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05/03/2012 | FRANCE | N°10/06335

France | France, Cour d'appel de Lyon, 2ème chambre b, 05 mars 2012, 10/06335


R. G : 10/ 06335

COUR D'APPEL DE LYON 2ème Chambre B ARRET DU 05 Mars 2012
décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE Au fond du 20 juillet 2010
RG : 2009/ 02980 ch no2
X...
C/
Y...

APPELANTE :
Mme Messaouda X... épouse Y... née le 18 Novembre 1952 à AIN-ROUA (ALGERIE)... 42100 SAINT-ETIENNE
représentée par Me Annie FOURNEL, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 32694 du 20/ 01/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIME :
M. Laïd Y.

.. né le 20 Mars 1941 à AIN-ROUA (ALGERIE) ... 42000 SAINT-ETIENNE
représenté par la SCP LIGIER DE M...

R. G : 10/ 06335

COUR D'APPEL DE LYON 2ème Chambre B ARRET DU 05 Mars 2012
décision du Tribunal de Grande Instance de SAINT-ETIENNE Au fond du 20 juillet 2010
RG : 2009/ 02980 ch no2
X...
C/
Y...

APPELANTE :
Mme Messaouda X... épouse Y... née le 18 Novembre 1952 à AIN-ROUA (ALGERIE)... 42100 SAINT-ETIENNE
représentée par Me Annie FOURNEL, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 32694 du 20/ 01/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIME :
M. Laïd Y... né le 20 Mars 1941 à AIN-ROUA (ALGERIE) ... 42000 SAINT-ETIENNE
représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY ET LIGIER, avocats au barreau de LYON, assisté de Me Nassima CHEKAROUA, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 30515 du 06/ 01/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

Date de clôture de l'instruction : 13 Janvier 2012 Date des plaidoiries tenues en Chambre du Conseil : 26 Janvier 2012 Date de mise à disposition : 05 Mars 2012

COMPOSÉE LORS DES DÉBATS :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue devant Blandine FRESSARD, conseillère, qui a fait lecture de son rapport, et Madame Catherine FARINELLI, présidente, (sans opposition des avocats dûment avisés), qui ont entendu les plaidoiries en audience non publique et en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée de Christine SENTIS, greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Catherine FARINELLI, présidente Madame Blandine FRESSARD, conseillère Madame Catherine CLERC, conseillère
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Catherine FARINELLI, président, et par Christine SENTIS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :
Messaouda X... et Laïd Y... se sont mariés le 19 mars 1976 à Bougaa, Wilaya de Setif (Algérie). De cette union sont issus cinq enfants, aujourd'hui majeurs.
Par jugement du 7 février 2006, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint Étienne a prononcé la séparation de corps des époux aux torts exclusifs du mari. Le jugement a notamment fixé à 80 € la pension alimentaire due pour la femme au titre du devoir de secours et à 100 € la contribution mensuelle du père à l'entretien et l'éducation des deux enfants mineurs ; Laïd Y... a été condamné à payer à Messaouda X... une nouvelle provision de 6000 € à valoir sur la liquidation de la communauté.
Par jugement du 20 juillet 2010, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint Etienne a :
- prononcé le divorce de Messaouda X... et Laïd Y... aux torts du mari et en conversion de la séparation de corps,- rappelé que la liquidation du régime matrimonial a été ordonnée par le jugement de séparation de corps,- autorisé l'épouse à conserver l'usage du nom du mari,- débouté Messaouda X... de sa demande de prestation compensatoire,- condamné Laïd Y... à payer Messaouda X... la somme de 400 € à titre de dommages et intérêts,- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,- condamné monsieur Y... aux dépens.
Le 25 août 2010, Messaouda X... a interjeté appel de cette décision.
Par dernières conclusions déposées le 24 novembre 2010, l'appelante demande à la cour de :
- confirmer le prononcé du divorce des époux Y... aux torts exclusifs de l'époux,- réformer le jugement rendu en première instance et condamner monsieur Y... à payer à son épouse la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du Code civil,- ordonner les mesures de publicités légales prévues par la loi,- ordonner la liquidation du régime matrimonial qui n'a pas encore été faite à la suite du jugement de séparation de corps et de bien,- réformer le jugement rendu en première instance en ce qu'il a débouté madame X... de sa demande de prestation compensatoire et condamner monsieur Y... à payer à son épouse à titre principal une rente viagère mensuelle de 400 € à titre de prestation compensatoire et à titre subsidiaire lui allouer un capital de 30 000 € payables en plusieurs mensualités si nécessaires,- confirmer le jugement rendu en première instance en ce qu'il a autorisé l'épouse à conserver l'usage du nom marital-condamner monsieur Y... aux entiers dépens.
Selon ses dernières écritures déposées le 17 janvier 2011, Laïd Y... demande à la cour de confirmer dans son intégralité le jugement querellé sauf à supprimer la condamnation à titre de dommages et intérêts octroyés à l'épouse. L'intimé sollicite également la condamnation de madame X... à lui verser la somme de 2000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du Code civil ainsi que la condamnation de madame aux entiers dépens. Dans le corps de ses écritures l'intimé soutient également qu'il s'oppose catégoriquement à ce que madame soit autorisée à conserver l'usage de son nom.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties à la décision entreprise et aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 janvier 2012 et l'audience des plaidoiries fixée au 26 janvier 2012. La décision a été mise en délibéré au 05 mars 2012.
MOTIFS DE LA DECISION :
L'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile in fine, issu du décret du 09 décembre 2009 dispose que « les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ».
Or si l'intimé, dans le corps de ses écritures, s'oppose catégoriquement à ce que son épouse soit autorisée à conserver l'usage de son nom, cette prétention n'est pas de celles énoncées au dispositif de ses dernières conclusions ; en conséquence la cour n'en est pas saisie.
Ainsi la décision entreprise est contestée en celles de ses dispositions ayant statué sur la prestation compensatoire et les dommages et intérêts et doit être confirmée pour le surplus.
Sur la prestation compensatoire :
Aux termes des articles 270 et suivants du code civil, pour apprécier la nécessité d'une prestation compensatoire, le juge doit rechercher si la rupture du mariage crée une disparité dans les conditions de vie respectives des parties. Cette prestation a pour but de compenser autant que possible cette disparité en fonction des besoins de l'époux à qui elle est versée et des ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution dans un avenir prévisible.
Pour la détermination des besoins et ressources, il convient de relever les éléments suivants :
Le mariage de Messaouda X... et de Laïd Y... a été célébré le 19 mars 1976, les époux ont été autorisés à résider séparément par ordonnance de non conciliation du 08 octobre 2004, la séparation de corps des époux a été prononcée le 07 février 2006, soit une vie conjugale de 30 ans avec une vie commune de 28 ans. Cinq enfants sont issus de cette union.
Messaouda X... est âgée de 59 ans et fait des observations sur son état de santé qu'elle étaye en produisant une dispense de recherche d'emploi qui lui a été adressée par l'Agence Locale pour l'emploi de Saint Etienne le 27 décembre 2007 ainsi qu'un certificat médical daté du 1er avril 2010.
Elle n'a exercé aucune activité professionnelle pendant le mariage. Elle a donc fait le choix, qu'à défaut d'éléments contraires dans le dossier, la cour considère résulter de l'accord commun des époux, de consacrer plusieurs années à son foyer et à l'éducation des cinq enfants communs. Elle justifie percevoir le RSA pour un montant mensuel de 499, 72 € (base mars 2010), lequel diminuera lorsque sa fille HOUDA, qui vit encore avec elle, partira pour étudier (estimation en avril 2010 entre 320 € et 460 €). Ses droits à la retraite sont minimes. L'estimation produite de la CRAM établit qu'au 1er décembre 2012 le montant mensuel brut de sa retraite personnelle serait de 246, 86 €.
Elle assume la charge d'un loyer mensuel résiduel de 126, 14 €, hors charges et après déduction de l'APL de 259, 45 €.
Elle affirme ne disposer d'aucun patrimoine propre, la preuve contraire de la possession par Messaouda X... d'une petite maison en Algérie n'étant pas rapportée par Laïd Y....
Laïd Y... est âgé de 70 ans. Il est retraité et perçoit au titre de ses retraites CRAM et complémentaire PRO BTP, la somme mensuelle moyenne de 872, 33 € (base avis d'impôt sur le revenu 2011).
Il assume, outre les dépenses incompressibles de la vie courante, la charge mensuelle d'un loyer de 174, 17 €, dont doit être déduite l'allocation logement à hauteur de 46, 47 €.
Il n'est pas démontré que Laïd Y... disposerait d'un patrimoine immobilier propre ; en revanche l'évocation par Messaouda X... de la possession par celui-ci de placements financiers en Algérie comme en France est corroborée par la production notamment de l'état d'un compte à la Caisse Nationale d'Epargne et de Prévoyance détenu de Laïd Y... à l'agence de Setif au 31 décembre 2001 ainsi que par l'état de ses comptes (LEP, LIVRET A, PEL, compte courant) en France en 2004 et 2005, lesquels ont d'ailleurs justifié l'attribution à l'appelante de deux avances sur communauté de 6000 €.
L'ensemble de ces éléments met en évidence une disparité telle que sus définie au détriment de l'épouse tenant essentiellement à une différence de ressouces qui s'accentuera encore lorsque Messaouda X... aura fait valoir ses droits à la retraite.
Ainsi en considération de l'âge et de l'état de santé des époux, de la durée de la vie commune, de la précarité de la situation de Messaouda X..., mais également de la faiblesse des ressources de Laïd Y..., ainsi que de la faiblesse de l'actif de communauté, il convient, par infirmation de la première décision, de fixer au profit de Messaouda X... une prestation compensatoire. L'appelante ne justifiant pas d'un état de besoin tel que visé à l'article 276 du code civil, cette prestation compensatoire doit prendre la forme d'un capital dont le montant doit être fixé à la somme de 7680 €. Laïd Y... n'étant pas en mesure de verser ce capital dans les conditions prévues par l'article 274 du code civil, il doit être autorisé à le règler sous forme de versements mensuels de 80 € par mois pendant huit ans.
Sur les demandes de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil :
Aux termes de l'article 266 du code civil, des dommages et intérêts peuvent être accordée à un époux en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage, quand le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint.
Laïd Y... forme pour la première fois en cause d'appel une demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil. Or le divorce ayant été prononcé, en conversion de la séparation de corps, à ses torts exclusifs, sa demande sur le fondement de l'article ne peut pas être accueillie.
Messaouda X..., quant à elle, n'avait formulé, devant le premier juge de la séparation, aucune demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article sus visé. A l'occasion de l'action en divorce, l'épouse ne rapporte cependant pas la preuve des conséquences d'une particulière gravité subies du fait de la dissolution du mariage.
En effet si le certificat médical daté du 1er avril 2010 atteste que Messaouda X... souffre de diverses pathologies invalidantes et notamment d'un syndrome dépressif avec anxiété majeure, aucun lien de causalité n'est établi entre cette dépression et le prononcé du divorce. De plus la douleur qui a pu être légitimement la sienne au moment du prononcé de la séparation de corps, comme de sa conversion en divorce, n'apparaît pas avoir dépassé la commune mesure de celle que le divorce inflige habituellement. De même si Messaouda X... s'est retrouvée dans une situation matérielle précaire du fait du départ de son époux, elle a bénéficié de pensions alimentaires pour elle et les enfants ainsi que de deux avances sur communauté de 6000 € qui ont rétabli un certain équilibre entre les époux.
Ainsi l'intimée qui affirme, sans le démontrer, avoir été très perturbée par le départ de son époux doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts. La décision entreprise doit donc être infirmée de ce chef.
Sur les dépens :
Compte tenu de la nature et de l'issue du litige, chaque partie doit conserver la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après débats hors la présence du public et après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 20 juillet 2010 par le juge aux affaires familiales de Saint Etienne en toutes ses dispositions sauf en celles ayant statué sur la prestation compensatoire et les dommages et intérêts ;
Statuant à nouveau ;
Fixe au profit de Messaouda X... une prestation compensatoire sous forme d'un capital de 7680 € payable par versements mensuels de 80 € pendant huit ans ;
Condamne Laïd Y... à payer à titre de prestation compensatoire à Messaouda X... ce capital de 7680 € payable par versements de 80 € par mois pendant huit ans ;
Rappelle que cette pension devra être versée douze mois sur douze et avant le 1ER de chaque mois à Messaouda X..., sans frais pour la bénéficiaire,
Dit que cette somme variera de plein droit le premier janvier de chaque année en fonction de la variation de l'indice des prix de détail à la consommation (série France entière INSEE sans tabac) publié par l'INSEE selon la formule :
Pension initiale x A (nouvel indice) Pension revalorisée =------------------------------- B (Indice de base)
dans laquelle :- A représente le dernier indice publié à la date de réévaluation,- B l'indice de base au jour du prononcé de la présente décision
Condamne dès à présent le débiteur de la pension à payer les majorations futures de la pension alimentaire ainsi indexée, laquelle sera exigible de plein droit sans notification préalable,
Déboute Messaouda X... de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil ;
Déboute Laïd Y... de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil ;
Y ajoutant,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre b
Numéro d'arrêt : 10/06335
Date de la décision : 05/03/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2012-03-05;10.06335 ?
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