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08/02/2012 | FRANCE | N°10/06933

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 08 février 2012, 10/06933


AFFAIRE PRUD'HOMALE



DOUBLE RAPPORTEUR





R.G : 10/06933





[S]

C/

SARL ETABLISSEMENT SUZANNE - CENTRE DE CONVALESCENCE DE NEUVILLE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURG-EN-BRESSE

du 14 septembre 2010

RG : F 09/0275

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 08 FÉVRIER 2012





APPELANTE :



[W] [S]

née le [Date naissance 4] 1956 à [Localité 6]
<

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[Localité 2]



comparant en personne, assistée de la SELARL AVENIR JURISTES (Me Eric DEZ), avocats au barreau del'AIN



INTIMÉE :



SA MEDICA FRANCE VENANT AUX DROITS DE LA SARL ETABLISSEMENT SUZANNE - CENTRE...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

DOUBLE RAPPORTEUR

R.G : 10/06933

[S]

C/

SARL ETABLISSEMENT SUZANNE - CENTRE DE CONVALESCENCE DE NEUVILLE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURG-EN-BRESSE

du 14 septembre 2010

RG : F 09/0275

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 08 FÉVRIER 2012

APPELANTE :

[W] [S]

née le [Date naissance 4] 1956 à [Localité 6]

[Adresse 5]

[Localité 2]

comparant en personne, assistée de la SELARL AVENIR JURISTES (Me Eric DEZ), avocats au barreau del'AIN

INTIMÉE :

SA MEDICA FRANCE VENANT AUX DROITS DE LA SARL ETABLISSEMENT SUZANNE - CENTRE DE CONVALESCENCE DE NEUVILLE

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par la SELARL ABEILLE ET ASSOCIES (Me Denis FERRE), avocats au barreau de MARSEILLE

PARTIES CONVOQUÉES LE : 21 avril 2011

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 30 novembre 2011

Présidée par Jean-Charles GOUILHERS, Président et composée de Françoise CARRIER, tous deux magistrats rapporteurs, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, assistés pendant les débats de Fabienne BEZAULT-CACAUT, Greffier placé.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Jean-Charles GOUILHERS, Président

Hervé GUILBERT, Conseiller

Françoise CARRIER, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 février 2012 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Jean-Charles GOUILHERS, Président et par Marie BRUNEL, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Le 27 mars 2003, Mme [W] [S] a été embauchée à temps partiel pour un horaire de 75,83 heures par mois par la SARL ETABLISSEMENT SUZANNE exploitant le Centre de convalescence de NEUVILLE LES DAMES en qualité de pharmacienne chef de service, coefficient 558 position III statut cadre de la convention collective, afin de gérer la pharmacie à usage intérieur (PUI) de l'établissement.

La relation contractuelle était soumise à la convention collective des établissements hospitaliers à but non lucratif.

Au dernier état de sa collaboration, Mme [W] [S] percevait une rémunération mensuelle brute de 2 152,98 €.

Elle a été en arrêt maladie entre décembre 2008 et février 2009.

Par lettre remise en main propre à la directrice de l'établissement, Mme [O], le 27 mars 2009, elle a dénoncé les anomalies suivantes :

- non paiement des heures complémentaires pour assister aux réunions statutaires, sa charge de travail ne lui permettant pas de les récupérer,

- absence d'information à l'inspection de la pharmacie et à l'ordre des pharmaciens de la personne qui l'avait remplacée pendant son arrêt maladie,

- prélèvement opéré dans la pharmacie sans autorisation par la responsable de l'unité de soins pour son usage personnel et omission de l'employeur d'aviser le pharmacien en charge de cette anomalie,

- rappel de la législation qui n'autorise pas la direction à donner l'accès de la pharmacie au personnel administratif en l'absence du pharmacien,

concluant son courrier dans les termes suivants : 'Vous comprendrez que la poursuite de notre collaboration exige de votre part une amélioration des conditions de travail, indispensable à l'accomplissement de la mission pharmaceutique.'

La Directrice a répondu à ces griefs par une lettre du 23 avril 2009 dans laquelle elle reconnaissait avoir omis d'aviser l'inspection de la pharmacie et l'ordre des médecins du remplacement du pharmacien en titre tout en soulignant que la salariée aurait pu lui rappeler cette obligation et avoir autorisé une infirmière à prendre une poche à urine en dépannage dans la pharmacie en soulignant que, dans la mesure où il ne s'agissait pas d'un médicament, cela n'avait pas prêté à conséquence, et contestait les autres allégations de la salariée en faisant valoir que les heures complémentaires effectuées pour assister aux réunions d'instances avaient été payées, que Mme [W] [S] n'avait pas été vue dépasser son horaire contractuel ni ne l'avait fait constater comme cela lui avait été demandé, et qu'aucun membre du personnel n'avait jamais effectué de travail sur son poste informatique.

Le 24 avril 2009, Mme [W] [S] a adressé une nouvelle lettre à la directrice de l'établissement lui reprochant sa légèreté ou sa désinvolture dans le respect de la législation et estimant que ce comportement mettait en cause les conditions mêmes de son activité. Ce second courrier faisait l'inventaire des irrégularités constatées, outre celles déjà dénoncées, à savoir :

- qu'il n'existait plus de contrôle continu de la température du lieu de stockage des médicaments,

- que la pharmacie était en sous effectif depuis le mois de juin 2008, date de la création de 4 lits supplémentaires sans augmentation des horaires de travail,

- que la direction n'avait pas accordé les horaires de la préparatrice à ceux de la pharmacienne sous la supervision de laquelle elle devait travailler,

- qu'il lui avait été demandé d'assurer la facturation aux patients des médicaments non remboursés par la sécurité sociale ce qui était proscrit par le code de la santé publique,

- que ses conditions de travail n'étaient pas acceptables (salle de travail sans ouverture sur l'extérieur, pas de moyens matériels pour la manutention des cartons),

- que sa prime de fin d'année ne lui avait pas été versée depuis la fin de l'année 2007.

Elle concluait ce courrier dans les termes suivants : 'Je vous ai dit ce que j'avais sur le coeur car il m'est de plus en plus difficile d'accepter ces méthodes ou ces pratiques qui, par leur accumulation et leur caractère de gravité affectent les conditions de notre collaboration. Je souhaite être enfin entendue à défaut de quoi je devrai en tirer les conséquences et ne pourrai faire autrement que renoncer et démissionner.'

Par un courrier du 4 mai 2009,Mme [O] a répondu sur chacun des points en contestant les allégations de la salariée. Celle-ci a maintenu ses griefs dans un troisième courrier en date du 12 mai 2009.

Par lettre du 28 mai 2009, adressée au directeur régional, Mme [W] [S] a fait grief à celui-ci du déroulement d'une réunion qui s'était tenue la veille 27 mai, en lui reprochant un comportement et des méthodes indignes de sa fonction, 'le caractère humiliant et scandaleux' de sa démarche, se déclarant consternée par son 'absence d'humanité et de professionnalisme' et concluant 'Vous me contraignez à la démission. Je n'entends pas plus longtemps consacrer mon énergie à une entreprise qui bafoue tous les principes et ne respecte pas ses obligations'.

Elle a été placée en arrêt maladie par son médecin traitant à compter du 27 mai et jusqu'au 2 juin 2009. Au terme d'une visite médicale du 3 juin 2009, elle a été déclarée inapte temporaire à son poste par le médecin du travail. Son arrêt de travail a été prolongé à deux reprises, les 3 juin et 2 juillet.

Par courrier du 10 juin 2009, l'employeur a pris acte de sa démission et lui a notifié qu'elle restait débitrice d'un préavis de trois mois et qu'à défaut de réponse de sa part, il considérerait qu'elle n'entendait pas l'effectuer et qu'elle cesserait de faire partie des effectifs à compter du 3 juin.

Par courrier du 4 juillet 2009, il lui a adressé les documents de fin de contrat mentionnant une date de rupture au 2 juin.

Par lettre du 7 juillet, Mme [W] [S] a contesté la rupture de son contrat en cours de préavis en faisant valoir qu'elle n'avait pas précisé qu'elle n'entendait pas effectuer son préavis.

Elle a fait adresser le 13 juillet 2009 un courrier par son conseil demandant le règlement d'un préavis de six mois.

Le 7 août 2009, elle a saisi le conseil de prud'hommes de BOURG EN BRESSE à l'effet d'obtenir le paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.

Par jugement du 14 septembre 2010, le conseil de prud'hommes a dit que la démission de Mme [W] [S] était claire et non équivoque et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes.

Mme [W] [S] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Au terme de ses écritures reçues au greffe le 26 août 2011 et soutenues oralement à l'audience, Mme [W] [S] conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à voir dire que sa démission doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et demande à voir condamner la SARL ETABLISSEMENT SUZANNE à lui payer les sommes suivantes :

- 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- 31 222,50 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 12 489 € à titre d'indemnité de préavis outre 1 248,90 € au titre des congés payés afférents,

- 324,50 € à titre de rappel d'heures complémentaires outre 32,45 € au titre des congés payés afférents,

- 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Au terme de ses écritures reçues au greffe le 11 octobre 2011 et soutenues oralement à l'audience, la Société ETABLISSEMENT SUZANNE aux droits de laquelle se trouve la SA MEDICA FRANCE conclut à la confirmation du jugement déféré, au débouté de l'ensemble des demandes de la salariée et subsidiairement à la réduction à de plus justes proportions des sommes allouées.

Elle sollicite en tout état de cause l'allocation de la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Oralement à l'audience, elle a demandé à voir écarter des débats les pièces et écritures communiquées par Mme [W] [S] le 30 novembre 2011, veille de l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les écritures et pièces communiquées la veille de l'audience par Mme [W] [S] en contravention avec le principe du contradictoire seront écartées des débats.

Sur les heures complémentaires

La salariée reconnaît avoir reçu le paiement des heures complémentaires correspondant au temps consacré aux réunions statutaires dont elle réclamait le paiement dans son courrier du 26 mars. Elle réclame le paiement de 12h30 effectuées entre le 28 décembre 2007 et le 30 avril 2009 et correspondant à la préparation des piluliers lorsque la préparatrice était en congés et non remplacée soit la somme de 324,50 € outre 32,45 € au titre des congés payés afférents.

Selon l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié. Il appartient toutefois au salarié d'étayer préalablement sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'espèce, la salariée produit un état récapitulant les heures complémentaires effectuées semaine par semaine au cours de la période considérée. Cet état déduit les heures qui ont pu être récupérées ce qui permet de considérer qu'il n'a pas été établi pour les besoins de la cause. Il convient de relever que la salariée a fait état de ce 'solde d'heures en dépassement de 12h30" dans son courrier du 12 mai, précisant tenir depuis 2004 'un décompte précis des heures effectuées n'ayant jamais donné lieu à contestation auparavant', et a joint à son courrier un tableau desdites heures. L'employeur n'a pas contesté l'existence de ce système de décompte des heures. Il n'a pas non plus démenti, dans ses courriers en réponse du mois d'avril 2009, qu'il avait été demandé à la salariée de récupérer ses heures complémentaires ce qui implique la reconnaissance implicite de l'accomplissement d'heures complémentaires.

Il ne peut être reproché à l'employeur de n'avoir pas mis en place un enregistrement quotidien ou hebdomadaire des horaires de travail de la salariée, les dispositions de l'article D.3171-8 du code du travail invoquées par celle-ci ne lui étant pas applicables s'agissant de dispositions relatives à l'organisation du travail par relais, par roulement ou par équipe successive. Il n'en demeure pas moins que le relevé récapitulatif produit permettait à l'employeur de vérifier que les heures complémentaires réclamées correspondaient effectivement à des périodes d'absence de la préparatrice et donc, le cas échéant, d'y répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'absence d'élément venant démentir le décompte de la salariée, il convient de faire droit à sa demande de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail

La démission du salarié qui est rendue équivoque par des circonstances qui lui sont antérieures ou contemporaines doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail laquelle produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements imputés par le salarié à son employeur empêchaient la poursuite des relations contractuelles soit d'une démission dans le cas contraire. Il appartient au salarié de rapporter les preuve des manquements qu'il invoque.

En l'espèce la démission de la salariée doit s'analyser en une prise d'acte dès lors que la lettre par laquelle elle met un terme au contrat de travail impute la responsabilité de la rupture à l'employeur auquel elle reproche un comportement fautif. Il convient en conséquence de rechercher si la salariée rapporte la preuve des manquements qu'elle invoque et si ceux-ci empêchaient la poursuite des relations contractuelles.

1) Sur le non paiement des heures complémentaires

S'il ne résulte pas de ses courriers que la salariée ait expressément demandé le paiement desdites heures, elle a néanmoins fait état du fait qu'elle était dans l'impossibilité de les récupérer compte tenu de sa charge de travail. Il appartenait à l'employeur de proposer une solution pour remédier à cette situation. Néanmoins, au regard du très faible nombre d'heures en cause, s'agissant de 12h30 sur une période de 16 mois ce qui correspond à moins d'une heure par mois, ce manquement de l'employeur n'est pas constitutif d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat de travail.

2) sur la prime de fin d'année

Mme [W] [S] expose qu'elle avait bénéficié d'une prime de fin d'année qui a cessé de lui être versée à compter de l'année 2007. Néanmoins il n'est pas démontré que cette prime ait été contractualisée ni qu'elle ait présenté les caractères de constance, de fixité et de généralité seuls susceptibles de lui donner le caractère d'un usage. Ce grief n'est donc pas fondé.

3) sur les clauses devant figurer dans le contrat de travail

Mme [W] [S] fait valoir que son contrat de travail omettait de rappeler les dispositions de l'article R.5126-35 du code de la santé publique ce que l'employeur ne conteste pas. Néanmoins, le code de la santé publique n'édicte aucune sanction en cas de non respect de ce texte. D'autre part cette omission n'a eu aucune incidence sur la relation de travail et l'exercice par Mme [W] [S] de ses fonctions, s'agissant d'une irrégularité de pure forme, ce dont atteste le fait que la salariée a attendu plus de 6 ans pour s'en prévaloir.

4) sur l'emploi d'une préparatrice hors la présence de Mme [W] [S]

Il est acquis que la préparatrice engagée par l'établissement à compter du mois de juin 2007 à raison de deux heures par semaine réalisait ses fonctions hors la présence de la pharmacienne. Se prévalant de décisions judiciaires qui avaient estimé que les dispositions l'article L.4241-1 du code de la santé publique, qui édicte que les préparateurs en pharmacie assument leurs tâches sous la responsabilité et le contrôle effectif d'un pharmacien, imposaient qu'ils exercent leur activité en la présence du pharmacien, Mme [W] [S] a signalé que l'organisation existante était critiquable. Il résulte des échanges de courrier versés aux débats que lorsque la salariée a signalé cette anomalie au mois d'avril 2009, l'employeur lui a demandé de 'voir' avec l'intéressée et d'établir avec elle la meilleure organisation possible'. L'employeur était légitime à la déléguer, en sa qualité de chef du service, afin de rechercher les aménagements possibles avec la préparatrice.

Mme [W] [S] ne justifie d'aucune diligence à cette fin. Pas plus elle ne démontre s'être trouvée dans une impasse en raison de l'impossibilité de rendre les horaires de la préparatrice compatibles avec les siens ou d'un refus de l'employeur de se mettre en conformité avec la loi. Il en résulte qu'aucune faute de l'employeur n'est caractérisée.

5) sur l'absence d'information du conseil de l'ordre des pharmaciens et de l'inspection de la pharmacie sur le remplacement de Mme [W] [S] pendant son arrêt maladie entre décembre 2008 et février 2009.

L'employeur reconnaît avoir omis de procéder à cette formalité par simple ignorance de son obligation à cet égard. Néanmoins cette omission involontaire n'a eu aucune incidence sur la relation de travail et n'était pas de nature à empêcher la poursuite de la relation contractuelle.

6) sur la facturation aux patients de médicaments non remboursés par la sécurité sociale

La salariée expose que par un courriel du 12 janvier 2009, le directeur régional lui a imposé de facturer directement aux patients de l'établissement les médicaments non remboursés par la sécurité sociale ce qui selon elle est contraire à l'article L.5126-2 alinéa 3 du code de la santé publique qui n'autorise les pharmacies à usage interne à effectuer la vente de médicaments que de manière exceptionnelle et après autorisation du directeur de l'ARS.

Néanmoins, la disposition alléguée est ainsi libellée : 'Exceptionnellement, en cas de nécessité le directeur général de l'agence régionale de santé peut autoriser pour une durée limitée les établissements publics de santé à vendre au détail des médicaments lorsqu'il n'y a pas d'autre source de distribution possible' et ne vise que les établissements publics de santé. Elle n'est donc pas applicable au centre de convalescence dans lequel la salariée exerçait s'agissant d'un établissement privé.

7) sur l'accès à la pharmacie à usage intérieur en son absence

La salariée soutient que l'employeur a autorisé sans son accord l'une de ses secrétaires à réaliser des tâches administratives au sein de la pharmacie à usage intérieur en son absence alors que l'accès à la pharmacie est strictement réservé aux personnes qui sont autorisées par le pharmacien gérant. Néanmoins, il ne résulte pas des courriers de la directrice de l'établissement que celle-ci ait reconnu ce fait. Au contraire, elle a indiqué dans son courrier du 23 avril 2009 qu'aucun membre du personnel n'avait effectué de travail sur le poste informatique de Mme [W] [S]. Ce grief n'est donc pas démontré.

8) sur l'utilisation de la pharmacie à usage intérieur à des fins personnelles

Il est acquis que l'infirmière responsable, Mme [N], a pris une poche à urine stérile dans la pharmacie, pour un usage personnel. Mme [W] [S] fait valoir que l'employeur à manqué à ses obligations à son égard en soutenant Mme [N] alors que celle-ci avait agi sans autorisation. Elle produit une attestation d'une autre infirmière de l'établissement, Mme [X], qui déclare avoir surpris sa collègue et en avoir référé à la directrice.

L'employeur soutient au contraire qu'il avait donné l'autorisation à Mme [N] de prendre la poche litigieuse pour son père, qu'il n'avait en la circonstance violé ni règle d'hygiène ni prescription médicamenteuse et qu'il n'avait pas eu un comportement dangereux.

L'attestation de Mme [X] est insuffisante à démontrer que Mme [N] aurait agi sans l'autorisation de l'employeur. Il n'est pas démontré que ce comportement aurait été dangereux et susceptible de mettre en cause la responsabilité de Mme [W] [S].

9) l'absence de relevé de température pour les médicaments à conservation à froid

Mme [W] [S] fait valoir que la température du réfrigérateur contenant les médicaments à conservation à froid devait en permanence être contrôlée ; qu'il existait auparavant un logiciel installé sur l'ordinateur portable de la direction qui avait disparu suite au remplacement de ce matériel ; qu'elle a alerté l'employeur de ce que cette situation était anormale mais que celui-ci avait refusé de remettre en place un dispositif permettant de sécuriser la conservation des médicaments en cause.

L'employeur répond que deux thermomètres étaient installés dans le réfrigérateur de la pharmacie permettant de faire un relevé quotidien des températures. Si, selon le guide des bonnes pratiques de pharmacie hospitalière, les équipements de stockage à basse température doivent être pourvus de systèmes de contrôle et de sécurité qualifiés tels qu'alarmes ou enregistrements, le refus de l'employeur de mettre en place un tel équipement ne faisait encourir aucune responsabilité pénale à la salariée, qui avait rempli ses obligations en signalant l'anomalie et qui n'était pas titulaire d'une délégation de pouvoirs. Mme [W] [S] ne prétend ni ne démontre avoir été amenée à refuser d'administrer des médicaments conservés dans le réfrigérateur de l'établissement après la disparition du dispositif d'enregistrement ce qui suffit à mettre en évidence que le refus de l'employeur de donner suite aux doléances de la salariée sur ce point n'était pas de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail et à justifier la prise d'acte.

10) sur les locaux dans lesquels Mme [W] [S] exerçait ses fonctions

Mme [W] [S] fait valoir qu'elle exerçait dans un local sans ouverture sur l'extérieur et éclairé artificiellement, ce en contravention avec les dispositions de l'article R.4213-3 du code du travail. Néanmoins, ces dispositions ne sont imposées qu'aux maîtres d'ouvrage dans le cadre de la conception des lieux de travail et non pas aux employeurs. Aucun manquement de ce chef ne saurait dès lors être reproché à l'employeur.

La salariée invoque également le fait qu'elle ne disposait pas du matériel nécessaire pour la manutention des médicaments mais ne rapporte pas la preuve de ce grief.

11) sur le sous effectif de la pharmacie à usage intérieur

La salariée expose que l'activité de la pharmacie a augmenté en raison de l'ouverture de 4 lits supplémentaires depuis juin 2008. Elle invoque son rapport d'activité de 2008 qui ne saurait faire la preuve de ses allégations.

12) sur les brimades subies lors des réunions des 27 mars et 27 mai 2009

Mme [W] [S] fait valoir que lors de ces réunions, elle a été prise à partie devant le personnel de l'établissement et que la directrice a porté plainte contre elle de façon mensongère. Néanmoins, elle ne produit aucun élément objectif justifiant de ses allégations sur ce point. Le fait que la plainte de la directrice a été classée sans suite ne suffit pas à la faire apparaître comme mensongère.

L'accumulation de griefs ne permet pas de pallier leur inconsistance. C'est donc par une exacte analyse que le conseil de prud'hommes a dit que la prise d'acte de la rupture produisait les effets d'une démission.

Sur la demande en paiement de l'indemnité de préavis

La conclusion de la lettre de rupture, par laquelle la salariée indiquait ne pas vouloir 'plus longtemps' consacrer son énergie à l'entreprise faisait apparaître que celle-ci n'avait pas l'intention d'exécuter le préavis dont elle était débitrice en sa qualité de démissionnaire ce que confirme le fait qu'elle a laissé sans réponse le courrier de l'employeur en date du 10 juin qui lui demandait de prendre position sur ce point. Faute d'avoir offert en temps utile d'exécuter son obligation à cet égard, Mme [W] [S] ne saurait prétendre au paiement de l'indemnité de préavis.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré,

REFORME le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [W] [S] de sa demande de rappel d'heures complémentaires et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens,

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la SA MEDICA FRANCE venant aux droits de la SARL ETABLISSEMENT SUZANNE à payer à Mme [W] [S] la somme de 324,50€ à titre de rappel d'heures complémentaires outre 32,45 € au titre des congés payés afférents,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 10/06933
Date de la décision : 08/02/2012

Références :

Cour d'appel de Lyon SB, arrêt n°10/06933 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-08;10.06933 ?
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