AFFAIRE DE SÉCURITÉ SOCIALE
RAPPORTEUR
RG : 12/01860
[K]
C/
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU RHÔNE
[A]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de LYON
du 11 Janvier 2012
RG : 2010/0367
COUR D'APPEL DE LYON
Sécurité sociale
ARRÊT DU 05 FEVRIER 2013
APPELANTE :
[X] [K]
née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 9]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée par Me Jean-baudoin kakela SHIBABA, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/003605 du 23/02/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
INTIMÉS :
CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU RHÔNE
[Adresse 5]
[Localité 7]
représentée par Mme [H], en vertu d'un pouvoir spécial
[C] [A]
Chez Madame [A] [H]
[Adresse 8]
[Localité 6]
non comparant
PARTIES CONVOQUÉES LE : 7 Juin 2012
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 04 Décembre 2012
Présidée par Michèle JAILLET, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Mme Ouarda BELAHCENE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Nicole BURKEL, Président de chambre
Marie-Claude REVOL, Conseiller
Michèle JAILLET, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 05 Février 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Nicole BURKER, Président, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS ET PROCEDURE
Attendu que madame [X] [K] a bénéficié de l'allocation de soutien familial en faveur de l'enfant [K] [G], née le [Date naissance 4] 1989 ;
Attendu qu'à la suite d'un contrôle diligenté au domicile de madame [K] le 4 mai 2009, la Caisse d'Allocations Familiales de LYON , au regard des éléments établissant une vie maritale de madame [K] avec monsieur [A] à compter d'octobre 2007, a refusé à madame [K] le bénéfice des prestations familiales en qualité d'allocataire isolé à compter du 1er novembre 2007, générant un indu de 1705,56 euros, représentant l'allocation de soutien familial pour la période de novembre 2007 à juin 2009 ;
Attendu par décision du 8 juillet 2011, la commission de recours amiable a rejeté le recours de madame [K] ;
Attendu que le tribunal des affaires de sécurité sociale de LYON, par jugement contradictoire du 11 janvier 2012, a :
- débouté madame [X] [K] de ses demandes
- condamné conjointement et solidairement madame [X] [K] et monsieur [C] [A] à payer à la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU RHONE la somme de 1.203,56 euros ;
Attendu que la cour est saisie par un appel formé par madame [K] ;
Attendu que madame [K] demande à la cour par conclusions déposées au greffe le 29 octobre 2012, visées par le greffier le 4 décembre 2012 et soutenues oralement, au visa des articles L 262-1; L262-10,L262-12, R262-2, R262-6 du code de l'action sociale et des familles, des articles L541-4,L523-1,R524-3 et L821-15 du code de la sécurité sociale, de :
- la dire et juger fondée et recevable en sa demande
- dire et juger la demande de la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES irrecevable et forclose
- en tout état de cause infirmer le jugement
- débouter la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES de toutes ses demandes contraires
- condamner la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES au remboursement de la somme déjà perçue avec intérêts au taux légal
- condamner la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES à la somme de 5000 euros en réparation du préjudice subi
- condamner la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES à 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, somme qui sera allouée à maître Jean Baudoin Kakela SHIBABA, moyennant renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle
- condamner la même aux dépens,
- subsidiairement, et pour le cas où elle serait condamnée aux dépens, faire application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique et laisser les dépens à la charge de l'Etat ;
Attendu que la Caisse d'Allocations Familiales du Rhône demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 23 août 2012, visées par le greffier le 4 décembre 2012 et soutenues oralement, de :
A titre principal,
- dire et juger qu'aux termes de l'article R. 142-25 du code de la sécurité sociale, le tribunal des affaires de sécurité sociale statue en dernier ressort jusqu'à la valeur de 4.000 euros
- qu'en l'espèce le montant du litige étant inférieur à 4000 euros, l'appel est irrecevable
Subsidiairement au fond
- débouter madame [K] de l'ensemble de ses demandes
- dire et juger que madame [K] et monsieur [A] vivaient maritalement de novembre 2007 à juin 2009
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de LYON du 11 janvier 2012 ;
Attendu qu'à l'audience la CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DU RHONE a renoncé à l'exception d'irrecevabilité et maintenu ses autres demandes ;
Que mention en a été portée sur la note d'audience signée du conseiller rapporteur et du greffier ;
Attendu que monsieur [A] a été régulièrement assigné devant la cour par acte d'huissier de justice délivré le 22 octobre 2012, à la demande de madame [K];
Qu'il n'est ni présent ni représenté à l'audience;
Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l'article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement;
MOTIFS DE LA DECISION:
Attendu que l'arrêt doit être qualifié de réputé contradictoire, en application de l'article 474 du code de procédure civile ;
Sur la forclusion
Attendu que madame [K] se fonde sur l'article L. 821-5 du code de la sécurité sociale pour soutenir que l'action de la CAF est forclose, cette dernière n'ayant notifié sa décision que par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 août 2011 une créance remontant à novembre 2007 ;
Attendu que ce texte qui concerne l'allocation adulte handicapé n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce, l'objet du litige étant relatif à l'allocation de soutien familial ;
Attendu que la CAF soutient que son action n'est pas prescrite puisqu'elle a adressé à madame [K] le 24 novembre 2009 une notification d'indu d'allocation de soutien familial pour la période de novembre 2007 à juin 2009 et une mise en demeure le 7 mai 2010 en recommandé dont madame [K] a signé l'accusé réception le 18 mai 2010 ;
Attendu que l'article L 553-1 alinéas 1 et 2 du code de la sécurité sociale dispose :
' L'action de l'allocataire pour le paiement des prestations se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de man'uvre frauduleuse ou de fausse déclaration.' ;
Attendu que la CAF du RHÔNE n'a eu connaissance de l'indu qu'à l'occasion du contrôle diligenté par ses services le 4 mai 2009 ;
Qu'elle a réclamé cet indu à madame [K] par lettre recommandée du 7 mai 2010 dont l'allocataire a signé l'accusé réception le 18 mai 2010 ;
Attendu en conséquence que l'action en recouvrement de l'allocation de soutien familial de la CAF à l'encontre de madame [K] n'est pas prescrite ;
Sur l'allocation de soutien familial
Attendu qu'aux termes de l'article L. 523 - 2 du code de la sécurité sociale, peut bénéficier de l'allocation de soutien familial, le père, la mère ou la personne physique qui assume la charge effective et permanente de l'enfant assimilé à un orphelin au sens de l'article L. 523-1;
Que l'article R 523-5 du même code prévoit que dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article L. 523-2, l'allocation cesse d'être due à compter du premier jour du mois au cours duquel le parent de l'enfant se marie ou vit maritalement et le versement peut être repris si le parent justifie vivre seul à nouveau de façon permanente, à compter du premier jour du mois civil suivant cette justification ;
Attendu que madame [K] dément toute vie maritale avec monsieur [A] depuis le 1er octobre 2007 telle que retenue par la CAF ;
Qu'elle indique produire plusieurs attestations qui mentionnent que pendant la période considérée elle a toujours vécu seule avec sa fille, ainsi que ses avis d'impôt sur les revenus de 2004 à 2012 qui portent tous les mentions 'C', soit célibataire, avec un enfant mineur à charge ;
Qu'elle ajoute que les éléments fournis par la CAF dans son rapport d'enquête sont « inexacts » ;
Attendu que madame [K] verse régulièrement aux débats 4 attestations dont seules 3 comportent les cartes d'identité de leurs auteurs, conformément aux prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile :
- celle de monsieur [Y] [D], qui se qualifie de proche de madame [K] et mentionne : « j'atteste sur l'honneur que mademoiselle [K] [X], résidant au [Adresse 2] depuis 1997, vie seule avec sa fille. Et que monsieur [A] [C] n'est pas son compagnon et qu'il ne réside pas au [Adresse 2]. Il vient seulement récupérer son courrier chez mademoiselle [K]
- celles de mesdames [P] [S] et [N] [B], voisines de madame [K] qui indiquent respectivement habiter depuis 1987 et 1993 dans le même bâtiment que madame [X] [K], et avoir toujours vu ou croisé cette dame, seule et/ou avec sa fille
- celle de madame [T] [V] qui précise depuis son installation le 20 septembre 1986 et l'arrivée de madame [K], elle a toujours vu cette dernière « vivre avec sa fille toute seule » ;
Attendu que l'attestation de madame [T], à laquelle n'est pas annexé un document d'état civil de son auteur, ne comporte pas de garanties suffisantes pour emporter la conviction de la cour ;
Qu'il en est de même concernant l'attestation de monsieur [D], qui n'indique pas, en violation de l'article 202 du code de procédure civile ni son lien de parenté avec madame [K], ni le fait qu'il réside au domicile de madame [K], laquelle est sa tante;
Attendu que les témoignages de mesdames [P] [S] et [N] [B], rédigés en des termes identiques, permettent d'établir que ces deux voisines ont rencontré madame [K], à l'extérieur de son domicile, seule ou avec sa fille ;
Qu'elles ne précisent aucunement avoir rendu visite à madame [K] à son domicile et avoir constaté qui y vivait ;
Attendu que madame [K] ne verse pas aux débats ses déclarations simplifiées de revenus pour les revenus 2006, 2007, 2008 et 2010 ;
Que madame [K] n'a pas coché la case 'B1 parent isolé ' sur la déclaration de revenus 2009, alors même qu'elle avait coché cette case sur la déclaration de revenus 2005 ;
Que s'agissant d'un système déclaratif, il convient d'observer que les avis d'impôt sur les revenus 2006, 2007, 2008, 2009 et 2010 ne comportent plus la lettre ' T' correspondant à la qualité de parent isolé, et ce contrairement aux avis d'impositions 2004 ou 2002 ;
Que les éléments d'ordre fiscal, invoqués par l'allocataire, ne permettent donc pas d'exclure une vie maritale pour la période concernée par le litige ;
Attendu que les dénégations opposées par madame [K] sont par ailleurs contredites par des éléments objectifs résultant soit de l'enquête diligentée par la CAF soit des formulaires ou déclarations effectués auprès de différents organismes, notamment par monsieur [A];
Attendu que l'enquête administrative réalisée par la CAF relève :
- « il apparaît que monsieur [A] [C] est connu de tous les organismes
(CPAM, ASSEDIC, IMPOTS) comme résidant au domicile de madame [K] [X] bât [Adresse 2], et ce depuis au moins 2005
- il apparaît que monsieur [A] ne justifie, depuis toutes ces années, d'aucune recherche de logement active
- il apparaît que madame [K] [X] ne coche plus, auprès des Impôts, depuis 2006, la case parent isolé
- il apparaît lors des entretiens effectués, que madame [K] et monsieur [A] ont reconnu qu'ils entretenaient une relation affective notoire et durable
- il apparaît que le logement de madame [K], ne comportant que deux chambres, laquelle héberge sa fille et son neveu, ne permet aucune indépendance de vie avec monsieur [A] »;
Que les procès-verbaux des agents chargés du contrôle assermentés et agréés font foi jusqu'à preuve contraire ;
Attendu que ces constats et éléments de preuve ont été contradictoirement notifiés à madame [K] et monsieur [A], par lettres recommandées distinctes du 22 juillet 2009 dont ils ont signé les accusés réception respectivement les 29 juillet et 3 août 2009 ;
Qu'ils n'ont, ni l'un ni l'autre contesté le contenu et le résultat de cette enquête ;
Attendu que les éléments de fait mis en évidence par les agents contrôleurs de la CAF sont encore corroborés par la mention de deux occupants (en les personnes de madame [K] et de monsieur [A]) sur la taxe d'habitation 2008 et par l'utilisation du téléphone et des coordonnées téléphoniques de madame [K] par monsieur [A] lors de ses démarches, déniant l'hypothèse d'une simple adresse postale pour ce dernier;
Attendu que monsieur [A], qui déclarait, en novembre 2007, vivre en couple depuis le 1er mars 2004 dans sa déclaration RMI du 3ème trimestre 2007, a précisé dans sa demande de RSA du 10 septembre 2010 qu'il avait cessé toute vie maritale le 29 janvier 2010 ;
Attendu que la CAF du RHÔNE rapporte la preuve d'une vie maritale de madame [K] à compter du 1er octobre 2007, interdisant à celle-ci de percevoir l'allocation de soutien familial à compter du 1er novembre 2007 ;
Attendu que madame [K] doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes ;
Que le jugement entrepris doit être confirmé ;
Attendu que c'est à bon droit que la CAF a notifié un indu de 1.203,56 euros à madame [K] ;
Que cependant madame [K] ayant seule la qualité d'allocataire et de bénéficiaire de l'allocation de soutien familial est donc seule débitrice de l'indu, à l'exclusion de monsieur [A] ;
Que monsieur [A] doit être mis hors de cause ;
Que le jugement doit être infirmé sur ce point ;
Attendu qu'aucune considération d'équité ne justifie l'application de l'article 700 du code de procédure civile ou 37 de la loi du 10 juillet 1991 à Maître SHIBABA, avocat de madame [K], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ;
Attendu que la demande de madame [K] relative aux dépens est dénuée d'objet, la procédure étant gratuite et sans frais ;
Attendu que madame [K] doit être dispensée du paiement du droit prévu à l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale ;
PAR CES MOTIFS
la Cour,
Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire
Reçoit l'appel
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté madame [K] de ses demandes
L'infirme pour le surplus
Condamne madame [X] [K] à payer à la CAF du RHÔNE la somme de 1.203,56 euros au titre de l'indu relatif à l'allocation de soutien familial
Met hors de cause monsieur [C] [A]
Y ajoutant,
Rejette l'exception de prescription
Dispense madame [K] du paiement du droit prévu à l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale,
Dit dénuée d'objet la demande relative aux dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
Malika CHINOUNE Nicole BURKEL