La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2011 | FRANCE | N°09/06327

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 18 octobre 2011, 09/06327


R. G : 09/ 06327
COUR D'APPEL DE LYON 8ème chambre ARRET DU 18 Octobre 2011

Décision du Tribunal de Commerce de LYON Au fond du 01 septembre 2009

RG : 2007j603 ch no

SAS ICADE ARCOBA SAS PATRICOLA ENTREPRISE

C/
SAS GECITER Société ICADE PROMOTION LOGEMENT SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES SAS CARRIER Société GDF SUEZ ENERGIE SERVICE COFELY

APPELANTES :

SAS ICADE ARCOBA venant aux droits de la société GDP INGEQUIP représentée par ses dirigeants légaux 45 avenue Victor Hugo Bâtiment 265 93300 AUBERVILLIERS

représentée pa

r la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistée de la SELARL RACINE, avocats au barreau de LYON ...

R. G : 09/ 06327
COUR D'APPEL DE LYON 8ème chambre ARRET DU 18 Octobre 2011

Décision du Tribunal de Commerce de LYON Au fond du 01 septembre 2009

RG : 2007j603 ch no

SAS ICADE ARCOBA SAS PATRICOLA ENTREPRISE

C/
SAS GECITER Société ICADE PROMOTION LOGEMENT SA MUTUELLES DU MANS ASSURANCES SAS CARRIER Société GDF SUEZ ENERGIE SERVICE COFELY

APPELANTES :

SAS ICADE ARCOBA venant aux droits de la société GDP INGEQUIP représentée par ses dirigeants légaux 45 avenue Victor Hugo Bâtiment 265 93300 AUBERVILLIERS

représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour
assistée de la SELARL RACINE, avocats au barreau de LYON représentée par Me JACQUES, avocat

SAS PATRICOLA représentée par ses dirigeants légaux ZA La Croix des Hormes 69250 MONTANAY

représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assistée de Me Hugues DUCROT, avocat au barreau de LYON substitué par Me RIGOLLET, avocat

INTIMÉES :

SAS GECITER représentée par ses dirigeants légaux 16 rue des Capucines 75002 PARIS

représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Michel BONNEFOY, avocat au barreau de LYON

Société ICADE PROMOTION LOGEMENT anciennement SCIC DEVELOPPEMENT devenue ICAD G3A représentée par ses dirigeants légaux " Millénaire I " 35 rue de la Gare 75168 PARIS CEDEX 19

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Me DELACHENAL, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me PIRET, avocat au barreau de GRENOBLE

SA MMA IARD anciennement dénommée LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD représentée par ses dirigeants légaux 14 boulevard Marie et Alexandre Oyon 72030 LE MANS CEDEX 9

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Me Corinne MICHEL, avocat au barreau de LYON

SAS CARRIER représentée par ses dirigeants légaux route de Thil 01120 MONTLUEL

représentée par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assistée de Me Gilles PIOT-MOUNY, avocat au barreau de LYON substitué par Me SAULOT, avocat

Société EDF SUEZ ENERGIE SERVICES (ELY COFATHEC) venant aux droits de la société COFATHEC SERVICES représentée par ses dirigeants légaux 129 avenue Barthélémy Buyer 69005 LYON

représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour
assistée de Me Paul-Michel DAMET, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 01 Juillet 2011 Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Septembre 2011 Date de mise à disposition : 18 Octobre 2011

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Catherine ZAGALA, conseiller

assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Pascal VENCENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
La SAS GEClTER est propriétaire d'un immeuble dénommé " DAUPHINE PART DIEU " sis rue de la Villette à LYON 3ème.
Elle en a confié la construction par contrat de promotion en date du 1er août 2001 à la société SCIC DEVELOPPEMENT devenue ICADE G3A et actuellement ICADE PROMOTION.
Celle-ci concernant le lot climatisation a passé un marché avec :- la société GDP INGEQUIP aux droits de laquelle vient la société ICADE ARCOBA en sa qualité de bureau d'étude,- la société PATRICOLA entreprise titulaire du lot relatif à la production du froid qui a installé les deux groupes de production du froid,- la société CARRIER fournisseur des groupes de froid.

Une " assurance dommages des ouvrages de bâtiment " et une " assurance responsabilité civile décennale des constructeurs d'ouvrages de bâtiment " ont été conclues avec la compagnie MMA suivant contrat no 112708824.
L'exploitation de l'installation a été confiée à la société COFATHEC-EDF SUEZ, actuellement EDF Suez Energie Services.
La réception avec réserves est intervenue le 3 février 2004 et le procès-verbal de levée de réserve le 2 mars 2004.
Le 7 mars 2005, l'un des groupes de froid a cessé de fonctionner, victime du gel de son évaporateur du fait du froid extérieur.
A l'initiative de la société GECITER, le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon, par ordonnance du 30 mai 2005, l'a autorisée à exécuter les travaux d'urgence et à désigné monsieur Pierre X... en qualité d'expert.
Postérieurement, la société GECITER a assigné les 12 et 14 février 2007 la société ICADE G3A, la société CARRIER, la société PATRICOLA ENTREPRISE, la société GDP INGEQUIP, la société COFATHEC-EDF SUEZ et la compagnie d'assurances MMA lARD en responsabilité et en réparation de son préjudice sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil et celles de l'article 1147 du même code.
L'expert judiciaire a déposé finalement un pré-rapport le 20 mars 2007 et une note le 25 mai 2007 concluant à une responsabilité partagée entre les sociétés CARRIER, COFATHEC-EDF SUEZ et PATRICOLA ENTREPRISE, en raison d'un défaut de conseil sur les protections anti-gel du groupe froid et de l'absence collective de mise en garde du maître d'ouvrage, quant à la potentialité d'incidents de cette nature.
L'installation aurait ainsi souffert d'une absence de protection de ce climatiseur et spécialement de l'évaporateur, les désordres provenant du gel intempestif de l'eau dans les tubes du dit évaporateur après arrêt du groupe par un technicien de la société COFATECH.
Selon jugement du 1er septembre 2009, le tribunal de commerce de Lyon a :- mis hors de cause la compagnie MMA et la société ICADE G3A devenue ICADE PROMOTION,.- condamné in solidum les sociétés ARCOBA venant aux droits de la sociétés INGEQUIP, PATRICOLA ENTREPRISE et COFATHEC SERVICES à payer à la société GECITER la somme de 77. 676, 92 euros, outre intérêts de droits à compter du 12 février 2007, à titre indemnitaire,- condamné les mêmes à régler à la société GEClTER la somme de 7. 000 euros au titre de l'article 700, et aux sociétés CARRIER, MMA et ICADE PROMOTION la somme de 2. 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

La société PATRICOLA entreprise a interjeté appel de cette décision.
Elle demande à la cour de réformer la décision la concernant et de constater que les désordres litigieux ne lui sont en aucun cas imputables et en tout état de cause de condamner EDF SUEZ ENERGIE SERVICES (ELY COFATHEC), la société ARCOBA venant aux droits de la société INGEQUIP, et la société CARRIER à relever et garantir la société PATRICOLA des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre. A titre subsidiaire il conviendrait de limiter sa responsabilité dans la survenance du sinistre à 10 %. Il est demandé la somme de 2. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est ainsi soutenu que chargée uniquement de l'installation de ce groupe de froid par raccordement des installations, elle était obligatoirement étrangère à toute manipulation humaine volontaire ayant consisté à déconnecter l'alarme au niveau du système de gestion thermique et climatique. Seule la société COFATECH, gestionnaire de l'installation, serait responsable de ces erreurs de manipulation.
Si une défaillance dans le devoir de conseil devait lui être reprochée du fait de ne pas avoir averti le maître de l'ouvrage de la possibilité d'un gel dans les tubes, cette partie demande à la cour de constater qu'il y avait bien un système de protection contre le gel puisqu'il y avait un système d'alarme mais que ce système d'alarme a été déconnecté par une action volontaire imputée à l'exploitant, la société COFATECH.
En tout état de cause cette obligation de particulière information ne pèserait pas sur elle mais sur la société ICADE ARCOBA venant aux droits de la société INGEQUIP, en sa qualité de bureau d'études de fluides et sur la société CARRIER en sa qualité fournisseur des groupes froid.
Quoi qu'il en soit, ce débat sur l'obligation de conseil, généré par le pré-rapport serait sans objet car l'origine des sinistres serait à trouver dans une action qualifiée d'" imprévisible " d'un préposé de la société COFATECH qui aurait mis "hors tension" (coupé) l'alimentation électrique du groupe froid. Cela aurait eu pour conséquence de n'engendrer aucune alarme et de permettre le gel de l'installation.
La société ICADE ARCOBA venant aux droits de la société GDP INGEQUIP, ès qualités de bureau d'études, demande préliminairement de considérer et prononcer la nullité du jugement déféré en l'absence de véritable motivation, le tribunal de commerce s'étant selon elle contenté de reprendre l'argumentation développée par la société GECITER sans qualifier en droit sa propre faute et cela en parfaite contradiction avec les conclusions expertales. En outre le jugement n'aurait pas été signé.
Sur le fond, il est soutenu que le tribunal retiendrait, à tort, que l'installation conçue par la société INGEQUIP ne comportait pas de protection autonome contre le gel et qu'il n'aurait été fait aucune prescription contre le gel, ce qui serait susceptible d'engager sa responsabilité pour manquement à son obligation de conseil.
Le fait que la société ARCOBA ait participé à l'opération de construction ne saurait en aucun cas suffire à retenir sa responsabilité, la présomption visée aux articles 1792 et suivants du code civil ne pouvant s'appliquer que si l'implication du constructeur dans la survenance du sinistre est démontrée.
En l'espèce, l'expert X... rappellerait dans le corps de son rapport que le bureau d'études INGEQUIP avait, dans son CCTP, prévu une protection antigel du réseau extérieur par traçage électrique ce qui a été réalisé et est confirmé dans le procès-verbal de prise en charge de l'installation du 22 avril 2004 établi par la société COFATECH.
La société INGEQUIP aurait bien précisé dans son CCTP que l'installation devait fonctionner par une " température de fonctionnement de- 15o ".
Il est demandé à la cour de bien noter qu'aucun reproche n'est formulé par l'expert à l'encontre de la société INGEQUIP, de sorte que la cour devra mettre cette partie hors de cause.
A titre subsidiaire et pour le cas où ce jugement serait confirmé, il est demandé de dire et juger qu'elle serait intégralement relevée et garantie de toute condamnation par la compagnie MMA, auprès de laquelle a été souscrite une police unique de chantier, et par la société COFATECH, la société PATRICOLA et la société CARRIER dont il apparaît qu'elles ont participé à la survenance des désordres.
De son côté, la SAS GECITER, propriétaire de l'immeuble et donc de l'installation de réfrigération, conclut que les sociétés ICAD G3A, CARRIER, EDF SUEZ ENERGIE, PATRICOLA et ICADE ARCOBA sont responsables des dommages ayant affecté le groupe froid de l'immeuble DAUPHINE PART DIEU et de toutes leurs conséquences dans la mesure où en leur qualité de participant à l'opération de construction elles ne rapportent pas la preuve d'une cause étrangère.
Il est demandé de dire en toute hypothèse qu'elles ont commis une faute engageant leur responsabilité comme souligné par l'expert dans son rapport, de dire et juger que la compagnie MAAF doit sa garantie au titre de la police no 112708824, en conséquence, évoquant si besoin était et confirmant la décision entreprise en son principe, de condamner in solidum les sociétés ICAD G3A, CARRIER, EDF SUEZ ENERGIE, PATRICOLA et ICADE ARCOBA ainsi que la compagnie MAAF à payer à la SAS GECITER la somme de 77. 676, 92 euros TTC, outre intérêts de droit à compter de la demande, outre la somme de 10. 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
De son côté, la société ICADE PROMOTION LOGEMENT, ès qualités de constructeur, conclut à la confirmation de ce jugement qui l'a mise hors de cause le dommage étant sans lien avec l'opération de construction, s'agissant d'un désordre lié à un défaut de maintenance de ce groupe froid. Il est demandé complémentairement une somme de 3. 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur une éventuelle mise en cause de son devoir de conseil, il est répondu par le promoteur que la société ICADE PROMOTION en sa qualité de promoteur n'a d'évidence pas qualité pour conseiller le maître d'ouvrage sur la protection de l'installation affirmée par le bureau d'études ou sur les conditions d'exploitation du système que le maître d'ouvrage avait confié à une entreprise de maintenance.
Si cependant une responsabilité était laissée à la charge de la société ICADE PROMOTION à l'égard du maître d'ouvrage, elle devrait être relevée et garantie par les locateurs d'ouvrage avec lesquels elle avait contracté.
Pour ce qui la concerne la société COFATECH SERVICES devenue EDF SUEZ ENERGIE SERVICES conclut à la confirmation le jugement du tribunal de commerce de Lyon le sinistre trouvant sa source dans une erreur grossière de conception et de l'absence de tout système anti-gel. Il est demandé de condamner PATRICOLA SAS à payer à GDF SUEZ COFELY COFATECH la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, y compris ceux d'appel.
Selon cette partie l'expert retient à tort la responsabilité de COFATECH qui, selon lui, avait une parfaite connaissance des conséquences de la mise hors tension de l'installation ainsi que du fait que dans ce cas aucune information en provenance de GTC ne serait transmise.
La responsabilité, selon elle, serait à rechercher dans une erreur de conception cette installation ne comportait pas de protection hors gel, tels que cordon chauffant ou " kit 4 saisons " que le seul moyen d'éviter la prise en glace par température négative était de faire circuler l'eau en permanence ce que ne permettait pas une éventuelle coupure de courant électrique, que le technicien missionné ce jour par COFATECH ne pouvait se douter que l'évaporateur, qui mesure 4 mètres de large, n'était pas protégé par traçage électrique puisque les tuyauteries des deux côtés du dit évaporateur, comportaient lesdites étiquettes relevant la présence d'une protection par traceur électrique.
Si effectivement la mise hors tension de l'appareil a été le fait de l'entreprise COFATECH et de son technicien, celle-ci aurait du être sans conséquence si la protection antigel par traceur électrique avait normalement fonctionné.
De son côté, la SAS CARRIER, ès qualités de fabricant du matériel de climatisation et de conditionnement d'air, demande à la cour de constater qu'il résulte du rapport d'expertise que la cause du dommage réside dans l'interruption de l'alimentation électrique de la machine opérée par la société COFATECH, de dire et juger que cette circonstance constitue un fait exonératoire de toute présomption de responsabilité au titre de la garantie décennale, de dire et juger en toute hypothèse que la responsabilité de la société CARRIER ne peut être engagée sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, dire et juger qu'aucune faute contractuelle ne peut être articulée à l'encontre de la société CARRIER n'étant tenue à aucun devoir de conseil vis-à-vis d'un maître de l'ouvrage avec laquelle elle n'a pas contracté, en conséquence, confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon en ce qu'il a débouté la société GECITER de l'intégralité de ses demandes à l'égard de la société CARRIER et la société PATRICOLA de son recours en garantie, condamner la société PATRICOLA à payer à la société CARRIER la somme de 5. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Enfin, la compagnie MMA, ès qualités d'assureur DO du maître de l'ouvrage, demande à son tour à la cour de constater que la cause du gel qui a entraîné la détérioration du groupe froid appartenant à la société GECITER provient des seules conditions de son exploitation, constater en tout cas qu'il n'existe en l'espèce aucun désordre de nature décennale susceptible de relever des dispositions de l'article 1792 du code civil, constater en conséquence qu'aucune des garanties souscrites auprès de la compagnie MMA lARD n'est susceptible d'être mise en œ uvre, confirmer en conséquence le jugement contesté du 1er septembre 2009 en ce qu'il a rejeté toutes demandes en tant que dirigées à l'encontre de cet assureur, condamner solidairement la société GECITER, la société COFATECH, la société PATRICOLA ou qui d'entre elles mieux le devra à payer à la société MMA lARD la somme de 3. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les condamner solidairement aux entiers dépens.
SUR QUOI LA COUR
La cour étant saisie de l'entier litige par suite de l'effet dévolutif de l'appel, peu importent les éventuelles irrégularités de forme affectant la décision du premier juge.
Il est désormais de jurisprudence bien établie qu'un système frigorifique lorsqu'il assure le froid dans l'ensemble d'un bâtiment par des canalisations multiples et une machinerie centrale comme c'est présentement le cas, si il est certes un élément d'équipement de cet immeuble, n'en relève pas moins des dispositions de l'article 1792 du code civil du fait de son ampleur, de son importance au sein de l'immeuble et de son emprunt aux techniques du bâtiment pour sa conception et son édification. Il doit bien être considéré comme constituant en lui-même un ouvrage au sens de ce texte.
Par voie de conséquence, les dysfonctionnements qui l'affectent relèvent de la garantie décennale.
Dans son pré-rapport du 20 mars 2007 complété et modifié par les notes no9 et 10, cette dernière du 5 juin 2007 constituant en réalité son rapport définitif, monsieur X... après rappel des circonstances de la cause et du rôle tenu par chacun des protagonistes de cette affaire propose à la juridiction saisie une analyse technique des responsabilités de chacun dans la survenance de ce sinistre.
Ainsi selon lui :
- Concernant le bureau d'études INGEQUIP devenu ICADE ARCOBA, maître d'oeuvre, celui-ci prévoyait au cahier des charges une protection antigel du réseau extérieur par traçage électrique lequel a été effectivement réalisé. Il prévoyait par ailleurs, alors même qu'il n'ignorait pas qu'une coupure électrique entraînerait l'arrêt du traçage électrique, un fonctionnement jusqu'à- 15o. Il n'aurait pas pour autant prescrit la mise en place du liquide Glycol qui aurait retardé le gel de l'installation. Il lui est ainsi fait le reproche d'avoir laissé le moyen de protection de l'installation à la discrétion de l'installateur.
- Concernant le constructeur CARRIER il sait que tous les asservissements, permutation et relayage de pompes offrent une sécurité antigel mais uniquement dans la mesure où l'alimentation électrique est maintenue. Il aurait été indispensable que l'information centralisée arrivant à la télésurveillance prenne en compte cette situation car à cet instant rien ne protégeait du gel l'eau contenue dans les évaporateurs. Il lui est ainsi fait reproche lors de la mise en service de ne pas avoir averti suffisamment les utilisateurs de ce groupe froid de ce risque ou de l'avoir fait sans y insister.
- Concernant la société PATRICOLA, installateur de ce groupe froid, qui répond au cahier des charges précisant les conditions d'exploitation amenant à faire fonctionner ce groupe froid jusqu'à- 15ode froid, il lui est fait reproche par l'expert de n'avoir pris aucune précaution particulière y compris celle proposée au catalogue des options par la société CARRIER sous la forme d'une protection par traçage électrique.
- Concernant la société COFATECH devenue GDF SUEZ SERVICES, chargée de l'exploitation et de la maintenance de l'installation, il est constant que c'est elle par l'intermédiaire de l'un de ses employés qui est à l'origine de l'arrêt de l'installation pour rinçage des canalisations du 8 au 10 février 2005. Cet arrêt serait la cause directe de la panne subséquente du mois de mars 2005 par gel des canalisations du fait de l'arrêt de la circulation de l'eau contenue dans les circuits de l'évaporateu. Il est ainsi fait reproche à cette société, outre l'arrêt intempestif de l'installation, du fait que COFATECH avait une parfaite connaissance de l'installation et de ses caractéristiques et du fait qu'elle ne pouvait manquer de savoir que l'arrêt de la machine par mise hors tension électrique non seulement entraînerait le gel de l'installation mais encore ne serait pas détecté par la centrale chargée de recenser les incidents.
Rien ne permet de remettre en cause des conclusions expertales parfaitement circonstanciées qu'aucune partie ne vient contredire par des avis techniques autorisés. La cour fait donc sienne l'analyse des causes et conséquences de ce sinistre par monsieur X....
Chacune des parties visées ci-dessus à concouru par sa négligence ou une défaillance dans son devoir de conseil à la naissance de l'entier dommage.
Il convient d'y ajouter la société la SCIC DEVELOPPEMENT devenue ICAD G3A puis ICADE PROMOTION qui, ès qualités de promoteur constructeur, est tenu de plein droit sur le fondement des dispositions de l'article 1792 du code civil à réparations des désordres relevant de la garantie décennale dans ses rapports avec la société GECITER, maître de l'ouvrage et propriétaire de ce groupe froid, l'ouvrage souffrant d'une non conformité aux normes techniques liée à l'absence de système de lutte contre le gel de l'eau contenue dans les tubes de ce groupe froid, cause partielle de ce sinistre.
Il convient donc de condamner in solidum les sociétés ICADE PROMOTION et son assureur garantie décennale la compagnie MMA, ICADE ARCOBA, CARRIER, GDF SUEZ et PATRICOLA à réparer l'entier dommage compté sans discussion pour 77. 676. 92 euros TTC outre intérêts de droit à compter de la demande et donc de les condamner sous cette solidarité à payer cette somme à la société SAS GECITER.
Dans les rapports entre le promoteur constructeur ICADE PROMOTION et son asureur la compagnie MMA d'une part, et les différents locateurs d'ouvrage mis en cause d'autre part, il convient de dire et juger qu'il y a lieu de condamner in solidum les sociétés EDF SUEZ ENERGIE SERVICE, venant aux droits de la société COFATHEC SERVICES, la société CARRIER, la société PATRICOLA ENTREPRISE, et la société ICADE ARCOBA, venant aux droits de la société GDP INGEQUIP, à les relever et garantir de toutes les condamnations prononcées contre elles au bénéfice de la société GECITER, en principal, intérêts, frais, et article 700 du code de procédure civile.
Dans les rapports entre ces sociétés fautives, la cour sur la base de ces conclusions expertales a les moyens suffisants pour hiérarchiser l'importance de ces manquements sur le fondement des dispositions des articles 1382, 1147 et 1792 du code civil, selon le positionement contractuel ou quasi délictuel de chacun, de la façon suivante :
-50 % à la charge de GDF SUEZ (COFATECH) pour avoir eu la parfaite maîtrise de l'installation qu'elle contrôle et dirige et être pourtant directement à l'origine du sinistre par sa mise hors tension électrique intempestive et prolongée entraînant l'arrêt de la circulation de l'eau alors qu'elle connaissait les conséquences inéluctables de ce geste qu'elle savait indétectable par l'utilisateur et propriétaire faute de tout système d'alerte approprié,
-20 % à la charge de la société ICADE ARCOBA pour n'avoir, ès qualités de bureau d'études censé prévenir tout dysfonctionnement, pas prévu de système d'alarme censé prémunir ce groupe froid contre le gel de l'installation,
-20 % à la charge de PATRICOLA qui en sa qualité d'installateur du groupe n'a pas prévu à l'origine un système de détection des risques de gel alors même que le constructeur proposait lors de l'installation de la machine des options capables de remédier efficacement à ce risque important et parfaitement prévisible,
-10 % à la charge de la société CARRIER, constructeur, qui a participé à la mise en place de ce groupe froid, n'a donc rien ignoré de ses conditions d'utilisation et n'a pas pour autant insisté à cette occasion auprès des différents responsables sur la nécessité de la mise en place de ce système antigel alors pourtant qu'ès qualités il ne pouvait rien ignorer des risques encourus par un utilisateur néophyte dans un environnement géographique où le risque de gel d'un système fonctionnant à l'eau et non au glycol est permanent la moitié de l'année.
La société GECITER doit bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour une somme de 5. 000 euros et les dépens tant de première instance que d'appel doivent suivre le sort du principal.
PAR CES MOTIFS
Réforme le jugement déféré et statuant à nouveau,
Condamne in solidum les sociétés ICADE PROMOTION et son assureur la compagnie MMA, CARRIER, EDF SUEZ ENERGIE, PATRICOLA et ICADE ARCOBA à payer à la SAS GECITER la somme de 77. 676, 92 euros TTC, outre intérêts de droit à compter du jour de l'assignation au fond,
Condamne in solidum les sociétés CARRIER, EDF SUEZ ENERGIE, PATRICOLA et ICADE ARCOBA à relever et garantir les sociétés ICADE PROMOTION et MMA de toutes les condamnations prononcées contre elles tant en principal, intérêts, frais et dépens de première instance et d'appel,
Dans les rapports entre les sociétés CARRIER, GDF SUEZ ENERGIE, PATRICOLA et ICADE ARCOBA répartit ainsi qu'il suit les responsabilités et donc la part des condamnations restant à la charge de chacune des sociétés suivantes :
-50 % GDF SUEZ-20 % ICADE ARCOBA-20 % PATRICOLA-10 % CARRIER

Condamne les mêmes sous les mêmes solidarités successives à payer à la société SAS GECITER la somme de 5. 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens, les dépens d'appel étant distraits au profit des avoués de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/06327
Date de la décision : 18/10/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-10-18;09.06327 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award