AFFAIRE PRUD'HOMALE
DOUBLE RAPPORTEURS
R. G : 11/ 00902
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 05 DECEMBRE 2011
SA COMAP
C/ X...
APPEL D'UNE DÉCISION DU : Conseil de Prud'hommes-Formation paritaire de LYON du 25 Janvier 2011 RG : F 09/ 03040
APPELANTE :
SA COMAP MR Y... Laurent, directeur des ressources humaines 16 Avenue Paul Santy BP 8211 69355 LYON CEDEX 08
comparant en personne, assistée de Me Jean-jacques DUFLOS de la SELAS DUFLOS et CARTIGNY ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substitué par Me OLLIER, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
Martine X... née le 23 Août 1957 à L'ARBRESLE (69) ...69380 CHESSY-LES-MINES
comparant en personne, assistée de Me Pascale REVEL de la SCP REVEL-MAHUSSIER et ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Octobre 2011
Didier JOLY, Président et Mireille SEMERIVA, Conseiller, tous deux magistrats rapporteurs, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré, assistés pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Didier JOLY, Président Hervé GUILBERT, Conseiller Mireille SEMERIVA, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 05 Décembre 2011 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
Martine X... a été engagée par la S. A. COMAP en qualité de secrétaire de direction pour la branche " maîtrise des fluides domestiques " (niveau IV, échelon 3, coefficient 285) suivant contrat écrit à durée indéterminée du 17 août 1992, soumis à la convention collective de la métallurgie du Rhône. Elle occupait en dernier lieu, le poste d'assistante de direction (niveau V, échelon 1, coefficient 305). La rémunération mensuelle brute moyenne de Martine X... calculée sur les douze derniers mois de travail s'élevait à 3 143, 29 €.
En 2005, la S. A. LEGRIS INDUSTRIES, société mère de la S. A. COMAP, a manifesté l'intention de céder ses actions. En mars 2006, celle-ci est passée sous le contrôle de la société AALBERTS INDUSTRIES, de droit néerlandais.
Le 13 juin 2007, Bernard BOUILLÉ, président directeur général, a informé la société AALBERTS INDUSTRIES de sa décision de faire valoir ses droits à la retraite. La société AALBERTS INDUSTRIES a désigné pour le remplacer Dominique Z..., qui a pris ses fonctions à l'automne 2007.
Par lettre circulaire du 18 décembre 2007, le nouveau président directeur général a informé les cadres dirigeants de la stratégie qu'il entendait suivre à compter du 1er janvier 2008.
Plusieurs cadres se sont trouvés en désaccord avec les orientations de Dominique Z... :
Pascal D..., directeur commercial et marketing, qui a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 6 septembre 2008 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, que la Cour a prononcée aux torts de l'employeur par arrêt du 21 avril 2011, Jean-Laurent E..., directeur industriel et technique, qui a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 2 avril 2008 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et qui a été licencié pour faute grave le 22 avril 2008, Franck F..., directeur financier, qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 25 février 2008 et qui a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 17 juillet 2008.
Par lettre remise en main propre le 8 juin 2009, la société COMAP a convoqué Martine X... en vue d'un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 17 juin 2009, et lui a notifié par la même sa mise à pied à titre conservatoire.
La salariée s'est trouvée en congé de maladie du 15 au 30 juin 2009.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 juin 2009, la société COMAP a notifié à Martine X... son licenciement pour faute grave dans les termes suivants :
Nous faisons suite à l'entretien que nous avons eu avec vous le 17 juin dernier, au cours duquel vous étiez assistée et où nous vous avons exposé les motifs qui nous ont conduits à envisager votre licenciement.
... Lors de cet entretien nous avons relaté les faits, à savoir l'envoi d'un courriel de votre part, le vendredi 8 juin dernier, à M. Franck F..., ancien Directeur financier de la société, sorti de nos effectifs le 23 mai 2008.
Nous avons eu connaissance de cet envoi puisque vous l'avez adressé, par erreur, de la boîte mail de M. Dominique Z..., Président directeur général de notre société dont vous êtes l'assistante.
Comme nous vous l'avons exposé, vous avez ainsi communiqué à l'extérieur de la société, des renseignements confidentiels et émis des propos dénigrants vis-à-vis de l'entreprise et de ses équipes, faits déjà graves en eux-mêmes mais d'autant plus inacceptables au cas particulier, dès lors que vous n'êtes pas sans savoir que Monsieur Franck F..., ancien salarié, a engagé un important contentieux avec notre société et que les éléments à lui transmis sont de nature à alimenter son dossier contre notre société. Ces faits sont d'autant plus graves et intolérables que votre fonction d'assistante du Président directeur général vous impose une obligation de réserve renforcée.
Au cours de cet entretien, vous avez reconnu les faits mais en tentant d'en minimiser la portée. Nous vous avons demandé la possibilité d'ouvrir votre messagerie en votre présence afin de savoir si vous aviez envoyé précédemment d'autres courriels de ce type. Vous avez demandé à pouvoir prendre contact avec votre conseil et nous en avons pris acte et attendu votre réponse.
Celle-ci n'étant pas intervenue à la date du vendredi 19 juin, nous vous avons adressé un courrier ce même jour pour vous demander de passer à mon bureau pour l'ouverture de votre messagerie en notre présence. Vous nous avez répondu le 19 juin au soir que vous ne viendriez pas.
Vous avez été dûment appelée pour l'ouverture, en notre présence, de votre messagerie professionnelle et, au regard des évènements judiciaires rappelés ci-dessus et des risques que vos messages font courir à l'entreprise, nous nous réservons la possibilité d'en prendre connaissance, de les imprimer et, le cas échéant, de nous en prévaloir ultérieurement.
... Ainsi, nous maintenons le caractère de gravité lié à votre écrit et nous vous notifions votre licenciement pour faute grave.
Néanmoins, pour tenir compte de votre ancienneté et de votre situation personnelle, nous consentons à ne pas appliquer à votre égard, la totalité des conséquences financières d'une telle rupture. A ce titre, nous vous verserons, à titre exceptionnel, au terme de votre contrat de travail, soit à réception de cette lettre, une somme équivalente à l'indemnité de licenciement qui vous aurait été due si votre licenciement n'avait pas été motivé par une faute grave.
En fait, le courriel reproché à la salariée a été envoyé le vendredi 5 juin 2009, et non le vendredi 8 juin 2009, comme il a été indiqué à la suite d'une erreur matérielle.
Martine X..., qui avait accès à la boîte e-mail du président directeur général, a émis le vendredi 5 juin 2009 à 15 heures 59, à partir de cette boîte, un courrier électronique destiné à Franck F...et ainsi rédigé :
Salut Franck, J'espère que tout va bien pour toi. Je profite de cet fin d'après-midi, juste avant le départ en week-end pour souffler un peu et te faire un petit coucou. Je ne sais si tu as reçu les dernières nouvelles Comap.... elles sont assez nombreuse actuellement... Tout d'abord il y a eu le départ de Mark H..., sans crier gare... il a quitté ses fonctions du jour au lendemain et l'annonce Aalberts est tombée : MHO a quitté le Groupe pour des " divergences de vues " ! ! ! ! Le COMEX de COMAP, euphorique, est allé fêter la nouvelle chez Rouge Tendance mais ils ont quelque peu déchanté depuis : C'est Wim I...qui a repris en direct la fonction de MHO et là, les choses ont tout de suite paru moins sympa. En ce moment, il fait le tour des usines et mène la vie dure à notre COMEX qui se plaint maintenant du " virage à 180o " qu'il semble vouloir opérer par rapport à ce que pratiquait MHO ! ! ! Aujourd'hui, c'est Wim J...qui quitte notre COMEX-dommage il venait juste de se commander son nouveau mobilier parce qu'il ne se sentait pas bien dans le bureau de Pascal, le pauvre (en même temps, il n'a jamais vraiment été là : partagé entre ses fonctions Henco et ses fonctions Comap).... Un nouveau devrait prochainement faire son entrée ! Patrice K...nous quitte aussi... en principe d'ici la fin du mois. C'est le dernier jour aujourd'hui d'Olivier L...: il a trouvé un autre job et malgré le " chagrin " de Cédric M...(c'est incroyable comme il s'était " entiché " de lui) il part vers de nouveaux horizons (je crois du côté d'Annecy). Audrey a finalement décidé de le suivre et elle quittera COMAP fin juillet après avoir conclu un " accord " pour bénéficier du chômage et avoir, ainsi le temps, de rechercher un autre poste.... Les économies étant de rigueur (enfin certaines !) Olivier n'est pas remplacé mais c'est Olivier N...qui reprendra une partie de son job et Didier O...(qui pourrait bien être le nouveau chouchou de Cédric) qui reprendra en plus du contrôle de gestion Gaz le contrôle de gestion pour toute l'Italie. En ce qui concerne Audrey, son travail sera là aussi réparti entre tous... et veinarde, j'ai hérité du suivi de 2 indicateurs (dont personne ne voulait) : je suis absolument ravie parce que Dominique m'a bien expliqué que c'était pour mon bien, pour me sortir de ma routine de 18 ans d'ancienneté ! ! ! ! ! Sinon, tu t'en doutes, l'ambiance n'est pas terrible, mais il faut bien faire avec.... Bon, mon taxi (en fait mon ami, Christian) vient de m'avertir qu'il m'attendait en bas... alors je vais plier. La semaine ne comptait que 4 jours mais c'est dingue ce qu'elle m'a parue longue ! ! ! Gros bisous à toi et à toute ta petite famille.... Martine PS : Le ventre de ma Cendrillon devient tout rond et j'avoue que je suis trop contente de devenir enfin grand mère (au moins c'est une consolation dans " ce monde de brutes " et un peu d'amusement à essayer de deviner le prénom qu'ils ont choisi et se refusent à nous dévoiler avant la naissance de la jeune fille ! ! ! !
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 juillet 2009, Martine X... a contesté les motifs de son licenciement.
Martine X... a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 20 juillet 2009.
* * * LA COUR,
Statuant sur l'appel interjeté le 8 février 2011 par la S. A. COMAP du jugement rendu le 25 janvier 2011 par le Conseil de prud'hommes de Lyon (section industrie) qui a :
- dit et jugé que le licenciement de Martine X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse,- en conséquence, condamné la société COMAP à verser à Martine X... les sommes suivantes : 9 409, 87 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 942, 99 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis, 1 384, 36 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, 138, 44 € bruts à titre de congés payés afférents, 34 500 € à titre de dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail sans cause réelle et sérieuse, 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour perte de chance de faire valoir son droit individuel à la formation,- condamné la société COMAP à verser à Martine X... la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,- dit qu'il y a lieu à exécution provisoire de droit,- condamné la société COMAP à rembourser au POLE EMPLOI la somme correspondant à 3 mois d'indemnités de chômage que Martine X... a perçues entre le 23 juin 2009 et la date de prononcé du jugement,- condamné la société COMAP aux entiers dépens de l'instance ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 11 octobre 2011 par la SA COMAP qui demande à la Cour de :
- réformer purement et simplement le jugement dont appel, A titre principal,- constater, dire et juger que le licenciement prononcé à l'encontre de Martine X... repose sur une faute grave,- constater, dire et juger que c'est à bon droit que la lettre de licenciement ne comporte pas la mention relative aux droits à la formation. A titre subsidiaire, si la Cour devait rejeter l'existence d'une faute grave :- constater, dire et juger que le licenciement prononcé à l'encontre de Martine X... repose sur une cause réelle et sérieuse,- en conséquence, limiter l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 9 409, 87 € outre 942, 99 € au titre des congés payés y afférents,- limiter les rappels de salaire afférents à la mise à pied conservatoire à la somme de 1 384, 36 € outre 138, 44 € au titre des congés payés y afférents,- réduire le montant des dommages et intérêts alloués à Martine X... du fait de l'absence de mention du droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement à 500 €. A titre infiniment subsidiaire, si la Cour devait considérer le licenciement sans cause réelle et sérieuse :- limiter les dommages et intérêts alloués à Martine X... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à de plus justes proportions,- réduire le montant des dommages et intérêts alloués à Martine X... du fait de l'absence de mention du droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement à 500 €. Dans tous les cas :- débouter Martine X... de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,- condamner Martine X... au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 11 octobre 2011 par Martine X... qui demande à la Cour de :
- dire et juger le licenciement de Martine X... infondé,- en conséquence, condamner la société COMAP au paiement des sommes suivantes : 12 573, 16 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1 257, 31 € de congés payés afférents, 1 384, 36 € à titre de rappel de salaires sur mise à pied conservatoire, 138, 44 € de congés payés afférents, 55 000 € nets de CSG et de CRDS de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 13 711 € à titre d'indemnité de licenciement, 3 000 € nets de CSG CRDS de dommages et intérêts pour perte de chance de faire valoir son droit individuel à la formation,- condamner la société COMAP au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Sur le motif du licenciement :
Attendu, d'abord, que si l'employeur est tenu par les dispositions de l'article L 1232-6 du code du travail d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement, ces motifs ne fixent les limites du litige qu'à l'égard de l'employeur qui l'a rédigée ; qu'il appartient au juge de rechercher, lorsqu'il y est invité par le salarié, si les motifs énoncés sont la véritable cause de la rupture, ce qui ne peut résulter seulement de la réalité des faits imputés au salarié et de leur caractère fautif ;
Qu'il ne ressort cependant pas des pièces et des débats que Martine X..., alors âgée de cinquante-et-un ans, a été en réalité licenciée dans un souci d'économie et de rajeunissement de l'équipe ; que l'intimée, qui occupait le même poste depuis seize ans, ne tirait de cette antériorité aucun droit acquis au maintien dans les mêmes fonctions ; que la proposition faite à Audrey P..., en juillet 2008, de prendre le poste d'assistante de direction à la direction générale n'impliquait pas le départ de Martine X... de la société ; qu'il était légitime, dans le contexte précédemment décrit, de la part de Dominique Z..., de ne pas souhaiter conserver à ses côtés l'assistante de direction de son prédécesseur ; que seul le peu de goût de la salariée pour le changement, souligné par l'ancien président directeur général lors de l'évaluation de mars 2007, peut expliquer que l'intéressée ait interprété le projet, d'ailleurs avorté, de Dominique Z... comme une volonté d'éviction de l'entreprise ;
Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ;
Qu'en l'espèce, Martine X..., qui a utilisé la messagerie de son président directeur général, à laquelle elle avait accès dans un cadre strictement défini, n'est pas fondé à soutenir que le courriel adressé par cette voie à Franck FANNEAU avait un caractère privé ; qu'il est d'ailleurs significatif que les nouvelles personnelles communiquées soient reléguées en post-scriptum ; que la liberté d'expression dont jouit le salarié a pour limite l'obligation de loyauté qui met obstacle à la diffusion par ce dernier d'informations professionnelles confidentielles à l'extérieur de l'entreprise ; qu'entrent dans cette catégorie non seulement les informations confidentielles par leur contenu, mais aussi celles qui, quel que soit leur objet, n'ont été confiée au salarié, dans le cadre de la relation de travail, qu'en raison de la nature même de ses fonctions ; que le départ de Wim Q..., directeur commercial et membre du COMEX a été annoncé le 8 juillet 2009 par note du président directeur général et le premier entretien prévu par l'article L 1237-12 du code du travail en cas de rupture conventionnelle du contrat de travail a réuni Audrey P..., assistante de direction, et son employeur le 11 juin 2011 seulement ; que Martine X... ne communique aucun élément démontrant que ces départs étaient " notoires " le 5 juin 2009 ; que, d'une part, Pascal D..., qui se trouvait en congé de maladie depuis le 18 septembre 2008 et dont la messagerie professionnelle avait été désactivée, ne pouvait avoir une connaissance directe et personnelle des faits sur lesquels il a attesté le 5 juin 2010 ; qu'en outre, le litige qui l'opposait à la S. A. COMAP devant le Conseil de prud'hommes de Lyon conduit à douter de son objectivité lorsqu'il qualifie d'anecdotiques les informations communiquées par Martine X... ; que, d'autre part, Audrey P..., qui avait déjà délivré une attestation à l'intimée le 8 juillet 2009, s'est souvenue le 5 septembre 2011, un mois avant l'audience de la chambre sociale, que son responsable Patrick R...l'avait mise en copie, le 5 juin 2009, d'un courriel adressé à Martine X... pour lui demander de reprendre le suivi d'un indicateur qu'elle gérait jusqu'alors ; que le témoin ajoute qu'il lui avait été demandé également de transmettre un autre indicateur à Sophie S..., assistante du service achats ; qu'outre le caractère tardif et par conséquent suspect de cette attestation, la Cour relève qu'il n'y est question que d'une diffusion restreinte à deux personnes, dont Martine X..., qui aurait le jour même fait sortir l'information de l'entreprise ; que tout autant que de la nature confidentielle de l'information transmise, le manquement à l'obligation de loyauté peut résulter d'une présentation d'informations apparemment objectives, de nature à déconsidérer les personnes évoquées ; que les membres du COMEX sont présentés dans le courriel de Martine X... comme des cadres supérieurs versatiles, passant d'un jour à l'autre de l'euphorie provoquée par le départ de Mark H...au désenchantement, commandant un nouveau mobilier pour ne pas l'utiliser (Wim Q...), ou se consolant du chagrin causé par un départ en choisissant un nouveau " chouchou " (Cédric M...) ; qu'il y a lieu, surtout, de prendre en considération, en l'espèce, l'identité du destinataire du message litigieux, c'est-à-dire un ancien directeur financier qui avait fait citer la S. A. COMAP devant le Conseil de prud'hommes de Lyon, et celle de son expéditeur, l'assistante du président directeur général ; que sur le lieu et pendant le temps de son activité professionnelle, Martine X... ne pouvait, a fortiori avec le matériel informatique de Dominique Z..., avoir, à l'insu de ce dernier, des échanges avec Franck F..., de nature à donner à l'ancien directeur financier une vision négative de la société qu'il avait quittée et à le conforter dans le bien fondé de sa démarche d'opposition au nouveau dirigeant ; qu'au temps et au lieu du travail, la solidarité de Martine X... avec le président directeur général dont elle était l'assistante devait être totale sur tous les sujets d'ordre professionnel ; qu'occupant un poste situé à la source de toutes les informations, en relation permanente avec Dominique Z..., dans un contexte de départs de salariés situés au sommet de la hiérarchie de l'entreprise, suivis de contentieux prud'homaux, Martine X... ne pouvait, comme elle l'a fait, manquer à son obligation de loyauté sans rompre un lien de confiance indispensable avec le président directeur général et rendre impossible son maintien dans l'entreprise ;
Attendu que le versement d'une indemnité de licenciement, qui n'entraîne pas le maintien du salarié dans l'entreprise pendant tout ou partie du préavis, n'implique pas de la part de l'employeur une renonciation à se prévaloir d'une faute grave ; que Martine X..., qui a été remplie de ses droits à indemnité de licenciement, n'est donc pas fondée à solliciter une indemnité compensatrice de préavis et un rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire, avec les congés payés afférents ;
Sur le droit individuel à la formation :
Attendu qu'aux termes de l'article L 6323-17 du code du travail, alors applicable, le droit individuel à la formation est transférable en cas de licenciement du salarié, sauf pour faute grave ou pour faute lourde ; que le licenciement de Martine X... reposant sur une faute grave, la S. A. COMAP n'était pas tenue de faire mention des informations prescrites par l'article L 6323-18 du même code dans la lettre de licenciement ; qu'en conséquence, la salariée sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts de ce chef ;
Sur les frais irrépétibles :
Attendu qu'il est équitable de laisser chacune des parties supporter les frais qu'elle a exposés, tant en première instance que devant la Cour, et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
PAR CES MOTIFS,
Reçoit l'appel régulier en la forme,
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau :
Dit que le licenciement de Martine X... par la S. A. COMAP est justifié par une faute grave,
En conséquence, déboute Martine X... de l'intégralité de ses demandes,
Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Martine X... aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffierLe Président S. MASCRIER D. JOLY