AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 11/08498
SARL MEDICAL COATING
C/
[G]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 06 Décembre 2011
RG : F 09/02306
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 15 MAI 2013
APPELANTE :
SARL MEDICAL COATING
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Murielle VANDEVELDE-PETIT de la SELARL VANDEVELDE AVOCATS, avocat au barreau de LYON
substitué par Me François-Xavier LECLERC, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
[S] [G]
née le [Date naissance 1] 1969 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 2]
comparant en personne,
assistée de Me Aurélie BABOLAT, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2012/2949 du 09/02/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
PARTIES CONVOQUÉES LE : 20 Avril 2012
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 17 Janvier 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre
Hervé GUILBERT, Conseiller
Christian RISS, Conseiller
Assistés pendant les débats de Ouarda BELAHCENE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 15 Mai 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS
La SARL MEDICAL COATING, qui vient aux droits et obligations de la SARL COATING INDUSTRIES, produit des revêtements sur implants orthopédiques et dentaires ;
Elle fait partie du groupe MEDICAL GROUP spécialisé dans la recherche et le développement en biotechnologie ;
Elle est basée à [Localité 4] et son personnel relève de la convention collective des mensuels de la métallurgie du Rhône ;
Le 1er octobre 2001, la SARL COATING INDUSTRIES embauchait par un contrat à durée déterminée de quatre mois [S] [G] en tant qu'opératrice masquage à plein temps, son horaire quotidien de travail étant du lundi au vendredi inclus de 13 heures 30 à 21 heures avec une pause d'une demi-heure ;
Le 28 décembre 2001, les parties convenaient de poursuive la relation de travail par un contrat écrit à durée indéterminée rédigé dans les mêmes termes ;
À la fin du 1er semestre de 2005, la SARL MEDICAL COATING venait aux droits et obligations de la SARL COATING INDUSTRIES ;
Le 1er juillet 2005, la SARL MEDICAL COATING embauchait [S] [G] par un contrat écrit à durée indéterminée en tant qu'opératrice masquage, contrôle final et expéditions ; l'ancienneté était reprise au 1er octobre 2001 ; la salariée travaillait en équipe, une semaine le matin de 6 à 13 heures 30, l'autre l'après-midi de 13 heures 30 à 21 heures, une demi-heure de pause étant prévue dans l'un et l'autre cas ;
Par un premier avenant du même jour l'horaire hebdomadaire de travail était porté à 38 heures 30 ;
Par un second avenant du même jour [S] [G] devenait responsable technique finition et contrôle final TSM ;
À partir du début de 2007 les relations entre les parties se dégradaient, alors que les supérieurs de [S] [G] changeaient et que les méthodes de production de l'entreprise se modifiaient ;
[S] [G] se trouvait en arrêt maladie aux périodes suivantes :
- 2 au 16 février 2007,
- 16 au 23 mars 2007,
- 25 juillet au 27 août 2007,
- 5 mai au 9 juin 2008,
- 18 juin au 10 octobre 2008 ;
À partir de mai 2008 l'employeur avisait la salariée de modifications de ses horaires de travail, laquelle les refusait ;
Les 13 et 28 octobre 2008, le médecin du travail déclarait [S] [G] inapte à son poste ;
Par lettre recommandée avec avis de réception du 28 novembre 2008, la SARL MEDICAL COATING proposait à [S] [G] en reclassement deux autres postes au conditionnement, l'un en son sein, l'autre à la SARL MEDICAL PACKAGING ;
[S] [G] refusait ces deux postes par un lettre recommandée avec avis de réception de son avocat en date du 12 décembre 2008 ;
Par lettre recommandée avec avis de réception du 16 décembre 2008, la SARL MEDICAL COATING licenciait [S] [G] pour cause réelle et sérieuse : inaptitude déclarée par le médecin du travail et refus de tout reclassement ;
PROCÉDURE
Le 17 juin 2009, [S] [G] saisissait le conseil de prud'hommes de Lyon en constatation d'un harcèlement moral, nullité du licenciement et condamnation de la SARL MEDICAL COATING à lui payer les sommes suivantes :
- 1.539,40 € à titre de compléments de salaires pour les périodes d'arrêt maladie de 2007 et 2008,
- 100 € à titre de rappel de salaire sur la prime exceptionnelle de 2007,
- 125 € à titre de rappel de salaire sur la prime exceptionnelle de 2008,
- 1.200 € à titre de rappel de la prime d'encadrement d'octobre 2007 à décembre 2008,
- 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,
- 15.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,
- 1.564,63 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,
- 3.129,26 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 312,92 € au titre des congés payés y afférents ;
Subsidiairement elle demandait les mêmes dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Maître Aurélie BABOLAT, avocat de [S] [G], demandait le bénéfice d'une indemnité de 2.000 € sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Comparaissant, la SARL MEDICAL COATING concluait au débouté total de [S] [G] et à sa condamnation à lui payer les sommes suivantes :
- 581,17 € à titre de rappel d'un trop-perçu de salaire,
- 2.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par jugement contradictoire du 6 décembre 2011, le conseil de prud'hommes de Lyon, section de l'industrie, reconnaissait l'existence d'un harcèlement moral, disait le licenciement nul et condamnait la SARL MEDICAL COATING à payer à [S] [G] les sommes suivantes :
- 1.539,40 € à titre de compléments de salaires pour les périodes d'arrêt maladie de 2007 et 2008,
- 100 € à titre de rappel de salaire sur la prime exceptionnelle de 2007,
- 1.200 € à titre de rappel de la prime d'encadrement d'octobre 2007 à décembre 2008,
- 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,
- 15.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,
- 1.564,63 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,
- 3.129,26 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 312,92 € au titre des congés payés y afférents ;
Il condamnait la SARL MEDICAL COATING à payer à maître Aurélie BABOLAT, avocat de [S] [G], une indemnité de 2.000 € sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il ordonnait l'exécution provisoire des condamnations à dommages-intérêts dans la limite de 10.000 € ;
La SARL MEDICAL COATING interjetait appel du jugement le 15 décembre 2011 ;
Elle conclut à son infirmation partielle, au débouté total de [S] [G] et à sa condamnation à lui payer une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
[S] [G] conclut à la confirmation du jugement et sur appel incident à la condamnation de la SARL MEDICAL COATING à lui payer la somme de 125 € au titre de la prime exceptionnelle d'avril 2008 ;
Maître Aurélie BABOLAT, avocat de [S] [G]; demande le bénéfice d'une indemnité de 2.000 € sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Subsidiairement [S] [G] demande la même somme à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le complément de rémunération pendant les arrêts maladie de 2007 et 2008
Attendu que [S] [G] fonde sa demande sur l'article 40 de la convention collective des mensuels de la métallurgie du Rhône selon lequel le salarié en arrêt maladie comptant une ancienneté comprise entre 5 et 10 ans a droit à une garantie de ressources de 100% pendant les 60 premiers jours et de 75% pendant les 40 jours suivants ;
Attendu que ces périodes s'entendent sur l'année civile ;
Attendu que [S] [G] totalisait 55 jours d'absence en 2007, ce qui lui donnait droit à la garantie de ressources à 100% ;
Attendu que la SARL MEDICAL COATING ne pouvait dès lors opérer des retenues ;
Attendu que [S] [G] se trouve dès lors bien fondée à demander le paiement de la somme de 653,02 € ;
Attendu que [S] [G] totalisait 192 jours d'absence en 2008, ce qui épuisait ses droits conventionnels à garantie de ressources ;
Attendu qu'elle s'avère ainsi mal fondée en sa demande ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être partiellement infirmée ;
Sur le rappel de la prime exceptionnelle de 2007
Attendu que cette prime ne constituait pas un élément du salaire, ce qui ne conférait aucun droit à [S] [G] ;
Attendu qu'elle s'avère ainsi mal fondée en sa demande ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur le rappel de la prime exceptionnelle de 2008
Attendu que cette prime ne constituait pas un élément du salaire, ce qui ne conférait aucun droit à [S] [G] ;
Attendu qu'elle s'avère ainsi mal fondée en sa demande ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être confirmée ;
Sur le rappel de la prime d'encadrement d'octobre 2007 à décembre 2008
Attendu que [S] [G] devenait le 1er juillet 2005 responsable technique finition et contrôle final TSM ;
Attendu qu'elle percevait à compter de cette date une prime mensuelle d'encadrement de 80 € ;
Attendu que du fait de son arrêt maladie elle cessait d'exercer toute fonction d'encadrement à compter de mai 2008 ;
Attendu qu'elle ne se trouve fondée en sa demande que pour la période de 7 mois ayant couru d'octobre 2007 à avril 2008 ;
Attendu que la SARL MEDICAL COATING lui est ainsi redevable de 560 € ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être partiellement infirmée ;
Sur le harcèlement moral
Attendu que selon l'article L. 1152-1 du code du travail aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Attendu que, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement ;
Attendu que [S] [G] soutient avoir été mise à l'écart à partir de juillet 2007, s'être vue privée de primes et avoir subi des changements arbitraires d'horaires de travail ;
Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats que [S] [G] s'entendait mal avec certaines de ses collègues nouvellement arrivées dans les premiers mois de 2007 ;
Attendu que parallèlement elle se désinvestissait de son travail ;
Attendu qu'elle manifestait le 9 juillet 2007 son désir de quitter l'entreprise ; qu'en fait elle souhaitait percevoir des indemnités de départ ;
Attendu que par la suite l'ambiance de travail se dégradait progressivement, ce en partie du fait de [S] [G] ;
Attendu que les changements d'horaires étaient conformes au contrat de travail et à ses avenants, et répondaient à des impératifs de la production ; qu'ils ne concernaient pas [S] [G] seule mais l'ensemble de son équipe ;
Attendu qu'elle s'avère ainsi mal fondée à invoquer avoir subi un harcèlement moral ;
Attendu qu'elle succombera dès lors en sa demande de dommages-intérêts ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur la nullité du licenciement
Attendu qu'en l'absence d'un harcèlement moral [S] [G] est mal fondée en sa demande ;
Attendu qu'elle succombera ainsi en sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement
Attendu que selon l'article L. 1226-2 du code du travail lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
Attendu que la lettre de licenciement, qui circonscrit le litige, contient les motifs suivants : inaptitude déclarée par le médecin du travail et refus de tout reclassement ;
Attendu que [S] [G] se trouvait constamment en arrêt de travail à compter du 5 mai 2008 ;
Attendu que le médecin du travail la déclarait inapte à son poste les 13 et 28 octobre 2008 ;
Attendu que par lettre recommandée avec avis de réception du 28 novembre 2008, la SARL MEDICAL COATING proposait à [S] [G] en reclassement deux postes au conditionnement, l'un en son sein, l'autre à la SARL MEDICAL PACKAGING ;
Attendu que [S] [G] refusait ces deux postes par un lettre recommandée avec avis de réception de son avocat en date du 12 décembre 2008 ;
Attendu que dans ces conditions le licenciement se fonde sur une cause réelle et sérieuse, ce qui rend [S] [G] mal fondée en sa demande de dommages-intérêts ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement
Attendu que selon l'article L. 1232-2 du code du travail l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable ; que la convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge ; que cette lettre indique l'objet de la convocation ; que l'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ;
Attendu que selon l'article L. 1235-2 du même code si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l'employeur d'accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ;
Attendu que par lettre recommandée avec avis de réception du 16 décembre 2008, la SARL MEDICAL COATING licenciait [S] [G] pour cause réelle et sérieuse sans l'avoir préalablement convoquée à un entretien ;
Attendu que ce manquement de l'employeur préjudiciait nécessairement à la salariée ;
Attendu que la cour a les éléments pour fixer les dommages-intérêts à 500 € ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être partiellement infirmée ;
Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents
Attendu que [S] [G] se voyait licencier pour une inaptitude d'origine non professionnelle ;
Attendu qu'elle ne pouvait exécuter le préavis pour une cause non imputable à la SARL MEDICAL COATING ;
Attendu qu'elle succombera ainsi en sa demande ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement déféré sur les points suivants :
- débouté de la demande de la prime exceptionnelle d'avril 2008,
- non-application de l'article 700 du code de procédure civile,
- dépens,
Infirme le jugement déféré pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Dit que [S] [G] n'a pas subi un harcèlement moral et la déboute de sa demande de dommages-intérêts de ce chef,
Dit que le licenciement n'est pas nul et déboute [S] [G] de sa demande de dommages-intérêts de ce chef,
Dit que le licenciement de [S] [G] se fonde sur une cause réelle et sérieuse,
Déboute [S] [G] de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents,
Condamne la SARL MEDICAL COATING à payer à [S] [G] les sommes suivantes :
- 653,02 € à titre de compléments de salaires pour les périodes d'arrêt maladie de 2007,
- 560 € au titre de la prime d'encadrement d'octobre 2007 à avril 2008;
- 500 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,
Déboute [S] [G] de ses demandes salariales suivantes :
- rappels de salaires pour les arrêts maladie de 2008,
- prime exceptionnelle de juillet 2007,
- prime d'encadrement de mai à décembre 2008,
Dit n'y avoir lieu à allouer à maître Aurélie BABOLAT, avocat de [S] [G], une indemnité sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 pour la première instance,
Y ajoutant,
Rejette les demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile formulées en cause d'appel,
Condamne [S] [G] aux dépens d'appel.
Le Greffier, Le Président,
Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS