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09/01/2012 | FRANCE | N°10/00085

France | France, Cour d'appel de Lyon, 2ème chambre, 09 janvier 2012, 10/00085


R. G : 10/ 00085
COUR D'APPEL DE LYON 2ème chambre ARRET DU 09 Janvier 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 16 décembre 2009
RG : 09/ 10061

X...
C/
Y...

APPELANT :
M. Michel X... né le 16 Juillet 1960 à OWANDO (CONGO)... 77870 VULAINES-SUR-SEINE
représenté par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre, avoués à la Cour assisté de Me Joseph NSIMBA, avocat au barreau de l'ESSONNE

INTIMES :
M. Hervé Y... né le 25 Février 1970 à BRON (69500)... 69003 LYON
représenté par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à

la Cour assisté de Me Chantal PARET, avocat au barreau de LYON

En présence du Ministère Public, représenté p...

R. G : 10/ 00085
COUR D'APPEL DE LYON 2ème chambre ARRET DU 09 Janvier 2012
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 16 décembre 2009
RG : 09/ 10061

X...
C/
Y...

APPELANT :
M. Michel X... né le 16 Juillet 1960 à OWANDO (CONGO)... 77870 VULAINES-SUR-SEINE
représenté par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre, avoués à la Cour assisté de Me Joseph NSIMBA, avocat au barreau de l'ESSONNE

INTIMES :
M. Hervé Y... né le 25 Février 1970 à BRON (69500)... 69003 LYON
représenté par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour assisté de Me Chantal PARET, avocat au barreau de LYON

En présence du Ministère Public, représenté par Madame ESCOLANO, substitut général
Date de clôture de l'instruction : 23 Novembre 2011 Date des plaidoiries tenues en chambre du conseil : 24 Novembre 2011 Date de mise à disposition : 09 Janvier 2012
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Anne Marie DURAND, président-Catherine CLERC, conseiller-Isabelle BORDENAVE, conseiller, assistées pendant les débats de Christine SENTIS, greffier.
A l'audience, Isabelle BORDENAVE a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire, rendu publiquement, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Anne Marie DURAND, président et par Anne-Marie BENOIT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Ossya Augy X... est née le 25 mars 1990 à Gonesse de Michel X... qui l'a reconnue le 26 mars 1990 et Lohota Z... qui l'a reconnue le 22 octobre 1990.
Par requête en date du 17 avril 2008, monsieur Hervé Y... a saisi le tribunal de grande instance de Lyon, exposant qu'il a contracté mariage, le 23 janvier 1999, par devant l'officier d'état civil de la Mairie de Lyon 3ème (Rhône), avec Madame Lohota Z..., née le 15 mai 1974 à Brazaville (Congo).
Il expose qu ‘ avant même son mariage il vivait maritalement avec cette dernière depuis 1993, qu'il a ainsi accueilli la fille de son épouse, Ossya Augy X..., depuis qu'elle a l'âge de quatre ou cinq ans, qu'il l'élève comme si elle était sa propre fille, s'occupe de son éducation et est très attaché à elle.
Monsieur Y... a demandé au tribunal de grande instance de prononcer l'adoption simple précisant que son épouse, madame Lohota Z... était tout à fait d'accord pour qu'il adopte sa fille et que cette dernière souhaitait prendre le nom de Y....
Il a formulé en conséquence cette demande et sollicité que mention du jugement à intervenir soit ordonnée, à la diligence du parquet, conformément aux dispositions de l'article 354 du code civil, en marge de l'acte de naissance d'Ossya Augy X..., née le 25 mars 1990 à Gonesse, sur les registres d'état civil et qu'il soit dit que, sur tous les extraits qui pourront être délivrés par l'officier d'état civil, l'adoptée sera portée comme s'appelant Ossya Augy Y....
Par jugement du 16 décembre 2009, la chambre de la famille du tribunal de grande instance de Lyon a prononcé, avec toutes conséquences de droit, l'adoption simple de Ossya Augy X... par Hervé Y..., dit qu'en application des dispositions de l ‘ article 363 du code civil l'adoptée porterait désormais le nom de Y..., dit que le jugement d'adoption prendrait effet à compter du jour du dépôt de la requête, soit le 12 août 2009, ordonné les formalités de transcription et laissé les dépens à la charge du requérant.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 décembre 2009, reçue au greffe le 4 janvier 2010, le conseil de monsieur Michel X... a relevé appel de ce jugement qui avait été notifié à son client le 29 décembre 2009.
Par conclusions du 29 avril 2010, il demande que son appel soit déclaré recevable et bien fondé, que le jugement déféré soit réformé en toutes ses dispositions, que la demande d'adoption simple soit purement et simplement rejetée, considérant que le consentement donné par madame Lohota Z... est insuffisant, en l'absence de son propre consentement.
Il indique s'opposer à cette adoption de sa fille par monsieur Y..., dont il sollicite condamnation à lui verser, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1500 euros, réclamant sa condamnation aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SCP DUTRIEVOZ.
Il rappelle avoir reconnu l'enfant, avoir toujours pris au sérieux son rôle de père et rappelle que Ossya Auguy, qui vivait avec sa mère au domicile des grands parents maternels, a été ensuite accueillie par le service d'aide sociale à l'enfance du Val d'Oise jusqu'en 1993, avant que le juge des enfants de Pontoise ne donne main levée de la mesure, en confiant l'enfant à la mère, et en lui accordant un droit de visite et d'hébergement.
Il indique que le juge aux affaires matrimoniales de Lyon, le 27 janvier 1994, a maintenu l'exercice en commun de l'autorité parentale, avec résidence habituelle chez la mère et organisation de son droit de visite et d'hébergement, soutenant que la mère a fait obstruction à l'exercice de ce droit et qu'elle cherche, au travers de la procédure d'adoption simple, à régler ses comptes avec lui.
Par conclusions en réponse du 25 février 2011, monsieur Hervé Y... sollicite confirmation de la décision, et condamnation de monsieur X... à lui verser, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 000 euros, réclamant sa condamnation aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SCP LAFFLY WICKY.
Par conclusions du 8 avril 2011, monsieur le procureur général a conclu à l'infirmation de la décision, aux motifs que la procédure d'adoption simple s'inscrit dans une histoire complexe, au cours de laquelle le père n'a cessé de se manifester pour exercer ses droits, et que la mineure, âgée de 17 ans et demi au jour de l'adoption, peut manifester son affection pour celui qui l'a élevée autrement que par une mesure d'adoption, qui a pour effet de placer le beau père en rivalité avec le père biologique.
Par de nouvelles écritures du 15 novembre 2011, monsieur Y... a réitéré ses demandes.
Par conclusions en date du 22 novembre 2011, le conseil de monsieur X... a sollicité le rejet de ces écritures et des pièces communiquées le 21 novembre, invoquant une violation des dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile.
Par conclusions en réponse aux conclusions de rejet, monsieur Y... a demandé à la cour de déclarer cette demande de rejet de conclusions et pièces infondée.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément renvoyé pour les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives déposées.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 novembre 2011, l'affaire a été évoquée le 24 novembre et mise en délibéré ce jour.

MOTIFS DE LA DECISION
* Sur l'incident de procédure
Attendu que la clôture de la procédure a été fixée au 23 novembre 2011, monsieur Y... ayant signifié de nouvelles conclusions le 15 novembre, puis de nouvelles pièces le 21 novembre.
Qu'il apparaît que monsieur X... pouvait prendre connaissance de ces éléments avant la date de clôture, dès lors que les conclusions ne formalisent pas de nouvelles demandes et que les nouvelles pièces (8 à 18) correspondent pour partie à des documents qu'il avait lui même communiqués dans son dossier, pour partie à des pièces d'actualisation financière, et qu'il avait le temps, avant l'audience, de prendre connaissance des trois autres pièces constituées par une lettre de sa fille, Ossya Augy X..., établie le 17 octobre 2011, un document d'inscription à l'école, et un cahier de correspondance.
Qu'il sera débouté de la demande de rejet de ces pièces et conclusions.
* Sur le fond
Attendu qu'en application des dispositions combinées des articles 360, 361 et 348 du code civil, lorsque la filiation d'un enfant est établie à l'égard de son père et de sa mère, ceux-ci doivent consentir l'un et l'autre à l'adoption, l'enfant âgé de plus de treize ans devant par ailleurs lui même consentir personnellement à son adoption.
Que l'article 348-6 précise cependant que le tribunal peut prononcer l'adoption s'il estime abusif le refus de consentement opposé par les parents ou par l'un d'entre eux seulement, lorsqu'ils se sont désintéressés de l'enfant, au risque d'en compromettre la santé ou la moralité.
Attendu en l'espèce que la mineure a donné son consentement à adoption devant le greffier en chef du tribunal d'instance le 19 avril 2009, que sa mère, madame Lohota Z... s'est associée à la demande d'adoption et a établi une attestation en ce sens.
Qu'en revanche, le père, monsieur Michel X... a, dès le dépôt de la requête par monsieur Y..., en juillet 2008, fait connaître son opposition à cette procédure, refusant que sa fille puisse être adoptée par l'époux de sa mère.
Que nonobstant ce refus, l'adoption a été prononcée par le jugement déféré, lequel a, par ailleurs, fait droit à la demande visant à voir substituer le nom de l'adoptant à celui du père biologique.
Attendu qu'en application des textes susvisés et au regard du refus manifesté par le père, il apparaît que l'adoption ne pouvait être prononcée que s'il était établi que le refus était abusif et que le père s'était désintéressé de l'enfant au risque d'en compromettre la santé ou moralité.
Que monsieur X... conteste s'être désintéressé de sa fille et soutient que si les contacts ont été limités, cette situation est imputable à la mère, qui aurait fait en sorte de le priver de Ossya Augy, en rappelant les circonstances de la séparation, le placement de l'enfant, puis les décisions de justice intervenues.
Attendu que l'examen des pièces communiquées, et notamment le rapport d'enquête rédigé le 28 octobre 1993 par les services sociaux du conseil général du Rhône, permet de retenir que la séparation des parents d'Ossya Augy est intervenue avant même la naissance, monsieur X... étant parti et s'étant ensuite marié à Paris.
Que le même rapport précise que la mère de l'enfant, suite à cette naissance, étant rappelé qu'elle était alors mineure, a du quitter le domicile de ses parents, chez lesquels elle habitait, pour être hébergée avec le bébé dans un foyer, une ordonnance de placement provisoire du juge des enfants de Pontoise intervenant le 4 juin 1991.
Que par décision du 10 novembre 1992, le placement de l'enfant à l'aide sociale à l'enfance a été renouvelé par le juge des enfants, lequel avait accordé un droit de visite et d'hébergement à la mère, et un simple droit de visite au père, dans l'attente du retour d'une mesure d'enquête sociale.
Attendu que madame Lohota Z... a ensuite trouvé du travail et rencontré monsieur Y..., avec lequel elle est venue s'installer à Lyon, l'enfant étant rendue à la mère par jugement du juge des enfants de Pontoise du 23 août 1993.
Que le juge des enfants de Lyon, auquel le dossier d'assistance éducative avait été transféré, après avoir entendu les parents d'Ossya Augy le 20 avril 1994, a dit n'y avoir lieu à mesure d'assistance éducative.
Que préalablement, le juge aux affaires matrimoniales, saisi par le père, avait, par décision du 27 janvier 1994, maintenu l'exercice conjoint de l'autorité parentale, fixé la résidence habituelle de l'enfant chez la mère, organisé les droits de visite et d'hébergement du père un week end par mois et moitié des vacances scolaires, et mis à la charge de celui ci une pension alimentaire.
Attendu que s'il fait état de démarches entreprises pour sa fille entre sa naissance et la fin du placement, monsieur X... n'a pas démenti ne pas avoir entretenu de relations avec elle depuis 1995, comme indiqué dans les conclusions du requérant.
Que tout en soutenant que cette situation serait la conséquence du comportement de la mère, qui l'aurait privé de l'enfant, il ne fournit absolument aucun élément en ce sens, et notamment ne justifie nullement de dépôts de plainte pour non représentation d'enfant, ni même de simples demandes adressées à la mère pour exercer, comme stipulé à la décision du 27 janvier 1994, son droit de visite et d'hébergement.
Qu'il communique comme uniques pièces pour manifester son intérêt pour sa fille, une attestation de prise en charge par son centre de sécurité sociale à compter de mars 2006, un courrier de la CPAM du Val de Marne relatif à un examen bucco dentaire d'Ossya Augy à la veille de ses 16 ans, quatre photographies de la jeune fille.
Attendu qu'il apparaît, au regard des pièces produites par le requérant, et notamment à la lecture des attestations, que monsieur X..., après s'être manifesté jusqu'à la dernière décision de justice en 1994, n'a pas montré d'intérêt pour sa fille, n'exerçant pas son droit de visite et d'hébergement et, ce point n'ayant pas été démenti, ne versant plus la pension alimentaire.
Qu'au regard de ces divers éléments, il apparaît que les conditions visées par l'article 348-6 du code civil sont réunies, et que le refus manifesté par monsieur X... à l'adoption simple de sa fille par l'époux de la mère est abusif, dès lors qu'il est suffisamment établi que celui ci s'est désintéressé matériellement et affectivement d'Ossya Augy depuis de très nombreuses années et que ce comportement pouvait conduire à compromettre la santé ou la moralité de l'enfant, dont la charge entière était assumée par sa mère.
Attendu qu'il apparaît que les conditions pour prononcer l'adoption simple par monsieur Y... de la jeune fille Augy, enfant de son épouse, sont réunies, et que par ailleurs, ainsi que l'exige l'article 353 du code civil, cette adoption est conforme à l'intérêt de la jeune fille, laquelle a été élevée par son beau père depuis de très nombreuses années, et partage la vie familiale avec ses deux demi frères, nés de l'union de sa mère et son beau père.
Attendu que le dernier alinéa de l'article 363 du code civil permet, dans le cadre d'une adoption simple, à la demande de l'adoptant, de décider que l'adopté ne portera que le nom de l'adoptant cette substitution de nom supposant l'accord de l'adopté, s'il est âgé de plus de treize ans.
Qu'en l'espèce monsieur Y... formule telle demande, Ossya Augy ayant également demandé à pouvoir porter le nom de Y....
Qu'il convient, au regard des éléments ci dessus rappelés, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à la demande de substitution du nom.
Attendu qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Que monsieur X..., qui succombe, sera condamné aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SCP LAFFLY WICKY
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Après débats en chambre du conseil après en avoir délibéré statuant contradictoirement, et en dernier ressort,
Dit n'y avoir lieu à rejeter les dernières conclusions et pièces déposées les 15 et 21 novembre 2011 par le conseil de monsieur Y...,
Confirme, par substitution de motifs, le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne monsieur X... aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la SCP LAFFLY WICKY.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame Anne-Marie DURAND, président et par madame Anne-Marie BENOIT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/00085
Date de la décision : 09/01/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2012-01-09;10.00085 ?
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