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09/01/2013 | FRANCE | N°11/03784

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 09 janvier 2013, 11/03784


AFFAIRE PRUD'HOMALE



DOUBLE RAPPORTEUR





R.G : 11/03784





[S]



C/

SAS LE CERCLE DES AINES







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELLEY

du 20 Mai 2011

RG : F 10/00058











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 09 JANVIER 2013







APPELANTE :



[N] [S] épouse [Y]

née le [Date naissance 1] 1966 à [Local

ité 7]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



comparante en personne

assistée de Me Fabien ROUMEAS, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



SAS LE CERCLE DES AINES

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentée par Me Alexandre DE PLATER de la SELARL ALEXANDRE DE PLATER,...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

DOUBLE RAPPORTEUR

R.G : 11/03784

[S]

C/

SAS LE CERCLE DES AINES

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELLEY

du 20 Mai 2011

RG : F 10/00058

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 09 JANVIER 2013

APPELANTE :

[N] [S] épouse [Y]

née le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en personne

assistée de Me Fabien ROUMEAS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SAS LE CERCLE DES AINES

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Alexandre DE PLATER de la SELARL ALEXANDRE DE PLATER, avocat au barreau de PARIS

PARTIES CONVOQUÉES LE : 19 Septembre 2011

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 25 Avril 2012

Présidée par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre et Hervé GUILBERT, Conseiller, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre

Hervé GUILBERT, Conseiller

Françoise CARRIER, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 Janvier 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Vu le jugement contradictoire rendu entre les parties le 20 mai 2011 par le Conseil de Prud'hommes de BELLEY, dont appel ;

Vu les conclusions déposées le 25 avril 2012 par [N] [S] épouse [Y], appelante, incidemment intimée ;

Vu les conclusions déposées le 15 mars 2012 par la S.A.S. LE CERCLE DES AÎNÉS, intimée, incidemment appelante ;

Ouï les parties en leurs explications orales à l'audience du 25 avril 2012 ;

La Cour,

Attendu que suivant contrat de travail à durée indéterminée et à temps plein du 4 décembre 2006 [N] [S] épouse [Y] a été embauchée par la S.A.S. LE CERCLE DES AÎNÉS (ci-après la société, brievitatis causa) qui exploite un établissement d'hébergement pour adultes dépendants à [Localité 5] (Ain) en qualité d'infirmière diplômée d'État ;

que par avenant du 1er octobre 2007, elle a été promue infirmière coordinatrice avec le statut de cadre ;

que dans la matinée du 22 avril 2010, un incident l'a opposée au directeur de l'établissement au sujet de son refus de prendre en considération les demandes de l'une des résidentes, et qu'elle a alors immédiatement quitté le lieu de travail pour aller consulter le médecin du Travail, puis un autre praticien qui lui a délivré un avis d'arrêt de travail du 22 avril au 13 mai 2010 ;

qu'elle a été licenciée pour faute grave le 11 mai 2010 ;

Attendu que le 16 juin 2010 [N] [S] a saisi la juridiction du Travail en lui demandant de condamner la société à lui payer un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ainsi que des dommages et intérêts pour des motifs divers, notamment pour licenciement nul, outre indemnités y afférentes ;

Attendu que c'est à la suite de ces circonstances que par jugement du 20 mai 2011 le Conseil de Prud'hommes de BELLEY a notamment :

- dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la société à payer à [N] [S] :

1° la somme de 2 500 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à l'obligation de santé-sécurité-résultat,

2° la somme de 2 306,25 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

3° la somme de 9 225 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 9 22,50 € pour les congés payés y afférents,

- ordonné la remise des documents de rupture rectificatifs sous astreinte

- débouté les parties de toutes autres prétentions ;

Attendu que [N] [S] a régulièrement relevé appel de cette décision le 26 mai 2011 ;

qu'elle soutient essentiellement à l'appui de sa contestation formulée en pas moins de soixante-quatre pages non reliées qu'elle a accompli de nombreuses heures supplémentaires pour le payement desquelles la convention de forfait prévue par l'avenant du 1er octobre 2007 ne peut lui être opposée dès lors que la possibilité de conclure une telle convention de forfait n'était prévue par aucun accord d'entreprise, d'établissement ou de branche, que l'employeur a reconnu la réalité de ces heures supplémentaires en lui accordant des jours de récupération, qu'au reste la société intimée qui se prévaut de la convention de forfait n'a pas satisfait à l'obligation d'entretien annuel portant sur la durée du travail instituée par l'article L 3121-46 du Code du Travail, qu'elle n'a pas été informée de ses droits à repos compensateur, que le défaut de payement des heures supplémentaires est constitutif d'un travail dissimulé, que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat et que la dégradation de son état de santé est la conséquence de celle de ses conditions de travail sur laquelle elle a attiré l'attention de la société à de nombreuses reprises sans que celle-ci prenne aucune mesure propre à remédier à cette situation qui a provoqué chez elle un 'burn out' mentionné par le médecin salarié de l'établissement, qu'elle n'a fait qu'exercer son droit de retrait en quittant son lieu de travail à la suite de l'incident du 22 avril 2010 et qu'aucune sanction ne pouvait être prise contre elle pour ce motif alors surtout que les suites de cet événement ont été considérées comme un accident du travail par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie et prises en charge comme tel au titre de la législation professionnelle de sorte que le licenciement doit être déclaré nul comme prononcé pendant la suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail, et subsidiairement que les griefs contre elle articulés dans la lettre de licenciement sont injustifiés ;

qu'elle demande en conséquence à la Cour de réformer le jugement critiqué et de :

- condamner la société à lui payer la somme de 60 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et subsidiairement pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

et en tout état de cause,

- condamner la société à lui payer :

1° la somme de 26 080,40 € à titre de rappel d'heures supplémentaires outre celle de 2608,04 € pour les congés payés y afférents,

2° la somme de 10 423,60 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits à repos compensateur,

3° la somme de 27 660 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

4° la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

5° la somme de 13 827,60 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 1 382,76 € pour les congés payés y afférents,

6° la somme de 22 755 €à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Attendu qu'en se limitant à des conclusions écrites de quarante-et-une pages reliées la société forme appel incident et conclut à ce qu'il plaise à la Cour réformer la décision attaquée, débouter [N] [S] de l'ensemble de ses prétentions et la condamner à lui rembourser :

1° la somme de 10 136,08 € versée au titre de l'exécution provisoire du jugement entrepris,

2° la somme de 558,22 € correspondant à un trop perçu au titre de la prévoyance ;

qu'elle fait principalement valoir à cet effet que [N] [S] a acquis le statut de cadre autonome le 1er octobre 2007 conformément à l'accord de branche du 27 janvier 2000 et qu'il était donc possible de lui proposer une convention de forfait qu'elle a acceptée et qu'elle a appliquée sans jamais la contester avant son licenciement, que la salariée est dans l'incapacité d'établir un décompte des heures supplémentaires prétendument effectuées, que ses prétentions relatives au défaut d'information sur les repos compensateurs et au travail dissimulé ne peuvent prospérer dès lors que celle relative aux heures supplémentaires sera rejetée, qu'elle ne démontre pas avoir jamais été exposée à un état de danger du fait de l'employeur, que les griefs précis articulés dans la lettre de licenciement sont parfaitement établis, qu'elle n'est pas fondée à se prévaloir de la nullité du licenciement ni au motif qu'elle aurait été sanctionnée pour avoir exercé son droit de retrait ni au motif qu'elle aurait été licenciée pendant une période de suspension du contrat de travail dès lors que les fautes graves relevées par l'employeur sont sans rapport avec la maladie ou l'accident ayant motivé l'arrêt de travail ;

Attendu, sur la durée du temps de travail, la demande en payement d'heures supplémentaires et les prétentions qui en sont le corollaire, que l'appelante a été élevée au statut de cadre autonome non soumis aux horaires collectifs suivant avenant du 1er octobre 2007 prévoyant une durée de travail annuelle de 212 jours avec récupération des jours excédant ce nombre le cas échéant ;

que contrairement à ce que soutient l'appelante, la possibilité de conclure une telle convention de forfait est expressément stipulée par l'article 7-3 de l'accord de branche du 27 janvier 2000 dont l'alinéa 2 précise qu'elle peut résulter d'une concertation avec les cadres concernés à défaut d'accord d'entreprise ou d'établissement ;

que la convention de forfait ainsi conclue d'un commun accord le 1er octobre 2007 et strictement appliquée de part et d'autre est donc parfaitement régulière et oblige l'une et l'autre parties dont le contrat fait la loi ;

qu'il est en effet constant et non contesté, ainsi que l'a relevé le Conseil de Prud'hommes, que les sept jours de dépassement travaillés par [N] [S] entre le 1er octobre 2007 et le 30 septembre 2008 ont été compensés par autant de journées de récupération sur l'année suivante dans les conditions fixées par l'avenant précité ;

Attendu que c'est donc par de justes motifs que les premiers juges ont rejeté la demande de [N] [S] relative au payement d'heures supplémentaires ;

que le défaut de tenue d'un entretien individuel annuel n'a pas pour effet de rendre la convention de forfait inopposable au salarié, mais pourrait, éventuellement, ouvrir droit à des dommages et intérêts que l'appelante ne sollicite pas ;

Attendu que le jugement critiqué sera donc confirmé en ce qu'il a débouté [N] [S] de ses demandes relatives au payement d'heures supplémentaires et congés payés y afférents, au défaut d'information sur les repos compensateurs et à un prétendu travail dissimulé ;

Attendu, sur le manquement à l'obligation de sécurité des travailleurs dont est tenu l'employeur et considérée comme obligation de résultat, qu'il ressort des pièces du dossier que l'appelante qui s'est elle-même montrée tyrannique vis-à-vis de ses subordonnés comme des résidents dont elle avait la charge, n'a simplement pas supporté, sous l'empire d'un orgueil et d'un sentiment de supériorité qui depuis longtemps ne connaissaient plus de limites, les observations parfaitement justifiées de son supérieur hiérarchique sur des faits matériellement établis, lesquelles ne comportaient aucune connotation personnelle ni désobligeante ;

que le fait que l'intéressée ait, à diverses reprises, adressé à la direction diverses notes ou remarques sur ce qui, à son sens, constituait des imperfections du service auxquelles elle suggérait de remédier par les moyens qu'elle proposait, ne peut en aucune manière constituer la preuve de ce que l'employeur aurait été averti d'une situation de danger pour l'ensemble de ses salariés comme pour l'appelante personnellement qu'il aurait refusé ou négligé de prendre en considération ;

Attendu qu'il s'évince des pièces versées aux débats par les deux parties que l'employeur a seulement, pendant trop longtemps, laissé la salariée régner sans partage et de façon extrêmement autoritaire sur l'établissement où elle semait la terreur sur ses subordonnés comme sur les résidents ;

que l'intéressée n'a tout simplement pas accepté une reprise en main par la nouvelle direction qui, ayant constaté l'existence de méthodes inacceptables mises en oeuvre par la salariée, a entendu restaurer la quiétude des résidents d'abord, et des relations harmonieuses au sein du personnel ensuite ;

que ce refus de l'autorité de l'employeur, manifesté par un départ immédiat du lieu de travail aussitôt après des observations parfaitement justifiées et mesurées du supérieur hiérarchique, ne saurait en aucune façon être regardé comme l'exercice d'un droit de retrait face à un danger immédiat pour la santé physique et morale de la salariée, mais qu'il constitue au contraire de la part de celle-ci une faute en ce que [N] [S] a tenté de substituer son autorité à celle de l'employeur et n'a pu accepter d'être, comme il convenait, purement et simplement remise à sa place ;

Attendu qu'il est totalement indifférent que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie ait cru devoir considérer l'arrêt de travail consécutif à l'incident du 22 avril 2010 comme relevant de la législation professionnelle ;

que la Cour tient, tout au contraire, le départ impromptu de la salariée du lieu de travail, pour un refus d'obéissance et un abandon de poste caractérisés ;

que l'arrêt de travail prescrit à la salariée, non sans difficulté et recherche laborieuse d'un médecin compréhensif de sa part, ne peut être regardé comme la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat ;

Attendu qu'il convient de réformer de ce chef et de débouter [N] [S] de sa demande de dommages et intérêts formulée sur ce fondement ;

Attendu, sur la rupture du contrat de travail, que la lettre de licenciement du 11 mai 2010 fixe les limites du litige ;

Attendu que le moyen tiré de la nullité du licenciement pour violation du droit de retrait ne saurait prospérer dès lors qu'il est établi plus qu'à suffire par les pièces produites aux débats de part et d'autre que l'appelante, en quittant subitement le lieu de travail le 22 avril 2010 suite aux remarques justifiées et mesurées de son supérieur hiérarchique relatives à son attitude inadmissible envers l'une des résidentes de l'établissement, n'a nullement cherché à se protéger d'une situation de danger exposant sa santé physique ou mentale personnelle, mais qu'elle s'est tout au contraire soustraite à l'autorité légitime de l'employeur en abandonnant son poste sans aucune raison valable ;

que le fait que les remarques tout à fait légitimes de son supérieur hiérarchique aient pu lui être désagréables ne saurait caractériser l'existence d'une situation de danger personnel pouvant justifier l'exercice du droit de retrait ;

qu'en outre la lettre de licenciement, du 11 mai 2010 ne contient aucun grief relatif à l'exercice d'un droit de retrait contesté par l'employeur ;

que ce moyen ne peut être accueilli ;

Attendu, sur le moyen tiré de la nullité du licenciement prononcé pendant la suspension du contrat de travail par suite d'un accident du travail, que l'appelante a fait l'objet d'un arrêt de travail du 22 avril 2010 pour syndrome anxieux sévère ;

qu'aucune des pièces produites aux débats ne démontre qu'au jour du licenciement l'employeur avait connaissance de la prise en charge de cet arrêt de travail au titre de la législation professionnelle, la décision de prise en charge de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie étant du reste postérieure de plusieurs semaines au licenciement ;

que par ailleurs les motifs invoqués par l'employeur pour justifier le licenciement sont sans rapport avec l'arrêt de maladie dont la salariée a bénéficié quand bien même la caisse de sécurité sociale a cru devoir lui reconnaître un caractère professionnel, cette décision ayant d'ailleurs été déclarée inopposable à l'employeur par la Commission de Recours Amiable le 23 février 2011 ;

que ce moyen sera donc également écarté ;

Attendu que la lettre de licenciement du 11 mai 2010 reproche à la salariée d'avoir, le 22 avril 2010, provoqué un incident violent avec des cris et des emportements alors que le directeur de l'établissement lui faisait remarquer qu'elle avait refusé sans aucune raison valable d'accéder à la requête d'une résidente relative aux modalités pratiques et à l'horaire de son lever, d'avoir dans les mêmes circonstances tenté d'exercer des pressions inadmissibles sur une infirmière stagiaire, puis d'avoir purement et simplement abandonné son lieu de travail sans plus aucunement s'occuper de la préparation des médicaments des résidents ni se soucier de leur prise en charge alors qu'elle était la seul infirmière présente sur place et qu'il était impossible de pourvoir à son remplacement sur-le-champ, d'avoir en outre, dès le 24 avril 2010, suscité un autre incident en venant remettre elle-même son avis d'arrêt de travail, visite qu'elle a mise à profit pour tenir des propos déplacés contre la direction, d'avoir eu des attitudes ou comportements totalement inadaptés tant envers ses subordonnés qu'envers les résidents, et enfin d'avoir quelques jours avant le 22 avril 2010, validé le dossier médical d'un candidat à l'hébergement alors qu'il était évident pour une professionnelle expérimentée comme elle que l'intéressé était dans un état de santé qui nécessitait son placement dans un service de soins ;

Attendu que si le dernier grief relatif à l'admission indue d'une candidature à la résidence n'est pas démontré, la matérialité des autres faits est en revanche établie plus qu'à suffire par les pièces produites aux débats par l'employeur et notamment par les attestations d'autres membres du personnel de l'établissement ;

que le refus parfaitement arbitraire et injustifié de la salariée de prendre en considération les demandes de l'une des résidentes, la dame [M], a donné lieu le 22 avril 2010 à des observations verbales du directeur de l'établissement, le sieur [U] [G], qui lui a demandé des explications et aussi de prendre les mesures adéquates, ce qui a provoqué de la part de [N] [S] une sorte de crise hystérique avec des hurlements devant le personnel mais aussi et surtout devant les résidents qui sont des personnes âgées et fragiles dont il importe de protéger la sérénité ;

que [N] [S] a alors intimé l'ordre à l'infirmière stagiaire de la suivre immédiatement en la menaçant de ne pas valider son stage si elle ne s'exécutait pas à l'instant même (cf. Attestation du Docteur [W] [L], médecin de l'établissement présent sur place au moment des faits et témoin direct de la scène qu'il décrit avec précision);

que contrairement à ce qu'a estimé le Conseil de Prud'hommes ces seuls faits sont à eux seuls constitutifs d'une faute grave ;

qu'il est constant et non contesté que quelques instants plus tard [N] [S] a quitté son lieu de travail non sans avertir le directeur qu'elle allait se procurer un avis d'arrêt de travail ni sans omettre d'annoncer aux personnes présentes qu'elle allait 'couler la boîte'

qu'il s'agit d'un abandon de poste caractérisé, la salariée qui était la seule infirmière diplômée présente sur place ne pouvant être immédiatement remplacée, ce alors qu'il fallait préparer les médicaments à distribuer aux résidents ;

que ce départ inopiné ne saurait en aucune manière être regardé comme l'exercice d'un droit de retrait, la salariée ne démontrant nullement s'être trouvée en état de danger physique ou moral ni avoir d'ailleurs jamais averti l'employeur de l'existence d'un tel danger grave et imminent quand bien même elle avait pu, en diverses occasions, présenter des remarques sur le fonctionnement ou l'organisation du service ;

Attendu qu'il est constant qu'en agissant de la sorte, [N] [S] a mis en danger les résidents, personnes âgées et fragiles ainsi qu'il a été dit supra, ce qui constitue une autre faute grave ;

Attendu qu'il est encore établi que la salariée a pris prétexte de venir personnellement déposer son avis d'arrêt de travail dans les bureaux de l'établissement le 24 avril 2010 pour créer du scandale et se répandre en propos déplacés et venimeux à l'encontre de la direction, ce qui est aussi une faute grave ;

Attendu enfin que la lettre de licenciement fait état de comportements abusifs voire même délictueux à l'encontre tant des personnels placés sous son autorité que des résidents

qu'à cet égard, les nombreuses attestations versées aux débats par l'employeur décrivent avec beaucoup de précisions, une attitude marquée par un autoritarisme sans borne, un mépris affiché de l'autre et en particulier des résidents dont beaucoup ont eu à souffrir de la part de [N] [S] des vexations continuelles et des brimades parfaitement indignes (en particulier l'interdiction formelle pour les résidents de converser à table, les repas devant se dérouler dans le silence le plus absolu, l'obligation pour les mêmes de consommer entièrement les plats servis sous peine de sanctions et de privations, tous faits attestés par de multiples témoignages de subordonnés faisant part de leur écoeurement devant de telles méthodes) ;

Attendu que ces faits dans leur ensemble ont rendu absolument impossible la poursuite du contrat de travail ;

que le licenciement pour faute grave est donc justifié ;

qu'il échet en conséquence de réformer la décision querellée et de débouter l'appelante de l'ensemble de ses prétentions ;

que [N] [S] sera en conséquence condamnée à rembourser à la société intimée l'ensemble des sommes que celle-ci lui a versées au titre de l'exécution provisoire attachée au jugement dont appel ;

Attendu que la société intimée ne démontre pas avoir versé à tort à [N] [S] une somme de 558,22 € au titre de la prévoyance ;

qu'en effet la lettre qu'elle a adressée à la salariée le 9 décembre 2010 ne peut valoir preuve du trop-versé allégué ;

que cette demande sera rejetée ;

Attendu que pour assurer la défense de ses intérêts devant la Cour, la société a été contrainte d'exposer des frais non inclus dans les dépens qu'il paraît équitable de laisser, au moins pour partie, à la charge de l'appelante ;

que celle-ci sera donc condamnée à lui payer une indemnité de 3 000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

En la forme, déclare recevables tant l'appel principal que l'appel incident ;

Au fond, dit le second seul justifié ;

Infirme le jugement déféré et le met à néant ;

Dit justifié le licenciement pour faute grave de [N] [S] épouse [Y] prononcé le 11 mai 2010 par la S.A.S. LE CERCLE DES AÎNÉS ;

Déboute en conséquence [N] [S] épouse [Y] de l'ensemble de ses prétentions ;

La condamne à rembourser à la S.A.S. LE CERCLE DES AÎNÉS l'ensemble des sommes que celle-ci lui a versées au titre de l'exécution provisoire attachée à la décision infirmée ;

Déboute la S.A.S. LE CERCLE DES AÎNÉS de sa demande de remboursement d'un trop-versé de 558,22 € ;

Condamne [N] [S] épouse [Y] à payer à la S.A.S. LE CERCLE DES AÎNÉS une indemnité de 3 000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

La condamne aux dépens.

Le Greffier, Le Président,

Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 11/03784
Date de la décision : 09/01/2013

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°11/03784 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-09;11.03784 ?
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