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22/02/2013 | FRANCE | N°11/07020

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 22 février 2013, 11/07020


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 11/07020





[L]



C/

[W]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 16 Septembre 2011

RG : F 10/00470











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 22 FEVRIER 2013













APPELANTS :



Epoux [I] [L]-[T] [X]

[Adresse 8]

[Localité 5]

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représentée par Me Olivier MILKOFF, avocat au barreau de PARIS







INTIMÉE :



[N] [W]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 4]



comparant en personne, assistée de Me Gaëlle MATHIEU, avocat au barreau de HAUTES-ALPES













PARTIES CONVOQUÉ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 11/07020

[L]

C/

[W]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 16 Septembre 2011

RG : F 10/00470

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 22 FEVRIER 2013

APPELANTS :

Epoux [I] [L]-[T] [X]

[Adresse 8]

[Localité 5]

représentée par Me Olivier MILKOFF, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

[N] [W]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 4]

comparant en personne, assistée de Me Gaëlle MATHIEU, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

PARTIES CONVOQUÉES LE : 16 février 2012

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Janvier 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Michèle JAILLET, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Février 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 3 juillet 2009, [N] [W] a embarqué sur le bateau des époux [I] [L]-[T] [X]; elle a débarqué dans le port de [11] au [Localité 10] le 14 juillet 2009.

[N] [W] a saisi le conseil des prud'hommes de LYON ; prétendant qu'elle avait été embauchée par les époux [I] [L]-[T] [X] pour s'occuper de leurs enfants âgés de 1 an et 3 ans, elle a demandé que la relation contractuelle soit qualifiée de contrat de travail, que la rupture des relations soit qualifiée de licenciement sans cause et elle a réclamé des rappels de salaires, des remboursements de frais, des dommages et intérêts pour licenciement irrégulier, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause, une indemnité pour travail dissimulé et une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 16 septembre 2011, le conseil des prud'hommes a :

- qualifié la relation contractuelle de contrat de travail,

- analysé la rupture de la relation contractuelle en un licenciement irrégulier et dénué de cause,

- condamné solidairement les époux [I] [L]-[T] [X] à verser à [N] [W] la somme de 959,17 euros correspondant aux salaires pour la période du 3 au 14 juillet 2009, outre 95,91 euros de congés payés afférents, la somme de 2.060,88 euros à titre de remboursement de frais, la somme de 1.337 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier, la somme de 1.337 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause, la somme de 8.022 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé et la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le jugement a été notifié le 11 octobre 2011 aux époux [I] [L]-[T] [X] qui ont interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 16 octobre 2011.

Par conclusions visées au greffe le 11 janvier 2013 maintenues et soutenues oralement à l'audience, les époux [I] [L]-[T] [X] :

- soulèvent l'incompétence du conseil des prud'hommes au profit du tribunal d'instance de SAINT-BARTHELEMY, ville qui est le port d'attache du voilier en cause,

- à cet effet, font valoir que seules les règles du code du travail maritime s'appliquent s'agissant d'un contrat d'engagement maritime conclu avec un armateur et ayant pour objet un service à bord d'un navire français en vue de son exploitation,

- dénient l'existence d'un contrat de travail au motif que [N] [W], qui avait des compétences dans le domaine de la voile et non une qualification de nounou, avait embarqué sur le bateau en qualité d'équipière et que le statut d'équipier est exclusif de celui de salarié,

- contestent l'existence d'un lien de subordination au sens du droit du travail et précisent que tout passager d'un bateau doit se soumettre aux ordres du capitaine,

- demandent l'annulation du jugement,

- subsidiairement, querellent les sommes allouées et exposent que [N] [W] avait accepté un défraiement de 500 euros mensuel, n'a pas accompli d'heures supplémentaires et a quitté le bateau de sa propre initiative et que son travail n'a pas été dissimulé,

- sollicitent la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de [N] [W] aux dépens.

Par conclusions visées au greffe le 11 janvier 2013 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [N] [W] :

- affirme qu'elle a été recrutée uniquement pour s'occuper des enfants et non comme équipière pour la marche, la conduite, l'entretien et l'exploitation du bateau,

- estime donc que le code du travail maritime ne peut recevoir application,

- prétend qu'elle recevait des instructions de [I] [L] et de son épouse laquelle n'était pas capitaine et qu'elle se trouvait ainsi dans un lien de subordination,ne résultant pas des rapports capitaine/marin,

- en déduit son statut de salarié, l'application du code du travail et la compétence du conseil des prud'hommes,

- réclame, en incluant les heures supplémentaires accomplies, un rappel de salaire de 959,17 euros, outre 95,91 euros de congés payés afférents,

- relève que les époux [L] s'étaient engagés à lui rembourser ses frais et réclame la somme de 2.060,88 euros,

- explique que l'employeur lui a demandé verbalement de quitter le bateau, analyse la rupture des relations en un licenciement dénué de cause et irrégulier et réclame la somme de 1.337 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et la somme de 1.337 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier,

- reproche à l'employeur d'avoir sciemment dissimulé son travail en ne procédant pas à la déclaration préalable à l'embauche et en ne lui délivrant pas de bulletin de paie et réclame la somme de 8.022 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- sollicite la confirmation du jugement entrepris, la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation des époux [L] aux dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

L'exception d'incompétence est soulevée par les époux [I] [L]-[T] [X].

[N] [W] s'oppose à cette exception sans opérer de distinction entre [I] [L] et [T] [X] mais objecte qu'elle ne participait pas une expédition maritime et n'apportait pas son concours à la marche, l'entretien et l'exploitation du navire.

[N] [W] a embarqué sur le voilier Fleur Australe dans le cadre d'une expédition dont le but était le passage du Nord-Ouest ; [I] [L] était le capitaine et l'armateur du bateau ; il n'est pas discuté qu'il s'agissait d'un bateau français.

En vertu du code du travail maritime en vigueur à la date des faits, en application de l'article 2, est considéré comme armateur tout particulier, toute société, tout service public, pour le compte desquels un navire est armé et en application de l'article 3, est considéré comme marin quiconque s'engage envers l'armateur ou son représentant pour servir à bord d'un navire.

En vertu de l'article 1 du décret n° 67-390 du 7 août 1967 relatif aux conditions d'exercice de la profession de marin, exerce la profession de marin toute personne engagée par un armateur ou embarquée pour son propre compte en vue d'occuper à bord d'un navire français un emploi permanent relatif à la marche, à l'entretien et à l'exploitation du navire.

Sont notamment produits régulièrement aux débats :

* l'annonce éditée le 27 avril 2009 sur le site Voiles et Voiliers et ainsi libellée : '[I] [L] cherche équipière nounou pour enfants 1 et 3 ans',

* la réponse à cette annonce de [N] [W] dans laquelle elle explique qu'elle n'a pas été nounou, qu'elle a enseigné en classe maternelle, qu'elle a des enfants et qu'elle a encadré des stages de voiles et a navigué en qualité d'équipière et de chef de bord sur différents océans,

* un message que [I] [L] a envoyé le 29 juin 2009 à [N] [W] lui demandant de se trouver à Halifax le 3 juillet, lui précisant une prise en charge totale des voyages aller et retour et un défraiement de 500 euros par mois,

* l'attestation de [R] [F] qui se trouvait à bord du bateau et qui témoigne que [N] [W] comme lui même assurait « les tâches découlant de la vie en collectivité: cuisine, plonge, gestion du stock de nourriture, gestion des poubelles, ménage collectif » impliquant 14 heures de travail quotidien, en plus de s'occuper des enfants,

Il résulte de ces pièces que [N] [W] a été recrutée par [I] [L], capitaine et armateur du bateau, qu'elle a été occupée de manière permanente sur le bateau et qu'elle s'occupait des enfants et participait à l'entretien du voilier assurant le ménage, la cuisine et la vaisselle, prestations dont bénéficiait l'ensemble des personnes présentes sur le voilier ,

Ainsi, [N] [W] servait en permanence à bord d'un navire français à la demande de l'armateur.

Dans ces conditions, [N] [W] ne peut pas revendiquer un contrat de travail régi par le code du travail mais uniquement l'existence d'un contrat d'engagement maritime régi par le code du travail maritime.

L'article R.221-13 du code de l'organisation judiciaire confère compétence au tribunal d'instance pour connaître des contestations relatives au contrat d'engagement entre armateurs et marins.

Il n'est pas discuté que le port d'attache du voilier Fleur Australe est [Localité 13] (97).

Dès lors, seul le tribunal d'instance de SAINT-MARTIN est compétent pour connaître du litige.

Il doit être fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par les époux [I] [L]-[T] [X].

En conséquence, il convient de déclarer le conseil des prud'hommes de LYON incompétent au profit du tribunal d'instance de SAINT- MARTIN.

Le greffe doit être invité à transmettre la copie du présent arrêt et l'original du dossier au greffe du tribunal d'instance de SAINT-MARTIN.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

***

L'équité commande de débouter les parties de leurs demandes présentées en première instance et en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

[N] [W] qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris,

Fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par les époux [I] [L]-[T] [X],

Déclare le conseil des prud'hommes de LYON incompétent pour connaître du litige,

Désigne le tribunal d'instance de SAINT-MARTIN [Adresse 2]

[Localité 6] comme juridiction habile à connaître du litige,

Invite le greffe à transmettre la copie du présent arrêt et l'original du dossier au greffe du tribunal d'instance de SAINT-BARTHELEMY,

Déboute les parties de leurs demandes présentées en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens de première instance à la charge de [N] [W],

Ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes présentées en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse les dépens d'appel à la charge de [N] [W].

Le GreffierLe Président

Malika CHINOUNENicole BURKEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 11/07020
Date de la décision : 22/02/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°11/07020 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-22;11.07020 ?
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