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31/10/2013 | FRANCE | N°12/03450

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 31 octobre 2013, 12/03450


R.G : 12/03450









Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 10 avril 2012



RG : 2010J3020

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 31 Octobre 2013







APPELANTE :



SARL GREMAUD SOLUTIONS

[Adresse 2]

[Localité 2]



représentée par la SCP LAFFLY & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON



assistée de la SELARL AXTEN, avoca

t au barreau de LYON









INTIMEE :



CAISSE DE CREDIT MUTUEL LYON BELLECOUR SAINT-JEAN

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par la SELARL REBOTIER ROSSI ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON













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R.G : 12/03450

Décision du tribunal de commerce de Lyon

Au fond du 10 avril 2012

RG : 2010J3020

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 31 Octobre 2013

APPELANTE :

SARL GREMAUD SOLUTIONS

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par la SCP LAFFLY & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

assistée de la SELARL AXTEN, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

CAISSE DE CREDIT MUTUEL LYON BELLECOUR SAINT-JEAN

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par la SELARL REBOTIER ROSSI ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 07 Mai 2013

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Juillet 2013

Date de mise à disposition : 31 Octobre 2013

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Michel GAGET, président

- François MARTIN, conseiller

- Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, François MARTIN a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par François MARTIN, conseiller, faisant fonction de président, en remplacement du président légitimement empêché, et par Frédérique JANKOV, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

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La Sarl GREMAUD SOLUTIONS (la Sarl GREMAUD) a souscrit auprès de la société coopérative à capital variable CAISSE DE CREDIT MUTUEL de LYON BELLECOUR SAINT JEAN (le Crédit Mutuel), selon acte notarié reçu le 31 octobre 2006 par Maître [E], notaire associé à [Localité 3], une ouverture de crédit de 1320000 euros d'une durée de 24 mois destinée au financement de l'acquisition d'une maison à usage d'habitation.

Il était stipulé qu'en rémunération de ce crédit, la SARL GREMAUD versera des intérêts et commissions décomptés trimestriellement à terme échus, payables à la fin de chaque trimestre civil au taux de 5,333% l'an, ce taux étant variable à la hausse comme à la baisse en fonction de l'évolution du taux moyen de l'EURIBOR à trois mois.

La Sarl GREMAUD n'étant pas en mesure de rembourser les sommes dues dans le délai conventionnellement convenu, deux avenants étaient régularisés avant que le crédit ne soit finalement intégralement remboursé au moyen du prix de vente après que celle-ci soit intervenue le 24 février 2010.

Par acte d'huissier en date du 13 octobre 2010, se plaignant d'une part de la perception d'intérêts conventionnels sur la base de 360 jours par an et de l'irrégularité du taux effectif global en résultant, d'autre part de la perception d'intérêts indus par anticipation des dates de valeur, la SARL GREMAUD SOLUTIONS a assigné en paiement le Crédit Mutuel devant le tribunal de commerce de LYON.

Par jugement en date du 10 avril 2012, retenant en premier lieu que le mode de calcul des intérêts sur la base d'une année de 360 jours avait été contractuellement défini entre les parties, ensuite que la Sarl GREMAUD ne démontrait pas en quoi le Crédit Mutuel était tenu au calcul du TEG sur l'année civile soit 365 ou 366 jours dès lors que les parties, en conformité avec les dispositions de l'article R 313-1 du code de la consommation, avaient contractuellement défini le diviseur 360 comme période de référence et enfin que l'omission de prendre en considération les frais d'information annuels de la caution pour le calcul du TEG annuel était sans incidence eu égard à la précision du TEG exigée par les dispositions précitées, le tribunal de commerce de LYON a :

- dit que le Crédit mutuel n'a pas méconnu ses obligations légales résultant de l'article L 313-4 du code monétaire et financier à l'occasion de l'acte de prêt consenti le 31 octobre 2006,

- débouté la Sarl GREMAUD de toutes ses demandes

- condamné la Sarl GREMAUD au paiement de la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Appel de cette décision a été interjeté le 7 mai 2013 par la Sarl GREMAUD.

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelant n°3 en date du 4 mars 2013, la Sarl GREMAUD au visa des articles L. 313-4 et R. 313-1 du code monétaire et financier, L. 313-1 à L. 313-4 et R. 313-1 du code de la consommation et 1131 du Code civil, demande à la cour, infirmant le jugement déféré en toutes ses dispositions de :

1/ A TITRE PRINCIPAL :

- dire que le CREDIT MUTUEL a méconnu ses obligations légales de renseignement du TEG résultant des dispositions de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier à l'occasion de l'acte de prêt consenti à la société GREMAUD SOLUTIONS le 31 octobre 2006,

- en conséquence, prononcer la nullité de la clause d'intérêts conventionnels stipulée à l'acte de prêt en date du 31 octobre 2006,

- condamner le CREDIT MUTUEL à payer à la société GREMAUD SOLUTIONS la somme de 106.923,70 euros outre intérêts légaux à compter de l'assignation,

2/ A TITRE SUBSIDIAIRE :

- dire que le CREDIT MUTUEL s'est arrogé des intérêts indus qu'il doit restituer,

- en conséquence condamner le CREDIT MUTUEL à payer à la société GREMAUD SOLUTIONS la somme de 5.990,15 euros outre intérêts légaux à compter de l'assignation au titre des intérêts indûment perçus,

et en tout état de cause, condamner le CREDIT MUTUEL à payer à la société GREMAUD SOLUTIONS la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et les entiers dépens de l'instance, ces derniers avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP LAFFLY et Associés, avocat.

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives en date du 7 janvier 2013, au visa des articles L.313-1, L.313-2 et R.313-1 et ses annexes du Code de la consommation et de l'article 1134 du Code civil, le Crédit mutuel conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et, y ajoutant, à la condamnation de la Sarl GREMAUD à lui payer 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Maître REBOTIER avocat.

La clôture de l'instruction est intervenue le 7 mai 2013.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la nullité de la clause d'intérêts conventionnels

Le CREDIT MUTUEL a exposé dans son courriel du 28 juillet 2010 les modalités selon lesquelles avaient été calculés les intérêts débiteurs afférents à l'ouverture de crédit qui étaient portés au débit du compte courant de la SARL GREMAUD: il était indiqué qu'après calcul sur un mois donné de la somme des soldes débiteurs au jour le jour de la ligne de crédit, lui est appliqué le taux nominal mensuel rapporté à 360 jours conformément à la pratique bancaire.

Et le jugement déféré, pour rejeter la contestation de la SARL GREMAUD a considéré que les parties avaient contractuellement défini un tel mode de calcul des intérêts de l'ouverture de crédit consentie à la SARL GREMAUD, par renvoi de l'acte authentique à l'article 11-1 des conditions générales de banque stipulant que ces intérêts sont calculés sur la base d'une année de 360 jours.

L'article 8 de l'acte authentique consacrant l'ouverture de crédit litigieuse stipule que 'le taux d'intérêts est de 5,333 % l'an actuellement' et il ne contient aucune précision quant au nombre de jours constituant la base annuelle sur lequel il est calculé.

Néanmoins, il est exact que l'article 5 de l'acte authentique précité prévoit que 'la créance exigible en capital de la Banque résultera du solde débiteur du compte n°10278 07301 20597603 ouvert dans les livres de la Banque, tel qu'il apparaîtra à l'échéance ou au moment de sa clôture pour quelque cause que ce soit.

Ce compte aura nature de compte courant et sera soumis aux conditions générales de Banque et aux conditions spéciales de la Banque créancière dont la débitrice reconnaît avoir reçu et signé un exemplaire'.

La Sarl GREMAUD verse aux débats les conditions générales de banque qui lui ont été remises le 8 septembre 2006 et objecte qu'elles ne contiennent aucun article relatif au calcul des intérêts.

Le CREDIT MUTUEL communique pour sa part un fascicule des 'conditions générales' datées de juillet 2006, référencé 82.02.64 07/06 dans lequel figure l'article 11-1 précité.

Si leurs références correspondent effectivement à celles des 'conditions générales de banque' que la Sarl GREMAUD a reconnu s'être vu remettre le 8 septembre 2006, elles ne sont pas signées de la Sarl GREMAUD.

Et il ne peut qu'être constaté, après lecture de leur sommaire que sous cette référence, ces 'conditions générales' se divisent en plusieurs parties parmi lesquelles une première intitulée 'conditions générales de banque' et une deuxième dénommée 'conditions générales des crédits professionnels'.

Or l'article 11-1 dont se prévaut le CREDIT MUTUEL figure dans cette dernière partie.

Il s'ensuit que la Sarl GREMAUD, en acceptant expressément que son engagement résultant de l'ouverture de crédit soit soumis aux seules 'conditions générales de Banque' n'a pas consenti à ce qu'il soit soumis aux conditions générales des crédits professionnels dont il n'est pas démontré qu'elle en avait eu connaissance.

Dès lors, le taux d'intérêt afférent ne pouvait être calculé sur une base annuelle de 360 jours mais devait l'être conformément au droit commun sur la base de 365 ou 366 jours par an.

Sur les conséquences de l'absence de clause conventionnelle de calcul des intérêts

Les parties admettent l'une et l'autre que dans l'hypothèse où le TEG indiqué dans l'acte d'ouverture de crédit n'aurait pas été effectivement appliqué, le taux légal doit être substitué au taux conventionnel.

Il a déjà été rappelé que le CREDIT MUTUEL a reconnu dans son courriel du 28 juillet 2010 que les intérêts avaient été calculés sur 360 jours conformément à la pratique bancaire.

L'irrégularité du taux nominal à partir duquel le TEG est calculé a donc à elle seule pour conséquence d'entraîner celle de ce dernier de sorte qu'il n'est pas besoin de s'interroger sur l'obligation éventuelle pour le CREDIT MUTUEL d'inclure, pour le calcul de ce taux, les frais d'information des cautions.

Pour autant, le CREDIT MUTUEL objecte que les intérêts effectivement perçus étant conforme au TEG dont la SARL GREMAUD avait connaissance par sa mention sur les 'tickets d'agios' ( en réalité les arrêtés du compte courant) qui lui étaient adressés périodiquement, la régularité du taux effectif global pratiqué a suppléé, pour les intérêts échus postérieurement à leur réception l'absence de fixation préalable par écrit dudit taux.

Et il ajoute encore que la SARL GREMAUD est irrecevable, à raison de l'écoulement du délai de la prescription légale de 5 ans avant qu'elle ne conteste l'exactitude des informations figurant sur ces relevés dans ses conclusions du 20 novembre 2012, à contester les tickets d'agios qu'elle a reçus antérieurement au 20 novembre 2007.

Comme le fait valoir la SARL GREMAUD, ayant assigné le 13 octobre 2010 le CREDIT MUTUEL pour contester les intérêts ayant été prélevés, elle a interrompu la prescription.

Quant au fait que l'indication du TEG sur les arrêtés de compte aurait suppléé l'absence de fixation préalable par écrit du TEG, il n'en est rien puisqu'à même suivre ce raisonnement, le TEG pratiqué n'a jamais été identique pour la période suivant l'envoi d'un arrêté de compte courant au taux indiqué sur cet arrêté.

Le taux d'intérêt légal doit être substitué au taux d'intérêt conventionnel.

La SARL GREMAUD en tire la conséquence que lui est due une somme de 106923,70 euros, l'imputation de la totalité des intérêts erronés devant se faire sur le capital, leur perception ne pouvant s'assimiler à un paiement.

Mais comme l'oppose le CREDIT MUTUEL, une telle imputation n'est fondée qu'en cas de déchéance de tout droit à intérêts et ce n'est pas la situation en l'espèce.

Après rectification du décompte versé aux débats par la Sarl GREMAUD qui procédait de façon injustifiée à cette imputation en capital, le montant des intérêts légaux qu'elle devait s'élève à 139081,69 euros alors que le CREDIT MUTUEL ne conteste pas avoir encaissé au titre des intérêts la somme de 228 226.58 euros.

Le CREDIT MUTUEL a perçu indûment la différence soit 89144.89 euros.

Sur les intérêts indus par l'application des dates de valeur

Cette demande n'étant formée qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il ne serait pas retenu que le TEG était irrégulier, il n'y a pas lieu de l'examiner.

Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable que la SARL GREMAUD conserve à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits.

Le CREDIT MUTUEL est condamné à lui payer à ce titre la somme de 8000 euros qu'elle réclame.

Sur les dépens

Le CREDIT MUTUEL qui succombe les supporte.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Dit qu'en raison de l'irrégularité du TEG figurant dans l'acte authentique portant ouverture de crédit, la société coopérative CAISSE de CREDIT MUTUEL BELLECOUR SAINT JEAN n'a pas satisfait à l'obligation légale de l'article L 313-2 du Code de la consommation d'indiquer préalablement par écrit le TEG,

Dit en conséquence que le taux d'intérêt légal se substitue au taux d'intérêt conventionnel,

Condamne la CAISSE de CREDIT MUTUEL BELLECOUR SAINT JEAN à payer à la SARL GREMAUD SOLUTIONS :

- la somme de QUATRE VINGT NEUF MILLE CENT QUARANTE QUATRE EUROS QUATRE VINGT NEUF CENTIMES (89144.89 euros) outre intérêts au taux légal à compter du 13 octobre 2010, date de l'assignation,

- HUIT MILLE EUROS (8000 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile,

et les entiers dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct pour ces derniers au profit de la SCP LAFFLY et Associés avocat.

LE GREFFIERPour LE PRESIDENT empêché

Frédérique JANKOVFrançois MARTIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 12/03450
Date de la décision : 31/10/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°12/03450 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-31;12.03450 ?
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