AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
R.G : 11/06751
INSTITUT FRANCAIS DU PETROLE ENERGIES NOUVELLES
C/
[F]
SYNDICAT SCERAO CFDT
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 25 Juin 2010
RG : 07/02306
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 31 JANVIER 2013
APPELANTE :
INSTITUT FRANCAIS DU PETROLE ENERGIES NOUVELLES
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Philippe ROZEC de la SELARL PRAXES AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
substitué par Me Sandrine AZOU, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
[T] [F]
né le [Date naissance 3] 1956 à [Localité 10]
[Adresse 2]
[Localité 5]
comparant en personne, assisté de la SELARL CABINET RITOUET-SOULA (Me Cécile RITOUET), avocats au barreau de LYON
substituée par Me Fatima TABOUZI, avocat au barreau de LYON
SYNDICAT SCERAO CFDT
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par la SELARL CABINET RITOUET-SOULA (Me Cécile RITOUET), avocats au barreau de LYON
substituée par Me Fatima TABOUZI, avocat au barreau de LYON
PARTIES CONVOQUÉES LE : 02 Mars 2012
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Octobre 2012
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre
Hervé GUILBERT, Conseiller
Christian RISS, Conseiller
Assistés pendant les débats de Marie BRUNEL, Greffier.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 31 Janvier 2013, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS
L'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles est un établissement public industriel et commercial à vocation de recherche, formation et expertise industrielle ;
Il est placé sous la tutelle de l'État ;
Son personnel est employé par des contrats de travail de droit privé relevant de la convention collective nationale de l'industrie du pétrole ;
Le 1er septembre 1983, il embauchait par un contrat à durée indéterminée [T] [F] né le [Date naissance 3] 1956 en tant qu'aide chimiste de niveau 2 au coefficient conventionnel 200 ; le salarié était affecté à l'établissement de [Localité 13] ;
L'engagement se concrétisait par un courrier de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles du 19 septembre 1983 ;
[T] [F] connaissait dans les premières années les progressions suivantes en terme de coefficient salarial :
- coefficient 215 le 1er juin 1986,
- coefficient 230 le 1er juin 1987,
- coefficient 250 le 1er mai 1989 ;
Le 1er mars 1994, [T] [F] devenait technicien ECR (essai - contrôle - recherches) au 2ème degré niveau B avec le coefficient 270 ;
À la fin de 1996, [T] [F] intégrait le département des analyses élémentaires et pétrolières au sein de la direction physique et analyse ;
Il se voyait affecter au laboratoire d'analyses élémentaires et moléculaires ;
Son travail donnait lieu à des évaluations annuelles ;
Celles-ci révélaient une progression en 1997 et 1998 puis étaient variables jusqu'en 2006 ;
En 2002, [T] [F] était élu membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail ; il était réélu en 2004 ;
Il devenait délégué CFDT du personnel en 2006 ;
Le 1er juin 2007, [T] [F] était promu au coefficient conventionnel 290 rétroactivement au 1er janvier 2007 ;
PROCÉDURE
S'estimant lésé, [T] [F] saisissait le 25 juin 2007 le conseil de prud'hommes de Lyon en constatation d'une discrimination salariale due à ses activités syndicales, repositionnement au coefficient salarial 310 à compter de la décision à intervenir et condamnation de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles à lui payer les sommes suivantes :
- 70.000 € à titre de dommages-intérêts,
- 133,98 € au titre de la journée de solidarité du 5 juin 2006,
- 13,40 € au titre des congés payés y afférents,
- 136,71 € au titre de la journée de solidarité du 28 mai 2007,
- 13,67 € au titre des congés payés y afférents,
- 2.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le syndicat SCERAO CFDT se joignait à l'action de [T] [F] et demandait la condamnation de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles à lui payer les sommes suivantes :
- 4.000 € à titre de dommages-intérêts pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession,
- 2.000 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Comparaissant, l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles concluait au débouté total de [T] [F] et du syndicat SCERAO CFDT, et à la condamnation de chacun d'eux à lui payer une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par jugement contradictoire du 25 juin 2010, le conseil de prud'hommes de Lyon, section des activités diverses, constatait une discrimination salariale en raison de l'activité syndicale de [T] [F], et condamnait l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles tant à le repositionner au coefficient 310 à compter du jugement qu'à lui payer les sommes suivantes
- 50.000 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination,
- 1.500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Il déboutait [T] [F] de ses autres demandes ;
Il condamnait l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles à payer au syndicat SCERAO CFDT les sommes suivantes :
- 4.000 € à titre de dommages-intérêts pour discrimination,
- 1.500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Il ordonnait l'exécution provisoire du jugement ;
L'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles interjetait appel du jugement le 15 juillet 2010 ;
L'affaire inscrite au rôle de la cour sous le numéro 10 / 05572 faisait l'objet d'une radiation le 05 octobre 2011 ;
Dans les jours suivants elle faisait l'objet d'une réinscription au rôle de la cour sous le numéro 11 / 06751 ;
Contestant toute discrimination, l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles conclut à l'infirmation partielle du jugement, au débouté total des parties et à la condamnation de chacune d'elles tant à lui rembourser les sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement expressément ordonnée qu'à lui payer chacune une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Il conclut à la confirmation du jugement sur le débouté du paiement de la journée de solidarité ;
[T] [F] conclut à la confirmation du jugement sur le repositionnement salarial et les dommages-intérêts ; interjetant appel incident, il demande la condamnation de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles à lui payer les sommes suivantes :
- 136,71 € au titre de la journée de solidarité du 28 mai 2007,
- 13,67 € au titre des congés payés y afférents,
- 28.066,72 € au titre du salaire dû sur la base de 3.808 € mensuels à compter du 1er juillet 2010 et jusqu'au 31 août 2012,
- 2.806,67 € au titre des congés payés y afférents,
- .2500 € à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais d'appel ;
Le syndicat SCERAO CFDT conclut à la confirmation du jugement en ce qui le concerne et à la condamnation de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles à lui payer une indemnité de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le paiement de la journée de solidarité du 28 mai 2007 et les congés payés y afférents
Attendu que selon l'article L. 3133-7 du code du travail la journée de solidarité instituée en vue d'assurer le financement des actions en faveur de l'autonomie des personnes âgées ou handicapées prend la forme :
1° D'une journée supplémentaire de travail non rémunérée pour les salariés ;
2° De la contribution prévue au 1º de l'article 11 de la loi nº 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées pour les employeurs ;
Attendu que selon l'article L. 3133-8 du même code une convention, un accord de branche ou une convention ou un accord d'entreprise détermine la date de la journée de solidarité ; que cet accord peut prévoir :
1° Soit le travail d'un jour férié précédemment chômé autre que le 1er mai ;
2° Soit le travail d'un jour de réduction du temps de travail tel que prévu à l'article L. 3122-6 ou à l'article L 3122-19 ;
3° Soit toute autre modalité permettant le travail d'un autre jour non travaillé en application de dispositions conventionnelles ou des modalités d'organisation des entreprises ;
Attendu qu' en l'absence de convention ou d'accord la journée de solidarité est le lundi de Pentecôte ;
Attendu qu'un accord de réduction du temps de travail se signait au sein de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles le 4 novembre 1998 ; que ses modalités étaient fixées sous la forme de la fermeture des entités pendant 8 jours ouvrés par an fixés en début d'année après consultation des instances représentatives du personnel ;
Attendu que par la voie d'un avenant à cet accord il se signait au sein de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles le 11 janvier 2006 un accord relatif à cette journée de solidarité ; que le nombre annuel d'heures travaillées était porté de 1.589 à 1.596 et celui des jours de fermeture de 8 à 9 ;
Attendu qu'après notification aux organisations syndicales représentatives les syndicats CGT et CFDT y formaient opposition les 6 et 7 février 2006, ce qui le rendait non applicable ;
Attendu que dans ces conditions la journée de solidarité était le lundi de Pentecôte ;
Attendu que par une note du 27 juin 2006 prise après concertation avec les instances représentatives du personnel la direction des ressources humaines de l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles fixait comme suit les jours de congés à prendre en 2007 au titre de la réduction du temps de travail : 18 mai, 28 mai (lundi de Pentecôte), 2 novembre, 24, 26, 27, 28 et 31 décembre ;
Attendu que l'employeur s'engageait ainsi à rémunérer les salariés pour la journée du lundi de Pentecôte, le 28 mai 2007 ;
Attendu que l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles dérogeait de la sorte à l'article L. 3133-8 du code du travail dans un sens favorable au salarié ;
Attendu que [T] [F] s'avère bien fondé en sa demande ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur le repositionnement au coefficient 310
Attendu que la classification d'un salarié doit être déterminée au regard des fonctions réellement exercées par celui qui réclame un coefficient, la charge de la preuve reposant sur le demandeur ;
Attendu que ni le contrat de travail ni la convention collective ne précisent les modalités d'évolution des coefficients ;
Attendu qu'il ressort des pièces du dossier que les promotions et révisions salariales se décident collégialement entre le supérieur hiérarchique direct du salarié, un autre supérieur et le directeur des ressources humaines ;
Attendu que l'accord du 5 mars 1993 portant classification des emplois définit les coefficients ECR comme suit :
'K 150
Agent ECR 1er degré, échelon A.
K 160
Agent ECR 1er degré, échelon B.
Est chargé, selon des directives précises, d'effectuer des essais et tests simples dans les domaines relevant de son activité.
K 170
Agent ECR 2e degré, échelon A.
K 185
Agent ECR 2e degré, échelon B.
En plus des travaux dévolus à l'agent ECR 1er degré, possède l'expérience et les connaissances lui permettant de procéder à des travaux plus complexes.
K 200
Agent technique ECR.
En plus d'une très haute qualification, possède une connaissance approfondie de sa spécialité et une pratique suffisante lui permettant de réaliser des montages, des essais, des mesures, des contrôles et d'en consigner les résultats.
K 215
Technicien ECR 1er degré, échelon A.
K 230
Technicien ECR 1er degré, échelon B.
Exerce des fonctions à caractère technique ou scientifique. A des connaissances théoriques et/ou une pratique étendues dans sa spécialité qui lui permettent de mener à bien, selon des directives générales et sans supervision permanente, des travaux qui comportent une part importante d'initiative et de responsabilités.
Lorsqu'il procède à des essais, il est en mesure d'en interpréter les résultats. Il sait utiliser la documentation scientifique courante.
K 250
Technicien ECR 2e degré, échelon A.
K 270
Technicien ECR 2e degré, échelon B.
En plus des tâches dévolues au technicien ECR 1er degré, possède dans sa spécialité des connaissances et une expérience plus étendues lui permettant d'élaborer, d'utiliser des techniques nouvelles en débordant, le cas échéant, de sa spécialité. Est capable de consulter et d'exploiter les moyens documentaires existants. Prend les contacts nécessaires à l'extérieur de l'entreprise.
K 290
Technicien ECR 3e degré, échelon A.
K 310
Technicien ECR 3e degré, échelon B.
En plus des tâches dévolues au technicien ECR 2e degré, est chargé, dans sa spécialité, de concevoir, de conduire et de coordonner des essais complexes. Est capable d'analyser les résultats, d'en tirer les conclusions et de faire des recommandations. Peut suppléer, occasionnellement, la hiérarchie dans les activités courantes.' ;
Attendu que le classement dans les échelons dépend de l'importance des responsabilités, de leurs conditions d'exécution et du niveau de l'expérience de l'intéressé ;
Attendu que l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles embauchait le 1er septembre 1983 par un contrat à durée indéterminée [T] [F] né le [Date naissance 3] 1956 en tant qu'aide chimiste de niveau 2 au coefficient conventionnel 200 ;
Attendu que [T] [F] connaissait dans les premières années les progressions suivantes en terme de coefficient salarial :
- coefficient 215 le 1er juin 1986,
- coefficient 230 le 1er juin 1987,
- coefficient 250 le 1er mai 1989 ;
Attendu que [T] [F] devenait le 1er mars 1994 technicien ECR (essai - contrôle - recherches) au 2ème degré niveau B avec le coefficient 270 ;
Attendu qu'il ne connaissait plus de progression de coefficient pendant treize ans, jusqu'en juin 2007 ;
Attendu que selon l'article 5 de l'avenant du 5 mars 1993 précité tout salarié dont la classification n'a pas évolué depuis 5 ans verra sa situation examinée dans l'entreprise ; que cet examen pourra être demandé au bout de 3 ans lorsque le salarié est classé dans un échelon A ;
Attendu que [T] [F] demandait plusieurs fois ce réexamen, d'abord verbalement au cours d'entretiens annuels d'évaluation ; qu'il lui était alors objecté qu'il ne pouvait y prétendre en raison de son niveau d'implication parfois insuffisant ;
Attendu qu'il le faisait ensuite par une lettre recommandée avec avis de réception du 31 août 2006 et une de son avocat en date du 17 octobre suivant ;
Attendu que l'Institut Français du Pétrole ne répondait pas à ces courriers mais accordait à [T] [F] un passage au coefficient 290 en juin 2007 ;
Attendu que ce dernier ne précise pas dans ses écritures et pièces les tâches réellement exécutées et leur correspondance avec le coefficient 310, qu'il revendique ;
Attendu qu'il ne justifie pas avoir été en droit de passer directement du niveau 270 au 310, c'est à dire du rang de technicien ECR 2ème degré échelon B à celui de technicien ECR 3ème degré échelon B sans passer par celui de technicien ECR 3e degré, échelon A, coefficient 290, comme il est d'usage dans l'entreprise ;
Attendu qu'il présente seulement deux attestations de messieurs [W] [M] et [L] [O], qui étaient comme lui investis de mandats représentatifs, et se limitent à faire état de son implication dans ses fonctions électives ;
Attendu qu'il ne ressort pas des pièces et des débats que [T] [F] était chargé de concevoir, conduire et coordonner des essais complexes, la complexité requise devant être inhérente à la technique mise en 'uvre ;
Attendu que [T] [F] s'avère ainsi mal fondé à revendiquer le coefficient 310 ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur le rappel de salaires et congés payés pour la période du 1er juillet 2010 au 31 août 2012
Attendu que la demande se fonde sur le coefficient 310 et un salaire brut mensuel de 3.808 € ;
Attendu qu'il ressort des développements précédents que [T] [F] ne peut revendiquer une revalorisation salariale sur ces fondements ;
Attendu qu'il succombera ainsi en sa demande, qui est nouvelle en appel ;
Sur la discrimination
Attendu que selon l'article L. 1132-1 du code du travail aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3, et de classification en raison de ses activités syndicales ; que l'article L 2141-5 du même code interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment d'avancement et de rémunération ;
Attendu que selon l'article L 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utile ;
Attendu que selon l'article L. 2141-5 du même code il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail ;
Attendu que [T] [F] soutient avoir été lésé dans son évolution de carrière à cause de ses activités syndicales ;
Attendu qu'il invoque les éléments suivants :
- mention de ses activités syndicales dans les fiches d'évaluation,
- défaut de réponse aux revendications de coefficient et de salaire,
- stagnation professionnelle,
- favoritisme de madame [C],
- absence d'entretien relatif à l'évolution professionnelle du salarié ;
Attendu que [T] [F] était en 2002 élu membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail ;qu' il était réélu en 2004 ;
Attendu qu' il devenait délégué CFDT du personnel en 2006 ;
Attendu que plusieurs fiches établies après l'entretien annuel d'évaluation font état du temps passé par [T] [F] à ses activités représentatives au détriment de celles du laboratoire d'analyses ; que cet élément laisse présumer l'existence d'une discrimination ;
Attendu qu'au cours de ces entretiens puis par des courriers de 2006 [T] [F], qui occupait le coefficient 270 depuis 1994, demandait sa promotion au 310 ; que l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles n'y répondait pas jusqu'à ce qu'il décidât en juin 2007 de promouvoir [T] [F] au coefficient 290, ce concomitamment à la saisine du conseil de prud'hommes ; que cet élément laisse aussi présumer l'existence d'une discrimination ;
Attendu que le grief de stagnation professionnelle est constant, le salarié n'ayant bénéficié d'aucun avancement de coefficient depuis 1994 et ayant atteint le 290 en juin 2007, à l'âge de 51 ans, alors que la moyenne d'âge de l'entreprise était à 48 ans ; que cet élément laisse aussi présumer l'existence d'une discrimination ;
Attendu que, concernant le grief de favoritisme de madame [C], [T] [F] prétend que cette dernière fut nommée en 2000 à la direction du laboratoire d'analyses élémentaires, alors qu'il aurait dû recevoir ce poste ; que toutefois aucune circonstance ne démontre que ce poste revenait de droit à [T] [F], que d'autre part il est antérieur au début de ses activités syndicales ; que cet élément n'est dons pas de nature à caractériser une discrimination en relation avec les activités syndicales du salarié ;
Attendu que, concernant l'absence d'un entretien quinquennal relatif à son évolution de carrière, [T] [F] se fonde sur l'article 5 de l'avenant du 5 mars 1993 selon lequel le salarié dont la classification n'a pas évolué depuis 5 ans verra sa situation examinée dans l'entreprise ; que l'absence de cet entretien est certes fautive mais ne laisse pas pour autant présumer une discrimination due aux activités syndicales ;
Attendu qu'il ressort des trois premiers griefs la présomption d'une discrimination en relation avec les activités syndicales ;
Attendu que l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles ne conteste pas la matérialité des faits mais fournit des explications se fondant sur les fiches établies lors des entretiens annuels d'évaluation ;
Attendu qu'il en ressort que le travail et l'évolution de [T] [F] étaient tout à fait satisfaisants pendant 15 ans, jusqu'en 1998 ;
Attendu que le comportement du salarié et la situation se dégradaient à partir de 1999, alors que madame [C] arrivait au service des analyses élémentaires où [T] [F] travaillait, laquelle devenait dès 2000 sa supérieure hiérarchique ;
Attendu qu'une incompatibilité entre [T] [F] et cette personne se manifestait rapidement ; qu'en fait le salarié n'acceptait pas que madame [C] lui eût été préférée, alors que le choix de l'employeur portait sur les qualités professionnelles et ne relevait pas d'une intention de lui nuire ;
Attendu que cette situation naissait avant que [T] [F] n'eût été investi de fonctions syndicales représentatives, lesquelles débutaient en 2002 ;
Attendu que les évaluations annuelles, que [T] [F] ne contestait pas vraiment, montraient un comportement irrégulier, qui reflétait cette situation d'antinomies personnelles;
Attendu que dans ces conditions le manque d'implication de [T] [F] apparaissait d'autant plus important, ce qui explique sa stagnation professionnelle ;
Attendu que le défaut de réponse aux demandes de promotion s'inscrivait dans ce contexte ; que plusieurs appréciations de supérieurs laissaient ressortir que [T] [F] ne remplissait pas les conditions d'une promotion ;
Attendu que la mention du pourcentage de temps consacré aux activités syndicales s'inscrivait dans ce même contexte, l'employeur ne soulignant pas cette activité mais le manque d'implication de [T] [F] dans les tâches courantes ;
Attendu que [T] [F] reconnaît dans ses écritures avoir bénéficié d'augmentations individuelles de salaires à l'instar de ses collègues ; qu'il ne ressort pas des pièces et des débats que celles-ci aient été inférieures aux leurs en considération de ses activités de membre du comité d'hygiène et de sécurité puis de délégué du personnel ;
Attendu qu'il appert de l'ensemble de ces éléments que la discrimination alléguée n'est pas établie ;
Attendu que par voie de conséquence [T] [F] est mal fondé en sa demande de dommages-intérêts ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée sur tous ces points ;
Sur la demande de dommages-intérêts du syndicat SCERAO CFDT
Attendu que celui-ci succombera en sa demande, qui est indissociable de celle de [T] [F] ;
Attendu que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
Sur la demande de condamnation des intimés au remboursement des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement déféré
Attendu que l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles demande que soit ordonnée la restitution des sommes, qu'il a versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement déféré ;
Attendu cependant que le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement ;
Attendu qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu à statuer sur la demande ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement déféré et, statuant à nouveau,
Condamne l'Institut Français du Pétrole Énergies Nouvelles à payer à [T] [F] les sommes suivantes :
- 136,71 € au titre de la journée de solidarité du 28 mai 2007,
- 13,67 € au titre des congés payés y afférents,
Déboute [T] [F] de ses autres demandes,
Déboute le syndicat SCERAO CFDT de ses demandes,
Y ajoutant,
Déboute [T] [F] de sa demande de rappel de salaires et congés payés sur coefficient,
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré,
Rejette les demandes d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile formulées en cause d'appel,
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier, Le Président,
Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS