AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
COLLÉGIALE
RG : 12/03399
SAS AREVA NP
C/
U.R.S.S.A.F DU RHÔNE
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON
du 25 Avril 2012
RG : 20100383
COUR D'APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 05 FEVRIER 2013
APPELANTE :
SAS AREVA NP (anciennement SAS FRAMATOME)
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par la SELAS LAMY- LEXEL AVOCATS ASSOCIES (Me Robert DEMAHIS), avocats au barreau de LYON
INTIMÉE :
U.R.S.S.A.F DU RHÔNE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par M. [L], en vertu d'un pouvoir général
PARTIES CONVOQUÉES LE : 21 Juin 2012
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Décembre 2012
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Nicole BURKEL, Président de chambre
Marie-Claude REVOL, Conseiller
Michèle JAILLET, Conseiller
Assistées pendant les débats de Ouarda BELAHCENE, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 05 Février 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCEDURE
Attendu que la société AREVA NP s'est vue notifier un redressement au titre des années 2006 et 2007 pour un montant de 405.492 euros hors 63747 euros de majorations de retard;
Attendu que la commission de recours amiable par décision du 20 octobre 2011, statuant sur le recours de la société AREVA NP ayant pour objet :
« la contestation du chef de redressement n°4 des observations suite à contrôle intitulé cessation anticipée d'activité de certains salariés et la remise des majorations de retard inhérents à l'entier redressement » a considéré que c'est à juste titre que l'inspecteur de recouvrement a procédé à la réintégration dans l'assiette des cotisations de ladite majoration conformément aux dispositions du 1er alinéa de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale et indiqué que la demande de remise des majorations de retard sera examinée à l'issue du litige ;
Attendu que le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon, statuant sur saisine de la société AREVA NP par jugement contradictoire du 25 avril 2012, a:
- débouté la société AREVA NP de ses demandes;
Attendu que la cour est régulièrement saisie d'un appel formé par la société AREVA NP;
Attendu que la société AREVA NP demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 21 août 2012, visées par le greffier le 11 décembre 2012 et soutenues oralement, de:
- dire et juger son appel recevable
- infirmer le jugement entrepris
- dire et juger que la rupture du contrat de travail étant le fait de l'employeur et ayant causé des préjudices au salarié avant et après ladite rupture, l'indemnité complémentaire de mise à la retraite présentait bien le caractère de dommages et intérêts et n'avait pas à entrer, à l'époque, dans l'assiette des cotisations sociales, peu important son caractère uniforme et forfaitaire
- dire et juger que l'URSSAF devra lui répéter la somme de 48.370 euros
- dire et juger qu'il n'ya pas lieu à majorations de retard
- lui allouer les intérêts de droit à hauteur de cour calculés depuis le jour où elle a réglé l'intégralité du principal du redressement contesté à savoir à partir de février 2009
- lui allouer la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que l'URSSAF du Rhône demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 24 octobre 2012, visées par le greffier le 11 décembre 2012 et soutenues oralement, de:
- confirmer le jugement rendu le 25 avril 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon
- rejeter la demande de remboursement assortie d'intérêts légaux
- rejeter comme non fondée la demande de sa condamnation au titre de l'article 700du code de procédure civile;
Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement;
MOTIFS DE LA DECISION:
Attendu que la Sas FRAMATOM ANP, aux droits de laquelle vient la Sas AREVA NP, a conclu, en application de l'accord national professionnel du 26 juillet 1999, branche professionnelle de la métallurgie, complété par des avenants des 1er mars et 24 octobre 2001, avec 3 organisations syndicales, un accord relatif à la cessation anticipée d'activité des salariés âgés (CASA) le 18 février 2003 ;
Attendu qu'aux termes de cet accord, le personnel entrant dans ce dispositif perçoit, durant la période de cessation anticipée d'activité, une indemnité mensuelle égale à 65% de leur salaire de référence pour la part n'excédant pas le plafond de la sécurité sociale à laquelle s'ajoute 50% du salaire de référence pour la part comprise entre 1 à 2 fois ce même plafond ;
Qu'à l'issue de la période de cessation d'activité, lorsque le salarié aura acquis le nombre de trimestres nécessaires pour la liquidation de sa retraite à taux plein, la rupture des relations contractuelles interviendra sous la forme de mise à la retraite ;
Qu'en application de l'article 8, à la sortie du dispositif, la société AREVA NP s'est engagée à servir au salarié « une indemnité de mise à la retraite composée de l'indemnité de mise à la retraite dont le montant est calculé conformément aux définitions des conventions collectives et à l'article 8-1majorée d'un montant calculé conformément à l'article 8-2. Cette indemnité est versée à la sortie du dispositif, déduction faite de l'acompte défini à l'article 8.3» ;
Que cette majoration est définie comme suit :
« Cette majoration est calculée à raison de 250 euros par mois depuis son adhésion et pour toute la durée de la période en CASA.
Le montant de cette majoration sera toutefois calculé de manière à ce qu'il ne conduise pas le salarié à percevoir plus de 100% de son salaire de référence net.
Toutefois, en lieu et place de la majoration indiquée ci-dessus :
* les salariés dont le salaire de référence mensuel brut est inférieur ou égal à 1900 euros percevront une majoration de l'indemnité de mise à la préretraite dont le montant sera calculé de manière à leur assurer l'équivalent de 100% de leur salaire de référence net
* les salariés dont le salaire de référence mensuel brut est supérieur à 1900 euros percevront une majoration de l'indemnité de mise à la préretraite dont le montant sera calculé de manière à leur assurer l'équivalent du net d'un salaire de 1900 euros brut
* les salariés de [Localité 8] travaillant en postes (travail en équipes successives) et ceux de [Localité 5] Services et de [Localité 6] répondant à la définition de l'article 2.3, bénéficieront d'une majoration de mise à la retraite égale à 3600 euros par année complète en CASA (calculée au prorata temporis en cas d'année incomplète), si cela est plus favorable que les deux alinéas précédents.
* les salariés dont le salaire de référence mensuel brut est supérieur aux deux plafonds de la sécurité sociale bénéficieront d'une majoration de l'indemnité de mise à la retraite égale à 3600 euros par année complète en CASA (calculée au prorata temporis en cas d'année incomplète). » ;
Attendu que la société AREVA NP et deux organisations syndicales ont signé le 15 octobre 2007 un « accord d'interprétation de l'accord CASA ' du 18 février 2003 » suite à différents positionnements adoptés par l'URSSAF, aux termes duquel elles ont convenu « de rappeler les discussions qui ont présidées à l'adoption de (la) clause (majoration de l'indemnité de mise à la retraite) ainsi que la nature desdites indemnités » ;
Que la teneur de la convention est la suivante :
« Lors des négociations de l'accord CASA, les syndicats signataires ont fait observer que nonobstant les garanties données aux salariés par le régime de préretraite considéré, durant la période de suspension du contrat de travail, à savoir notamment l'acompte sur l'indemnité de mise à la retraite, le maintien des régimes complémentaires de retraite, etc ... l'initiative de la rupture émanant toutefois de l'employeur, les salariés subissaient néanmoins des préjudices non salariaux qu'il appartenait à l'employeur d'indemniser.
Par exemple, le contrat de travail se trouvant suspendu, des augmentations de salaire autres que celles automatiques, et des promotions à des classements supérieurs n'interviendraient pas.
De même, l'interdiction d'exercer une activité professionnelle pendant la période de suspension du contrat de travail empêcherait les intéressés de saisir les opportunités d'emploi plus favorables pouvant se présenter.
C'est pourquoi, initialement les syndicats signataires ont formé la demande d'une majoration des allocations de préretraite, demande qui fut catégoriquement repoussée.
En revanche, les parties sont convenues, s'agissant de l'indemnisation de divers préjudices non salariaux de l'octroi d'une majoration de l'indemnité de mise à la retraite.
Cette dernière pouvant être fractionnée dans son montant et les divers préjudices qu'elle compense, appréciés par rapport à la rémunération des intéressés. » ;
Attendu que l'URSSAF a notifié un redressement à la société AREVA, concernant la majoration de l'indemnité de mise à la retraite définie à l'article 8-2 exclue de l'assiette des cotisations, ce que conteste la société appelante ;
Attendu qu'en application de l'article L242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire. La compensation salariale d'une perte de rémunération induite par une mesure de réduction du temps de travail est également considérée comme une rémunération, qu'elle prenne la forme, notamment, d'un complément différentiel de salaire ou d'une hausse du taux de salaire horaire'. » ;
Que doivent également prises en compte « les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants visées à l'article 80 ter du code général des impôts, ainsi que les indemnités versées à l'occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail, au sens de l'article L1237-13 du code du travail et les indemnités de départ volontaire versées aux salariés dans le cadre d'un accord collectif de gestion prévisionnelle et des compétences, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80duodecies du code général des impôts '» ;
Attendu que d'une part, la majoration de l'indemnité de mise à la retraite définie à l'article 8-2 n'est pas prévue ni dans le cadre de l'accord national instituant le dispositif de cessation anticipée d'activité des salariés âgés ni dans le cadre légal des articles L5428-1, L5422-10, L5122-4 et L5123-6 du code du travail ;
Que l'exonération des cotisations sociales des allocations versées dans le cadre du dispositif CASA est limitée à la seule indemnisation mise en place par les accords professionnels nationaux et ne peut être étendue à une majoration complémentaire versée en application d'un accord d'entreprise ;
Attendu que d'autre part, pour les salariés adhérant librement, en dehors de tout contentieux avec leur employeur dans l'exécution du contrat de travail, après un délai de réflexion et possibilité d'entretien avec la direction des ressources humaines et de simulation, à ce dispositif CASA et dont le contrat de travail n'est aucunement rompu, la majoration de l'indemnité de mise à la retraite définie à l'article 8-2, versée chaque mois passé en dispense d'activité, n'a pas vocation à compenser un préjudice mais constitue un complément de revenu de remplacement ;
Que le fait que cette majoration s'acquiert de manière automatique et forfaitaire, sans individualisation de la situation personnelle des bénéficiaires, notamment sans référence à leur salaire, à leur ancienneté ou catégorie professionnelle, corrobore cette analyse ;
Que selon l'accord d'interprétation signée a posteriori entre la société AREVA NP et deux organisations syndicales, afin de mettre un terme au contentieux opposant l'employeur à certaines URSSAF, la majoration litigieuse a d'ailleurs été mise en place pour compenser le refus de l'employeur opposé à la demande de relèvement du revenu de remplacement réclamée par les organisations syndicales ;
Que le fait pour le salarié adhérant au dispositif CASA de ne pouvoir bénéficier d'augmentations, de promotions n'est que la conséquence du choix clairement manifesté de cesser toute activité de façon anticipée ;
Attendu qu'enfin, le fait que le contrat de travail du salarié, arrivé au terme de la période de cessation anticipée d'activité, soit rompu à l'initiative de l'employeur par la mise à la retraite est totalement indifférent à la solution du litige, le salarié ayant fait choix d'adhérer au dispositif CASA, lequel implique une cessation anticipée d'activité s'achevant par une mise à la retraite;
Que si la société AREVA NP soutient que l'adhésion exprimée par le salarié au dispositif CASA puisse être conditionnée par la crainte de se voir licencié pour motif économique ultérieurement, aucun élément ne vient corroborer cette affirmation;
Que dans le préambule et l'article 3 de l'accord du 18 février 2003, la société AREVA NP n'a nullement fait référence à une menace pesant sur l'emploi des salariés susceptibles d'être concernés mais à l'organisation du « transfert des compétences et des savoirs faire 'en vue de réguler les départs du personnel »;
Attendu que la majoration de l'indemnité de mise à la retraite doit être soumise à cotisations dans les conditions de droit commun ;
Attendu que la décision entreprise doit être confirmée en ce qu'elle a rejeté le recours formé par la société AREVA NP ;
Attendu que l'appelante succombant en son recours doit être dispensée du paiement du droit prévu à l'article R144-10 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'aucune considération d'équité ne justifie l'application de l'article 700 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement par arrêt contradictoire
Reçoit l'appel
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions
Y ajoutant
Dispense la société AREVA NP du paiement du droit prévu à l'article R144-10 du code de la sécurité sociale
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Malika CHINOUNE Nicole BURKEL