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26/03/2013 | FRANCE | N°11/08780

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 26 mars 2013, 11/08780


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 11/08780





SAS [Adresse 3]



C/

[H]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 15 Décembre 2011

RG : 10/00487











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 26 MARS 2013













APPELANTE :



SAS [Adresse 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Lo

calité 1]



représentée par Me Olivier GELLER de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON







INTIMÉ :



[Q] [H]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 1]



comparant en personne, assisté de Me Pierre MASANOVIC de la SCP ANTIGONE ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 11/08780

SAS [Adresse 3]

C/

[H]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 15 Décembre 2011

RG : 10/00487

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 26 MARS 2013

APPELANTE :

SAS [Adresse 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Olivier GELLER de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

[Q] [H]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Pierre MASANOVIC de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par la SCP ANTIGONE AVOCATS (Me Stéphanie BARADEL), avocats au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 29 Janvier 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Mireille SEMERIVA, Conseiller

Catherine PAOLI, Conseiller

Assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 26 Mars 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Par contrat de travail à durée indéterminée en date du 12 mars 1990, Monsieur [Q] [H] a été embauché par la société GENERALE TRAITEUR en qualité de cariste, avec reprise d'ancienneté au 13 décembre 1989.

Son contrat de travail a été transféré à compter du 1er octobre 1999 à la société STEF LOGISTIQUE exerçant une activité spécialisée dans le domaine de la logistique frigorifique.

Par lettre remise en main propre le 10 mars 2008, l'employeur a prononcé la mise à pied conservatoire de Monsieur [H] et l'a convoqué à un entretien préalable à son licenciement qui s'est tenu le 18 mars 2008.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 21 mars 2008, la société STEF LOGISTIQUE a notifié à Monsieur [H] son licenciement pour faute grave. La première partie de la lettre de licenciement était ainsi libellée :

'Le 25 février 2008, le technicien en charge de la surveillance de la production de froid de la chambre occupée par le dossier [S], sur lequel vous travaillez, observe sur la courbe de température de la chambre des variations de température anormales. Après investigation, il constate que les protections thermiques des deux évaporateurs du fond de la chambre sont déclenchées dans l'armoire électrique fermée. Il les réenclanche aussitôt.

Le 26 février matin, le même technicien constate que l'armoire électrique est ouverte et que les protections thermiques sont à nouveau déclenchées. Il les réenclenche et revient à 13 H pour poser une chaîne et un cadenas sur la porte de l'armoire afin de vérifier si le déclenchement provient d'un problème électrique ou d'une intervention humaine. Or, la courbe de température démontre à nouveau des variations anormales.

Le 5 mars 2008, le même technicien intervenant à la demande du chef d'équipe du dossier [S] pour modifier les horaires de ventilation de la chambre, constate que la porte de l'armoire électrique est forcée, le cadenas non fracturé est posé sur cette dernière et la chaîne a disparu. Les protections thermiques sont enclenchées. Le service technique décide alors de rechercher la cause du problème en visionnant les enregistrements de la vidéo surveillance de la semaine écoulée.

Nous observons clairement sur la bande enregistrée le 5 mars 2008 que lors de votre arrivée sur les lieux vous avez d'abord forcé la chaîne de l'armoire électrique à l'aide d'une barre de fer. N'y parvenant pas, muni d'une pince, vous avez ensuite coupé cette chaîne qui condamnait l'accès à l'armoire puis forcé la serrure de l'armoire avec un ustensile non adapté. Vous déclenchez les protections thermiques puis repartez travailler.

Vers 9H00, nous vous observons de nouveau ouvrant l'armoire et réenclenchant les protections thermiques puis repartir.

Lors de l'entretien du 18 mars 2008, assisté de Mme [V] [D], vous avez reconnu les faits.

Les explications recueillies n'ont pas remis en cause notre appréciation des faits.'

'Effectivement, votre attitude consistant à dégrader volontairement les locaux et l'équipement de l'entreprise ne saurait être tolérée et constitue un manquement gravissime à vos obligations les plus élémentaires.

Vous n'ignorez pas non plus les potentielles conséquences que vos gestes auraient pu avoir à l'encontre des denrées entreposées compte tenu des variations constatées de température et l'importance toute particulière que l'entreprise se doit d'attacher à ces courbes de température.

Par ailleurs, vous n'ignorez pas également que l'entreprise a entendu se montrer particulièrement intransigeante à l'égard des détériorations constatées et que ce point avait notamment été abordé avec les représentants du personnel.

Nous sommes donc contraints de vous licencier pour faute grave.'

Contestant son licenciement M [Q] [H] a saisi le conseil des prud'hommes de Lyon (section commerce) par requête du 16 mai 2008. Par jugement contradictoire de départage en date du 15 décembre 2011, le conseil des prud'hommes de Lyon a majoritairement fait droit aux demandes de M [Q] [H] et :

- a déclaré le licenciement notifié à Monsieur [Q] [H] le 21 mars 2008 dépourvu de cause réelle et sérieuse

- a condamné la société [Adresse 3] à lui payer :

* la somme de 35 000 € (trente cinq mille euros) à titre de dommages-intérêts,

* la somme de 631,40 € (six cent trente et un euros et quarante centimes) à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre la somme de 63,14 € (soixante trois euros et quatorze centimes) au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droit à compter de la demande

* la somme de 3 536 € (trois mille cinq cent trente six euros) à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 353,60 € (trois cent cinquante trois euros et soixante centimes) au titre des congés payés afférents, avec intérêts de droit à compter de la demande,

* la somme de 7 009,20 € (sept mille neuf euros et vingt centimes) au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement avec intérêts de droit à compter de la demande,

* la somme de 1 500 € (mille cinq cent euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile

- a rejeté les demandes plus amples ou contraires,

- a fixé le salaire mensuel moyen de Monsieur [Q] [H] au cours des trois derniers mois de son exercice professionnel à la somme de 1 947 €,

- a condamné la société [Adresse 3] à rembourser aux ASSEDICS la totalité des indemnités de chômage versées à Monsieur [Q] [H], à compter du jour de son licenciement jusqu'à la date du présent jugement, et ce dans la limite de six mois d'indemnités,

- a ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,

- a mis les dépens à la charge de la société [Adresse 3].

Le jugement a été notifié aux parties le 16 décembre 2011 ; la SAS [Adresse 3] en a relevé appel par lettre recommandée du 23 décembre 2011.

Par conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 29 janvier 2013 la société [Adresse 3] demande à la cour d'infirmer le jugement, d'ordonner la répétition des sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire et de condamner M [Q] [H] à lui payer la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Par conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 29 janvier 2013 M [Q] [H] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner la société appelante à lui payer 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'affaire initialement fixée à l'audience du juge rapporteur du 13 juin 2012 a été renvoyée à la demande des parties à l'audience collégiale du 29 janvier 2013 date à laquelle, à l'issue des débats, elle a été mise en délibéré au 26 mars 2013.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient à titre liminaire de constater que le débat de première instance sur la version de la lettre de licenciement adressée au salarié n'a plus lieu d'être ; la lettre produite par l'employeur en pièce 4 est celle signée par le directeur de l'établissement, reçu par le salarié et sur laquelle le premier juge a fondé son raisonnement.

Les parties sont opposées sur la réalité et la gravité des fautes reprochées au salarié dans la lettre de licenciement du 21 mars 2008.

1 - 1 Aux termes des dispositions de l'article L1231-1 du code du travail, le « contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre.

Ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d'essai.».

Il résulte des dispositions combinées des articles L.1232-6, L.1234-1 et L.1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés personnellement au salarié dans la lettre, d'autre part de démontrer que ceux-ci constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

1 - 2 La lettre de licenciement précédemment rappelée, laquelle fixe les limites du litige, relie les ruptures de la chaîne du froid constatées les 25 et 26 février 2008 dans la chambre froide par le technicien de surveillance de la production de froid, aux constatations qu'il a pu faire en visionnant la bande de vidéo surveillance enregistrée le 5 mars 2008 et sur laquelle il constate que M [Q] [H], à son arrivée sur le lieu de travail, après avoir brisé la chaîne qui empêchait l'accès au boîtier électrique, a coupé les protections thermiques et les a réenclenchés à son départ.

L'employeur reproche donc au salarié, qui les conteste, une rupture de la chaîne du froid dans la chambre froide et une dégradation volontaire des locaux et du matériel de l'entreprise.

L'employeur, pour preuve des fautes qu'il reproche au salarié, produit les attestations de Monsieur [E], une courbe de température relative au quai 23 allant du 10 février au 10 mars 2008 et des photographies.

Il ressort des attestations de M [E], chef d'équipe d'entretien, que l'armoire électrique litigieuse commandait le circuit du froid des quais de déchargement et non pas des chambres froides. Par ailleurs, pour le 5 avril 2008, seul jour imputable de manière indiscutable au salarié, l'examen des courbes de température montre que celle-ci se situait au-dessous de 4° et retrouvait donc un niveau de température adéquat, similaire à celui de la période allant du 10 au 18 février 2008. Le lien entre l'action du salarié sur le boîtier électrique et la remontée des températures sur les quais n'apparaît donc pas établi avec certitude.

Il convient de constater que l'imputabilité des faits reprochés au salarié et partant sur la rupture de la chaîne du froid dans la chambre froide, voir même sur le quai, n'est pas démontrée ainsi que le relevait le premier juge dans des motivations que pour le surplus la cour fait sienne.

Enfin, si le bris de la chaîne, qui marquait une interdiction d'accéder au contenu de l'armoire électrique, constitue un comportement inapproprié de la part de ce salarié, le contexte dans lequel il est intervenu et dont il justifie par les attestations qu'il produit, n'est pas de nature là encore à caractériser une faute d'une gravité telle qu'elle justifie, la mise à pied conservatoire, la dispense de préavis et donc le licenciement du salarié pour faute grave.

Le premier juge a fait une exacte appréciation des éléments de fait et de droit soumis à son examen, c'est donc pour le surplus par une motivation pertinente du premier juge que la cour reprend, que le jugement entrepris doit être confirmé.

2 - La Société [Adresse 3] succombe en appel dans ses prétentions, elle supportera en conséquence la charge des dépens de cette instance ainsi que celle d'une indemnité de procédure d'un montant de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement.

Condamne la SAS [Adresse 3] aux dépens d'appel.

Condamne la SAS [Adresse 3] à payer à M [Q] [H] 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffierLe Président

S. MASCRIERD. JOLY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 11/08780
Date de la décision : 26/03/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°11/08780 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-26;11.08780 ?
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