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07/11/2011 | FRANCE | N°10/02886

France | France, Cour d'appel de Lyon, 2ème chambre, 07 novembre 2011, 10/02886


R. G : 10/ 02886

COUR D'APPEL DE LYON
2ème chambre
ARRET DU 07 Novembre 2011
décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE Au fond du 26 février 2010

RG : 2008/ 00606 ch no

Z...
C/
X...
APPELANTE :
Mme Muriel Nathalie Z... épouse X... née le 22 Novembre 1967 à ISSY-LES-MOULINEAUX (92442)...... 01000 BOURG-EN-BRESSE

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me Agnès BLOISE, avocat au barreau de l'AIN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 016715 du 30/

09/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIME :

M. Olivier Jean Francis Armand X... n...

R. G : 10/ 02886

COUR D'APPEL DE LYON
2ème chambre
ARRET DU 07 Novembre 2011
décision du Tribunal de Grande Instance de BOURG-EN-BRESSE Au fond du 26 février 2010

RG : 2008/ 00606 ch no

Z...
C/
X...
APPELANTE :
Mme Muriel Nathalie Z... épouse X... née le 22 Novembre 1967 à ISSY-LES-MOULINEAUX (92442)...... 01000 BOURG-EN-BRESSE

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me Agnès BLOISE, avocat au barreau de l'AIN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2010/ 016715 du 30/ 09/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIME :

M. Olivier Jean Francis Armand X... né le 18 Juin 1966 à BOURG-EN-BRESSE (01000)... 01000 BOURG-EN-BRESSE

représenté par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour
assisté de Me Brigitte ROUSSEAU, avocat au barreau de l'AIN
******
Date de clôture de l'instruction : 10 Juin 2011
Date des plaidoiries tenues en chambre du conseil : 22 Juin 2011
Date de mise à disposition : 12 Septembre 2011 prorogée jusqu'au 07 Novembre 2011
Audience présidée par Jeannine VALTIN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Anne-Marie BENOIT, greffier.
Composition de la Cour lors du délibéré :- Jeannine VALTIN, président-Bénédicte LECHARNY, conseiller-Catherine FARINELLI, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Jeannine VALTIN, président, et par Anne-Marie BENOIT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
*****
Vu le jugement du 26 février 2010 par lequel, sur l'assignation délivrée le 21 janvier 2009 par l'épouse le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de BOURG-EN-BRESSE a principalement :
- prononcé aux torts exclusifs du mari le divorce de Muriel Z... et Olivier-Jean X...
- condamné Olivier-Jean X... à verser à Muriel Z... une prestation compensatoire en capital d'un montant de 120 000 €
- attribué à la mère la résidence habituelle des enfants mineurs
-dit que les droits de visite et d'hébergement s'exerceront librement et amiablement entre les parents
-dit qu'à défaut d'accord entre les parents le père exercera son droit de visite et d'hébergement :
¤ hors vacances scolaires, les fins de semaines paires du vendredi soir après l'école au lundi matin retour à l'école, et chaque semaine du mardi soir après l'école au jeudi matin retour à l'école
¤ pendant les vacances scolaires, la première moitié les années impaires et la deuxième moitié les années paires
¤ le droit de visite et d'hébergement devant se prolonger en cas de jour férié qui précède ou qui suit la fin de semaine au cours de laquelle le droit de visite et d'hébergement doit s'exercer ¤ à charge pour le père d'aller chercher les enfants ou de les faire prendre et de les ramener ou les faire ramener

-fixé la contribution mensuelle du père à l'entretien et à l'éducation des deux enfants à 600 € à raison de 300 € pour chacun d'eux jusqu'à ce qu'ils subviennent eux-mêmes à leurs propres besoins
-ordonné l'exécution provisoire sur les mesures relatives aux enfants
-rejeté les autres demandes
-condamné Olivier-Jean X... aux dépens ;
Vu l'appel général interjeté de la décision susvisée par Muriel Z... suivant déclaration du 20 avril 2010.
Vu ses dernières conclusions déposées le 17 février 2011 tendant à l'infirmation du jugement sur le rejet de sa demande de dommages intérêts, le droit de visite et d'hébergement du père, le montant de la pension alimentaire due par Olivier-Jean X... pour les deux enfants ainsi que celui de la prestation compensatoire, pour voir en conséquence :
- condamner Olivier-Jean X... à lui verser 5 000 € à titre de dommages intérêts en application des articles 266 et 1382 du code civil
-fixer à 400 € par mois et par enfant la part contributive du père à l'entretien et à l'éducation des deux enfants soit au total 800 € par mois
-condamner Olivier-Jean X... à lui verser la somme de 450 000 € à titre de prestation compensatoire, et 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux entiers dépens ;
Vu les dernières conclusions d'appel incident déposées le 12 mai 2011 par Olivier-Jean X... dans les termes essentiels suivants, le surplus de la décision devant dès lors être confirmé :
- prononcer le divorce aux torts partagés des époux
-fixer une résidence alternée à la semaine, du lundi soir au lundi soir suivant chez le père ou chez la mère
-à titre subsidiaire, dire qu'il pourra bénéficier d'un droit de visite et d'hébergement sur ses enfants durant la moitié des vacances scolaires et hors vacances scolaires, du vendredi soir au jeudi matin suivant les semaines paires
-dire qu'il devra payer une prestation compensatoire de 100 000 € à Muriel Z...
- rejeter toutes autres demandes présentées par celle-ci
-la condamner à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-la condamner aux entiers dépens
Vu l'ordonnance de clôture en date du 10 juin 2011 ; SUR LA CHARGE DES TORTS DU DIVORCE :

Attendu que le premier juge a fait une exacte analyse des faits de la cause et en a déduit les conséquences juridiques qui s'imposaient, par des motifs pertinents que la cour adopte expressément en l'absence d'éléments réellement nouveaux en cause d'appel ;
Qu'en effet, il est suffisamment établi qu'Olivier-Jean X... a entretenu, au moins dès septembre 2007, des relations injurieuses pour son épouse avec une serveuse du bar « le Sauvage » à BOURG-EN-BRESSE, comme en attestent à la fois :
- le procès-verbal de constat des 15, 17, 18 et 19 octobre rapportant l'absence de l'intéressé du domicile conjugal, la présence de son véhicule le matin de bonne heure au domicile de la femme susvisée
-l'attestation de madame C... épouse D... du 22 janvier 2008 qui a vu Olivier-Jean X... sortir du restaurant en compagnie de celle-ci
-l'attestation de madame de SAINT MARTIN du 10 octobre 2008 qui se trouvait au Pub « le Sauvage » le mardi 2 octobre 2007 et a rencontré Olivier-Jean X..., en compagnie de son amie, lequel lui a expliqué avoir quitté son domicile la veille, pour sa nouvelle compagne dont il lui a avoué être très amoureux
-enfin, le procès verbal de constat d'adultère du 21 janvier 2009 ;
Qu'il ne démontre pas que ses relations rapprochées avec une autre personne que son épouse et son infidélité, alors qu'il était encore dans les liens du mariage, aient été la conséquence du propre comportement de son épouse durant leur vie commune ;
Que le fait que son épouse soit partie chez ses parents, avec leurs deux enfants, durant près de deux mois d'été pour assister sa mère handicapée suite à une fracture du genou, ne saurait justifier un tel comportement, pas plus que la prétendue omniprésence de sa belle-famille au domicile du couple, du fait que :
- d'une part, Olivier-Jean X... n'exerce pas d'activité professionnelle et n'était donc pas tenu de rester seul à BOURG EN BRESSE quand sa femme est allée assister sa mère et que le décès de son père, en février 2007, ne pouvait contraindre son épouse et sa famille à figer leur vie au-delà d'une période de deuil normal, sans que d'ailleurs il ne démontre le retentissement exceptionnel de ce décès nécessairement douloureux, et surtout avoir discuté avec son épouse de cet éventuel retentissement qui a, certes, pu participer à son évolution comportementale sans qu'elle puisse l'excuser
-d'autre part, il résulte suffisamment des attestations, photographies et messages écrits pour l'anniversaire d'Olivier-Jean X..., durant la période estivale de 2007, et produits par Muriel Z..., qu'il n'avait pas manifesté d'opposition formelle au séjour de sa femme et des enfants chez ses beaux-parents, qu'ils ont assisté au mariage de Virginie E... le 23 juin 2007, paraissant former un couple heureux et uni, ainsi qu'à un spectacle le 28 juin 2007, laissant la garde des enfants à la mère d'Olivier-Jean X..., qu'enfin, ils sont partis en vacances avec eux en août 2007 chez cette dernière à CANNES comme chaque année, Olivier-Jean X... ayant aussi participé à l'anniversaire du frère de son épouse en juillet 2007- d'autre part, encore, sa mère qui avait témoigné, d'ailleurs par attestation non signée et non datée, comme sa fille et son compagnon, que sa belle-fille ne laissait pas son fils s'occuper de ses enfants, comptant sur ses parents toujours présents alors, en substance, que les grands-parents paternels n'avaient pas ce même privilège, a attesté le 28 décembre 2010, qu'elle avait rédigé cette attestation sous la pression de ses enfants ;

- enfin, les premières attestations délivrées à Olivier-Jean X... ne sont pas du tout déterminantes d'un comportement répréhensif de son épouse à son égard, en observant en outre que les violences ponctuelles qui lui sont reprochées par cette dernière sont également suffisamment avérées, au vu des attestations versées aux débats, étant noté que pour répondre à la suspicion de l'intimé sur la véracité de celles-ci et après vérification de l'itinéraire entre le bar « le Sauvage » et le domicile conjugal, les horaires mentionnés par les témoins sont totalement crédibles ;
Attendu que tout ce qui précède caractérise bien à la charge du mari des faits constitutifs d'une violation grave des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune, aucun fait du même ordre ne pouvant être retenu à l'encontre de l'épouse, en relevant au demeurant, que le mari n'avait présenté une requête en divorce que le 17 décembre 2007, soit seulement après, à priori, avoir entamé une liaison avec sa nouvelle compagne ;
Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé le divorce aux torts du mari sur le fondement des dispositions de l'article 242 du code civil ;
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERÊTS :
Attendu que le dispositif des conclusions de Muriel Z... fonde sa demande de dommages intérêts à la fois sur les articles 266 et 1382 du code civil, mais elle n'explicite celle-ci que sur le fondement de ce dernier article ;
Qu'en tout état de cause, comme l'a relevé le premier juge, Muriel Z... ne justifie pas, conformément aux dispositions de l'article 266 précité, de l'existence de conséquences d'une particulière gravité qu'elle aurait subie du fait de la dissolution du mariage ;
Attendu qu'en ce qui concerne les dispositions de l'article 1382 du code civil, elles permettent de réparer le préjudice subi par un conjoint résultant de toute autre circonstance que la dissolution du mariage et causé par le comportement de l'autre conjoint ;
Attendu qu'en l'espèce, Muriel Z... fait état de sa souffrance consécutive au comportement de son époux depuis le mois d'août 2007 et de la nécessité de gérer, notamment face aux enfants, cette souffrance, la trahison, la vie dissolue de celui-ci, sans rien montrer ;
Que c'est seulement quand elle invoque l'adultère d'Olivier-Jean X... qu'elle fait référence à l'absence de son mari lorsqu'elle est arrivée avec les enfants à leur domicile le 1er août 2007, son arrivée quelques minutes plus tard en titubant, et la fin de soirée chez eux avec ses nouveaux amis auxquels elle l'a entendu expliquer son attirance pour la serveuse du bar « le Sauvage », ses sorties régulières pour rentrer au petit matin complètement ivre, s'en prenant à elle quand elle lui demandait des comptes, lui promettant aussi qu'il n'avait pas de relation amoureuse avec la serveuse, puis finalement disant qu'il allait rompre et, surtout ne s'occupant pas des enfants et leur disant du mal de leur mère ;
Que l'ensemble de ces évènements liés à la période de la rupture, pour difficiles à vivre qu'ils aient pu être, ne constituent pas une faute distincte de l'adultère et du comportement injurieux consécutif du mari qui sont les éléments même constitutifs du divorce ;
Que c'est donc à juste titre que le premier juge a débouté Muriel Z... de sa demande fondée sur l'article 1382 du code civil ;
Attendu que le jugement sera ainsi confirmé de ce chef ;
SUR LA RESIDENCE DES ENFANTS ET LE DROIT DE VISITE ET D'HEBERGEMENT CONSECUTIF :
Attendu qu'en application de l'article 373-2-9 du code civil, la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux ;
Que l'article 373-2-11 du code civil dispose par ailleurs :
« Lorsqu'il se prononce sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération :
1o la pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu'ils avaient pu antérieurement conclure ;
2o les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1
3o l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre
4o le résultat des expertises éventuellement effectuées, tenant compte notamment de l'âge de l'enfant
5o les renseignements qui ont été recueillis dans les éventuelles enquêtes et contre-enquêtes sociales prévues à l'article 373-2-12 » ;
Qu'enfin, d'une manière générale, et en application de l'article 373-2-6 du code civil, le juge veille spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs ;
Attendu qu'il convient de noter que les Conseils des parties ont été avisés, par copie ou courriel du conseiller de la mise en état du 26 mai 2010, de bien vouloir inviter leurs clients, en cas de conflit sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale, à informer leur enfant de la possibilité d'être entendu dans les conditions de l'article 388-1 du code civil ;
Que cette audition n'a pas été sollicitée ;
Attendu qu'Olivier-Jean X... n'avait pas sollicité la résidence alternée en première instance et ne justifie pas d'un élément nouveau pouvant fonder cette nouvelle demande ;
Qu'il ne dément pas sérieusement avoir tardé à exercer son droit de visite et d'hébergement tel que fixé, avançant une obstruction par son épouse non démontrée ;

Qu'il n'émet aucune observation sur les propos rapportés de ses enfants par certaines attestations produites par l'épouse, lesquels se sont plaints de l'attitude de leur père à leur égard et à l'égard de leur mère et aussi des grands-parents, sans justifier de la fausseté de ses témoignages ni donner d'éléments de preuve pouvant permettre d'apprécier l'épanouissement auprès de lui de ses enfants, âgés aujourd'hui respectivement, Victor de 9 ans et demi et Charles de près de 8 ans ;

Qu'il ne donne pas plus d'information sur les éventuels souhaits des enfants et sur la façon dont il envisagerait leur éducation, les contraintes matérielles et les relations avec la mère dan le cadre d'une résidence alternée ;
Que sa demande de ce chef ne peut donc qu'être rejetée, de même que la demande de restriction faite par la mère, insuffisamment fondée en l'état, les attestations mentionnant le souhait des enfants de ne devoir passer que les fins de semaine avec leur père datant de fin décembre 2010, à une période proche de l'exercice complet de son droit de visite et d'hébergement par ce dernier qui a pu modifier quelque peu son attitude au vu des remarques faites dans le cadre de la procédure, aucun autre élément plus récent ne permettant ainsi d'apprécier la situation actuelle ;

SUR LA CONTIRUBTION DES PARENTS A L'ENTRETIEN ET A L'EDUCATION DES ENFANTS :

Attendu qu'il résulte de l'article 371-2 du code civil que chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant, et que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur ;
Qu'en application de l'article 373-2-2 du code civil en cas de séparation entre les parents la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants prend la forme d'une pension alimentaire versée, selon le cas, par l'un des parents à l'autre, ou à la personne à laquelle l'enfant a été confiée ;
Que la pension alimentaire initialement fixée peut être révisée en cas de changement significatif intervenu dans les situations économiques des parents ou dans les besoins des enfants depuis la date à laquelle cette pension a été fixée ;
Que Muriel Z... motive sa demande d'augmentation de pension alimentaire uniquement en considération de ce que le père n'a pas exercé son droit de visite et d'hébergement jusqu'à la fin 2009 et ne l'exerce comme il lui a été accordé que depuis septembre 2010, de ce qu'elle sollicite une restriction de ce droit de visite et d'hébergement et que l'intolérance au gluten dont souffre Charles la contraint à acheter des produits spéciaux coûteux ;
Que Muriel Z... n'a pas ressaisi le juge aux affaires familiales depuis l'ordonnance de non conciliation du 19 février 2008 du fait du non exercice du droit de visite et d'hébergement du père et des conséquences financières qu'elle invoque de ce chef ;
Qu'au surplus, les frais concernant l'intolérance au gluten de Charles étaient également existants lors de la dite ordonnance qui n'a pas fait l'objet d'un recours ;
Qu'enfin le droit de visite et d'hébergement du père n'est pas modifié par le présent arrêt ;
Qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement déféré de ce chef ;
SUR LA PRESTATION COMPENSATOIRE :
Attendu qu'en application de l'article 270 du code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée, dans les conditions de vie respectives ;
Attendu que la disparité résultant du texte précité n'est pas contestée en l'espèce, seul son montant étant discuté ;
Que l'article 271 du code civil dispose principalement que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle ci dans un avenir prévisible ;
Que c'est au moment où la décision de divorce devient irrévocable que doit s'apprécier la demande de prestation compensatoire, soit en cas d'appel principal général, comme en l'espèce, en raison de l'effet dévolutif de l'appel pour le tout, où jour où la Cour statue ;
Que le juge prend notamment en considération :
- la durée du mariage,
- l'âge et l'état de santé des époux,
- leur qualification et leur situation professionnelles,
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial,
- leurs droits existants et prévisibles et leur situation respective en matière de pensions de retraite ;
Attendu que Muriel Z..., née le 22 novembre 1967, et Olivier-Jean X..., né le 18 juin 1966, âgés aujourd'hui respectivement de près de 44 ans et de 45 ans, se sont mariés, sous le régime de la séparation de biens, le 20 avril 1996, soit depuis plus de quinze ans, la vie commune ayant duré près de 12 ans, et ils ont eu deux enfants nés les 4 avril 2002 et 14 novembre 2003 ;
Attendu que la cour dispose des renseignements principaux suivants concernant la situation de Muriel Z..., qui assume les charges de la vie courante pour elle et ses deux enfants encore très jeunes, dans un logement, bien propre du mari, et qui va donc devoir assumer son logement et celui des enfants :
- elle travaillait, à l'époque de son mariage, en avril 1996, comme secrétaire réceptionniste à temps complet chez un médecin, emploi qu'elle a exercé du 1er décembre 1991 au 31 mai 2007
- les avis d'imposition sur le revenu de 1996 mentionnent pour elle un revenu global de 73 929 F, soit 11 270 €
- elle a pris un congé parental sans solde du 20 juin 2002 au13 novembre 2006, puis a travaillé de nouveau du 14 novembre 2006 au 31 mai 2007, date de sa démission
-ainsi les avis d'imposition pour 2003, 2005 ne mentionnent pas de revenus, celui de 2006 porte un revenu de 1989 € et celui de 2007 un revenu annuel de 7 633 €
- atteinte d'une displasie polyépiphysaire, elle justifie d'un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79 % accordé par la Maison départementale des personnes handicapées le 24 novembre 2009 en raison de problèmes de santé affectant ses membres inférieurs mais n'a pas été admise au bénéfice d'une allocation aux adultes handicapés au double motif que son taux d'incapacité est inférieur à 80 % et que son handicap ne justifie pas à lui seul l'impossibilité de se procurer un emploi
-elle est à ce jour sans emploi et n'a fait des recherches parcellaires que depuis fin 2010
- elle est bénéficiaire, au titre d'une donation partage de ses parents, d'un tiers en nue propriété d'une maison de campagne d'une valeur d'environ 38 334 € et mentionne sur sa déclaration sur l'honneur du 2 mars 2009 la propriété d'une grange évaluée à 7 000 €
- cette déclaration sur l'honneur, non réactualisée, mentionne un revenu sur l'année 2007 de 6 870 €, outre des prestations familiales de 120, 32 € par mois et des charges mensuelles de 2 220 € dont 1 080 € pour les vêtements et prestations esthétiques pour l'intéressée ;
Attendu qu'en ce qui concerne Olivier-Jean X..., qui a les charges de la vie courante, en principe pour une seule personne, puisque son amie ne vivrait pas avec lui, et qui verse 600 € au titre de sa contribution mensuelle à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, les éléments essentiels d'information ci-dessous sont donnés :
- avis IR 1996 : 137 601 F, soit 20 977 €
- avis IR 2003 : 121 453 € + revenus fonciers nets 3 796 €
- avis IR 2005 : 149 612 € + revenus de capitaux mobiliers déclarés 4 396 € + revenus fonciers nets 4 642 €
- avis IR 2006 : 108 656 € + revenus de capitaux mobiliers déclarés 7878 € + revenus fonciers nets 4 629 €
- avis d'imposition contributions sociales revenus de 2006 pour des revenus au taux forfaitaire de 2 284 988 €
- avis IR 2007 : 113 € + revenus de capitaux mobiliers déclarés 26 276 € + revenus fonciers nets 5 206 €
- donation partage des parents du 22 juillet 1995 : 600 000 F soit nue propriété des parties divises et indivises d'un appartement sis... à BOURG EN BRESSE lot no6, nue propriété de 1070 parts de la SARL P. P. C. X... Parfumerie Conseil, pleine propriété de 1940 parts de la société civile JMOS 194 000 F et pleine propriété d'une cave...
- donation partage de ses parents du 22 juillet 2 000 d'une valeur de 927 460 F comprenant la pleine propriété de 1200 parts de la société OJPP, 1170 parts en usufruit, soit 641 899 F en avancement d'hoirie et 285 561 F par préciput et hors parts
-un protocole de cession de titres du 2 mai 2006 entre Olivier-Jean X..., ses parents et NOCIBE moyennant le prix de 2 460 397 € pour l'intégralité des actions de la SARL OJPP prévoyant une clause de non concurrence dans BOURG EN BRESSE et dans un rayon de 30 km pendant 3 ans et une garantie de passif
-impôt de solidarité sur la fortune en 2007 pour un total actif net imposable 2 567 631 €
- évaluation de son capital au 24 mars 2009 : 1 792 393, 12 €
- sa déclaration sur l'honneur du 25 avril 2009, non réactualisée, mentionnant un revenu de 26 095 € avec une évaluation de sa résidence principale de 300 000 €, de murs commerciaux de 60 000 € et de sa cave de 5 000 €, outre une assurance vie et des placements divers de l'ordre de 1 800 000 € et un véhicule évalué à 30 000 €
- courriers de sa banque du 7 avril 2008 lui indiquant qu'afin de transmettre un capital à ses enfants et dans le cadre d'une gestion en « bon père de famille » lui sont préconisés des retraits à hauteur de 70 000 € par an, puis courrier du 10 septembre 2010, lui indiquant, suite à leur entretien, que sans entamer le capital initialement placé, il peut envisager des retraits annuels de 59 363 €
- acte de délégation de créance, au profit de la LYONNAISE DE BANQUE en mai 2006, dont il dispose au titre d'un contrat d'assurance vie, le crédit concerné étant échu le 1er novembre 2009
- attestation du 13 février 2009 d'un prêt consenti par la CIC avec des échéances mensuelles de 473, 99 €
- déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune 2009 puis de 2010, soit : en 2009, actif net imposable 2 181 102 € avec une évaluation de l'immeuble... de 216 000 €, du bureau passage des cordeliers de 52 000 € et de la cave de 1 500 €, en ayant à l'esprit que ces évaluations résultent à priori de tolérances fiscales, puis en 2010, base imposable de 2 255 875 €
- acte d'acquisition en date du 27 septembre 2010 d'une maison pour le prix de 300 000 € ;
Attendu qu'observant tout d'abord que l'absence de déclarations sur l'honneur actualisées et renvoyant aux justificatifs nécessite, en l'absence des parties, une analyse pièce par pièce et un minimum de synthèse pouvant être source d'erreur, s'il est acquis que la différence de revenus des époux existait déjà au moment du mariage, il est non moins incontestable que :
- comme, le relève Olivier-Jean X... lui-même, l'épouse a peu participé financièrement à la vie familiale, ce qu'il ne prouve pas avoir discuté jusqu'au divorce et paraissait somme toute normal, vu la différence de revenus, sans qu'il ne démontre qu'elle ait pu ainsi se constituer un patrimoine personnel-il est d'ailleurs patent que Muriel Z... a bénéficié d'un train de vie conséquent, révélé par les frais dont elle fait état dans sa déclaration sur l'honneur, pendant la vie commune de 12 ans

-il n'est pas justifié qu'Olivier-Jean X... se soit opposé à l'arrêt de travail de son épouse, celui-ci n'apportant pas de contestation sérieuse à l'attestation de sa belle mère indiquant que depuis qu'il avait cessé lui-même toute activité en mai 2006, suite à la vente de son entreprise, il avait émis le souhait que son épouse cesse de travailler, son salaire n'améliorant en rien leur quotidien et qu'elle serait plus utile à la maison, cet arrêt de travail rendant nécessairement plus difficile une reprise dans les conditions antérieures vu l'âge de l'épouse, sans cependant qu'elle ne justifie de réels problèmes de santé depuis mars 2010 et de recherches assidues et adaptées d'emploi
-enfin, rien n'empêche Olivier-Jean X..., comme son épouse, au moins depuis 2009, de développer une activité professionnelle, notamment dans la perspective d'élever au mieux ses deux enfants ;
Qu'ainsi, même sans connaître les droits à la retraite précis de chacun des époux, et sans tenir compte de l'ensemble des biens dont bénéficie personnellement Olivier-Jean X..., en raison du régime de la séparation de biens adopté par les époux que la prestation compensatoire n'est pas destinée à compenser, il résulte suffisamment de tout ce qui précède que les conditions de vie respectives des époux du fait de la rupture du mariage, consacrée par la présente décision, entraîne une disparité qui sera justement évaluée à la somme de 150 000 € représentant le capital de la prestation compensatoire due par Olivier-Jean X... à Muriel Z... ;
Attendu que le jugement sera infirmé en ce sens de ce chef ;
SUR LES DEPENS ET L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE :
Attendu que le recours de Muriel Z... étant partiellement fondé contrairement à l'appel incident d'Olivier-Jean X..., ce dernier sera condamné aux dépens et au paiement à Muriel Z... d'une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Attendu que toutes autres demandes seront rejetées comme non fondées ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour après débats hors la présence du public et après en avoir délibéré,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant de la prestation compensatoire due en capital par Olivier-Jean X... à Muriel Z... ;
Statuant à nouveau de ce chef :
Condamne Olivier-Jean X... à payer à Muriel Z..., au titre de la prestation compensatoire précitée, la somme de 150 000 € ;
Le condamne aussi à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le condamne également aux dépens d'appel qui seront recouvrés au profit de Maître de FOURCROY conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes.
Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/02886
Date de la décision : 07/11/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-11-07;10.02886 ?
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