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28/03/2012 | FRANCE | N°11/01801

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 28 mars 2012, 11/01801


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 11/01801





[C]



C/

SARL MIPS FRANCE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELLEY

du 18 Février 2011

RG : F 10/00068











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 28 MARS 2012



















APPELANT :



[F] [C]

né le [Date naissance

2] 1973 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 1]



comparant en personne,

assisté de Me Jean-Pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS







INTIMÉE :



SARL MIPS FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 5]



représentée par Me Régine GOURY, avocat au barreau de PARIS







PARTIES CONVOQUÉES ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 11/01801

[C]

C/

SARL MIPS FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BELLEY

du 18 Février 2011

RG : F 10/00068

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 28 MARS 2012

APPELANT :

[F] [C]

né le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 1]

comparant en personne,

assisté de Me Jean-Pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

SARL MIPS FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Régine GOURY, avocat au barreau de PARIS

PARTIES CONVOQUÉES LE : 05 Mai 2011

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Janvier 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président de Chambre

Hervé GUILBERT, Conseiller

Françoise CARRIER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Chantal RIVOIRE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Mars 2012, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

La société MIPS France a pour activité la création, le développement et la vente de logiciels et de matériel informatique à usage des laboratoires d'analyses médicales.

M [F] [C] a été embauché par la société MIPS France le 14 avril 2003 suivant contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'ingénieur commercial, statut cadre, coefficient 150, position 2.3 de la convention collective Syntec.

Il a été promu Responsable des ventes France le 30 septembre 2005.

Par courrier du 7 septembre 2009, M [F] [C] a présenté sa démission, ce dont la société MIPS France a pris acte par courrier du 15 septembre en rappelant au salarié son obligation de non concurrence.

Par courrier du 17 septembre 2009, il a répondu : 'je prends bonne note de votre volonté d'appliquer l'article 12 de mon contrat de travail. Toutefois, je suis surpris de la requalification de cette clause qui portait sur la qualité d'ingénieur commercial. De plus, je m'étonne que vous ne fassiez aucune mention du paiement de mes heures supplémentaires alors qu'elles sont la principale raison de ma démission.'

Par courrier recommandé du 13 octobre 2009, la société MIPS France a dispensé M [F] [C] de l'exécution de son préavis à compter du 23 octobre 2009.

Par courrier recommandé du 5 novembre 2009, la société MIPS France a rappelé à M [F] [C] qu'il était tenu d'une obligation de non concurrence, que son nouvel employeur était un concurrent direct et qu'elle suspendait le versement de l'indemnité contractuelle en raison de l'inexécution de ses obligations.

Le 9 novembre 2009, elle a saisi le conseil de prud'hommes de BELLEY à l'effet de voir condamner M [C] à lui verser une indemnité pour violation de la clause de non concurrence et pour préjudice distinct.

Par jugement du 18 février 2011, le conseil de prud'hommes a débouté la société MIPS France de l'intégralité de ses demandes, l'a condamnée à payer à M [F] [C] la somme de 4 812,52 € au titre du prorata du 13 ème mois et a débouté le salarié du surplus de ses demandes.

M [F] [C] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Au terme de ses écritures reçues au greffe le 12 janvier 2012 et soutenues oralement à l'audience, il conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté la société MIPS France de ses demandes et à sa réformation pour le surplus.

Il demande à voir condamner la société MIPS France à lui payer les sommes suivantes :

- 310 671,06 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre des années 2005 à 2009 outre 31 067,10 € au titre des congés payés afférents, subsidiairement 207 240,62 € outre 20 724,06 € au titre des congés payés afférents et très subsidiairement 128 504,04 € et 12 850,40 € au titre des congés payés afférents,

- 206 742 € à titre de repos compensateur pour les années 2005 à 2009 outre la somme de 20 674,20 € au titre des congés payés afférents, subsidiairement 171 425,40 € outre 17 142,54 € au titre des congés payés afférents et très subsidiairement 59 163,60 € outre 5 916,36 € au titre des congés payés afférents et 100 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l'absence de compensation des temps de trajets ou subsidiairement à titre de salaires,

- 62 743,08 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- 14 046,54 € à titre de rappel d'indemnité de préavis outre 1 404,65 € au titre des congés payés afférents,

- 22 657,22 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 62 743,08 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 20 000 € à titre de rappel de congés payés 2008/2009 et 3 000 € à titre de rappel de congés payés 2009/2010,

- 750 € à titre de rappel de congés payés d'ancienneté,

- 63 311,24 € à titre de rappel de commissions outre 6 331,12 € au titre des congés payés afférents,

- 10 000 € à titre de rappel de bonus 2009,

- 5 591,93 € à titre de prorata 13ème mois 2009,

- 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au terme de ses écritures reçues au greffe le 17 janvier 2012 et soutenues oralement à l'audience, la société MIPS France conclut à la réformation du jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes et demande à voir condamner M [F] [C] à lui payer les sommes suivantes :

- 212 074 € pour violation des clauses de fidélité et de non concurrence,

- 36 700 € à titre d'indemnité pour préjudice distinct,

- 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle conclut au débouté de l'ensemble des demandes de M [F] [C], subsidiairement, elle demande à voir réduire au minimum légal le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à voir fixer la contrepartie des temps de trajets éventuellement due à une somme raisonnable.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la clause de non concurrence

Il est acquis que M [F] [C] a été engagé dès le 2 novembre 2009 par la SAS VISION4HEALTH en qualité de 'Directeur France' et qu'il a représenté cette société MIPS France dès le 4 novembre 2009 au salon des Journées Internationales de Biologie au CNIT à PARIS, en tenant son stand et en distribuant des cartes de visite mentionnant sa qualité ainsi que des brochures de présentation des produits de l'entreprise.

Il n'est pas contesté que la société VISION4HEALTH est une entreprise directement concurrente de la société MIPS France. Le démarchage de la clientèle attesté par l'activité déployée au salon des Journées Internationales de Biologie démontre suffisamment que les fonctions de 'Directeur' étaient des fonctions commerciales étant relevé que M [C] ne fournit aucun document de nature à démentir cette analyse.

Celui-ci soutient que la clause de non concurrence serait devenue caduque par l'effet de la novation du contrat de travail, l'annexe du 30 septembre 2005 constituant non pas un avenant mais un nouveau contrat. Néanmoins, la novation ne se présume pas et la volonté de l'opérer doit être non équivoque et résulter clairement de l'acte. En l'espèce, l'acte du 30 septembre 2005 constatant l'accord des parties sur les nouvelles fonctions du salarié et sur les modalités de sa rémunération est intitulé 'annexe au contrat de travail à durée indéterminée du 15 avril 2003", le paragraphe de présentation précisant que la rédaction de cette annexe est rendue nécessaire par la modification du périmètre des fonctions du salarié, ce qui dément toute volonté de voir disparaître le contrat initial. Il ne comporte aucune clause venant contredire cette analyse. Il doit donc s'analyser en un avenant modifiant les dispositions du contrat initial uniquement en ce qui concerne les fonctions et la rémunération du salarié mais ne remettant pas en cause ses autres dispositions parmi lesquelles la clause de non concurrence.

Cette clause, prévue par l'article 12 du contrat de travail, est ainsi libellée : 'Monsieur [C] s'engage donc à ne pas travailler en qualité d'ingénieur commercial pour une entreprise concurrente et à ne pas créer directement ou indirectement, par personne interposée d'entreprise ayant des activités concurrentes ou similaires à la Société MIPS . Cet engagement est limité au territoire français métropolitain et étendu aux Départements et Territoires d'Outre- Mer. La durée de cet engagement de non concurrence est limitée à une année à compter de la rupture du contrat de travail.'

M [F] [C] invoque le principe d'interprétation stricte des clauses de non concurrence et soutient que, seule la fonction d'ingénieur commercial lui étant interdite, il n'a pas violé la clause en cause en acceptant un autre emploi au sein d'une société concurrente.

Il résulte de l'annexe au contrat de travail du 30 septembre 2005 que ses missions en qualité de responsable des ventes étaient les suivantes : l'organisation d'une force commerciale en France, la recherche de prospects en France, la réponse aux cahiers des charges, l'introduction de nouveaux produits en France et la définition des objectifs commerciaux de l'équipe commerciale et qu'au delà de la nouvelle dénomination de son emploi, il conservait des fonctions d'ingénieur commercial auxquelles s'ajoutait la responsabilité de la force de vente.

M [F] [C] reconnaît d'autre part dans ses écritures que, jusqu'au mois de novembre 2005, l'équipe commerciale était composée de deux personnes, une commerciale ayant un secteur géographique limité et lui-même dont le secteur couvrait le reste de la France ; qu'ensuite, il avait été le seul commercial de l'entreprise jusqu'en mars 2006, date à laquelle un deuxième commercial avait été recruté ; que l'équipe s'était étoffée d'un troisième commercial à compter du mois d'octobre 2007, ce qui confirme que sa promotion en qualité de responsable des ventes n'a pas modifié fondamentalement les fonctions exercées et qu'il avait conservé des fonctions d'ingénierie commerciale faisant de lui, ainsi que l'affirme l'employeur, l'interface privilégiée et visible de la clientèle MIPS France.

Il en résulte qu'en prenant des fonctions à caractère commercial au sein de la société VISION4HEALTH, M [F] [C] a violé la clause de non concurrence.

M [F] [C] soutient que cette clause ne jouerait que dans l'hypothèse d'un licenciement. Néanmoins, la démission constitue un mode de rupture du contrat de travail qui déclenche le jeu de la clause de non concurrence en l'absence de disposition contractuelle contraire.

M [F] [C] se prétend fondé à opposer l'exception d'inexécution au motif d'une part que l'employeur n'a pas rempli ses obligations en matière de paiement des heures supplémentaires et d'autre part qu'il n'a pas payé la contrepartie financière de la clause de non concurrence.

Les obligations de l'employeur en matière d'heures supplémentaires et l'obligation de non concurrence du salarié sont distinctes et indépendantes les unes des autres et ne permettent pas le jeu de l'exception d'inexécution laquelle ne trouve à s'appliquer que dans les situations où coexistent des obligations réciproques et interdépendantes.

D'autre part, il ne saurait se déduire de l'abstention de l'employeur de payer la contrepartie financière de la clause de non concurrence dès le 31 octobre, alors que le salarié avait quitté l'entreprise le 23, la volonté de le libérer de son obligation de non concurrence. Pas plus, cette abstention de quelques jours ne constitue un manquement d'une gravité suffisante pour autoriser le salarié à se considérer comme délié ou dispensé de son obligation.

M [F] [C] fait valoir encore que la clause est irrégulière dans la mesure où sa durée est trop courte pour assurer la protection des intérêts de l'entreprise dont les produits représentent, pour ses clients, des investissements à long terme et où l'obtention d'un marché la met à l'abri de ses concurrents pendant 10 ans.

L'activité de création, de développement et de vente de logiciels et de matériel informatique à usage des laboratoires d'analyses médicales est une activité très spécifique. Le marché est étroit compte tenu de la durée des produits commercialisés. L'employeur justifie que 27 entreprises se disputent ce marché en France ce qui confirme qu'il s'agit d'une activité hautement concurrentielle. Il était dès lors légitime pour la société MIPS France de préserver son savoir-faire, ses connaissances et son portefeuille de clientèle en imposant au salarié appelé de par ses fonctions à être en contact direct avec la clientèle et à jouer un rôle prépondérant dans la commercialisation des produits, une clause de non concurrence. L'étendue de la clause à la France entière est proportionnée aux intérêts légitimes de l'entreprise dès lors que son activité s'exerce sur tout le territoire à destination d'une clientèle spécifique et peu nombreuse.

M [F] [C] fait valoir encore que l'étendue géographique de la clause de non concurrence lui interdit de travailler, sauf à s'expatrier, dans le secteur dans lequel il a été formé.

Son curriculum vitae fait apparaître qu'il est titulaire d'un DUT en analyses biologiques et biochimiques et d'une licence en informatique maintenance et commerce en biologie et qu'il a été attaché commercial médico-pharmaceutique en 1998 et ingénieur commercial gaz du sang de 1999 à 2000 ce dont il résulte que sa formation et son expérience ne le limitent pas au secteur des logiciels et de l'informatique à destination des laboratoires médicaux. Il convient en conséquence de dire que la clause de non concurrence est valable.

La société MIPS France réclame à titre de dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence la somme de 235 599,47 € constituée une part de la partie dispensée du préavis (du 23 octobre au 7 décembre 2009) et d'autre part de la valeur du marché du CH de GUERET attribué à la société VISION4HEALTH pour un montant de 223 525,70 €.

La société MIPS France n'est pas fondée à demander la restitution des sommes versées au titre du préavis en l'absence de notification au salarié de la rupture du préavis pour faute grave.

S'il est établi que le CH de GUERET faisait partie des clients prospectés par M [F] [C] pour le compte de la société MIPS France au cours de l'année 2009 et que celui-ci a été informé à la veille de son départ de l'entreprise que la date butoir de réponse à l'appel d'offre de ce client était fixée au 9 décembre 2009, il n'est pas démontré que l'attribution du marché à la société VISION4HEALTH soit le résultat des prospections initiales de M [F] [C]. Pas plus la société MIPS France ne démontre que c'est par la faute du salarié qu'elle n'a pas répondu à cet appel d'offres.

Néanmoins, le manquement de M [F] [C] à la clause de non concurrence a causé nécessairement un préjudice à l'entreprise qui, au regard du chiffre d'affaires apporté par celui-ci, sera réparé par l'allocation d'une somme de120 000 €.

Sur la demande de dommages et intérêts pour frais de formation

La société MIPS France demande le remboursement de frais de formation qu'elle a exposés pour M [F] [C].

En l'absence de clause de dédit formation, c'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges ont débouté la société MIPS France de cette demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour abus de droit

M [F] [C] ne rapporte pas la preuve de l'abus de droit qu'il impute à la société MIPS France et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de demande.

Sur le rappel de salaire pour heures supplémentaires

Selon l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié. Il appartient toutefois au salarié d'étayer préalablement sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

La société MIPS France soutient que M [F] [C] avait la qualité de cadre dirigeant et qu'il n'était pas soumis aux dispositions du code du travail relatives à la durée du travail.

Selon l'article L 311-2 du code du travail, sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.

S'il est acquis que le salarié organisait son travail en complète autonomie, aucun élément n'est produit faisant apparaître qu'il aurait exercé des fonctions de cadre de direction, notamment qu'il aurait disposé d'une délégation générale de pouvoirs en matière de politique économique, sociale et financière de l'entreprise.

La société MIPS France ne peut d'autre part sans se contredire opposer à la fois au salarié le statut de cadre dirigeant et la disposition du règlement intérieur imposant d'obtenir l'autorisation préalable de la direction pour l'exécution d'heures supplémentaires.

Aucune convention de forfait n'ayant été régularisée entre les parties, M [F] [C] relevait du régime légal des 35 heures.

M [F] [C] étaye sa demande d'heures supplémentaires par les relevés provenant d'un outil informatique interne à l'entreprise intitulé MIA et recensant l'ensemble des heures accomplies par chaque salarié au cours de l'année en détaillant le temps consacré à chaque tâche ainsi qu'aux déplacements et les temps de repos, d'absences et de congés payés. Il déduit du travail comptabilisé par année, les heures légales de travail sur la base de 1 547 h ainsi que les heures de récupération et considère que le solde constitue des heures supplémentaires qu'il divise par 48 semaines travaillées permettant d'obtenir le nombre d'heures supplémentaires hebdomadaires. Il calcule leur rémunération sur la base du taux horaire équivalent au brut annuel divisé par 12 et par 151h67, majoré de 25% pour les 8 premières heures et de 50% pour les suivantes.

Il produit en outre les comptes rendus de réunions de délégués du personnel qui démontrent que l'ensemble des salariés accomplissait un grand nombre d'heures supplémentaires qui n'ont été rémunérées qu'avec beaucoup de retard et dans le cadre de transactions individuelles postérieurement à son départ de l'entreprise.

L'employeur soutient que les décomptes MIA prennent en compte les temps de congés, de jours fériés, de jours de repos compensateur, d'arrêts maladie et de déplacement qui ne correspondent pas à du temps de travail effectif et que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires retenu par le salarié ne correspond pas au seuil légal ; qu'en outre le logiciel MIA ne constitue pas un outil de contrôle du temps de travail des salariés et que les temps comptabilisés par M [F] [C], notamment lorsqu'il était en congés ou en séminaire, sont manifestement inexacts.

Il résulte de l'article L.3122-4 du code du travail que la durée légale annualisée du travail est de 1 607 et non pas de 1 547 comme retenu par M [F] [C] dans ses décomptes.

Les heures de récupération doivent venir en déduction du temps de travail effectué. Les jours de congés payés, déjà décomptés du temps de travail annuel, n'ont pas à être déduits du seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Les heures d'absence autres doivent être déduites du seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

Selon l'article L.212-4 du code du travail, devenu L.3121-4, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif. Il en résulte que le temps de déplacement domicile-lieu d'exécution du travail autre que le lieu habituel n'est pas du temps de travail, qu'il se situe dans ou en dehors de l'horaire de travail et qu'il excède ou non le temps de trajet habituel. La part prise sur l'horaire de travail ne doit donc pas être comptabilisée dans le calcul des heures supplémentaires.

Contrairement à ce que soutient M [F] [C], les dispositions de l'accord collectif du 22 juin 1999 relatives à la durée du travail ne sauraient être considérées comme dérogeant aux dispositions relatives au temps de déplacement issues de la loi du 18 janvier 2005, le simple rappel de la définition légale du temps de travail effectif ne pouvant pas s'interpréter comme exprimant la volonté de déroger aux dispositions légales en matière de temps de déplacement professionnel.

Par contre, le temps de déplacement en clientèle pendant les heures de travail constitue un temps de travail effectif qui doit être pris en compte pour le calcul des heures supplémentaires.

Il résulte d'autre part des pièces versées aux débats que, ainsi que le soutient l'employeur, le logiciel MIA est un outil de gestion qui a pour objectif non pas de contrôler le temps de travail des salariés mais de fournir une indication des tâches qu'ils effectuent, ce à des fins de gestion interne à savoir le suivi des projets, l'étude de leur rentabilité, le tracé de l'avancement des prestations permettant la facturation ; que ce sont les salariés eux-mêmes qui saisissent la nature des tâches effectuées au fil de la journée et le temps passé à chacune d'elle ainsi que le temps de trajet, ce sans aucun contrôle de l'employeur dont les seules exigences sont que le programme soit renseigné au jour le jour et de façon complète. Ainsi les relevés MIA ne comportent aucune indication sur les horaires de début et de fin de journée du salarié ni sur ses amplitudes horaires. Compte tenu du fonctionnement et de l'objet de l'outil MIA, ces relevés ne sauraient être considérés comme reflétant avec une parfaite exactitude le temps de travail du salarié. Néanmoins, l'employeur n'a jamais critiqué, au cours de la relation contractuelle, le temps comptabilisé sur ces relevés. Ces éléments permettent à la cour de chiffrer les heures supplémentaires effectuées par M [F] [C] entre 2005 et 2009 ainsi qu'il suit :

2005 : 815 heures, soit sur 48 semaines travaillées, une moyenne de 16,98 heures par semaine. La rémunération des heures à 25% s'établit à 8 x 48 x 29,56 € = 11 351,04 € et celle des heures à 50% à 431 x 35,47 € = 15 287,57 € soit au total 26 638,61 €.

2006 : 1 000 heures, soit une moyenne de 20,83 heures par semaine. La rémunération des heures à 25% s'établit à 8 x 48 x 35,71 € = 13 712,64 € ; la rémunération des heures à 50% s'établit à 616 x 42,85 € = 26 395,60 € soit un total de 40 108,24 €.

2007 : 1 015 heures, soit une moyenne de 21,14 heures par semaine. La rémunération des heures à 25% s'établit à 8 x 48 x 42,72 = 16 404,48 € ; la rémunération des heures à 50% s'établit à 631 x 51,27 = 32 351,37 € soit un total de 48 755,85 €.

2008 : 1 145 heures, soit une moyenne de 23,85 heures supplémentaires par semaine. La rémunération des heures à 25% s'établit à 8 x 48 x 51,56 = 19 800 € ; la rémunération des heures à 50% s'établit à 761 x 61,87 € = 47 083,07 € soit un total de 66 883,07 €.

2009 : 198 heures soit une moyenne de 5,82 heures sur les 34 semaines de travail d'où une rémunération à 25% soit 180 x 41,10 € = 7 398 €.

M [F] [C] est en conséquence fondé à prétendre à un rappel de salaire pour la période 2005/2009 de 189 783,77 € outre 18 978,37 € au titre des congés payés afférents.

Sur le repos compensateur

En cas de dépassement du contingent annuel de 220 heures, les heures supplémentaires ouvrent droit à un repos compensateur (devenu contrepartie obligatoire en repos depuis la loi du 20 août 2008) de 100% et à un dédommagement équivalent lorsque ce repos n'a pas pu être pris du fait de l'employeur. Le rappel de repos compensateur ouvre droit à congés payés.

Le salarié est en conséquence fondé à réclamer les sommes suivantes :

- pour 2005 : (815 - 220) x 23,65 = 14 071,75 €,

- pour 2006 : (1 000 - 220) x 28,57 = 22 284,60 €,

- pour 2007 : (1 015 - 220) x 34,18 = 27 173,10 €,

- pour 2008 : (1 145 - 220) x 41,25 = 38 156,25 €,

soit un rappel de salaire de 101 685,70 € outre 10 168,57 € au titre des congés payés afférents.

Sur la demande d'indemnisation des temps de déplacement

Selon l'article L.212-4 du code du travail, devenu L.3121-4, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif et n'a pas à être indemnisé. Le salarié sera en conséquence débouté de sa demande de ce chef.

Sur le rappel d'indemnité de préavis

Selon le bulletin de paie du mois de novembre 2009, le montant du salaire de référence pour le calcul de cette indemnités était de 71 826,09 €. Compte tenu du rappel d'heures supplémentaires de l'année 2009, il convient de porter ce montant à 71 826,09 € + 7 398 € soit un salaire moyen réactualisé de 79 224,09 € sur 11 mois et un salaire moyen mensuel de 7 202,19 €.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de rappel sur indemnité de préavis à hauteur de la somme de (7 202,19 € - 5 775 €) x 3 = 4 281,57 € outre 428,15 € au titre des congés payés afférents.

Sur le rappel de commissions

Au terme du contrat de travail et de son avenant, la rémunération variable du salarié en matière de licence était fixée à 3% brut des licences produits MIPS vendues par lui et exigible au parfait paiement des licences par les client à chaque tranche de mise en ordre de marche (MOM), vérification d'aptitude (VA) et vérification de service régulier (VSR). Les après-vente de connexions d'automates et de nombre d'utilisateurs sont exclus de la rémunération variable.

M [F] [C] estime qu'il lui est dû un rappel de commissions de 63 311,24 € au titre de 22 licences vendues sous sa responsabilité entre octobre 2006 et octobre 2009.

Il résulte des documents relatifs aux marchés APHP versés aux débats que, si ces marchés sont des accords cadre permettant à la personne publique de passer ses commandes en fonction de ses besoins, les actes d'engagement comportent un montant de commande minimum ferme. Les actes d'engagement produits par le salarié font apparaître que les marchés étaient conclus sur une durée de 4 ans. Conclus entre octobre 2005 et juin 2007, ils sont tous arrivés à échéance à ce jour. La société MIPS France ne produit aucun document faisant apparaître qu'ils auraient été résiliés avant terme ou que le montant minimum de commande convenu n'aurait pas été honoré. Il sera en conséquence fait droit à la demande à hauteur de la somme de 54 605,61 € réclamée au titre des marchés APHP.

L'acte d'engagement du marché de NIORT est du 24 avril 2009 et ouvre donc droit à la commission de 828,93 € réclamée.

Il résulte des pièces et échanges de courriel produits par l'employeur que la commande de l'hôpital St Joseph de MARSEILLE comportait un logiciel Database Progress qui, n'étant pas un produit MIPS, n'ouvrait pas droit à commission et que la base de calcul des commissions était de 73 534,50 € et non pas de 76 534,50 €, comme retenu par erreur par le salarié, soit un droit à commission de 2 206,04 €. M [F] [C] reconnaît avoir perçu une somme de 1 148,02 €. Le solde de commission s'établit en conséquence à 1 058,02 €. L'employeur ne justifiant pas s'en être acquitté alors qu'il a la charge de la preuve du paiement du salaire, il sera fait droit à la demande à hauteur de ce montant.

Concernant le marché Gustave Roussy, le bon de commande produit par le salarié est relatif à une commande du 27 juin 2009 et non à celle du 19 mars 2009 dont il n'est pas contesté que la commission due a été payée. Il en résulte que la contestation de l'employeur n'est pas pertinente et que le droit à commission du salarié est justifié.

Les autres commissions réclamées ne font l'objet d'aucune contestation.

Il sera en conséquence fait droit à la demande de rappel de commissions à hauteur de la somme de 63 221,24 € outre 6 322,12 € au titre des congés payés afférents.

Sur le rappel de congés payés et de congé d'ancienneté

Il résulte du bulletin de paie du mois de décembre 2009 que 71 jours de congés payés et 3 jours d'ancienneté ont été payés. M [F] [C] sera en conséquence débouté de ce chef de demande.

Sur le bonus 2009

M [F] [C] réclame une somme de 10 000 € au titre du plan bonus 2009/2010.

Il résulte du plan de bonus produit par l'employeur que le versement du bonus est subordonné à la réalisation par l'équipe commerciale d'un chiffre d'affaires de 2,4 millions d'euro de nouveaux marchés en 2009/2010, les après-vente et les prolongations étant exclus de ce montant. L'employeur produit un relevé des marchés obtenus au cours de l'exercice considéré qui ne fait l'objet d'aucune critique et duquel il résulte que l'objectif atteint n'a été de 918 865 €. Ainsi, c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a débouté M [F] [C] de ce chef de demande.

Sur le treizième mois

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a fait droit à ce chef demande à hauteur de la somme de 4 812,52 €.

Sur la rupture du contrat de travail

La démission d'un salarié qui est rendue équivoque par des circonstances qui lui sont antérieures ou contemporaines doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail laquelle produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements imputés par le salarié à son employeur empêchaient la poursuite des relations contractuelles soit d'une démission dans le cas contraire.

En l'espèce, la lettre de démission de M [C] ne comporte aucune réserve. Le salarié ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un différend individuel sur le paiement des heures supplémentaires antérieur ou contemporain de sa démission. Le grief contenu dans son courrier du 17 septembre n'a été invoqué qu'en réponse au courrier de l'employeur lui rappelant son obligation de non concurrence et ne saurait, dans ce contexte, être considéré comme révélateur de circonstances rendant la démission équivoque.

Il n'y a dès lors pas lieu de requalifier la démission de M [C] en prise d'acte et le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté celui-ci de ses demandes d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour travail dissimulé

Selon l'article L.8221-5 du Code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Selon l'article L 8223-1, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, l'intention de l'employeur de dissimuler le nombre d'heures effectuées par le salarié n'est pas caractérisée et il ne saurait y avoir lieu à indemnité de ce chef.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré,

REFORME le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société MIPS France de sa demande de dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence et en ce qu'il a débouté M [F] [C] de ses demandes relatives aux heures supplémentaires, au repos compensateur, à l'indemnité de préavis et aux commissions.

Statuant à nouveau,

CONDAMNE M [F] [C] à payer à la société MIPS France la somme de 120 000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de la clause de non concurrence.

CONDAMNE la société MIPS France à payer à M [F] [C] les sommes suivantes :

- 189 783,77 € à titre de rappel pour heures supplémentaires au titre des années 2005 à 2009 outre 18 978,37 € au titre des congés payés afférents,

- 101 685,70 € à titre de repos compensateur pour les années 2005 à 2009 outre la somme de 10 168,57 € au titre des congés payés afférents,

- 4 281,57 € à titre de rappel d'indemnité de préavis outre 428,15 € au titre des congés payés afférents,

- 63 221,24 € à titre de rappel de commissions outre 6 322,12 € au titre des congés payés afférents,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions.

ORDONNE la compensation entre les créances réciproques des parties.

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société MIPS France aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, Le Président,

Evelyne FERRIER Jean-Charles GOUILHERS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 11/01801
Date de la décision : 28/03/2012

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°11/01801 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-28;11.01801 ?
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