racistes devant [B] [V] et hors de sa présence et a utilisé le terme 'nègre', que monsieur [A] mettait la pression et faisait accomplir beaucoup d'heures.
[D] [N], ancien chef d'équipe au sein de la société employeur entre novembre 2009 et mars 2010, a déclaré qu'il avait travaillé avec [B] [V] alors que personne ne voulait travailler avec lui, que [B] [V] travaillait bien, qu'il se faisait insulter, que monsieur [A] lui a donné la consigne de donner le travail le plus compliqué à [B] [V], que monsieur [A] a dit que [B] [V] aurait dû être fouetté pour travailler et a usé des mots 'noir' et 'nègre', qu'il avait pour consigne de ne pas ramener [B] [V], qu'il a entendu monsieur [A] dire à [B] [V] 'tu veux que je te mette mon poing sur la gueule', qu'il n'avait pas de critique à formuler sur le travail de [B] [V] et que les salariés déclaraient leurs heures en fin de mois.
[W] [C], ouvrier dans la société employeur, a déclaré que [B] [V] a changé en 2010, qu'il effectuait un travail bâclé, qu'il a eu une altercation avec lui en avril 2010, qu'il a demandé au patron de ne plus travailler avec [B] [V] car il fallait sans cesse repasser derrière lui, que monsieur [A] ne harcelait pas [B] [V] en lui tenant des propos racistes et que [B] [V] arrivait habituellement en retard ; dans son attestation , il a précisé que monsieur [A] n'a jamais eu de propos racistes, n'a jamais fait de ségrégation lors de la répartition du travail et qu'au contraire monsieur [A] lui a souvent donné des directives afin d'arranger [B] [V].
[U] [L], chef d'équipe dans la société employeur a déclaré qu'à compter du mois de novembre 2009 le comportement de [B] [V] a changé, que [B] [V] refusait de travailler en équipe, que plus personne ne voulait travailler avec lui, qu'aucun dialogue n'était possible, qu'il refusait d'être aidé, qu'il a eu une altercation avec un plaquiste et que sur le chantier DEFITEX il a commis une grave erreur ; dans son attestation , il a précisé que monsieur [A] n'a jamais eu de propos racistes, donnait les mêmes directives à tous, n'a jamais fait de ségrégation lors de la répartition du travail et que monsieur [A] gérait les retards de [B] [V].
[Y] [T], employé dans la société, atteste que monsieur [A] n'a jamais eu de propos racistes, n'a jamais fait de ségrégation et qu'au contraire monsieur [A] lui a souvent donné des directives afin d'arranger [B] [V] et a pris sa défense lorsque des collègues s'en plaignaient.
[Q] [J] et [F] [O], employés dans la société, attestent que monsieur [A] n'a jamais eu de propos racistes, n'a jamais fait de ségrégation et qu'au contraire [B] [V] était insolent envers monsieur [A] et répétait les retards.
Un client atteste que lors de l'exécution du chantier à son domicile, monsieur [A] n'a jamais tenu de propos raciste à l'encontre de [B] [V].
Monsieur [A] a prêté de l'argent à [B] [V] pour qu'il puisse passer l'examen du permis de conduire. C'est grâce à son embauche au sein de la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE que les services de la Préfecture ont accepté de régulariser la situation de [B] [V] au regard du droit des étrangers.
[B] [V] ne remet pas en cause les deux avertissements, celui du 2 avril 2010 qui sanctionnait un retard de 15 minutes le 30 mars 2010 et un retard de 2 heures 15 minutes le 1er avril 2010 et celui du 8 juillet 2010 qui sanctionnait le fait d'avoir traité son supérieur par les mots suivants : 'espèce d'enculé'.
Le 28 juillet 2010, la HALDE, saisie par [B] [V], lui a écrit que l'enquête menée n'a pas permis d'établir la preuve d'un harcèlement discriminatoire à son égard et qu'elle ne donnait pas suite à sa réclamation et clôturait le dossier. Elle a invité [B] [V] à saisir l'inspection du travail. [B] [V] ne produit pas de pièce concernant sa possible saisine de l'inspection du travail.
De la confrontation de ces éléments, la Cour tire la conviction que [B] [V] n'a pas subi de discrimination.
[B] [V] doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts.
Le jugement entrepris doit être infirmé.
Sur les retenues sur salaire :
L'article L. 3251-3 du code du travail permet à l'employeur d'opérer des retenues de salaire pour les avances en espèces qu'il a faites à condition qu'il s'agisse de retenues successive ne dépassant pas le dixième du montant des salaires exigibles ; cette limitation ne s'applique pas aux acomptes sur un travail en cours ; elle est applicable à tous les éléments de rémunération ayant un caractère de salaire et non sur les indemnités qui ont un caractère de dommages et intérêts.
L'employeur indique qu'il a versé à [B] [V] des avances sur frais à hauteur de 4.750 euros et lui a accordé un prêt de 850 euros et il en justifie ; le montant global s'établit à 5.600 euros.
Les bulletins de salaire versés au dossier mentionnent, outre les déductions des acomptes sur salaire comptabilisées séparément:
* pour le mois de mai 2007, une retenue de 192,67 euros sur un salaire brut de 771,54 euros bruts,
* pour le mois de juin 2007, une retenue de 320,53 euros sur un salaire brut de 1.283,68 euros bruts,
* pour le mois de septembre 2007, une retenue de 319,66 euros sur un salaire brut de 1.280,09 euros bruts,
* pour le mois d'octobre 2007, une retenue de 387,37 euros sur un salaire brut de 1.638,34 euros bruts,
* pour le mois de novembre 2007, une retenue de 326,30 euros sur un salaire brut de 1.453,70 euros bruts,
* pour le mois de décembre 2007, une retenue de 304,31 euros sur un salaire brut de 1.227,73 euros bruts,
* pour le mois de janvier 2008, une retenue de 324,29 euros sur un salaire brut de 1.385,61 euros bruts,
* pour le mois de février 2008, une retenue de 328,81 euros sur un salaire brut de 1.532,35 euros bruts,
* pour le mois de mars 2008, une retenue de 320,15 euros sur un salaire brut de 1.295,45 euros bruts,
* pour le mois d'avril 2008, une retenue de 320,39 euros sur un salaire brut de 1.296,41 euros bruts,
* pour le mois de mai 2008, une retenue de 206,91 euros sur un salaire brut de 837,21 euros bruts,
* pour le mois de juin 2008, une retenue de 328,28 euros sur un salaire brut de 1.328,20 euros bruts,
* pour le mois de juillet 2008, une retenue de 388,27 euros sur un salaire brut de 1.571,05 euros bruts,
* pour le mois d'août 2008, une retenue de 176,99 euros sur un salaire brut de 716,15 euros bruts,
* pour le mois de septembre 2008, une retenue de 251,61 euros sur un salaire brut de 1.018,12 euros bruts,
* pour le mois d'octobre 2008, une retenue de 333,49 euros sur un salaire brut de 1.538,80 euros bruts,
* pour le mois de novembre 2008, une retenue de 328,62 euros sur un salaire brut de 1.329,69 euros bruts,
* pour le mois de décembre 2008, une retenue de 331,49 euros sur un salaire brut de 1.341,21 euros bruts,
* pour le mois de janvier 2009, une retenue de 332,38 euros sur un salaire brut de 1.439,53 euros bruts,
* pour le mois de février 2009, une retenue de 331,73 euros sur un salaire brut de 1.484,36 euros bruts,
* pour le mois de mars 2009, une retenue de 383,40 euros sur un salaire brut de 1.740,72 euros bruts,
* pour le mois d'avril 2009, une retenue de 328,07 euros sur un salaire brut de 1.466,07 euros bruts,
* pour le mois de mai 2009, une retenue de 327,26 euros sur un salaire brut de 1.321,05 euros bruts,
* pour le mois de juin 2009, une retenue de 330,82 euros sur un salaire brut de 1.429,93 euros bruts,
* pour le mois de juillet 2009, une retenue de 306,64 euros sur un salaire brut de 1.390,94 euros bruts,
* pour le mois de septembre 2009, une retenue de 182,09 euros sur un salaire brut de 830,75 euros bruts,
* pour le mois d'octobre 2009, une retenue de 341,48 euros sur un salaire brut de 1.569,94 euros bruts,
* pour le mois de novembre 2009, une retenue de 390,10 euros sur un salaire brut de 1.766,14 euros bruts,
* pour le mois de décembre 2009, une retenue de 309,93 euros sur un salaire brut de 1.394,65 euros bruts,
* pour le mois d'avril 2010, une retenue de 830,62 euros sur un salaire brut de 4.808,46 euros bruts,
* pour le mois de mai 2010, une retenue de 157,08 euros sur un salaire brut de 634,05 euros bruts.
Les bulletins de paie de juillet et août 2007, de janvier à mars 2010 et ceux postérieurs à juin 2010 ne sont pas produits.
Le montant total des retenues s'élève à la somme de 9.789,89 euros.
Ainsi le montant des retenues est supérieur de 4.189,89 euros aux avances sur frais et au prêt et les retenues injustifiées ont dépassé le dixième du montant des salaires exigibles.
[B] [V] a subi un préjudice matériel et un préjudice moral que les éléments de la cause conduisent à réparer par l'allocation de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.
En conséquence, la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE doit être condamnée à verser à [B] [V] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des avances prélevées indûment.
Le jugement entrepris doit être infirmé.
Sur les heures supplémentaires :
En cas de litige relatif aux heures supplémentaires, l'article L.3171-4 du code du travail oblige le salarié à apporter des éléments à l'appui de sa demande et impose à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre.
Par lettre du 16 janvier 2010, [B] [V] a réclamé à son employeur le paiement de 247 heures supplémentaire de travail pour la période de septembre 2007 à décembre 2009 ; il avait effectué des décomptes mensuels et non hebdomadaires ; après discussion, l'employeur a repris les décomptes et a retenu l'accomplissement de 177,80 heures supplémentaires ; par lettre du 26 avril 2010, [B] [V] a répondu qu'il n'était pas 'tout à fait d'accord' car l'employeur avait omis les mois d'octobre et de novembre 2009 et il a produit un nouveau décompte hebdomadaire.
En avril 2010, l'employeur a réglé à [B] [V] 112,90 heures supplémentaires majorées au taux de 25 % et 64,90 heures supplémentaires majorées au taux de 50 %.
Les différences entre les décomptes de l'employeur et du salarié datant du mois d'avril 2010 sont les suivantes :
* semaine du 22 octobre au 2 novembre 2007 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % selon le salarié et 0 selon l'employeur,
* semaine du 4 au 8 février 2008 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 6,3 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié et 5,3 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 0 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon l'employeur,
* semaine du 31 mars au 4 avril 2008 : 5 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % selon le salarié et 0 heures supplémentaires selon l'employeur,
* semaine du 29 septembre au 3 octobre 2008 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 6 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié et 0 heures supplémentaires selon l'employeur,
* semaine du 29 juin au 3 juillet 2009 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 2,3 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié et 0 heures supplémentaires selon l'employeur,
* octobre 2009 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 4 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié et 0 heures supplémentaires selon l'employeur,
* novembre 2009 : 20 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 3 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié et 0 heures supplémentaires selon l'employeur.
Dans le cadre de l'instance, [B] [V] produit un nouveau décompte après paiement des heures que l'employeur reconnaissait devoir ; ce décompte est le suivant :
* semaine du 4 au 8 février 2008 : 2,3 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 6,7 heures supplémentaires au taux majoré de 50 %,
* semaine du 31 mars au 4 avril 2008 : 5 heures supplémentaires au taux majoré de 25 %,
* semaine du 29 septembre au 3 octobre 2008 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 6 heures supplémentaires au taux majoré de 50 %,
* semaine du 29 juin au 3 juillet 2009 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 2,3 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié,
* octobre 2009 : 8 heures supplémentaires au taux majoré de 25 % et 4 heures supplémentaires au taux majoré de 50 %,
* novembre 2009 : 3 heures supplémentaires au taux majoré de 50 % selon le salarié.
Ainsi, [B] [V] ne formule plus de réclamation au titre des heures supplémentaires pour la semaine du 22 octobre au 2 novembre 2007 ni au titre des heures supplémentaires au taux majoré de 25 % pour novembre 2009 alors que l'employeur n'a rien payé de ce chef puisqu'il contestait les heures.
[B] [V] ne fournit aucun document ; ses décomptes globalisent les heures de manière hebdomadaire ; les horaires de travail par journée sont inconnus.
De la confrontation de ces éléments, la Cour tire la conviction que [B] [V] a été rémunéré de l'intégralité de ses heures supplémentaires.
En conséquence, [B] [V] doit être débouté de sa demande fondée sur les heures supplémentaires.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
Sur les heures de trajet :
Le 16 janvier 2010, [B] [V] a réclamé à son employeur le paiement de 124 heures 10 de trajet pour la période de septembre 2007 à décembre 2009 selon le décompte suivant :
* octobre 2008 : 15 heures 30,
* novembre 2008 : 10 heures,
* janvier 2009 : 12 heures 40,
* février 2009 : 11 heures,
* avril 2009 : 14 heures,
* juin 2009 : 30 heures,
* octobre 2009 : 9 heures,
* novembre 2009 : 13 heures,
* décembre 2009 : 9 heures.
Dans le cadre de l'instance, [B] [V] produit un décompte des reliquat des heures de trajet pour un total de 25,90 heures qui est le suivant :
* juin 2009 : 3 heures,
* octobre 2009 : 17,3 heures
* novembre 2009 : 5,6 heures.
La comparaison de ces décomptes révèle que [B] [V] a renoncé à l'essentiel de ses réclamations et que le reliquat d'octobre 2009 est bien supérieur au décompte initial.
[B] [V] ne fournit aucun document ; ses décomptes globalisent les heures de manière hebdomadaire ; les temps de trajet journaliers sont inconnus ainsi que les destinations ; il n'est versé aucun élément qui puisse permettre de quantifier le temps de trajet et de le qualifier de temps de travail donnant lieu à rémunération.
En conséquence, [B] [V] doit être débouté de sa demande fondée sur les heures de trajet.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
Sur la résiliation du contrat de travail :
La résiliation du contrat de travail qui emporte les conséquences financières d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être prononcée si les manquements imputés par le salarié à son employeur empêchaient la poursuite des relations contractuelles ; il appartient au salarié de rapporter la preuve des manquements qu'il invoque.
Les retenues injustifiées sur salaire caractérisent un manquement grave de l'employeur qui justifie la résiliation du contrat de travail à ses torts à la date du licenciement prononcé le 13 septembre 2010.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
En application de l'article L. 1235-5 du code du travail, [B] [V] peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi ; le 1er février 2011, il a immatriculé une entreprise de travaux d'installation électrique soit dans les trois mois qui ont suivi l'expiration du préavis ; il comptabilisait une ancienneté supérieure à trois ans ; ces éléments conduisent à chiffrer les dommages et intérêts à la somme de 7.500 euros.
En conséquence, la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE doit être condamnée à verser à [B] [V] la somme de 7.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résiliation judiciaire du contrat de travail.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
Sur les intérêts :
Les intérêts courent au taux légal jusqu'à parfait paiement sur les dommages et intérêts liés à la résiliation du contrat de travail à compter du jugement et sur les dommages et intérêts liés aux retenues sur salaire à compter du présent arrêt.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L'équité commande de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et de condamner la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE à verser à [B] [V] en cause d'appel la somme complémentaire de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel et le jugement entrepris doit être confirmé.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [B] [V] de sa demande fondée sur les heures supplémentaires et de sa demande fondée sur les heures de trajet, en toutes ses dispositions relatives à la résiliation judiciaire du contrat de travail et en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Infirmant pour le surplus et statuant à nouveau,
Juge que [B] [V] n'a pas subi de discrimination,
Déboute [B] [V] de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination,
Condamne la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE à verser à [B] [V] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des avances prélevées indûment,
Ajoutant,
Condamne la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE à verser à [B] [V] en cause d'appel la somme complémentaire de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la S.A.R.L. APPLICATION ELECTRIQUE INDUSTRIELLE aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Christine SENTIS Nicole BURKEL