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19/01/2012 | FRANCE | N°10/03030

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 19 janvier 2012, 10/03030


R.G : 10/03030

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A
ARRET DU 19 Janvier 2012
Décision du tribunal de commerce de LyonAu fond du 06 avril 2010

RG : 2009J1842

APPELANTE :
SAS TRANSPALETTES SERVICESZ. I. des Estroublans4 rue de Vienne13127 VITROLLES

représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE
assistée de la SCP ASA, avocats au barreau de MARSEILLE

INTIMEES :

SA KBC LEASE France55 avenue Maréchal Foch69006 LYON

représentée par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre
assistée de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocats au barr

eau de LYON,

SARL DATA BUROChemin du ClosB. P. 613390 AURIOL

représentée par Maître Alain RAHON
assistée de Maître Jé...

R.G : 10/03030

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A
ARRET DU 19 Janvier 2012
Décision du tribunal de commerce de LyonAu fond du 06 avril 2010

RG : 2009J1842

APPELANTE :
SAS TRANSPALETTES SERVICESZ. I. des Estroublans4 rue de Vienne13127 VITROLLES

représentée par la SCP BAUFUME - SOURBE
assistée de la SCP ASA, avocats au barreau de MARSEILLE

INTIMEES :

SA KBC LEASE France55 avenue Maréchal Foch69006 LYON

représentée par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre
assistée de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocats au barreau de LYON,

SARL DATA BUROChemin du ClosB. P. 613390 AURIOL

représentée par Maître Alain RAHON
assistée de Maître Jérôme ACHILLI, avocat au barreau de MARSEILLE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 29 Juillet 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 04 Novembre 2011
Date de mise à disposition : 19 Janvier 2012
Audience présidée par François MARTIN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :- Michel GAGET, président- François MARTIN, conseiller- Philippe SEMERIVA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire .

* * * * *EXPOSÉ DU LITIGE

La société Transpalettes Services a pris en location auprès de la société KBC Lease un copieur fourni par la société Data Buro et dont cette dernière devait assurer l'entretien.

Les loyers convenus n'étant pas réglés, le loueur, après avoir mis la société Transpalettes en demeure de s'exécuter, l'a assignée au contradictoire de la société Data Buro en résiliation du contrat de location et paiement des sommes prévues en pareil cas.
Le jugement entrepris a constaté le jeu de la clause résolutoire aux torts de la société Transpalettes et l'a condamnée à payer à la société KBC Lease la somme de 75 303,88 euros avec intérêts de droit à compter du 2 mars 2009 et celle d'un euro au titre de la clause pénale ; il l'a en outre condamnée à restituer le matériel, sous astreinte dont le tribunal s'est réservé la liquidation, mis hors de cause la société Data Buro, débouté les sociétés Transpalettes et KBC Lease de leurs demandes à l'encontre de cette dernière, débouté la société Data Buro de ses propres demandes, refusé l'exécution provisoire et mis à la charge de la société Transpalettes des indemnités de 500 et 1 000 euros, respectivement au profit des sociétés KBC Lease et Data Buro, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
*

Appelante principale, la société Transpalettes soutient :

- qu'elle a exercé le droit de rétractation prévu à l'article L. 121-25 du code de la consommation et en tout cas résilié le contrat de fourniture, de sorte que le contrat de location est caduc,

- que la livraison du matériel n'est pas intervenue, les documents produits par la société KBC Lease procédant d'une escroquerie,

- qu'il n'a d'ailleurs pas été donné suite à sa sommation d'indiquer quel avait été le sort de ce matériel,
- que le loueur ne s'est pas prévalu de la résolution du contrat à la suite de la mise en demeure, et qu'en toute hypothèse cette faculté unilatérale est abusive au regard de l'article R. 132-1 8o du code de la consommation,
- que les clauses indemnitaires, qui constituent des clauses pénales, sont abusives au sens de l'article R. 132-2 de ce code et qu'il n'est en réalité aucun préjudice,
- que seules sont fautives la société Data Buro, pour avoir fait croire que le matériel devait être intégralement financé alors qu'il s'agissait essentiellement de racheter le solde d'un contrat antérieur, et la société KBC Lease, pour avoir manqué à son devoir de mise en garde ainsi qu'à son obligation de contracter de bonne foi, pour s'être rendue complice de manoeuvres frauduleuses et pour avoir pratiqué une politique visant à alourdir les charges d'une entreprise en difficulté, voire à la ruiner,
- qu'en toute hypothèse, la société Data Buro doit l'indemniser de son préjudice.
Elle demande d'infirmer le jugement, de rejeter les demandes formées à son encontre et de condamner la société Data Buro à lui payer une somme de 50 361,17 euros correspondant, conformément au bon de commande du 26 novembre 2008, au solde du contrat de location antérieurement conclu avec la société Sagem Lease, de condamner la société KBC Lease à lui payer une somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure particulièrement abusive, et les deux parties adverses à lui payer la somme de 3 000 euros chacune pour ses frais irrépétibles.
*

La société KBC Lease fait valoir :

- que les textes invoqués par la société Transpalettes ne sont applicables qu'à un consommateur,
- qu'en l'état d'une stipulation de durée ferme et irrévocable, le locataire qui a signé sans réserves le procès-verbal de réception du matériel ne pouvait résilier le contrat de location,
- que les griefs adressés au fournisseur ne lui sont pas opposables,
- que la clause résolutoire a régulièrement produit ses effets,
- que la clause pénale n'est pas excessive.
Elle demande de confirmer le jugement, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité de résiliation, de condamner la société Transpalettes à lui verser à ce titre une somme de 80 946,80 euros, avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 2 mars 2009, subsidiairement, de condamner la société Data Buro et la société Transpalettes à lui payer une somme de 74 593,47 euros à titre de dommages-intérêts et en tout état de cause de relever à 1 200 euros le montant de l'indemnité prévue à l'article 700 du code de procédure civile.
*
La société Data Buro expose qu'elle a déféré à ses obligations et que la société Transpalettes, qui a rompu le contrat unilatéralement et sans motif, ne saurait se prévaloir d'une protection par le code de la consommation.
Elle conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de la société Transpalettes à lui payer la somme de 1 620 euros en réparation du préjudice résultant de l'empêchement à l'exécution du contrat d'entretien complétant le contrat de fourniture, celle de 3 000 euros sur le fondement de l'article 1147 du code civil et celle de 1 500 euros au titre des frais irrrépétibles.
* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

La société Transpalettes a signé le 1er décembre 2008 un document attestant que le matériel réceptionné et installé est conforme aux spécifications indiquées dans le contrat de location et qu'il est en parfait état de fonctionnement.

En produisant ce procès-verbal, fut-il à son en-tête, la société KBC Lease ne se constitue pas une preuve à elle-même, mais oppose à son cocontractant une pièce valable et contraignante.
La société Transpalettes fait cependant exactement valoir que le bon de livraison, daté du 3 décembre 2008, établit que le matériel litigieux n'a pas été livré, motif pris de la résiliation, prétendument intervenue entre-temps, du contrat de fourniture et d'entretien.
Il en résulte donc qu'elle a adressé au loueur le document conventionnellement défini comme propre à déclencher le paiement du prix, alors même que les conditions d'un tel envoi n'étaient pas réunies.
Or, le contrat de location stipule que si le locataire transmet ce procès-verbal sans avoir reçu les équipements, il engage sa responsabilité et devra au loueur réparation du préjudice subi par ce dernier.
Dans la mesure où la société KBC Lease a effectivement réglé le prix à la société Data Buro, l'entier préjudice résultant de la perte des sommes attendues de ce financement sous forme de paiement de l'intégralité des loyers prévus au contrat, conclu pour une durée ferme et définitive de soixante-trois mois, est intégralement consommé.
Si la société KBC Lease n'est pas en droit, en l'état des termes du contrat, d'en exiger l'exécution, elle est fondée à soutenir qu'elle est créancière de dommages-intérêts à concurrence des loyers ainsi prévus, soit la somme de 74 593,47 euros qu'elle demande à titre subsidiaire.
En revanche, ce paiement n'est dû que par le preneur, dont la défaillance est à l'origine de l'inexécution du contrat, et non par le fournisseur.
Il ne s'agit pas là d'indemnité de résiliation ou de clause pénale, de sorte que les moyens pris de la prétendue irrégularité de la résiliation ou du caractère manifestement excessif des sommes réclamées sont inopérants.
Enfin, une société commerciale par la forme n'est pas fondée à invoquer l'application des articles L. 132-1, R. 132-1, 8o et R. 132-2 du code de la consommation, qui ne s'appliquent qu'aux contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs.

Les autres parties aux contrats n'ont commis aucune faute :

- la société KBC Lease n'était tenue d'aucune obligation de mise en garde à l'égard d'un professionnel averti, moins encore dans le cadre d'une opération très simple et dont il n'est pas prouvé qu'elle était susceptible de générer un niveau d'endettement sur lequel il convenait que l'attention du preneur soit attirée, cette intervention ne pouvant pas plus s'analyser en l'octroi d'un crédit ruineux ; en toute hypothèse, il n'est pas soutenu que la société KBC Lease aurait eu sur la situation du preneur des informations que ce dernier pouvait légitimement ignorer,
- l'allégation selon laquelle le matériel aurait été vendu à un prix correspondant à "six fois sa valeur réelle" n'est appuyée sur aucun élément, et d'ailleurs les prix sont libres et il appartient à un professionnel de comparer les tarifs,
- rien n'établit que les documents auraient été signés en blanc et la société Transpalettes ne saurait au demeurant se prévaloir en ce cas de sa propre faute,
- il résulte du bon de commande que cette dernière annulait et remplaçait la commande précédente, de sorte que la société Transpaelttes n'est pas fondée à soutenir que la société Data Buro aurait fait croire que le matériel devait être intégralement financé alors qu'il s'agissait essentiellement de racheter le solde d'un contrat antérieur.
Aucun manquement à la bonne foi, aucune manoeuvre pouvant évoquer un dol, moins encore une escroquerie, ne sont établis : la société Transpalettes a seulement émis un faux procès-verbal en concluant un contrat dont elle a ensuite voulu se dégager, pour des motifs d'ailleurs inconnus puisque sa lettre de "rétractation" n'en évoque pas.

Or, elle ne disposait pas de ce droit de rétractation, car :

- comme l'a retenu le tribunal, elle a loué le matériel pour les besoins de l'entreprise, l'opération portant sur un photocopieur qui ne pouvait qu'être destiné à traiter ses documents commerciaux ayant un rapport direct avec son activité commerciale de vente, achat, réparation et location de chariots élévateurs,
- personne morale, elle n'est pas éligible à la protection instaurée par l'article L. 121-21 du code de la consommation.
En refusant la livraison, la société Transpalettes a don commis une faute à l'égard de la société Data Buro par refus d'exécution de leur convention ; elle en doit réparation par paiement de dommages-intérêts couvrant le bénéfice attendu de la prestation complémentaire d'entretien, à concurrence du montant, indiscuté, de 1 620 euros.
Cette somme répare l'entier préjudice subi ; il n'y a pas lieu à la condamnation aux dommages-intérêts supplémentaires que demande la société Data Buro.

Dans la mesure où il n'est pas établi que la société Transpalettes détient le matériel financé, la condamnation sous astreinte à en assurer la restitution ne peut être maintenue.

Aucune circonstance ne conduit à écarter l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,
- Confirme le jugement en ce qu'il a statué sur les dépens ainsi que sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
- Le réforme pour le surplus,
- Statuant à nouveau, condamne la société Transpalettes Services à payer à la société KBC Lease France une somme de 74 593,47 euros à titre de dommages-intérêts,
- Déboute la société KBC Lease de ses demandes dirigées contre la société Data Buro,
- Condamne la société Transpalettes Services à payer à la société Data Buro une somme de 1 620 euros à titre de dommages-intérêts,
- Déboute la société Transpalettes Services de ses demandes,
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transpalettes Services à payer à la société KBC Lease la somme de 1 000 euros et à la société Data Buro la somme de 1 000 euros,
- Condamne la société Transpalettes Services aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, par ceux des mandataires des parties qui en ont fait la demande.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Joëlle POITOUX Michel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 10/03030
Date de la décision : 19/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Analyses

Pourvoi n° N1218551 du 03 mai 2012 (AROB)


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2012-01-19;10.03030 ?
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