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10/04/2013 | FRANCE | N°12/03492

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 10 avril 2013, 12/03492


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 12/03492





SARL C.R.A. [Q] [I]



C/

[J]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 23 Avril 2012

RG : F 10/00901











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 10 AVRIL 2013







APPELANTE :



SARL C.R.A. [Q] [I]

MR [L], gérant

[Adresse 2]

[Localité 1

]



comparant en personne, assistée de Me Emmanuelle JALLIFFIER-VERNE de la la SELARL ACTIVE AVOCATS (Me Vincent DURAND), avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



[M] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]



représentée par la SCP ANTIGONE AVOCATS (Me Pierre MASANOVIC), av...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 12/03492

SARL C.R.A. [Q] [I]

C/

[J]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 23 Avril 2012

RG : F 10/00901

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 10 AVRIL 2013

APPELANTE :

SARL C.R.A. [Q] [I]

MR [L], gérant

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparant en personne, assistée de Me Emmanuelle JALLIFFIER-VERNE de la la SELARL ACTIVE AVOCATS (Me Vincent DURAND), avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

[M] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par la SCP ANTIGONE AVOCATS (Me Pierre MASANOVIC), avocats au barreau de LYON substituée par Me Sylvie ESCALIER, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Février 2013

Présidée par Didier JOLY, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Mireille SEMERIVA, Conseiller

Catherine PAOLI, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Avril 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

[M] [J] a été engagée par la S.A.R.L. Centre de réparation automobile (CRA) [Q] [I] en qualité d'employée administrative (échelon majoré 4) suivant contrat à durée indéterminée du 2 janvier 1995 soumis à la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute de [M] [J] s'élevait à 1 842, 70 € pour 166,83 heures de travail outre une prime de treizième mois.

Le 31 janvier 2007, la société CRA [Q] [I], agent Peugeot à [Localité 1], a été rachetée par la S.A.R.L. holding GSM FINANCES qui contrôlait également la S.A.S. Centre de réparation collision (CRC) et la S.A.R.L. GSM GARAGE, agent Renault, toutes deux à la [Localité 2] (Isère) où étaient regroupées la comptabilité et la gestion générale du groupe.

La société CRA [Q] [I] fonctionnait comme un centre de profit :

autonome pour la réparation mécanique,

apporteur d'affaires pour la réparation de carrosseries en direction de l'unité CRC, spécialisée et agréée par les assurances dans la réparation des carrosseries.

L'autonomie technique de la société CRA [Q] [I] consistait à assurer l'ensemble des réparations mécaniques en tant qu'agent Peugeot et à diriger les réparations de carrosserie sur la [Localité 2] avec, en cas de surcharge, la possibilité d'utiliser les services du sous-traitant SG3 depuis octobre 2007.

L'autonomie de gestion de la société CRA [Q] [I] consistait à effectuer les facturations de mécanique et carrosserie à ses clients de [Localité 1], à valider les factures de sous-traitance et de charges générales et à les faire remonter pour règlement en comptabilité à la [Localité 2].

[B] [L] est devenu directeur général du groupe GSM le 15 juillet 2008.

En janvier 2009, il a rompu les relations commerciales entre les deux sociétés et il en est résulté un litige relatif à des factures impayées.

A la suite de la cession de la S.A.R.L. holding GSM Finances le 25 mars 2009, [B] [L] est devenu gérant de la société CRA [Q] [I].

Par lettre remise en main propre du 30 novembre 2009, la société CRA [Q] [I] a convoqué [M] [J] à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 9 décembre suivant et lui a notifié sa mise à pied à titre conservatoire.

Un avis d'arrêt de travail a été délivré à la salariée le 7 décembre 2009.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 janvier 2010, la société CRA [Q] [I] a notifié à [M] [J] son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :

[...] Vous assistiez aux réunions d'encadrement hebdomadaires où étaient régulièrement évoquées la stratégie des sociétés du groupe GSM [Q] [I], dont la société CRA fait partie.

Vous étiez ainsi parfaitement informée du litige qui nous a opposé à notre ex sous-traitant la société SG3 pour le paiement de ses factures, ce litige faisait suite à l'arrêt de notre collaboration qui a été effective à partir de janvier 2009.

Nous avons été informés que vous aviez communiqué des documents confidentiels à la société SG3.

Nous avons alors procédé à la vérification du journal des transmissions du télécopieur de la société et nous avons constaté le bien fondé de ces informations.

Vous étiez la seule à avoir accès au télécopieur aux temps et heures de ces envois.

Nous avons également été informé que vous aviez emporté à plusieurs reprises des dossiers «'à la maison'» alors que vos fonctions ne nécessitent nullement d'emporter du travail à l'extérieur de l'entreprise.

Lors de l'entretien préalable, nous vous avons demandé des explications sur ces envois et la raison pour la laquelle vous conserviez des documents confidentiels appartenant à la Société.

Vous avez refusé de nous répondre.

Nos clients nous ont également confirmé que vous présentiez la société SG3 comme notre partenaire actuel pour les travaux de carrosserie et que vous leur avez transmis les coordonnées de cette société concurrente en distribuant leurs propres cartes de visite... Vous avez ainsi détourné la clientèle de la société CRA vers la société SG3, trompant notre confiance et celle de nos clients, qui pensaient légitimement que la société SG3 était notre partenaire, sous-traitant en carrosserie, alors que cette fonction est exclusivement assurée par la société CRC, membre du Groupe GSM [Q] [I].

Dix jours après la mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée, nous constatons que le volume d'activité de la carrosserie avait augmenté de 30 % !

Nous avons été en outre alertés par ces mêmes clients et nos fournisseurs que vous n'avez pas hésité à répandre de fausses rumeurs concernant la situation financière de la société en indiquant que CRA allait bientôt «'déposer le bilan'» (sic) et allant même jusqu'à inciter nos fournisseurs à refuser des délais de paiement qui jusque là nous étaient accordés.

Ces dénigrements se sont traduits par une perte de confiance de certains de nos principaux clients et fournisseurs ayant entrainé une baisse significative de notre chiffre d'affaires.

Nous sommes extrêmement surpris par ce comportement et constatons avec regret que vous avez trahi notre confiance, ce qui est d'autant plus grave compte tenu des fonctions que vous occupez au sein de notre entreprise.

En effet, sommes-nous obligés de vous rappeler que votre poste requiert une obligation de discrétion, de confidentialité et d'impartialité sans limite. Force est aujourd'hui de constater que vous avez transgressé vos obligations.

Par ailleurs, vous avez fait l'objet de multiples remarques concernant la qualité de votre travail et le respect des consignes données. Vous n'en avez tenu aucun compte comme nous le prouvent les fréquentes erreurs ou omissions constatées pour l'établissement de nos factures et qui se sont traduites par un manque à facturer qui peut être estimé à 13 000 € à ce jour.

Ce type d'erreur est inacceptable et donne une image de marque de notre société bien pitoyable à l'égard de nos différents partenaires.

Enfin, à la suite de nombreuses doléances de nos clients, nous avons été contraints de vous rappeler les règles les plus élémentaires de courtoisie en attirant plus spécialement votre attention sur la nécessité de soigner l'accueil direct et l'accueil téléphonique de nos clients. A cet effet, nous vous avions inscrite à un stage de vente devant commencer le 1er décembre 2009 pour vous permettre d'améliorer la prise de rendez-vous et surtout la qualité de l'accueil de nos clients.

Toutefois, vous avez délibérément fait fi de nos remarques et de nos consignes.

Vous n'avez pas entendu modifier votre comportement et n'avez pas hésité à éconduire sans ménagement nos clients. [...]

[M] [J] a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 5 mars 2010.

Par jugement du 26 octobre 2010, le Tribunal de commerce de Vienne a ouvert le redressement judiciaire de la S.A.S. Centre de réparation collision (CRC).

Par jugement du 28 janvier 2011, il a arrêté le plan de cession de la société au profit de la S.A.S. Carrosserie du Faubourg avec clause de substitution au profit de la société DEXCAR CRC [I] S.A.S. en cours de constitution.

Le Conseil de prud'hommes a statué sur le dernier état des demandes le 23 avril 2012.

* * *

LA COUR,

Statuant sur l'appel interjeté le 7 mai 2012 par la S.A.R.L. CRA [I] du jugement rendu le 23 avril 2012 par le Conseil de prud'hommes de Lyon (section commerce) qui a':

- dit et jugé le licenciement de [M] [J] abusif, sans cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamné la S.A.R.L. CRA [Q] [I] à payer à [M] [J] les sommes suivantes :

15 000, 00 € à titre de dommages et intérêts,

outre les intérêts de droit à compter de la date de notification du présent jugement,

2 394, 04 € brut au titre du remboursement de la mise à pied,

239, 40 € brut au titre des congés payés afférents,

921, 30 € brut au titre du 13ème mois,

92, 13 € au titre des congés payés afférents,

3 685, 40 € brut au titre des deux mois de préavis,

368, 54 € au titre des congés payés afférents,

6 858, 91 € net au titre de l'indemnité de licenciement,

outre, sur ces sommes, les intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine,

850, 00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- rappelé l'exécution provisoire de droit et fixé la moyenne des salaires à la somme de 1'842,70 € conformément à l'article R. 1454-28 du Code du travail,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société CRA [Q] [I] aux entiers dépens de l'instance ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 6 février 2013 par la S.A.R.L. CRA [Q] [I] qui demande à la Cour de :

rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- déclarer [M] [J] irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes et l'en débouter,

- infirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Lyon le 23 avril 2012,

- dire et juger que le licenciement de [M] [J] est fondé sur une faute grave,

Subsidiairement,

- dire et juger que le licenciement de [M] [J] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Lyon le 23 avril 2012 en ce qu'il a condamné la société CRA [Q] [I] à verser à [M] [J] la somme de 6 858, 91 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

A titre infiniment subsidiaire,

- infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Lyon le 23 avril 2012 en ce qu'il a condamné la société CRA [Q] [I] à verser à [M] [J] la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts et le réduire à une plus juste proportion en l'absence de préjudice rapporté,

En toute hypothèse,

- condamner [M] [J] à payer à la société CRA [Q] [I] la somme de 2'500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner [M] [J] aux entiers dépens ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 6 février 2013 par [M] [J] qui demande à la Cour de :

- dire et juger régulier, mais mal fondé, l'appel interjeté par la société CRA [Q] [I] à l'encontre du jugement du Conseil de prud'hommes de Lyon en date du 23 avril 2012,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé abusif et sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé par la société CRA [Q] [I] à l'encontre de [M] [J] le 7 janvier 2010,

- condamner en conséquence la société CRA [Q] [I] à payer à [M] [J] les sommes suivantes :

2 394, 04 € au titre du remboursement de la mise à pied,

239, 40 € au titre des congés payés afférents,

921, 30 € au titre du 13ème mois,

92, 13 € au titre des congés payés afférents,

3 685, 40 € brut au titre des deux mois de préavis,

368, 54 € au titre des congés payés afférents,

6 858, 91 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

36 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société CRA [Q] [I] aux dépens de première instance et d'appel ;

Sur les motifs du licenciement :

Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ;

Qu'après avoir pris la direction générale du groupe, [B] [L] dit avoir constaté un important dysfonctionnement dans la sous-traitance à la société SG3, caractérisée par :

un courant d'ordres de réparation trop important en direction de SG3 alors que la carrosserie de la Verpilière n'était pas surchargée,

des incohérences dans les montants facturés en direction des assurances par rapport aux frais de sous-traitance qui, eux, ne concernaient que la main d'oeuvre,

une facturation main d'oeuvre de SG3 supérieure de 42% aux pratiques normales de la profession,

une validation systématique des travaux et factures SG3 par le personnel CRA,

des relations de 'copinage' entre certains personnels de CRA et de SG3, ayant servi à détourner des travaux de CRC vers SG3,

une facturation à perte en direction des assurances, après déduction des frais SG3 et des prix des services.

Que [B] [L] a acquis la conviction de l'existence d'une 'taupe' dans la société ; que selon ses dires, [R] [Y], assistante d'accueil engagée en juin 2009, lui a révélé le 30 novembre 2009 que [M] [J] appelait souvent les dirigeants de la société SG3 pour des devis qu'elle transmettait ensuite aux clients ; que [R] [Y] trouvait anormal que sa collègue puisse encore conseiller aux clients de s'adresser à la société SG3 pour les travaux de carrosserie ; que l'examen du journal des transmissions du télécopieur a fait apparaître que plusieurs documents avaient été envoyés à cette société ;

Que [R] [Y], dont les relations avec [M] [J] étaient notoirement mauvaises, n'a pas confirmé par attestation les propos qu'elle avait tenus, selon [G] [W], dans le cadre de l'entretien préalable à son licenciement ; qu'il n'est pas démontré que seule l'intimée avait accès au télécopieur aux dates et heures des envois ; que l'absence de transmission à la société SG3 pendant les congés payés pris par la salariée du 2 au 21 août 2009 n'est pas déterminante, aucune télécopie n'ayant été adressée à cette société du 20 octobre au 2 novembre, période au cours de laquelle la salariée n'a pris qu'un jour de congé, le 30 octobre 2009 ; que le silence de [R] [Y] est d'autant plus regrettable que, selon [A] [O], mécanicien auto, elle aurait été en mesure de confirmer que [M] [J] envoyait à la société SG3 des documents concernant son employeur (avis d'huissier, courriers, etc) ;

Que l'explication que donne la salariée de l'origine de la relation de sous-traitance, à savoir les liens personnels du gérant de la société SG3 et de [D] [T], chef d'atelier de la société CRA [Q] [I], est contredite non seulement par ce dernier, mais aussi par [G] [W], chargée de l'encadrement du personnel administratif ; que selon ces deux salariés, la solution consistant à confier à la société SG3 des travaux de carrosserie en sous-traitance avait été proposée par [M] [J] et entérinée par le gérant de l'époque ; que le rôle joué alors par la salariée éclaire son comportement de l'année 2009 ; qu'il ressort en effet des attestations communiquées que l'intimée n'a pas tenu compte de la décision que le directeur général avait prise de mettre fin aux relations commerciales qu'entretenaient les deux sociétés ; que [A] [O], salarié de la société CRA [Q] [I], certifie qu'il a constaté en début d'année 2009, que [M] [J] continuait de conduire les véhicules chez SG3 et de les ramener ; que selon le témoin, ces navettes avaient continué après le retour du chef d'atelier [D] [T], en congé de maladie jusqu'en mars 2009, et ce malgré les remarques de ce dernier ; que [A] [O] conclut son attestation en ces termes : 'elle était toujours chez SG3, elle déjeunait très souvent le midi avec M. [E]' (gérant de la société SG3) ; que [D] [T] confirme que [M] [J] cherchait souvent l'occasion de se rendre au garage SG3, ce qui l'avait conduit à lui dire que si elle désirait, elle pouvait se faire embaucher chez eux et éviter ainsi les déplacements ; que l'exemple de la réparation du véhicule Peugeot 406 de [Z] [O], père de [A] [O], est caractéristique du détournement de clientèle auquel [M] [J] s'est livrée ; qu'en effet, [A] [O] ayant demandé à celle-ci comment il fallait procéder pour la réparation, la salariée lui avait répondu qu'on ne l'envoyait pas à la [Localité 2] (CRC) qui était en surcharge et qu'elle pouvait s'en occuper avec SG3 ; qu'effectivement, selon [A] [O], [M] [J] avait conduit la Peugeot 406 au garage SG3 et l'avait ramenée une semaine après ; que [M] [J] communique elle-même une facture n°9 418 établie le 27 juillet 2009 par le garage SG3 pour les travaux de tôlerie et peinture effectués sur le véhicule de [Z] [O] ; que la production de cette pièce par l'intimée souligne les liens particuliers qu'elle entretenait avec la société SG3 et confirme les dires de [A] [O] quant aux conditions dans lesquelles la voiture a été réparée ; qu'il est étrange que [M] [J] y voit la preuve de la poursuite des relations entre la société CRA [Q] [I] et la société SG3 bien après la date de leur cessation officielle, alors que ces relations se sont poursuivies du fait de la salariée et contre la volonté de [B] [L] ;

Que pour ce qui concerne les autres griefs visés dans la lettre de licenciement, la société CRA [Q] [I] ne communique aucune pièce de nature à remettre en cause l'analyse du jugement entrepris dont la Cour adopte les motifs ;

Qu'il résulte des pièces et des débats que dans une mesure qu'il est impossible d'évaluer sérieusement, [M] [J] a orienté certains clients vers la société SG3 plutôt que vers les sociétés du groupe GSM, et ce malgré l'interruption des relations des sociétés CRA [Q] [I] et SG3 qu'un contentieux opposait devant le Tribunal de commerce ; qu'à la thèse de l'appelante selon laquelle l'augmentation importante et durable du chiffre d'affaires après la mise à pied conservatoire de [M] [J] ne peut s'expliquer que par l'arrêt du détournement de clientèle vers SG3, il est possible d'opposer que le chiffre d'affaires de la S.A.R.L. SG3 a augmenté de 2,80% entre le 31 décembre 2009 et le 31 décembre 2010 malgré la fin de l'apport de clientèle de [M] [J] ; que si la faute commise par celle-ci constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement, elle n'avait pas une importance telle que le maintien de l'intéressée dans l'entreprise en était rendu immédiatement impossible ; que la faute grave retenue contre [M] [J] sera donc écartée ;

Sur les indemnités de rupture :

Attendu qu'aucune des parties ne remet en cause les bases sur lesquelles le Conseil de prud'hommes a liquidé les droits de [M] [J] aux indemnités de préavis et de licenciement ;

Sur la demande de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied :

Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L 1332-3 du code du travail que seule une faute grave peut justifier le non-paiement du salaire pendant une mise à pied conservatoire ;

que le jugement qui a alloué à [M] [J] le rappel de salaire correspondant avec les congés payés incidents sera donc confirmé ;

Sur le treizième mois :

Attendu qu'en l'absence de faute grave, la mise à pied conservatoire n'était pas légalement possible ; que [M] [J] est donc censée avoir été présente à la date d'ouverture du droit au treizième mois ; que le jugement qui lui a alloué à ce titre la somme de 921,30 € doit donc être confirmé ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement de [M] [J] ne repose pas sur une faute grave,

- en conséquence, condamné la S.A.R.L. CRA [Q] [I] à payer à [M] [J] les sommes suivantes :

2 394, 04 € brut au titre du remboursement de la mise à pied,

239, 40 € brut au titre des congés payés afférents,

921, 30 € brut au titre du 13ème mois,

92, 13 € au titre des congés payés afférents,

3 685, 40 € brut au titre des deux mois de préavis,

368, 54 € au titre des congés payés afférents,

6 858, 91 € net au titre de l'indemnité de licenciement,

- condamné la société CRA [Q] [I] aux entiers dépens de l'instance ;

Dit que les sommes ci-dessus spécifiés portent intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2010, date de réception par la société CRA [Q] [I] de la convocation devant le bureau de conciliation ;

Infirme le jugement entrepris dans ses autres dispositions,

Statuant à nouveau :

Dit que le licenciement de [M] [J] repose sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence, déboute [M] [J] de sa demande de dommages-intérêts,

Condamne la société CRA [Q] [I] à payer à [M] [J] la somme de mille cinq cents euros (1 500 €) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne [M] [J] aux dépens d'appel.

Le greffierLe Président

S. MASCRIERD. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 12/03492
Date de la décision : 10/04/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°12/03492 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-10;12.03492 ?
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