R. G : 10/ 03573
COUR D'APPEL DE LYON 8ème chambre ARRET DU 22 Novembre 2011
Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 03 décembre 2009
RG : 2009/ 05850 ch no3
SOCIETE LE HAMEAU DE SAINT-ALBIN
C/
X... Y...
APPELANTE :
SCI LE HAMEAU DE SAINT-ALBIN représentée par ses dirigeants légaux 1 avenue Félix Faure 69007 LYON
représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assistée de la SELARL REBOTIER ROSSI ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON représentée par Me GRAS, avocat
INTIMES :
Monsieur Lucien X... né le 25 Octobre 1945 à TASSILLE (72540)... 38480 SAINT ALBIN DE VAULSERRE
représenté par Me Annie GUILLAUME, avoué à la Cour assisté de Me Catherine LEVY-ALLALI, avocat au barreau de LYON
Madame Nelly Y... épouse X... née le 04 Janvier 1947 à LOUE (72540)... 38480 SAINT ALBIN DE VAULSERRE
représentée par Me Annie GUILLAUME, avoué à la Cour assistée de Me Catherine LEVY-ALLALI, avocat au barreau de LYON
Date de clôture de l'instruction : 06 Juin 2011 Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 Octobre 2011 Date de mise à disposition : 22 Novembre 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Françoise CLEMENT, conseiller assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Pascal VENCENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Suivant contrat préliminaire de vente en l'état futur d'achèvement en date du 31 octobre 2003 la société civile de construction vente LE HAMEAU DE SAINT ALBIN a proposé aux époux X... d'édifier une maison d'habitation d'une surface de 102, 06 m ² habitable, type 5 sise à Saint Albin de Vaulserre dans un ensemble immobilier dénommé " LE HAMEAU DE SAINT ALBIN ".
Il était prévu une livraison au plus tard le 30 juin 2004.
Le 30 juin 2004, la SCI avait changé de siège social et de dirigeants, il était proposé aux époux X... de signer un contrat de vente le 25 février 2005 et cette fois ci avec le nouveau représentant de la société de construction.
Les conditions de la vente demeurant inchangées, il était prévu de repousser la livraison des locaux vendus au plus tard au 3ème trimestre de l'année 2005.
Ce serait finalement le 14 novembre 2006 que les époux X... auraient pris possession des lieux, lesquels souffraient de malfaçons et non conformités.
Les époux X... sollicitaient en référé une mesure d'expertise.
Par ordonnance du 27 février 2007, le tribunal de grande instance de Lyon siégeant en matière de référé a ordonné l'expertise judiciaire confiée à monsieur Xavier Z....
Monsieur Xavier Z... a rendu son rapport le 27 octobre 2008.
Suivant acte du 26 mars 2009, les époux X... ont saisi le tribunal grande instance de Lyon aux fins d'obtenir les sommes suivantes :-66. 431, 82 euros au titre des travaux de reprise des désordres et travaux non réalisés,-50. 000 euros de dommages-intérêts pour le préjudice moral,-25. 000 euros au titre de la perte de l'usage de la maison et frais afférents,-4. 000 euros au titre de l'article 700 outre les dépens qui comprendront le coût de l'expertise judiciaire.
Par jugement en date du 3 décembre 2009, le tribunal de grande instance de Lyon a condamné la société civile de construction vente LE HAMEAU DE SAINT ALBIN à payer à monsieur et madame X... les sommes suivantes :-66. 431, 82 euros au titre des travaux de reprise des malfaçons et non conformités,-6. 500 euros au titre des préjudices immatériels,-1. 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- les dépens comprenant le coût de l'expertise judiciaire.
La société civile de construction vente LE HAMEAU DE SAINT ALBIN a interjeté appel de cette décision et demande à la cour de constater que toutes les réserves portées sur le procès-verbal de réception en date du 14 novembre 2006 ont été levées et que tous les désordres et malfaçons relevés par l'expert dans son rapport ont été réparés, de dire et juger en conséquence qu'il n'y a pas lieu à condamner la SCI LE HAMEAU DE SAINT ALBIN à effectuer les travaux préconisés par l'expert puisqu'ils l'ont déjà été, de dire et juger encore que les travaux offerts par la SCI et la prise en charge des factures de relogement ont suffisamment indemnisé les époux X... et en conséquence rejeter toutes leurs demandes au titre de la réparation de leur préjudice de jouissance et de leur préjudice moral, de condamner enfin les époux X... à lui payer la somme de 4. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est ainsi soutenu que la SCI a joué de malchance pour avoir fait appel à diverses sociétés de construction qui ont successivement été mises en liquidation judiciaire ce qui explique le fait que la maison de monsieur et madame X... ait été terminée suivant procès-verbal de réception uniquement le 14 novembre 2006.
Mais en compensation de ce retard la dite SCI fait valoir qu'elle a pris à sa charge :- la location d'un chalet et d'une maison meublée,- le garde meuble,- leur consommation électrique car une fois dans la maison c'est la SCI LE HAMEAU DE SAINT ALBIN qui a supporté les frais de l'électricité de chantier,- la prise en charge des fournitures pour la réalisation de la murette devant la maison.
Toutes les réserves de monsieur et madame X... ont ensuite été levées comme cela ressortirait d'un procès-verbal de levée de réserves du 30 avril 2009.
Ce serait donc de façon déloyale, et alors que la SCI n'était pas représentée devant le tribunal, que les époux X... auraient maintenu leurs demandes portant notamment sur les travaux de reprise des désordres et travaux non réalisés tels qu'ils avaient été évalués par l'expert à la somme de 66. 431, 82 euros.
Il conviendrait également compte tenu des efforts fournis par la SCI et s'agissant des autres préjudices et notamment du préjudice de jouissance, de dire et juger que le tribunal s'est fourvoyé en accordant aux époux X... la somme de 6. 500 euros au titre du préjudice de jouissance.
A l'opposé, les époux X... demandent à la cour de confirmer la décision querellée en ce qu'elle a condamné la société civile de construction vente LE HAMEAU DE SAINT ALBIN à payer à Lucien X... et Nelly Y... épouse X... les sommes de 66. 431, 82 euros TTC au titre des travaux de reprise des malfaçons et non conformités et celles de 1. 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance.
Il conviendrait par contre de la réformer sur les sommes allouées au titre des préjudices moral, de jouissance et immatériels et de condamner la société civile de construction vente LE HAMEAU DE SAINT ALBIN à payer à Lucien X... et Nelly Y... épouse X... les sommes suivantes :-50. 000 euros au titre du préjudice moral subi,-25. 000 euros au titre de la perte d'usage de la maison d'habitation, soit : (29 mois X 800 euros) = 23. 200 euros + 1. 800 euros somme globale et forfaitaire pour frais afférents,-4. 000 euros conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est ainsi soutenu que les malfaçons ont été répertoriées et chiffrées par l'expert judiciaire, que rien ne s'oppose à ce que la SCI soit condamnée à payer le montant des réparations pour une somme de 66. 431 euros.
Concernant le retard, il est demandé de considérer que la maison aurait dû être livrée au 30 juin 2004, que selon l'expert aucun cas de force majeure n'est venu entraver le bon déroulement du chantier, qu'au contraire les époux X... ont dû faire du camping et laisser leurs meubles entreposés dans un garde meuble durant de nombreuses années, qu'ils sont âgés et en mauvaise santé, qu'ils ont passé de nombreux mois sans électricité sans que la société civile de construction vente LE HAMEAU DE SAINT ALBIN ne s'émeuve de leur situation qu'elle connaissait pourtant parfaitement, que la dite SCI n'a cessé de faire des promesses qu'elle n'a jamais tenues.
La perte d'usage devrait s'apprécier du 30 juin 2004 et jusqu'au 14 novembre 2006, soit 29 mois à 800 euros = 23. 200 euros outre les frais de déplacement comptés pour 1. 800 euros.
Le préjudice moral serait considérable et mériterait d'être indemnisé à hauteur de 50. 000 euros.
SUR QUOI LA COUR
A l'examen des pièces 1 à 26 versées à l'appui de ses prétentions par la SCI LE HAMEAU DE SAINT ALBIN, il apparaît que contre toute attente le procès-verbal de levée des réserves que cette partie date du 30 avril 2009 n'a pas été versé aux débats.
Clairement il ne s'agit pas d'une simple omission matérielle car dans le corps des conclusions de la dite SCI, si il est fait référence à ce procès-verbal, aucune numérotation de ce document n'est indiquée à la suite de cette mention contrairement aux autres pièces qui elles sont expressément visées après qu'il en ait été fait état dans le corps des conclusions et qui sont effectivement présentes au dossier de cette partie.
Cette singularité signe la volonté délibérée de cette partie de ne pas produire cette pièce pour des raisons qui échappent à la cour mais qui constituent une donnée de fait incontestable.
Cette pièce n'est pas d'avantage présente au dossier des époux X... qui font état de trente sept pièces mais pas de ce procès-verbal de levée de réserves dont il ne font même pas état dans le corps de leurs propres conclusions.
La SCI LE HAMEAU DE SAINT ALBIN qui doit prouver en sa qualité de débitrice d'une obligation qu'elle s'en est acquittée est donc défaillante en preuve.
N'apportant aucune objection au fond sur le bien fondé des demandes basées sur le rapport de l'expert judiciaire monsieur Z... qui chiffre le montant des travaux de reprise à 66. 431, 82 euros TTC, la dite SCI doit voir confirmé purement et simplement le jugement sur ce point.
S'agissant des préjudices subis, le premier juge a parfaitement arbitré les sommes qui devaient revenir aux époux X... du fait de ces retards sur la base du décompte fait par l'expert judiciaire, soit 8. 507 euros dont à déduire les frais de camping pris en charge par la dite SCI, soit bien au total une somme arrondie à 6. 500 euros.
Il convient d'y ajouter effectivement une somme au titre du préjudice moral du fait des atermoiements inconsidérés de la SCI qui n'a subi aucun cas de force majeure et qui a fait subir aux époux X..., par sa négligence, son manque de professionnalisme et sa désinvolture, des conditions de vie indignes pendant de nombreux mois spécialement par manque d'alimentation électrique.
La cour a les éléments suffisants pour arbitrer à 10. 000 euros le montant des réparations de ce chef.
La perte d'usage de la construction pendant globalement une année après signature du contrat du 25 février 2005 et délai reporté au 3ème trimestre 2005 est susceptible d'indemnisation sur la base de 500 euros par mois compte tenu de la prise en charge de certaines factures par la SCI, soit bien une somme de 6. 000 euros.
Il échet de condamner la dite SCI pour ce montant.
En équité il convient d'y ajouter une somme complémentaire de 3. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre la condamnation aux entiers dépens avec prise en charge des frais d'expertise et de référé.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne la SCI LE HAMEAU DE SAINT ALBIN à payer à monsieur et madame X... la somme de 10. 000 euros au titre de leur préjudice moral et celle de 6. 000 euros au titre de la perte de jouissance de l'immeuble outre la somme de 3. 000 euros supplémentaires au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La condamne encore aux entiers dépens de première instance, y compris le coût de l'expertise et du référé, et d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de maître GUILLAUME, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président.