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14/02/2012 | FRANCE | N°10/04776

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 14 février 2012, 10/04776


R. G : 10/ 04776
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 14 Février 2012

Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE Au fond du 10 mai 2010

RG : 09/ 00973 ch no

X... Z...

C/
SARL BAT IMMOB
APPELANTS :
Monsieur Nourredine X... né le 28 Septembre 1969 à LYON (69)... 01120 LA BOISSE

représenté par la SCP LAFFLY-WICKY
assisté de Maître Jean Philippe PACAUT, avocat au barreau de l'AIN

Madame Fatiha Z... épouse X... née le 18 Mai 1968 à LYON (69)... 01120 LA BOISSE

représentée par la SC

P LAFFLY-WICKY
assistée de Maître Jean Philippe PACAUT, avocat au barreau de l'AIN

INTIMÉE :

SARL BAT IMMOB représentée...

R. G : 10/ 04776
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 14 Février 2012

Décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE Au fond du 10 mai 2010

RG : 09/ 00973 ch no

X... Z...

C/
SARL BAT IMMOB
APPELANTS :
Monsieur Nourredine X... né le 28 Septembre 1969 à LYON (69)... 01120 LA BOISSE

représenté par la SCP LAFFLY-WICKY
assisté de Maître Jean Philippe PACAUT, avocat au barreau de l'AIN

Madame Fatiha Z... épouse X... née le 18 Mai 1968 à LYON (69)... 01120 LA BOISSE

représentée par la SCP LAFFLY-WICKY
assistée de Maître Jean Philippe PACAUT, avocat au barreau de l'AIN

INTIMÉE :

SARL BAT IMMOB représentée par ses dirigeants légaux 19 cours de Verdun 38200 VIENNE

représentée par Me André BARRIQUAND
assistée de la SCP BAULIEUX-BOHE-MUGNIER-RINCK, avocats au barreau de LYON, représentée par Me KUEFFER, avocat
******

Date de clôture de l'instruction : 07 Novembre 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 13 Décembre 2011
Date de mise à disposition : 14 Février 2012

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Françoise CLEMENT, conseiller

assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
****
Monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X... ont conclu avec la SARL BAT IMMOB le 27 février 2004, un contrat de construction de logement avec fourniture de plans.
La réception est intervenue le 27 mai 2005.
Se plaignant de divers désordres, monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X... ont obtenu en référé, par ordonnance du 23 mai 2006, l'organisation d'une expertise.
L'expert a déposé son rapport le 1er août 2008.
Par acte en date du 25 mars 2009, monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X... ont fait citer la SARL BAT IMMOB devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, lequel par jugement en date du 10 mai 2010, a :
- écarté des débats les pièces visées au bordereau no3 de monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X...,
- déclaré prescrite l'action des époux X...,
- déclaré en conséquence leurs demandes irrecevables,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé les dépens à la charge des demandeurs.

Vu les conclusions signifiées le 4 octobre 2011 par monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X..., appelants selon déclaration du 24 juin 2010, qui demandent à la cour de :

- dire et juger que les désordres relèvent de la garantie décennale de l'article 1792 du code civil,
- constater que l'action des époux X... n'est dès lors pas prescrite.
Subsidiairement,
- dire et juger que les époux X... sont bien fondés à se prévaloir de la théorie des dommages intermédiaires,
En conséquence,
- réformer le jugement du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse,
- condamner la SARL BAT IMMOB à verser aux époux X... la somme globale de 12. 891, 37 €, correspondant à :
-2. 900, 00 € au titre des travaux liés à l'isolation phonique,-200, 00 € au titre des travaux liés à l'isolation thermique,-8. 991, 37 € au titre des travaux liés aux infiltrations d'eau dans le garage,-800, 00 € au titre des désordres résultant des fissures et éclats de crépissage extérieur,

- condamner la SARL BAT IMMOB à verser aux époux X... la somme de 5. 600, 00 € au titre de leur trouble de jouissance, sauf à parfaire jusqu'à l'arrêt à intervenir,
- condamner la SARL BAT IMMOB à verser aux époux X... la somme de 5. 000, 00 € au titre de la résistance abusive,
- condamner la SARL BAT IMMOB à verser aux époux X... la somme de 4. 000, 00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les conclusions signifiées par la SARL BAT IMMOB le 20 octobre 2011, laquelle demande à la cour de :

- dire et juger mal fondé l'appel interjeté par monsieur et madame X... à l'encontre du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse le 10 mai 2010,
- rejeter les demandes de monsieur et madame X... comme irrecevables, non fondées et injustifiées ou, à tout le moins, les limiter eu égard au coût de remplacement des vitrages et au chiffrage de l'expert judiciaire,
En tout état de cause,
- condamner monsieur et madame X... aux dépens et à payer à la SARL BAT IMMOB une indemnité de 2. 000, 00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture été rendue le 7 novembre 2011.

MOTIFS ET DÉCISION

-I-Sur la recevabilité des demandes de monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X...
Monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X... soutiennent que l'étendue et la gravité des désordres affectant l'ouvrage le rendent impropre à sa destination ou sont de nature à compromettre sa solidité, peu important le fait que cette garantie n'ait pas été expressément invoquée dans leurs conclusions de première instance ; ils précisent qu'aucune prescription ne peut donc leur être opposée.
Au cas où la cour ne retiendrait pas la nature décennale des désordres, ils fondent leur action sur la responsabilité de droit commun s'agissant alors de dommages intermédiaires.
La SARL BAT IMMOB rétorque quant à elle que l'action des époux X... est manifestement prescrite sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ; que c'est à tort et seulement pour échapper à la prescription qu'ils invoquent aujourd'hui la garantie décennale, l'expert ayant expressément indiqué que les désordres ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage et qu'ils n'affectent pas l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement pouvant le rendre impropre à sa destination ; que la responsabilité de droit commun ne saurait pas plus être retenue sans démonstration d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité.
Il ressort du procès-verbal de réception que si la case " avec réserves " a été cochée par les parties, aucune réserve n'a cependant alors été exprimée ; les désordres dénoncés par les époux X... à l'occasion de leur procédure judiciaire ont été signalés au constructeur par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 mars 2006, soit dans l'année suivant la réception des travaux.
Les désordres notifiés dans l'année de la réception relèvent soit de la garantie de parfait achèvement, soit de la garantie bienno-décennale soit encore de la garantie contractuelle de droit commun, le maître de l'ouvrage restant libre d'exercer l'action de son choix.
Les époux X... se fondent en l'espèce sur la nature décennale des désordres ou invoquent subsidiairement la garantie contractuelle de droit commun au titre des dommages intermédiaires.
La SARL BAT IMMOB soutient alors que les désordres relèvent de la garantie biennale qui n'est pas invoquée par les appelants ; elle ajoute que les désordres relevant d'une garantie légale ne peuvent donner lieu à une action fondée sur la responsabilité de droit commun.
Il ressort des constatations et conclusions de l'expert A... que les désordres invoqués par les maîtres de l'ouvrage consistent dans :
- un problème d'isolation phonique concernant une maison située à proximité de la RN 84 et de la ligne TGV ; l'expert a constaté que s'agissant de deux chambres situées à l'étage, l'isolement réglementaire des deux blocs fenêtres n'était pas respecté,
- une mauvaise isolation thermique permettant, par manque d'étanchéité entre l'ouvrant et le seuil sur le dormant de la porte d'entrée, et entre les doublages intérieurs des murs de façade et les dormants des fenêtres du salon et des deux chambres à l'étage situées en façade Est du bâtiment, une entrée d'air sous les cadres des fenêtres,
- des infiltrations d'eau par temps pluvieux sur le mur Nord du garage,
- des fissures et éclats du crépis des façades extérieures par endroits,
- une baisse de pression d'eau dans le circuit de chauffage réparée et n'existant plus depuis mars 2008.
L'expert indique que l'ensemble de ces désordres dont l'ampleur n'était pas révélée à la réception, ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage et n'affectent pas l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement en le rendant impropre à sa destination.
Si les désordres affectant l'isolation phonique des immeubles peuvent effectivement relever de la garantie décennale lorsqu'ils rendent l'immeuble impropre à sa destination, en aucun cas il ne s'agit en l'espèce d'une situation semblable ; seule deux fenêtres sont concernées par le désordre et aucune impropriété à destination n'est établie.
Le désordre affectant le garage n'a nullement pour conséquence de rendre cette partie de la maison impropre à sa destination dans la mesure où les infiltrations d'eau ne paralysent nullement l'utilisation des lieux.
La cour ne peut dès lors que constater que les désordres invoqués ne relèvent pas de la garantie décennale.
Ils ne relèvent pas plus de la garantie biennale dans la mesure où ils n'affectent pas des éléments d'équipements dissociables des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.
0 Les maîtres de l'ouvrage sont donc autorisés à rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun de leur constructeur ; l'action qui se prescrit par dix années à compter de la réception est manifestement recevable en l'espèce.

- II-Sur la responsabilité de la SARL BAT IMMOB

Il ressort des conclusions de l'expert judiciaire que les désordres constatés proviennent :
- soit d'une faute de conception :- isolation phonique : absence de prise en compte au niveau des prestations du lot menuiseries extérieures, du seuil minimum d'isolation acoustique en fonction de la classification de la voie située à proximité,- infiltrations d'eau dans le garage : absence de prise en compte du cahier des charges prévoyant l'utilisation de matériaux insensibilisés à l'eau ou traités avec des produits hydrofuges ou non corrosifs pour la partie inférieure du bâtiment sur environ un mètre de hauteur,

- soit d'une malfaçon dans la mise en oeuvre :- mauvaise isolation thermique : absence de joints adéquats,- fissures et éclats du crépis : absence de fixateur ou de primaire d'accrochage sur le béton lisse des poteaux de la terrasse.

Les fautes de la SARL BAT IMMOB sont ainsi caractérisées et elles justifient l'indemnisation des préjudices subis par les époux X....
- III-Sur les demandes de monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X...
Monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X... sollicitent la condamnation de la SARL BAT IMMOB au paiement des sommes retenues par l'expert s'agissant des travaux de reprise des désordres.
S'agissant du quantum des demandes, la SARL BAT IMMOB précise que soit aucune justification n'étant produite, la demande sera rejetée, soit il conviendra de la réduire en fonction des documents du dossier.
L'expert A... a parfaitement décrit les travaux de reprise qu'il préconise ; il en a justement évalué le coût en prenant en compte l'argumentation du constructeur qui entendait limiter de façon non justifiée la reprise des désordres constatés en matière d'isolation phonique, au remplacement des vitrages ; il n'a pas indiqué que les drains de l'ensemble de l'immeuble devaient faire l'objet d'une réparation, préconisant seulement, au titre du désordre lié aux infiltrations d'eau dans le garage, la réalisation d'un drain perforé sur un regard d'eaux pluviales.
Ses conclusions doivent donc servir de base aux condamnations de la SARL BAT IMMOB à payer aux époux X... les sommes de :
-2. 900, 00 € TTC au titre de la reprise des désordres en matière d'isolation phonique,-200, 00 € TTC au titre de la reprise des désordres d'isolation thermique,-1. 400, 00 € TTC au titre de la reprise des désordres liés aux infiltrations d'eau dans le garage,-800, 00 € TTC au titre des désordres constatés sur le crépis.

Les époux X... invoque l'existence d'un préjudice de jouissance : la baisse de pression d'eau dans le circuit de chauffage a été solutionnée dès le mois de mars 2008 et aucun préjudice n'est démontré depuis en la matière ; les désordres en matière d'isolation phonique et thermique et les infiltrations d'eau dans le garage ont nécessairement été à l'origine de désagréments dans le quotidien de la famille X... qu'il convient de réparer par l'octroi d'une juste somme de 2. 000, 00 € à titre de dommages-intérêts.

Contrairement à ce que soutiennent les époux X..., la SARL BAT IMMOB a produit aux débats une attestation d'assurance multirisque et notamment responsabilité civile décennale MMA valable pour l'année 2004 ; aucune attestation n'est produite pour la période postérieure.

A aucun moment le constructeur n'a fait preuve de diligence face aux réclamations des époux X..., que ce soit dans le délai de la garantie de parfait achèvement alors même que les maîtres de l'ouvrage avaient dénoncé les désordres dès le 3 avril 2006 ou postérieurement aux opérations d'expertise ayant mis en évidence la réalité des désordres invoqués ; l'ensemble de ces éléments ajoutés à sa résistance abusive à justifier de son assurance responsabilité civile décennale pour l'entière période concernée par le chantier X... justifie que soit allouée aux appelants, une somme de 2. 000, 00 € à titre de dommages-intérêts.
- IV-Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
L'équité et la situation économique des parties commandent enfin l'octroi aux époux X... d'une somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la SARL BAT IMMOB qui succombe ne pouvant qu'être déboutée en sa demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Réforme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse le 10 mai 2010 en toutes ses dispositions,
Statuant de nouveau et y ajoutant,
Déclare recevable l'action de monsieur Nourredine X... et madame Fatiha X...,
Condamne la SARL BAT IMMOB à leur payer les sommes de :
-2. 900, 00 € au titre des travaux liés à l'isolation phonique,-200, 00 € au titre des travaux liés à l'isolation thermique,-1. 400, 00 € au titre des travaux liés aux infiltrations d'eau dans le garage,-800, 00 € au titre des désordres résultant des fissures et éclats de crépissage extérieur,-2. 000, 00 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance,-2. 000, 00 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive à paiement,-3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne la SARL BAT IMMOB aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront notamment les frais d'expertise et seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.
Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/04776
Date de la décision : 14/02/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2012-02-14;10.04776 ?
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