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22/02/2013 | FRANCE | N°12/04915

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 22 février 2013, 12/04915


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 12/04915





SARL ETABLISSEMENTS AROD



C/

[D]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de SAINT ETIENNE

du 05 Juin 2012

RG : 10/00806











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 22 FEVRIER 2013













APPELANTE :



SARL ETABLISSEMENTS AROD

[Adresse 8]<

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[Localité 4]



représentée par la SELARL LEXFACE (Me Etienne FURTOS), avocats au barreau de SAINT-ETIENNE







INTIMÉ :



[H] [D]

né le [Date naissance 2] 1957 à

[Adresse 1]

[Localité 3]



représenté par Me Ingrid GERAY, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE substit...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 12/04915

SARL ETABLISSEMENTS AROD

C/

[D]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de prud'hommes - Formation de départage de SAINT ETIENNE

du 05 Juin 2012

RG : 10/00806

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 22 FEVRIER 2013

APPELANTE :

SARL ETABLISSEMENTS AROD

[Adresse 8]

[Localité 4]

représentée par la SELARL LEXFACE (Me Etienne FURTOS), avocats au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉ :

[H] [D]

né le [Date naissance 2] 1957 à

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Ingrid GERAY, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE substitué par Me Olivier DUBOST de la SELARL CAPSTAN RHONE ALPES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

PARTIES CONVOQUÉES LE : 05 Septembre 2012

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Décembre 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Michèle JAILLET, Conseiller

Assistés pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Février 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Attendu que le conseil de prud'hommes de SAINT ' ETIENNE, section commerce, par jugement contradictoire du 5 juin 2012, rendu en formation de départage a:

- fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de monsieur [H] [D] à la somme de 1767,79 euros mensuels bruts,

- dit que le licenciement pour faute lourde notifié à monsieur [D] le 26 août 2010 est dépourvu de cause réelle et sérieuse et est vexatoire,

- condamné en conséquence la SARL ETABLISSEMENT AROD à verser à monsieur [D] les sommes suivantes :

* 3535,58 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 353,56 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

* 2404,52 euros bruts à titre d'indemnité de congés payés,

* 3476,65 euros bruts à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 1248,86 euros bruts à titre de rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire, outre 124,89 euros au titre des congés payés y afférents,

* 25000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

- dit que monsieur [D] a été privé de son droit individuel à la formation,

- condamné en conséquence la SARL ETABLISSEMENT AROD à verser à monsieur [D] la somme de 1098 euros à titre de dommages et intérêts pour privation de son droit individuel à la formation,

- débouté la SARL ETABLISSEMENT AROD de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles,

- condamné la SARL ETABLISSSEMENT AROD à verser à monsieur [D] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- rappelé qu'en application de l'article R 1454-28 du code du travail, l'exécution provisoire est de droit dans la limite maximum de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des 3 derniers mois de salaire, pour les sommes allouées à titre de rappel de salaires,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire pour le surplus,

- condamné la SARL ETABLISSEMENT AROD au paiement des dépens ;

Attendu que la cour est régulièrement saisie par un appel formé par la SARL ETABLISSEMENT AROD ;

Attendu que monsieur [H] [D] a été engagé par la SARL ETABLISSEMENT AROD suivant contrat à durée indéterminée du 10 octobre 2000, en qualité de mécanicien, coefficient 150 ;

Que son revenu mensuel brut s'est élevé à 1.769,79 euros ;

Attendu que monsieur [D] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 13 août 2010 par lettre recommandée avec avis de réception du 3 août 2010 et mis à pied à titre conservatoire par lettre du 3 août 2010 ;

Qu'il a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 août 2010 pour faute lourde ;

Attendu que le conseil de monsieur [D] a précisé à l'audience que son client était âgé de 53 ans à la date de rupture des relations contractuelles, avait perçu des allocations chômage depuis son licenciement et avait retrouvé depuis 15 jours un emploi d'éducateur sportif dans un « CEF » dans le cadre d'un contrat à durée déterminée ;

Attendu que la SARL ETABLISSEMENT AROD emploie moins de 11 salariés (7) et n'est pas dotée d'institutions représentatives du personnel ;

Que la convention collective applicable est celle des entreprises de commerce, de location et de réparation de tracteurs, machines et matériels agricoles, de matériels de travaux publics, de bâtiment et de manutention, de matériels de motoculture de

plaisance, de jardins et d'espaces verts du 30 octobre 1969 ;

Attendu que la SARL ETABLISEMENT AROD demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 5 décembre 2012, visées par le greffier le 21 décembre 2012 et soutenues oralement, au visa des articles L. 1222-1 du code du travail et 1134 du code civil, de :

Réformant le jugement entrepris,

- dire et juger que les griefs reprochés à monsieur [D] révèlent une intention de lui nuire et sont constitutifs d'une faute lourde,

- en conséquence, dire et juger que son licenciement pour faute lourde est parfaitement justifié et le débouter de l'intégralité de ses demandes,

- condamner monsieur [D] à lui payer une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens ;

Attendu que monsieur [D] demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 18 décembre 2012, visées par le greffier le 21 décembre 2012 et soutenues oralement, de :

- dire et juger que l'intention de nuire n'est pas caractérisée,

- dire et juger que la faute lourde n'est pas caractérisée,

- dire et juger que le licenciement initié par la société AROD à son encontre est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- condamner la société AROD à lui verser les sommes suivantes :

* moyenne des trois derniers mois = (mai+juin+juillet 2008)/3 = 1 767,79 euros

* dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 19 mois x1.767, 79 euros = 33 588 euros nets

* indemnité compensatrice de préavis : 1.767,79 euros x 2mois= 3 535,58 euros bruts outre 353,56 euros bruts de congés payés afférents,

* indemnité compensatrice de congés payés : 1 767,79/151,67hx7x29, 46 jours = 2 404,52 euros bruts

* indemnité légale de licenciement (9 ans et 10 mois d'ancienneté) : 1 767,79 euros/5x5 + 1 767,79/5x10/12 = 3 476,65 euros

* Rappel de salaire sur mise à pied conservatoire injustifiée : 1 248,86 euros bruts outre 124,89 euros bruts de congés payés afférents

- dire et juger que le licenciement est intervenu dans des conditions brutales et vexatoires

- condamner la société AROD à lui verser la somme de 10.000 euros nets à titre de dommages et intérêts

- dire et juger qu'il a injustement été privé de son droit individuel à la formation

- condamner la société AROD à lui verser la somme de 1 098 euros nets à titre de dommages et intérêts

- condamner la société AROD à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner la société AROD aux entiers dépens ;

Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement ;

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur le licenciement

Attendu que monsieur [D] a été licencié pour faute lourde par une lettre du 26 août 2010 ainsi rédigée :

« Nous avons eu à déplorer de votre part un agissement constitutif d'une faute lourde. En effet, le mardi 3 août 2010 à 9h30, vous vous êtes rendu coupable, devant témoins, de détournement de clientèle sur votre lieu de travail. Les faits qui vous sont reprochés sont les suivants : un client de notre société s'est rendu directement dans l'atelier (pourtant interdit au public) et non pas à la réception comme c'est l'usage pour un problème technique sur une tronçonneuse. Vous vous êtes entretenu à l'atelier devant témoin avec ce client. Quelques minutes plus tard, ce client a suivi vos instructions et a déposé cette tronçonneuse dans le coffre de votre véhicule ce qui nous laisse penser que vous vous êtes organisé à cet effet : vous laissez votre véhicule ouvert de manière intentionnelle toute la journée alors que le parking est ouvert au public et de surcroît non surveillé afin que l'on puisse y déposer les matériels à réparer.

L'utilisation que vous faites des relations inhérentes à la fonction de technicien dans le but de détourner notre clientèle qui se présente sur notre surface de vente nous porte gravement préjudice. Vos agissements sont inexcusables et c'est avec une indiscutable intention de nuire à notre société que vous sollicitez nos clients de la sorte sur votre lieu de travail.

A la suite de ce grave incident et après enquête auprès de nos clients ainsi qu'auprès de vos collègues de travail, il s'avère qu'il ne s'agissait pas là d'un acte isolé. En effet, nous avons relevé des témoignages accablants à votre encontre qui nous indiquent que vous avez déjà pratiqué de la sorte et allant même à vous vanter de cette pratique ! Nous avons en effet découvert, qu'il vous est arrivé, d'accepter les numéros de téléphone que les clients vous glissaient dans la main dans le but évident de réaliser pour votre propre compte des travaux à notre insu.

Par ailleurs, au cours de nos investigations, nous avons appris que vous avez fait courir le bruit que notre société arrêtait l'activité ' Espaces Verts' ce qui, bien sûr, n'a jamais été envisagé. De plus, vous avez à cette occasion dénigré en termes méprisants le travail de notre société. Il s'agit là d'une grave atteinte à l'image et à la réputation de notre société.De plus, à la suite de votre mise à pied, vous êtes revenu dans nos locaux pour nous amener un arrêt de travail pour maladie. Suite à votre visite, nous avons constaté la disparition du carnet contenant les numéros de téléphone des clients de notre société et nous en avons déduit que vous l'aviez dérobé. Au cours de notre entretien du 13 août 2010, nous vous avons réclamé ce carnet. Vous nous avez alors confirmé que ce carnet était bien en votre possession mais que vous ne souhaitiez pas nous le restituer conforté dans cette position par le conseil qui vous accompagnait. Puis vous êtes revenu une heure plus tard et vous nous l'avez restitué. Vraisemblablement était-ce le temps nécessaire afin de vous permettre de faire une copie des informations qu'il contient.

Tous ces agissements sont inexcusables et prouvent que vous cherchez à nuire à notre société.

Pour finir, nous ne pouvons admettre l'attitude de votre épouse dans nos locaux le mercredi 4 août à 10h00 qui, devant témoin et sans que vous ne cherchiez à l'en empêcher, a menacé de représailles un salarié de notre société si ce dernier venait à témoigner contre vous. Ce genre de comportement est inqualifiable et nous a extrêmement surpris :il est bien sur inacceptable. » ;

Attendu qu'il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la faute lourde, faute commise par le salarié dans l'intention de lui nuire ;

Attendu qu'au soutien de ces griefs, la SARL ETABLISSEMENT AROD produit régulièrement aux débats :

- une attestation de monsieur [B], collègue de travail, qui précise « avoir été toujours très surpris des agissements de Monsieur [D] vis-à-vis de la clientèle du magasin. C'était tout particulièrement le cas pour un certain nombre de clients se présentant directement dans l'atelier à Monsieur [D] sans passer la réception ce qui n'est pas l'usage chez nous puisque nous avons un comptoir ' réception atelier' pour cela. C'est ce qui s'est passé une fois de plus le 3 août 2010 lorsque qu'un client

(Monsieur [J] [F]) s'est rendu directement dans l'atelier pour s'entretenir avec monsieur [D]. Ce même client a ensuite sortit une tronçonneuse Husquavarna de sa voiture pour la déposer dans le véhicule de monsieur [D] laissé ouvert. »,

- une attestation de monsieur [O], collègue de travail qui indique « avoir été surpris de l'attitude très ambiguë d'un certain nombre de clients vis-à-vis de monsieur [D] dans l'exercice de ses fonctions au sein de l'atelier. Il était particulièrement frappant de constater qu'un certain nombre de clients cherchaient manifestement à s'isoler en compagnie de monsieur [D] à l'extérieur de la zone atelier ce qui n'est pas l'usage chez nous »

- une attestation de monsieur [C], collègue de travail qui indique « avoir été très surpris, inquiet et déçu d'apprendre auprès de nos fournisseurs (Ets Sodipieces) que nous arrêtions l'activité « espaces verts » et non pas de monsieur [G] » lequel contacté a démenti. « ce même fournisseur nous a appris que cette rumeur avait été lancée par monsieur [D] dans l'exercice de ses fonctions en novembre 2009 »,

- un carnet téléphonique, se terminant par la reconnaissance suivante de monsieur [D] datée du 13 août 2010 « avoir donné en main propre à monsieur [Y] [G] mon cahier d'adresses clients que j'avais fait moi-même »

- une attestation de madame [W], secrétaire-comptable de la SARL AROD, qui explique que depuis 2005 : « Le processus mis en place à l'époque et qui n'a pas évolué depuis est le suivant : les clients se présentent à un comptoir de réception prévu à cet effet dans la surface de vente et remplissent un document appelé ' ordre de réparation'. Les clients ne pénètrent en aucun cas dans l'atelier : un panneau de grande dimension a été placé en 2009 sur la porte qui mène à l'atelier pour en interdire l'accès aux clients....J'atteste qu'il n'y a pas eu d'ordre de réparation enregistré au nom de monsieur [F] le 3 aout 2010" et qui dénonce l'agression violente dont elle a fait l'objet de la part de l'épouse de monsieur [D],

- un exemplaire d'ordre de réparation autocopiant,

- une facture de l'imprimerie de cartonnage [S] [V] du 31 décembre 2007 concernant une commande de « liasses ordre de réparation »

- des photographies du guichet réception atelier et de la porte d'accès aux ateliers, sur lequel figure des pictogrammes et la mention « accès interdit à toute personne étrangère au service (même accompagné d'un mécanicien) », sans indication de date de prise de ces photographies 

- une facture que lui a adressée la société LUMINOL, du 26 juin 2009 d'un montant de 2212,40 euros correspondant à la commande de la signalétique figurant sur les portes de l'atelier ;

Attendu que monsieur [D] verse aux débats :

- une attestation de monsieur [F], qui précise « ayant ma tronçonneuse qui n'avait pas servi depuis l'hiver, je l'ai portée à mon ami [M] pour qu'il y jette un 'il et si nécessaire la fasse réparer dans son entreprise à mon compte », conteste toute demande de « travail au noir » et évoque « un conseil d'ami avant réparation éventuelle chez AROD » reproduisant les termes de sa lettre du 4 août 2010

- des attestations de clients soulignant son professionnalisme et sa compétence

- un compte rendu d'entretien préalable à licenciement établi par monsieur [I], conseiller du salarié, du 1er septembre 2010, au cours duquel il a précisé avoir conseillé plusieurs personnes de ses connaissances, comme le 3 août à l'égard d'un « papy de sa connaissance », les matériels étant réparés ou achetés chez son employeur et a reconnu avoir évoqué « une baisse d'activité passagère et rien d'autre » ;

Attendu que les manquements retenus par l'employeur doivent être analysés ;

Sur le grief de détournement de clientèle

Attendu que monsieur [D], le 3 août 2010, a fait déposer sur son temps et lieu de travail, du matériel d'un client dans le coffre de son véhicule ;

Que monsieur [F], le client concerné et monsieur [B] confirment le déroulement des faits ;

Que les témoignages de messieurs [B] et [O] établissent que monsieur [D] avait pris l'habitude d'avoir des entretiens personnels, quelque soit le lieu où se déroulaient les entretiens, avec des clients, au vu et su de ses collègues de travail ;

Attendu que si monsieur [D] entretenaient des relations très privilégiées avec certains clients et les conseillaient, il n'est nullement démontré que ces échanges personnalisés aient pu conduire à des détournements de clientèle au détriment de la société AROD;

Que monsieur [F] affirme que si des travaux étaient nécessaires ou du matériel devait être acquis, cela se faisait avec la société AROD, ce qu'a confirmé monsieur [D] lui-même ;

Attendu que ce manquement retenu par la SARL ETABLISSEMENTS AROD au soutien du licenciement prononcé pour faute lourde de monsieur [D] n'est pas établi ;

Sur le grief de dénigrement de la société

Attendu que l'employeur reproche à monsieur [D] d'avoir fait courir une fausse rumeur d'arrêt de l'activité ' Espaces Verts' et de l'avoir dénigré;

Attendu que si monsieur [D] évoque une absence de motif clair et précis dans la lettre de licenciement équivalent à une absence de motifs, la cour ne peut que constater que le grief retenu est matériellement vérifiable ;

Attendu que si monsieur [L] [C] affirme avoir appris par un fournisseur que monsieur [D] était à l'origine d'une rumeur et après interrogation de son employeur, avoir appris qu'il s'agissait d'une fausse rumeur, son seul témoignage ne peut suffire à établir que cette rumeur, dont la teneur est contestée par monsieur [D], s'inscrit dans le cadre d'un dénigrement de son employeur, les conditions dans lesquels cette information aurait pu être donnée restant totalement inconnues ;

Sur le détournement du carnet de téléphone

Attendu que l'employeur reproche à monsieur [D] d'avoir soustrait le 4 août 2010, suite à la remise de son arrêt maladie, le carnet contenant les numéros de téléphone des clients de la société ;

Attendu qu'aucun élément ne vient corroborer que le carnet de téléphone ait été soustrait par monsieur [D] le 4 août 2010 lors de sa visite ;

Attendu que le cahier vert versé aux débats ne comporte pas l'en-tête de la SARL AROD et comporte sur 5 pages et demi le nom de clients avec leur numéro de téléphone;

Que monsieur [D] a affirmé sans être démenti que ce cahier a été mis en place par lui, renseigné par lui ;

Que dans ce contexte le fait d'avoir voulu le conserver ne saurait s'analyser comme un manquement fautif ;

Qu'au surplus, le salarié a accepté de le remettre à son employeur à sa demande ;

Que si l'employeur évoque un délai de réflexion du salarié avant de lui remettre le carnet, aucun élément ne vient établir cette résistance et même à la supposer avérée, cette résistance ne saurait être fautive ;

Sur l'attitude de l'épouse de monsieur [D]

Attendu que l'employeur reproche au salarié le comportement de son épouse le 4 août 2010 ;

Attendu que le comportement adopté par madame [D], avéré ou non, est insusceptible de pouvoir être reproché à monsieur [D] et ne peut fonder son licenciement pour faute lourde ;

Attendu que faute pour la SARL ETABLISSEMENTS AROD de rapporter la preuve d'une faute lourde susceptible d'avoir été commise par monsieur [D] dans l'exécution de sa relation contractuelle de travail, le licenciement dont ce dernier a été l'objet se trouve dépourvu de toute cause réelle et sérieuse ;

Que le jugement entrepris doit être confirmé ;

Sur les conséquences financières de la rupture

Attendu que le licenciement ayant pris effet au 26 août 2010, monsieur [D] a été privé de son indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de ses congés payés, de son indemnité légale de licenciement, de son salaire durant la mise à pied conservatoire;

Que la décision de première instance a justement déterminé les conséquences financières en termes de rappel de salaires, d'indemnité compensatrice de préavis et de licenciement ;

Que le jugement doit être confirmé de ces chefs ;

Attendu qu'en application de l'article L. 1235-5 du code du travail, monsieur [D] peut prétendre à une indemnité en fonction du préjudice subi ;

Qu'au regard des circonstances particulières ayant entouré la rupture des relations contractuelles, des difficultés réelles de reconversion professionnelles rencontrées par monsieur [D], salarié âgé de plus de 50 ans, une indemnité définitive devant lui revenir personnellement, pouvant être justement évaluée à la somme de 25000 euros ;

Que le jugement doit être confirmé de ce chef ;

Attendu que la demande de monsieur [D] au titre de dommages et intérêts pour licenciement dans des conditions brutales et vexatoires ne repose pas sur des fondements juridiques et des faits distincts de ceux retenus pour fixer l'indemnité pour licenciement abusif ;

Que monsieur [D] sera débouté de ce chef de demande ;

Que le jugement doit être infirmé de ce chef ;

Attendu que le licenciement prononcé pour faute lourde ayant été jugé abusif, l'employeur doit indemniser monsieur [D] pour les heures correspondant au droit individuel à la formation qu'il n'a pas pu demander à utiliser au moment de la rupture faute d'avoir pu exécuter le préavis ;

Que la somme de 1098 euros allouée à titre de dommages et intérêts pour privation de ce droit par les premiers juges doit être confirmée ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Attendu que le jugement entrepris doit être confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ;

Attendu que la SARL ETABLISSEMENTS AROD, qui succombe en ses demandes, doit être condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile;

Attendu que les considérations d'équité justifient que soit allouée à monsieur [D] une indemnité complémentaire de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire

Reçoit l'appel

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de celles relatives à la demande à titre de dommages et intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions brutales et vexatoires

L'infirme de ce seul chef,

Déboute monsieur [D] de sa demande d'indemnisation complémentaire pour licenciement intervenu dans des conditions brutales et vexatoires

Y ajoutant,

Condamne la SARL AROD à payer à monsieur [D] une indemnité complémentaire de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SARL ETABLISSEMENTS AROD aux dépens d'appel.

Le GreffierLe Président

Malika CHINOUNENicole BURKEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 12/04915
Date de la décision : 22/02/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°12/04915 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-22;12.04915 ?
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