AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 12/05504
[F]
C/
SAS GROUPE CAYON
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 09 Juillet 2012
RG : F 08/02510
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2013
APPELANT :
[B] [F]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 11]
[Adresse 2]
[Localité 1]
comparant en personne
INTIMÉE :
SAS GROUPE CAYON
MR [U], responsable des ressources humaines (pouvoir)
[Adresse 1]
[Localité 2]
comparante en personne, assistée de Me Jérome CHOMEL DE VARAGNES de la SELARL EQUIPAGE, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Mai 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Didier JOLY, Président
Mireille SEMERIVA, Conseiller
Catherine PAOLI, Conseiller
Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 17 Septembre 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
[B] [F] a été engagé par la S.A.S. GROUPE CAYON en qualité de conducteur poids lourds (catégorie ouvrier, coefficient 150 M) suivant contrat écrit à durée indéterminée du 1er mars 2007, soumis à la convention collective nationale des transports routiers. Son ancienneté a été reprise à compter du 8 juillet 2004.
[B] [F] bénéficiait d'une rémunération mensuelle brute professionnelle garantie de 169 heures mensuelles pour un temps de service moyen de 169 heures mensuelles, auquel s'ajoutaient les heures d'équivalence majorées effectuées aux taux prévus, soit :
25% entre 170 heures et 186 heures par mois ou entre 510 heures et 559 heures par trimestre,
et des heures supplémentaires effectuées aux taux prévus, soit :
50% au-delà de 187 heures par mois ou de 559 heures par trimestre.
Le salarié ne pouvait prétendre à aucune affectation exclusive à un service ou à un véhicule.
Par avenant du 1er mars 2007 au contrat de travail, il a été convenu que [B] [F] exercerait ses fonctions de conducteur P.L. :
en assurant le remplacement de collègues en congé ou dont le contrat de travail était momentanément suspendu,
pour faire face à des accroissements temporaires d'activité,
sans pouvoir prétendre à aucun trafic ou véhicule attitré du fait de sa polyvalence.
Aux termes de l'avenant, le salarié était soumis à de multiples obligations, notamment :
prise de poste à toute heure du jour ou de la nuit, le plus souvent sur le site de [Localité 5], sans aucun préavis, y compris le dimanche soir,
travail de jour ou de nuit,
changements très fréquents de véhicule,
en contrepartie desquelles lui était octroyée une prime mensuelle brute de polyvalence de 155 €.
Un avenant contractuel du 1er avril 2007 a fait accéder [B] [F] au statut d'agent de maîtrise et a porté sa rémunération mensuelle brute à 1 534,99 € pour 169 heures sur douze mois, à laquelle s'ajoutaient :
une prime d'astreinte mensuelle brute de 100 €,
une prime de monitorat de 60,97 € par semaine de formation accompagnée.
Par lettre recommandée du 30 mai 2008, [B] [F] a constaté qu'il effectuait depuis le 8 juillet 2004 de nombreuses heures supplémentaires au-delà de son forfait mensuel de 210 heures.
Ayant demandé au directeur des ressources humaines de régulariser ses bulletins de paie, il avait été laissé sans travail avec l'obligation de restituer le véhicule qu'il utilisait pour se rendre sur les différents sites depuis le 1er avril 2007.
En conclusion, [B] [F] a demandé à son employeur de respecter les délais de prévenance en matière de prise de repos compensateur.
[B] [F] a réitéré sa protestation contre ces 'repos forcés' dans un courrier recommandé du 10 juin 2008
La S.A.S. GROUPE CAYON lui a répondu qu'il avait convenu avec le directeur d'exploitation de récupérer ses heures supplémentaires au-delà de 210 heures de travail effectif. Le salarié, qui avait atteint 210 heures de travail le 29 mai 2008, avait donc été placé en repos compensateur les deux premières semaines de juin.
L'employeur, ayant constaté que [B] [F] décomptait comme temps de travail le temps de déplacement de son domicile à son lieu de travail, a émis des réserves sur le volume de 365,35 heures supplémentaires depuis mars 2007, allégué par l'intéressé.
Par lettre recommandée du 14 juin 2008 avec accusé de réception du 18 juin, l'Union locale C.G.T. de [Localité 14] a informé la société de la désignation de [B] [F] en qualité de représentant syndical C.G.T. au comité d'entreprise.
Par lettre recommandée du 24 juin 2008, [B] [F] a fait savoir au président directeur général que le poste proposé au terme de son repos forcé avait pour but de l'éloigner des conducteurs de la région lyonnaise et ne correspondait pas à sa qualification. Il a sollicité la restitution de son véhicule de service et de son poste de conducteur-moniteur dans les plus brefs délais.
Par lettre recommandée du 2 juillet 2008, la S.A.S. GROUPE CAYON a vainement mis [B] [F] en demeure de reprendre son poste le 7 juillet à [Localité 14].
Puis, par lettre recommandée du 3 octobre 2008, elle lui a proposé sans davantage de succès de reprendre une activité de conducteur moniteur sur remorque, fonction impliquant occasionnellement des découchers, avec prise de poste à [Localité 14].
Au cours de cette période, les parties ont échangé de nombreux courriers traduisant leur désaccord sur le contenu du poste qu'occupait [B] [F] avant sa désignation par l'Union locale C.G.T.
Le 1er décembre 2008, la S.A.S. GROUPE CAYON a convoqué [B] [F] le 12 décembre en vue d'un entretien préalable à son licenciement.
Le 20 décembre 2008, le Comité d'entreprise a émis un avis favorable au licenciement de [B] [F].
Par décision du 25 février 2009, l'inspecteur du travail a refusé l'autorisation de licenciement sollicitée par l'employeur au motif que le salarié avait refusé la modification apportée à son contrat de travail et non de reprendre son poste.
Par ordonnance de référé du 27 janvier 2009, le juge départiteur du Conseil de prud'hommes de Lyon a relevé que la demande de prime de polyvalence de [B] [F] se heurtait à une contestation sérieuse. Il a condamné la S.A.S. GROUPE CAYON à payer au salarié un arriéré de prime d'assiduité à titre provisionnel.
Une ordonnance de référé du 12 mai 2009 a déclaré [B] [F] irrecevable en ses demandes de salaires de décembre 2008 à mars 2009, de primes, de dommages-intérêts et de remise en état de son contrat de travail tel qu'il était au 28 mai 2008 au motif qu'il ne démontrait pas que la S.A.S. GROUPE CAYON avait entendu modifier ses conditions de travail.
Par décision du 8 septembre 2009, le ministre du travail, sur le recours hiérarchique de la S.A.S. GROUPE CAYON, a confirmé la décision de l'inspecteur du travail du 25 février 2009 au motif que le refus par le salarié du changement de ses conditions de travail n'était pas fautif, cette modification ayant pour effet de l'empêcher d'exercer pleinement son mandat en l'éloignant de son site et l'employeur ne démontrant pas que la nouvelle affectation était indispensable au bon fonctionnement de l'entreprise.
[B] [F] a repris le travail le 12 octobre 2009.
Par lettre recommandée du 9 février 2010, la S.A.S. GROUPE CAYON a convoqué le salarié le 16 février en vue d'une sanction disciplinaire.
Par lettre recommandée du 17 février, elle lui a notifié un avertissement pour n'avoir pas respecté le délai de prévenance prévu par l'accord d'entreprise du 4 septembre 1998 pour la prise des heures de délégation.
Par lettre recommandée du 7 septembre 2010, la S.A.S. GROUPE CAYON a convoqué [B] [F] le 17 septembre en vue d'un entretien préalable à son licenciement.
Par lettre recommandée du 8 octobre 2010, elle lui a notifié une mise à pied disciplinaire de trois jours les 11, 12 et 13 octobre 2010 en raison des faits suivants :
excès manifestes pour refuser les instructions de travail de son exploitante [J] [I], mettant une pression psychologique démesurée et inutile sur sa collègue de travail qu'il avait fait craquer nerveusement,
absence de transmission des bons de délégation depuis le 6 juillet 2010 et absence d'information de l'exploitation sur la durée réelle de ses délégations, le planning prévisionnel communiqué ne permettant pas de connaître sa disponibilité et de lui fixer un programme de travail,
non-respect des instructions relatives au lieu de prise de service les 8 et 10 juillet 2010 (DHL à [Localité 13]) et les 3, 4 et 5 août 2010 (BMV à [Localité 12]), le salarié s'étant rendu au préalable sur le site de [Localité 14].
Par lettre recommandée du 17 novembre 2010, la S.A.S. GROUPE CAYON a convoqué [B] [F] le 26 novembre en vue d'un entretien préalable à son licenciement.
Par lettre recommandée du 13 décembre 2010, elle lui a notifié une mise à pied disciplinaire de trois jours les 16, 17 et 20 décembre 2010 en raison des faits suivants :
refus de prendre son service à [Localité 3] les 18, 21 et 22 octobre 2010, et 16 novembre 2010,
saisie manuelle de temps à disposition au lieu de périodes de repos le 23 septembre 2010 de 0 heure à 4 heure, le 24 septembre de 8 heures 55 à 24 heures et le 7 octobre 2010 de 0 heure à 15 heures 01.
Par jugement du 3 mars 2011, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la requête de la S.A.S. GROUPE CAYON tendant à l'annulation de la décision du ministre du travail du 8 septembre 2009, considérant que le ministre avait pu, sans erreur d'appréciation, estimer que le refus de [B] [F] d'accepter une modification de ses conditions de travail n'était pas fautif.
Par ordonnance de référé du 13 avril 2011, le Conseil de prud'hommes de Chalon-sur-Saône a débouté [B] [F] de ses demandes de remise en état du contrat de travail et de paiement des salaires depuis le 16 juin 2009.
Une ordonnance de référé du même Conseil de prud'hommes en date du 18 octobre 2011 a débouté [B] [F] de ses demandes d'indemnité de déplacement pour une réunion du comité d'entreprise du 23 juillet 2011 (aller-retour [Localité 4]), de frais d'autoroute et de repas.
Au cours d'une réunion du 19 septembre 2011 en présence de deux inspectrices du travail, une solution permettant de mettre fin à la situation d'absence continue de [B] [F] a été recherchée, mais en vain.
Par lettre recommandée du 2 novembre 2011, la S.A.S. GROUPE CAYON a convoqué le salarié le 14 novembre en vue d'un entretien préalable à son licenciement.
Au cours d'une réunion extraordinaire du 21 novembre 2011, le Comité d'entreprise a émis un avis favorable au licenciement de [B] [F].
Par lettre recommandée du 29 novembre 2011, la S.A.S. GROUPE CAYON a sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier [B] [F].
L'inspectrice du travail lui a accordé cette autorisation par une décision du 5 janvier 2012, motivée par le fait que les refus répétés de [B] [F] d'exécuter les ordres de mission les 5 janvier, 10 mai, 13 octobre et 21 octobre 2011, et ses absences injustifiées et non autorisées étaient établis.
L'employeur a notifié à [B] [F] son licenciement par lettre recommandée du 10 janvier 2012 et pour les faits suivants :
refus répétés d'exécuter les ordres de mission confiés par le service exploitation depuis le 4 janvier 2011,
absences injustifiées et non autorisées.
Le salarié a été dispensé de l'exécution de son préavis, sa rémunération étant toutefois maintenue.
Par arrêt du 31 mai 2012, la Cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 3 mars 2011, la décision de l'inspecteur du travail des transports du 25 février 2009 et la décision du ministre du travail du 8 septembre 2009, considérant que le refus de [B] [F] d'accepter une modification de ses conditions de travail, qui n'avait pas pour effet de l'empêcher d'exercer son mandat de membre du comité d'entreprise, constituait une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
L'arrêt a enjoint à l'inspecteur du travail de statuer à nouveau sur la demande de la S.A.S. GROUPE CAYON.
Le Conseil de prud'hommes de Lyon avait été saisi au fond le 11 juillet 2008 de demandes de rappels de salaire et de repos compensateurs.
Le bureau de jugement a entendu les parties sur le dernier état des demandes de [B] [F] à l'audience du 5 décembre 2011.
* * *
LA COUR,
Statuant sur l'appel interjeté le 11 juillet 2012 par [B] [F] du jugement rendu le 9 juillet 2012 par le Conseil de prud'hommes de LYON (section commerce) qui a :
- dit que l'intégration de la prime de nuit dans l'assiette des majorations pour heures supplémentaires était due par la S.A.S. GROUPE CAYON,
- pris acte de ce que la S.A.S. GROUPE CAYON s'engageait à verser à [B] [F] la somme de 185,65 € bruts au titre de l'intégration de la prime de nuit dans l'assiette des majorations pour heures supplémentaires,
- condamné à ce titre la S.A.S. GROUPE CAYON à payer, en deniers ou quittances, à [B] [F] la somme de 185,65 € bruts au titre de l'intégration de la prime de nuit dans l'assiette des majorations pour heures supplémentaires et la somme de 18,56 € bruts de congés payés afférents, outre les intérêts de droit à la date de la première demande,
- dit que le 16 février 2010 [B] [F] n'était pas en délégation, mais qu'il apportait son assistance à M. [N] [Z], salarié de la S.A.S. GROUPE CAYON, convoqué à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire,
- annulé de ce fait l'avertissement notifié par la S.A.S. GROUPE CAYON le 17 février 2010 à [B] [F],
- débouté [B] [F] du surplus de ses demandes,
- dit qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes reconventionnelles de la S.A.S. GROUPE CAYON,
- débouté la S.A.S. GROUPE CAYON de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la S.A.S. GROUPE CAYON à payer à [B] [F] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que ces sommes porteraient intérêts de droit sur le fondement de l'article 1153-11 du code civil,
- déclaré irrecevables les demandes en partie civile de l'Union locale C.G.T. de [Localité 14] et de l'Union départementale C.G.T. du Rhône,
- débouté l'Union locale C.G.T. de [Localité 14] et l'Union départementale C.G.T. du Rhône de leurs demandes,
- ordonné l'exécution provisoire sur les salaires et accessoires de salaire,
- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de [B] [F] à la somme de 1 990,00 € bruts ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 21 mai 2013 par [B] [F] qui demande à la Cour de :
- condamner la S.A.S. GROUPE CAYON à payer à [B] [F] les sommes suivantes :
indemnisation des jours fériés4 149,40 €
congés payés afférents414,94 €
rappel de salaire (heures supplémentaires de mars 2007 à mai 2008)5 315,73 €
congés payés afférents531,57 €
rappel de salaire (prime de monitorat)1 158,43 €
congés payés afférents115,84 €
rappel de salaire (période du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2009)21 612,16 €
congés payés afférents2 161,21 €
rappel de salaire (période du 1er octobre 2009 au 28 février 2012)48 586,11 €
congés payés afférents4 858,61 €
lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de l'instance devant le Conseil de prud'hommes,
dommages-intérêts pour repos compensateur 2007/20088 500,03 €
dommages-intérêts pour discrimination syndicale40 000,00 €
dommages-intérêts pour travail dissimulé15 445,08 €
dommages-intérêts pour harcèlement moral5 000,00 €
- annuler les sanctions disciplinaires, avertissement du 17 février 2009 et mises à pied des 8 octobre et 13 décembre 2010,
- ordonner au besoin la remise à la Cour des originaux et en copie à [B] [F], au titre de l'article 138 du code de procédure civile, des factures de téléphone pour les années 2007 à 2011 inclus de tous les agents de maîtrise conducteurs-moniteurs du Groupe CAYON, le litige portant sur le téléphone reposant en grande partie sur ces documents,
- ordonner au besoin la remise à la Cour des originaux des feuilles 1000 GC, et en copie à [B] [F], au titre de l'article 138 du code de procédure civile, pour la période du 1er mars 2007 au 28 mai 2008, le litige des heures supplémentaires reposant en grande partie sur ces documents,
- condamner la S.A.S. GROUPE CAYON à payer les salaires des mises à pied, déjà inclus dans ces calculs, dont [B] [F] a été indûment privé,
Subsidiairement :
dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail 40 000,00 €
- condamner la S.A.S. GROUPE CAYON à lui remettre une attestation Pôle Emploi rectifiée,
- condamner la S.A.S. GROUPE CAYON à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à lui rembourser le timbre fiscal de 35 €,
- débouter la S.A.S. GROUPE CAYON de ses demandes reconventionnelles ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 21 mai 2013 par la S.A.S. GROUPE CAYON qui demande à la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé l'avertissement notifié à [B] [F] le 17 février 2010,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la S.A.S. GROUPE CAYON de sa demande reconventionnelle au titre des remboursements de frais indus,
- le confirmer pour le surplus,
- en conséquence, débouter [B] [F] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner [B] [F] à verser à la S.A.S. GROUPE CAYON la somme de 8 016,96 € au titre des remboursements indus de frais de déplacements,
- condamner [B] [F] à verser à la S.A.S. GROUPE CAYON la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Sur la demande d'indemnisation des jours fériés :
Attendu que l'article 7 bis de l'annexe 1 de la convention collective, issu des avenants à cette convention en date des 13 novembre 1970 et 17 juillet 1975, vise au maintien de la rémunération intégrale du personnel ouvrier mensualisé, afin d'empêcher toute réduction de cette rémunération à l'occasion des jours fériés non travaillés ; qu'il a donc le même objet que celui prévu ultérieurement par l'article 3 de l'Accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977, rendu obligatoire par la loi du 19 janvier 1978 pour l'ensemble des salariés, dans la mesure où ces droits ne leur étaient pas reconnus antérieurement ; qu'il en résulte que ces deux avantages ne peuvent se cumuler et que le salarié mensualisé ne subit aucune perte de salaire du fait des jours fériés non travaillés ;
Que les engagements de la S.A.S. GROUPE CAYON, s'ils ont eu pour objet de faire droit à certaines revendications du personnel rendant leur statut plus favorable que celui issu de la convention collective d'origine, n'ont entraîné aucun cumul d'avantages, pas plus que l'accord interprofessionnel n'en avait lui même créé ; que l'objet de tous ces textes, quelle que soit leur nature, est le maintien du salaire du personnel mensualisé, quel que soit le nombre de jours fériés ;
Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté [B] [F] de sa demande de rappel de salaire au titre des jours fériés ;
Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires (mars 2007 à mai 2008) :
Attendu que l'examen des bulletins de paie communiqués fait apparaître qu'au cours de la période de mars 2007 à mai 2008 couverte par la demande, [B] [F] a été soumis à un forfait mensuel de 210 heures de travail, comprenant :
152 heures rémunérées au taux de base,
17 heures rémunérées au taux majoré de 25%,
17 heures supplémentaires rémunérées au taux majoré de 25%,
24 heures supplémentaires rémunérées au taux majoré de 50% ;
Que [B] [F] sollicite paiement d'heures supplémentaires qu'il affirme avoir effectuées au-delà du forfait de 210 heures ;
Attendu que selon l'article 5 (1°) du décret n°83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que cette durée est égale à l'amplitude de la journée de travail, définie au paragraphe 1 de l'article 6, diminuée de la durée totale des coupures et du temps consacré aux repas, à l'habillage et au casse-croûte, dans le respect des dispositions de l'article L. 212-4 du code du travail (devenu L 3121-2) selon lesquelles le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux coupures sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis au premier alinéa de l'article L. 212-4 (devenu L 3121-1) sont réunis ;
Attendu qu'aux termes de l'article 4 du décret n°83-40, la durée hebdomadaire du travail est calculée sur une semaine ; qu'en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'article L. 212-8 du code du travail, devenu L 3122-9, la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants peut être calculée sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ;
Que le cadre du calcul de la durée du travail fait d'ailleurs difficulté depuis longtemps dans le Groupe CAYON puisque par jugement du 24 octobre 2002, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la requête de l'employeur tendant à l'annulation d'une décision de l'inspecteur du travail, confirmée par le ministre des transports, qui avait rejeté sa demande de dérogation au calcul de la durée du travail à la semaine pour les personnels roulants 'grands routiers' ; qu'en l'espèce, les accords d'entreprise des 16 octobre 2009 et 29 octobre 2010, auxquels se réfère la S.A.S. GROUPE CAYON, sont postérieurs à la période couverte par la demande de rappel de salaire et sont donc inopérants ; que la société intimée ne démontre pas qu'elle satisfaisait de mars 2007 à mai 2008 aux conditions réglementaires requises pour déroger au cadre hebdomadaire du calcul de la durée du travail ; que les calculs qu'elle a effectués à l'intérieur du module mensuel sont par conséquent erronés ;
Que [B] [F] a fait application des dispositions l'article 5 (1°) du décret n°83-40 dans les feuilles de travail qu'il communique et sur la base desquelles il a établi le tableau récapitulatif des heures supplémentaires non payées qui constitue sa pièce n°210 (annexe 2) ; que contrairement à ce que soutient la S.A.S. GROUPE CAYON, il n'a pas confondu amplitude de la journée de travail et temps de travail effectif ; que les erreurs ponctuelles inévitables dans ce type de calculs, telles celles relevées par la société les 29, 30 mai 2007 et 3 avril 2008, ne lui sont pas toujours favorables ; que l'employeur admet en effet que les écarts constatés en cas de conduite en double équipage entre les décomptes d'heures des deux chauffeurs ne sont pas systématiquement en faveur de [B] [F], ainsi le 7 juin 2007 ;
Attendu qu'interprétant l'article 15 du règlement (CEE) n°3821/85 du Conseil du 20 décembre 1985, qui définit les périodes de temps que les conducteurs doivent enregistrer distinctement et séparément, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit, dans un arrêt C-297/99 du 18 janvier 2001, que l'obligation pour le conducteur d'enregistrer tous les autres temps de travail concerne également :
- les périodes consacrées par un conducteur aux déplacements nécessaires pour prendre en charge un véhicule soumis à l'obligation d'installer et d'utiliser un appareil de contrôle et situé en un lieu autre que le domicile du conducteur ou le centre d'exploitation de l'employeur, que celui-ci ait donné des instructions à cet égard ou que le choix de l'horaire et des modalités de transport ait appartenu au conducteur,
- les périodes consacrées par un conducteur à la conduite dans le cadre d'un service de transport qui échappe au domaine d'application du règlement n° 3821/85, avant la prise en charge d'un véhicule soumis à l'application de ce règlement ;
Qu'aux termes de l'article 9 du règlement CE n° 561/2006 du 15 mars 2006, tout temps passé par un conducteur pour se rendre sur le lieu de prise en charge d'un véhicule entrant dans le champ d'application du présent règlement ou en revenir, lorsque celui-ci ne se trouve ni au lieu de résidence du conducteur ni à l'établissement de l'employeur auquel le conducteur est normalement rattaché, n'est pas considéré comme repos ou pause, à moins que le conducteur se trouve dans un ferry ou un train et ait accès à une couchette ; que tout temps passé par un conducteur conduisant un véhicule n'entrant pas dans le champ d'application du présent règlement pour se rendre sur le lieu de prise en charge d'un véhicule entrant dans le champ d'application du présent règlement ou en revenir, lorsque celui-ci ne se trouve ni au lieu de résidence du conducteur ni à l'établissement de l'employeur auquel le conducteur est normalement rattaché, est considéré comme une autre tâche ;
Qu'il en résulte que la S.A.S. GROUPE CAYON n'est pas fondée à soutenir que les trajets effectués par [B] [F] entre son domicile à [Localité 7] (Rhône) et ses divers lieux de prise de poste, tels [Localité 10], [Localité 8], [Localité 12], [Localité 6], [Localité 9], [Localité 13], etc, au moyen d'un véhicule de service jusqu'en mai 2008, et conformément aux instructions de son employeur, n'étaient pas des temps de travail effectif au sens de l'article L 3121-1 du code du travail, quelle que soit la distance séparant ces lieux du domicile du salarié ;
Qu'appréciant les éléments communiqués par l'une et l'autre partie conformément aux prescriptions de l'article L 3171-4 du code du travail, la Cour en retire la conviction que [B] [F] a effectué les 419,71 heures supplémentaires dont il sollicite le paiement ; que la S.A.S. GROUPE CAYON sera donc condamnée à lui payer un rappel de salaire de 5 315,73 € outre 531,57 € au titre des congés payés afférents ;
Sur les repos compensateurs :
Attendu que selon les mentions des bulletins de paie, [B] [F] avait acquis au 31 mai 2008 31,04 heures de repos compensateur ; qu'il a bénéficié de ces repos début juin 2008 ; qu'il peut donc seulement prétendre aux repos compensateurs auxquels lui ouvraient droit les heures supplémentaires en paiement desquelles lui est alloué un rappel de salaire de 5 315,73 € ; qu'une somme de 3 827,75 € lui sera accordée à titre d'indemnité pour la perte des repos compensateurs, outre 382,77 € au titre des congés payés afférents ;
Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé :
Attendu qu'aux termes de l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre premier de la troisième partie ;
Attendu qu'aux termes de l'article L 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ;
Que l'opacité de la durée du travail au sein du groupe CAYON est une donnée ancienne puisque l'inspectrice du travail la relevait déjà dans sa décision du 14 mars 2001 ; que le fait d'imposer à [B] [F] un forfait mensuel de 210 heures de travail et de s'abstenir ensuite de décompter les heures de travail qui excédaient ce forfait, au point de méconnaître les dispositions de l'article 9 du règlement CE n° 561/2006 du 15 mars 2006, manifeste l'intention de la S.A.S. GROUPE CAYON de dissimuler une partie des heures de travail réellement accomplies ;
Qu'en conséquence, la S.A.S. GROUPE CAYON sera condamnée à payer à [B] [F] l'indemnité de 15 445,08 € qu'il sollicite pour travail dissimulé ;
Sur la demande de rappel de prime de monitorat :
Attendu que l'avenant contractuel du 1er avril 2007 prévoyait en faveur de [B] [F] une prime de monitorat de 60,97 € par semaine de formation accompagnée ; que le salarié soutient qu'il n'a pas bénéficié de ces primes pour 12 semaines de formations en 2007 et 7 semaines en 2008 ; qu'il présente une demande de rappel de primes qui couvre toute la période d'avril 2007 à avril 2008 ; que cette demande n'est étayée par aucun élément ; que dans ces conditions, la Cour ne s'explique pas comment l'appelant a pu établir le tableau très précis qui constitue son annexe 7 ; qu'il est troublant de constater que [B] [F], qui a adressé à son employeur treize lettres recommandées du 30 mai au 15 décembre 2008 pour exiger le respect scrupuleux de ses droits, n'y a jamais évoqué les primes de monitorat restant dues pour certaines depuis avril 2007 ; que le jugement qui l'a débouté de ce chef de demande sera donc confirmé ;
Sur la demande de rappel de salaire du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2009 :
Attendu que pour annuler les décisions administratives ayant refusé d'autoriser la S.A.S. GROUPE CAYON à licencier [B] [F], la Cour administrative d'appel de Lyon, par arrêt du 31 mai 2012, a dit que le refus du salarié d'accepter la modification de ses conditions de travail était fautive ; que ce motif, qui constitue le soutien nécessaire de sa décision, s'impose à la Cour d'appel de Lyon, saisie du présent litige ; qu'il en résulte que l'inexécution par [B] [F] d'une prestation de travail du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2009 est imputable au salarié lui-même qui ne peut, en conséquence, prétendre au versement de la rémunération correspondante ; que [B] [F] sera débouté de ce chef de demande, le jugement entrepris étant confirmé ;
Sur la demande de rappel de salaire du 1er octobre 2009 au 29 février 2012 :
Attendu que [B] [F] fait valoir qu'à compter de sa reprise du travail, il a été rémunéré sur la base de 169 heures mensuelles de travail et non de 210 heures comme auparavant ; qu'il sollicite le rappel de salaire correspondant à cette différence de volume horaire d'activité ;
Mais attendu que si les bulletins de paie de mars 2007 à juillet 2008 portent mention d'un nombre d'heures rémunérées au moins égal à 210 heures, jamais aucun accord n'était intervenu entre les parties pour convenir de la rémunération de [B] [F] sur la base d'un forfait ; qu'il s'agissait d'une décision unilatérale de l'employeur, contraire aux termes du contrat de travail, et n'ayant jamais reçu l'aval de l'appelant ; que celui-ci était donc sans droit à la pérennisation de ce mode de rémunération ;
Qu'en conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté [B] [F] de sa demande de rappel de salaire sur la période du 1er octobre 2009 au 29 février 2012 ;
Sur la demande d'annulation de l'avertissement du 17 février 2010 :
Attendu qu'aux termes des articles L 1333-1 et L 1333-2 du code du travail, dont les dispositions demeurent applicables lorsqu'un licenciement a été ultérieurement prononcé, le juge du contrat de travail peut, au vu des éléments que doit fournir l'employeur et de ceux que peut fournir le salarié, annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ;
Qu'en l'espèce, la S.A.S. GROUPE CAYON ne saisit la Cour d'aucun moyen opérant contre le jugement qui a annulé l'avertissement pour des motifs que la Cour adopte ;
Sur la demande d'annulation de la mise à pied disciplinaire du 8 octobre 2010 :
Attendu qu'en refusant de prendre son service à [Localité 13] les 8 juillet, 10 juillet et 7 septembre 2010, et à [Localité 12] les 3, 4 et 5 août 2010, et en se présentant sans raison valable sur le site de la S.A.S. GROUPE CAYON à [Localité 14], [B] [F] a commis une insubordination qui justifie la mise à pied qui lui a été notifiée et qui est proportionnée à la faute commise ;
Sur la demande d'annulation de la mise à pied disciplinaire du 13 décembre 2010 :
Attendu qu'en refusant de prendre son service à [Localité 3] les 18, 21, 22 octobre et 16 novembre 2010, et en se présentant sans raison valable sur le site de la S.A.S. GROUPE CAYON à [Localité 14], [B] [F] a commis une insubordination qui justifie la mise à pied qui lui a été notifiée et qui est proportionnée à la faute commise ;
Sur la discrimination syndicale :
Attendu qu'aux termes de l'article L 2141-5 du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail ;
Attendu que selon l'article L 1132-1 du même code, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales ;
Qu'aux termes de l'article L 1134-1, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Qu'en l'espèce, [B] [F] invoque :
son absence d'emploi du 20 juin 2008 au 12 octobre 2009,
l'absence de rémunération durant deux mois et sa rémunération incomplète du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2009,
son affectation depuis octobre 2009, de fait à un emploi de chauffeur-routier et non de conducteur moniteur,
le refus de l'employeur d'accéder à sa demande de formation pour la validation de ses certificats d'aptitude,
le refus d'accès sur le site de CALBERSON à [Localité 9],
les sanctions disciplinaires injustifiées ;
Que les trois premiers griefs adressés à la S.A.S. GROUPE CAYON ne sont pas de nature à laisser supposer l'existence d'une discrimination, la Cour administrative d'appel ayant jugé que le refus de [B] [F] d'accepter la modification de ses conditions de travail, qui était à l'origine de son absence d'emploi et de rémunération, était fautif ; que les mises à pied des 8 octobre et 13 décembre 2010 étaient justifiées ; qu'en ce qui concerne le grief n°4, la S.A.S. GROUPE CAYON justifie à la page 57 de ses écritures le refus opposé aux demandes de formation de [B] [F] par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;
Attendu, cependant, que selon l'article L 2325-11 du code du travail, pour l'exercice de leurs fonctions, les membres élus du comité d'entreprise et les représentants syndicaux au comité d'entreprise peuvent, durant les heures de délégation, se déplacer hors de l'entreprise ; qu'ils peuvent également, tant durant les heures de délégation qu'en dehors de leurs heures habituelles de travail, circuler librement dans l'entreprise et y prendre tous contacts nécessaires à l'accomplissement de leur mission, notamment auprès d'un salarié à son poste de travail, sous réserve de ne pas apporter de gêne importante à l'accomplissement du travail des salariés ;
Qu'en l'espèce, il résulte des pièces et des débats que la S.A.S. GROUPE CAYON affecte des salariés, à titre temporaire ou permanent, sur le site de l'entreprise cliente CALBERSON ; que le salarié [W] [G] ayant sollicité [B] [F] le 23 décembre 2009 à la suite d'un incident qui l'avait opposé à ce client, [B] [F] s'est vu opposer par la société CALBERSON une interdiction d'accès à ses installations et a dû rencontrer [W] [G] à l'extérieur ; que [B] [F] n'a donc pu rencontrer ce dernier à son poste de travail ainsi que l'article L 2325-11 l'y autorisait ; que l'explication de la S.A.S. GROUPE CAYON, qui prétend ne pouvoir imposer à ses clients les règles qu'ils appliquent à l'intérieur de leur site, est sans portée ; qu'il incombait en effet à la S.A.S. GROUPE CAYON d'anticiper la difficulté de sorte que les représentants du personnel puissent rencontrer sur leurs postes de travail les salariés affectés chez des clients dans les mêmes conditions que les salariés qui travaillent sur les sites de la société intimée ; qu'il suffisait, selon l'inspecteur du travail, de faire figurer les représentants du personnel sur la liste des salariés du groupe CAYON susceptibles de pénétrer sur les sites des sociétés clientes ; que la restriction apportée à la liberté de circulation de [B] [F] caractérise une discrimination syndicale, qui n'a causé qu'un préjudice limité puisque [B] [F] a pu rencontrer [W] [G] à l'extérieur ;
Qu'en conséquence, la S.A.S. GROUPE CAYON sera condamnée à payer à [B] [F] une somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts ;
Sur la demande subsidiaire de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :
Attendu qu'au soutien de sa demande subsidiaire de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, [B] [F] reprend les éléments de fait articulés comme laissant supposer l'existence d'une discrimination ; qu'en réalité, le manquement à l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail est imputable à [B] [F] lui-même qui s'est enfermé dans une attitude d'opposition systématique à toutes les propositions de la S.A.S. GROUPE CAYON, préférant exercer une activité d'auto-entrepreneur à l'extérieur que d'accepter les solutions offertes, et acculant l'inspectrice du travail, dont la médiation avait été vaine le 19 septembre 2011, à autoriser son licenciement le 5 janvier 2012 ; que [B] [F] sera donc débouté de ce chef de demande ;
Sur la demande nouvelle de dommages-intérêts pour harcèlement moral :
Attendu qu'aux termes de l'article L 1154-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l'application des articles L 1152-1 à L 1152-3, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
Que les faits mis en avant par [B] [F] sont :
- le fait que l'employeur n'a pas hésité à le décrier lors de réunions des délégués du personnel,
- le procès-verbal du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, dans lequel il est accusé à tort, reste affiché dans les vestiaires à [Localité 5] depuis le 25 octobre 2010,
- l'employeur s'est rendu complice du harcèlement du responsable des ressources humaines et a pris position en faveur du harceleur,
- la direction a cautionné le blocage du dernier téléphone professionnel dont disposait [B] [F] à un seul appelant nominatif la dernière année,
- la direction lui faisait balayer les remorques devant les bureaux de l'exploitation à [Localité 5],
- ses demandes de congés recevaient une réponse proche de la date de son départ,
- le refus de la S.A.S. GROUPE CAYON pendant plusieurs mois de lui verser régulièrement son salaire ;
Que [B] [F] ne peut revendiquer le droit de s'exprimer librement, et parfois avec véhémence, au cours des réunions des délégués du personnel, comme d'ailleurs du comité d'entreprise, et restreindre la possibilité pour le représentant de l'employeur de s'exprimer à son tour ; qu'aucun élément ne permet de vérifier les conditions d'affichage du procès-verbal de réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail à [Localité 5] ; que [B] [F] est sans qualité pour solliciter réparation du harcèlement moral éventuellement subi par d'autres salariés ; que [B] [F] n'a jamais demandé au service atelier de résoudre le problème purement technique de fonctionnement de son téléphone, préférant entretenir une vaine polémique ; que l'appelant ne peut tirer de ses écrits à l'employeur (pièces n°177 et 180) la preuve de ce qu'on l'a obligé à balayer les remorques à [Localité 5] ; que le salarié a demandé le 15 juin 2011 seulement à partir en congé le 18 juillet ; que la date à laquelle le congé sollicité lui a été accordé n'est pas connue ; que le refus de lui verser son salaire était justifié par l'absence de toute prestation de travail ;
Que [B] [F] n'établissant pas des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, sa demande de dommages-intérêts sera rejetée ;
Sur la demande reconventionnelle de la S.A.S. GROUPE CAYON :
Attendu que si, pour l'exercice de leurs fonctions, les délégués du personnel peuvent, durant les heures de délégation, se déplacer hors de l'entreprise, aucun texte légal n'impose à l'employeur de rembourser les frais de déplacement qu'à cette occasion les délégués du personnel peuvent engager ; qu'une convention collective, un accord d'entreprise ou un usage peuvent cependant mettre une telle obligation à la charge de l'employeur ;
Qu'en l'espèce, par lettre du 14 septembre 2009, la S.A.S. GROUPE CAYON a rappelé à [B] [F] les règles applicables au remboursement des frais exposés par les représentants du personnel, et qui excluaient la prise en charge par l'employeur des frais occasionnés par des réunions ou des rendez-vous organisés par le représentant du personnel de sa propre initiative ; qu'au contraire, étaient remboursés les frais engagés pour assister à une réunion organisée par l'employeur ou sollicitée par les représentants du personnel ou pour assister un salarié pendant un entretien préalable à son licenciement ; que dans un courrier du 16 septembre 2009 et encore devant la Cour, [B] [F] s'est prévalu d'un usage contraire moins restrictif ; que les attestations de [L] [Q], [A] [R] et [X] [K] sont inopérantes, aucun de ces salariés n'ayant exercé de fonctions représentatives après 1992 ; qu'il n'est donc pas possible de tirer de leur témoignage, déjà fragilisé par l'ancienneté des faits rapportés, la preuve d'un usage en vigueur en 2008 ; que les bordereaux de transmission de chèques de remboursement de frais à [E] [H], de 1994 à 2001, ne portent pas mention du motif du déplacement, à l'exception du remboursement du 30 septembre 1994, correspondant aux frais exposés à l'occasion du protocole électoral ; que ce motif entre dans les prévisions de la lettre du 14 septembre 2009 ; que dans une attestation du 17 juillet 2009, [O] [Y] certifie que le Groupe CAYON le dédommage régulièrement et totalement de ses frais kilométriques découlant de ses convocations patronales et de ses délégations ; que cette pièce est contredite par les attestations de [D] [M] (délégué syndical FO) et de [A] [S] (représentant UNSA), selon lesquels leurs frais de déplacement ne leur étaient remboursés que dans les conditions rappelées par la direction en septembre 2009 ; que [B] [F] ne rapporte pas la preuve d'une pratique constante, générale et fixe, procédant de la part de la S.A.S. GROUPE CAYON de la volonté de consentir aux représentants du personnel un avantage supplémentaire de nature à faciliter l'accomplissement de leur mission ;
Que la S.A.S. GROUPE CAYON a établi un tableau des frais de déplacement remboursés indûment, au vu des motifs de déplacement indiqués par [B] [F] dans ses demandes ; que celui-ci ne conteste pas qu'aucun des déplacements ainsi recensés ne correspondait à une réunion organisée par l'employeur ou sollicitée par les représentants du personnel ou à l'assistance d'un salarié pendant un entretien préalable à son licenciement ;
Qu'en conséquence, [B] [F] sera condamné à restituer à la S.A.S. GROUPE CAYON la somme de 8 016,96 € perçue indûment ;
Sur les frais irrépétibles :
Attendu qu'il est équitable de laisser chacune des parties supporter les frais qu'elle a exposés, tant en première instance que devant la Cour, et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [B] [F] de ses demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires, d'indemnisation des repos compensateurs non pris, d'indemnité pour travail dissimulé, de dommages-intérêts pour discrimination syndicale et en ce qu'il a débouté la S.A.S. GROUPE CAYON de sa demande reconventionnelle,
Statuant à nouveau :
Condamne la S.A.S. GROUPE CAYON à payer à [B] [F] :
- la somme de cinq mille trois cent quinze euros et soixante-treize centimes (5 315,73 €) à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,
- la somme de cinq cent trente-et-un euros et cinquante-sept centimes (531,57 €) au titre des congés payés afférents,
- la somme de trois mille huit cent vingt-sept euros et soixante-quinze centimes (3 827,75 €) à titre d'indemnité pour perte des repos compensateurs,
- la somme de trois cent quatre-vingt-deux euros et soixante-dix-sept centimes (382,77 €) au titre des congés payés afférents,
- la somme de quinze mille quatre cent quarante-cinq euros et huit centimes (15 445,08 €) à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
- la somme de deux mille euros (2 000 €) à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale ;
Condamne [B] [F] à restituer à la S.A.S. GROUPE CAYON la somme de huit mille seize euros et quatre-vingt-seize centimes (8 016,96 €) perçue indûment en remboursement de frais de déplacement,
Ordonne la compensation des créances réciproques des parties,
Confirme le jugement entrepris dans ses autres dispositions,
Y ajoutant :
Déboute [B] [F] de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral,
Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la S.A.S. GROUPE CAYON aux dépens d'appel.
Le greffierLe Président
S. MASCRIERD. JOLY