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10/05/2012 | FRANCE | N°10/07755

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 10 mai 2012, 10/07755


R.G : 10/07755









Décision du tribunal de commerce de SainT-Etienne

Au fond du 23 septembre 2010



3ème chambre



RG : 2008/02929











COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 10 Mai 2012







APPELANTE :



SNC MARIGNAN RESIDENCES

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON



assistée de la SELARL ISEE, avoc

ats au barreau de LYON









INTIMEE :



SA BATIR ET LOGER

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avocats au barreau de LYON



assistée de la SELAS CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE LYON, avocats au barreau de LYON


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R.G : 10/07755

Décision du tribunal de commerce de SainT-Etienne

Au fond du 23 septembre 2010

3ème chambre

RG : 2008/02929

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 10 Mai 2012

APPELANTE :

SNC MARIGNAN RESIDENCES

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON

assistée de la SELARL ISEE, avocats au barreau de LYON

INTIMEE :

SA BATIR ET LOGER

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avocats au barreau de LYON

assistée de la SELAS CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE LYON, avocats au barreau de LYON

******

Date de clôture de l'instruction : 06 Mars 2012

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Mars 2012

Date de mise à disposition : 10 Mai 2012

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Michel GAGET, président

- François MARTIN, conseiller

- Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l'audience, Michel GAGET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Vu le jugement rendu le 23 septembre 2010 par le tribunal de commerce de Saint-Etienne qui, après s'être déclaré compétent, prononce la résolution de la promesse de vente entre la société Bâtir et Loger et la société Marignan Résidences, aux torts exclusifs de cette dernière et qui la condamne à payer à la société Bâtir et Loger les sommes suivantes :

1 - acompte sur le compromis de vente................................ 39.742,00 euros

2 - honoraires de maîtrise d'oeuvre....................................... 31.150,77 euros

3 - constat d'huissier.............................................................. 195,89 euros

4 - frais de publicité................................................................ 721,31 euros

5 - perte de chance................................................................ 55.804,23 euros

6 - article 700 du code de procédure civile............................. 5.000,00 euros

tout en condamnant la société Bâtir et Loger à transférer le permis de construire représentant une Shon de 1.142,24 m2 à destination des logements soient en location-accession qui lui avait été cédé par la société Marignan Résidences ;

Vu la déclaration d'appel faite le 29 octobre 2010 par la société Marignan Résidences ;

Vu les conclusions de cette société en date du 23 février 2012 dans lesquelles la réformation de la décision attaquée est sollicitée et le mal fondé de l'intégralité des demandes de la société Bâtir et Loger, le tout au visa des articles 1382, 1383, 1134 et 1176 du code civil et dans lesquelles il est réclamé au motif que la société Bâtir et Loger a commis une faute en refusant de transférer à la société Marignan Résidences le permis de construire que cette dernière avait obtenu et transféré en exécution de la promesse signée, le paiement d'une somme de 90.896 euros à titre d'indemnité du fait de la perte de l'autorisation de construire, outre 10.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la société Bâtir et Loger en date du 02 mars 2012 qui conclut à la réformation partielle de la décision attaquée en ce qui concerne le montant de ses demandes indemnitaires et qui réclame donc à ce titre les sommes suivantes :

1 - perte de chance de réaliser un bénéfice commercial.............. 145.896 euros

2 - réparation du préjudice d'image.............................................. 50.000 euros

à moins que la cour n'organise sur le premier préjudice une expertise en allouant une provision de 55.804,23 euros à valoir sur ce préjudice ;

Vu les mêmes conclusions quant au transfert du permis de construire et à la demande indemnitaire de la société Marignan Résidences dans lesquelles il est soutenu que le permis de construire était caduque au 1er mars 2011 et que la condamnation de transfert doit être réformée, alors que la demande nouvelle de la société Marignan Résidences est irrecevable, ajoutant que la procédure est abusive de sorte que la somme de 5.000 euros de dommages intérêts doit être allouée, plus 15.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture du 06 mars 2012 ;

Les conseils des parties ont donné le 07 mars 2012 leurs explications orales après le rapport de Monsieur le Président Michel Gaget.

DECISION

1 - La société Marignan Résidences est propriétaire d'un terrain situé [Adresse 6], cadastré section LR [Cadastre 5] pour une contenance de 69 a et 84 ca.

2 - Elle a obtenu un permis de construire l'autorisant à réaliser un ensemble immobilier de 76 logements répartis sur 4 bâtiments représentant une Shon totale de 6.019,92 m2 et concernant les bâtiments A.B.C.D.

3 - Elle a proposé à la société Bâtir et Loger de lui céder des droits à construire sur le bâtiment D comprenant 12 lots à usage de logements et 16 lots à usage de garage en lui transférant partiellement le permis de construire pour une Shon de 1.142,24 m2.

4 - Les 11 et 18 janvier 2008, une promesse de vente était signée, après une longue discussion commencée en mars 2007 notamment sur le prix de 304.339 euros accepté le 27 juin 2007 par la société Bâtir et Loger pour une Shon de 1.191 mères carrés et sur un planning d'exécution et de consultation d'entreprises.

5 - Cette promesse devait être réitérée au plus tard le 15 mars 2006

6 - Le 13 novembre 2008, la société Bâtir et Loger faisait constater qu'aucun des travaux mis à la charge de la société Marignan Résidences, venderesse, n'avait fait l'objet d'un commencement d'exécution, et assignait le 24 novembre 2008 en résolution de la promesse synallagmatique de vente en se fondant sur l'article 1184 du code civil.

7 - La société Marignan Résidences soutient, en appel, qu'elle a rempli toutes les obligations qui avaient été mises à sa charge par la promesse à laquelle n'était annexé, en réalité, aucun calendrier de travaux opérationnel et prévisionnel.

Elle fait valoir aussi que l'ensemble des conditions suspensives n'avait pas été levé en observant que le 07 juillet 2009, la société Marignan Résidences n'avait pas acquis définitivement le terrain de la ville de [Localité 7] et que la condition suspensive de production d'un titre définitif de propriété n'était donc pas remplie le 05 mars 2008.

8 - En revanche, la société Bâtir et Loger qui sollicite la confirmation de la décision attaquée en ce qui concerne la résolution de la promesse synallagmatique aux torts exclusifs de sa cocontractante, soutient que les conditions suspensives qui devaient être réalisées au plus tard le 05 mars 2008 et qui étaient à la charge de la venderesse, doivent être prouvées par la société Marignan Résidences sur laquelle pèse la charge de la preuve d'établir qu'elle a réalisé les conditions.

Elle ajoute que, si les conditions n'étaient pas réalisées, la promesse serait caduque et l'acompte devrait être restitué, avec intérêts.

9 - Mais, en effet, la promesse synallagmatique de vente et d'achat signée les 11 et 18 janvier 2008 dont l'original n'est pas accompagné d'annexes signées par les parties comporte des conditions suspensives qui doivent être réalisées au plus tard le 05 mars 2008, avant la réalisation de l'acte authentique constatant l'exécution de ces conditions qui devait intervenir le 15 mars 2008 au plus tard.

10 - Les conditions sont les suivantes, selon l'acte :

1. la production d'un titre de propriété définitif du vendeur assurant une propriété incommutable du terrain assiette de la copropriété.

2. le transfert partiel du permis de construire.

3 - une situation hypothécaire.

4 - absence de servitude.

5 - un non exercice du droit de préemption.

6 - le certificat d'urbanisme.

11 - Si la société Marignan Résidences soutient qu'elle n'avait pas les 05 mars 2008 et 15 mars 2008 de titre définitif de propriété des parcelles de terrain assiettes de la copropriété au sens de la première condition suspensive, l'acte du 16 novembre 2007 de vente de certaines parcelles par la commune de [Localité 7] ne comportait pas de clause résolutoire en sa faveur dans la mesure où la condition résolutoire était stipulée au bénéfice des vendeurs originaires des parcelles polluées pour le cas où le coût de la dépollution dépasserait la somme globale de 917.000 euros.

La société Marignan Résidences n'établit pas que cette clause résolutoire ait été mise en oeuvre par les bénéficiaires contractuels prévus dans l'acte du 16 novembre 2007, alors que le rapport de l'expert prévu à l'acte a été déposé et transmis le 16 février 2008 au notaire [S] et que le délai de quinze jours stipulé pour agir en résolution a expiré le 06 mars 2008, soit avant la date de la réitération de la promesse liant les deux sociétés en litige.

Ce moyen nouveau en appel et recevable n'est donc pas fondé.

12 - Le transfert partiel du permis de construire a bien eu lieu en exécution d'un arrêté du 05 décembre 2007, affiché sur le terrain le 21 décembre 2007.

13 - Les quatre autres conditions ne font l'objet d'aucune discussion quant à leur réalisation et d'aucune preuve dans le débat judiciaire quant à leur exécution par la société Marignan Résidences qui les avaient à charge, sauf de la part de la société Bâtir et Loger qui observe qu'il appartient à la société Marignan Résidences de prouver qu'elle a effectué les démarches nécessaires à leur réalisation.

14 - Et cette dernière ne prouve pas qu'elle a fait des actes positifs en vue de l'obtention des documents attestant de la réalisation de ces quatre conditions de sorte qu'il en résulte qu'elle en a empêché l'accomplissement par sa défaillance.

15 - D'autre part, s'il est vrai qu'aucun calendrier de travaux opérationnel et prévisionnel n'était annexé à la promesse de vente et d'achat, et si ce document a été échangé le 26 novembre 2008 sans être signé par la société Marignan Résidences, il résulte des pièces produites par la société Bâtir et Loger que la société Marignan Résidences qui ne pouvait ignorer qu'elle devait réaliser des travaux qui aurait dû être énoncés dans la notice descriptive VRD concernant ces travaux et qui était chargée de démolir, avait bien connaissance et conscience que la construction du bâtiment D cédé et pour lequel le permis de construire partiel avait été demandé et accepté pour une Shon de 1.142,24 m2 par arrêté du 05 décembre 2007, l'obligeait à exécuter ses engagements avant le 05 mars 2008 et au plus tard le 15 mars 2008.

16 - Elle ne peut utilement soutenir qu'elle n'avait pas l'obligation parce qu'elle n'avait pas signé le calendrier prévisionnel et opérationnel, alors que la société Bâtir et Loger l'invitait à participer à l'ouverture des plis dans le cadre de l'appel d'offre, publié le 12 octobre 2007, séance prévue le 14 novembre 2007 et alors que le transfert partiel du permis de construire était mis en place d'un commun accord :

le 28 novembre 2007 la demande de permis de construire est conjointe, avant la signature de la promesse faite le 18 janvier 2008 dont Maître [S], notaire de la société Marignan Résidences assurait la garde.

17 - De plus, la société Marignan Résidences avait gardé le silence et donné aucune explication aux trois lettres de relance du 10 avril, 9 juillet et 23 octobre 2008, sollicitant la réitération de la promesse et le commencement des travaux.

18 - La cour constate qu'à la date où elle statue le permis de construire est devenu caduc depuis le 1er mars 2011.

19 - En conséquence, comme les premiers juges, la cour constate que la résolution de la promesse synallagmatique qui n'a pas reçu exécution ni commencement d'exécution par la faute de la société Marignan Résidences qui n'a pas rempli ses engagements contractuels et qui a empêché les conditions suspensives de se réaliser, doit être prononcée aux torts exclusifs de cette dernière.

Il s'ensuit que la société Bâtir et Loger est bien fondée à réclamer les sommes qui lui ont été allouées en première instance, à savoir :

- 39.742,00 euros

- 31.150,77 euros

- 195,89 euros

- 721,31 euros

au titre de l'acompte versé et des frais réels exposés sans aucun profit.

Ces sommes portent intérêts au taux légal à compter du 24 novembre 2008.

20 - La société Bâtir et Loger réclame, en outre un préjudice commercial né de la perte de chance de réaliser un bénéfice dans la commercialisation des constructions qu'elle chiffre à 145.896 euros alors que les premiers juges lui ont alloué la somme de 55.804,23 euros, à moins qu'une expertise soit ordonnée.

Elle sollicite, de plus, une indemnité réparant l'atteinte portée à son image et évaluée à 50.000 euros.

21 - Sans avoir à recourir à l'organisation d'une expertise et la cour trouvant dans les pièces du débat et les échanges de conclusions tous les éléments pour statuer sur ces deux postes de préjudice, chiffre la perte de chance de réaliser un bénéfice commercial sur l'opération à la juste somme de 100.000 euros pour un projet dont le coût de revient était de l'ordre de 1.860.141 euros.

L'atteinte à l'image doit être fixée à la somme de 30.000 euros eu égard aux éléments de la cause : la non réalisation du projet a nécessairement porté atteinte au crédit et à l'image de la société vis à vis des entreprises avec lesquelles elle entendait traiter et vis à vis des futurs accédants.

22 - L'attitude de la société Marignan Résidences qui a fait appel n'a pas commis d'abus dans son droit d'agir. Les dommages intérêts pour procédure abusive ne sont pas fondés.

En revanche l'équité commande d'allouer à la société Bâtir et Loger la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en appel.

23 - Le permis de construire transféré le 05 décembre 2007 est devenu caduc le 1er mars 2011 du fait de l'absence de construction sur la totalité de l'ensemble immobilier:

aucun des quatre bâtiments n'a été construit.

Cette situation ne peut pas être imputée à une faute de la société Bâtir et Loger mais doit être imputée à l'attitude de la société Marignan Résidences.

La caducité rend sans objet la demande de transfert. A ce titre le jugement attaqué doit être réformé.

24 - D'autre part, la demande de la société Marignan Résidences en dommages intérêts pour perte de l'autorisation de construire en raison du refus de transfert et d'exécuter le jugement frappé d'appel, n'est pas fondée ni en fait, ni en droit.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

- confirme le jugement du 23 septembre 2010 en toutes ses dispositions sauf sur le préjudice commercial et sur l'atteinte à l'image et sauf sur le transfert du permis ;

- statuant à nouveau sur ces trois points ;

- condamne la société Marignan Résidences à payer à la société Bâtir et Loger les sommes de :

1 - perte de chance de bénéfice............................................ 100.000 euros

2 - atteinte à l'image commerciale......................................... 30.000 euros

3 - article 700 du code de procédure civile............................ 8.000 euros

- dit n'y avoir lieu à transfert du permis de construire représentant une Shon de 1.142,24 m² dans la mesure où le permis de construire est caduc depuis le 1er mars 2011 ;

- déboute la société Marignan Résidences de ses demandes et moyens en appel ;

- condamne la SNC Marignan Résidences aux entiers dépens d'appel ;

- autorise les mandataires des parties qui en ont fait la demande à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 10/07755
Date de la décision : 10/05/2012

Références :

Cour d'appel de Lyon 01, arrêt n°10/07755 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-10;10.07755 ?
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