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29/09/2011 | FRANCE | N°09/02271

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 29 septembre 2011, 09/02271


R. G : 09/ 02271
COUR D'APPEL DE LYON 1ère chambre civile A ARRET DU 29 Septembre 2011
décision du tribunal de grande instance de Lyon Au fond du 05 février 2009
10ème chambre
RG : 97/ 09707

APPELANTS :
Gérard X... en sa qualité d'héritier de Rafaela X..., décédée le 14 septembre 2005 né le 21 Décembre 1945 à CHARENTON LE PONT (VAL-DE-MARNE)... 69730 GENAY
représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour assisté de la SELARL STOULS ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Laurent X... en sa qualité d'héritier de Rafaela

X..., décédée le 14 septembre 2005 né le 25 Mars 1973 à RILLIEUX-LA-PAPE (RHONE)... 69730 GENAY
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R. G : 09/ 02271
COUR D'APPEL DE LYON 1ère chambre civile A ARRET DU 29 Septembre 2011
décision du tribunal de grande instance de Lyon Au fond du 05 février 2009
10ème chambre
RG : 97/ 09707

APPELANTS :
Gérard X... en sa qualité d'héritier de Rafaela X..., décédée le 14 septembre 2005 né le 21 Décembre 1945 à CHARENTON LE PONT (VAL-DE-MARNE)... 69730 GENAY
représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour assisté de la SELARL STOULS ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Laurent X... en sa qualité d'héritier de Rafaela X..., décédée le 14 septembre 2005 né le 25 Mars 1973 à RILLIEUX-LA-PAPE (RHONE)... 69730 GENAY
représenté par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour assisté de la SELARL STOULS ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Lydia X... en sa qualité d'héritière de Rafaela X..., décédée le 14 septembre 2005 née le 19 Avril 1972 à RILLIEUX-LA-PAPE (RHONE)... 69120 VAULX-EN-VELIN
représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY-LIGIER, avoués à la Cour assistée de la SELARL STOULS ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

INTIMEES :
SA SMURFIT KAPPA HOLDING SOCAR (anciennement dénommée SMURFIT SOCAR) 5 avenue Général de Gaulle 94160 SAINT-MANDE
représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour assistée de la Partnership ALLEN et OLIVERY LLP, avocats au barreau de PARIS

SA IPODEC Z. I. 1 et 3 allée de l'Industrie 76140 LE PETIT QUEVILLY
représentée par la SCP BRONDEL TUDELA, avoués à la Cour assistée de la SCP DEPREZ GUIGNOT et Associés, avocats au barreau de PARIS
SAS RAYNAUD Z. I. Nord-Est Route Branly-B. P. 63 14102 LISIEUX CEDEX
représentée par la SCP LAFFLY-WICKY, avoués à la Cour assistée de la SELAFA FIDAL, avocats au barreau de CAEN

Date de clôture de l'instruction : 27 Mai 2011
Date de mise à disposition : 15 Septembre 2011 prorogée au 29 Septembre 2011, les avoués dûment avisés conformément à l'article 450 dernier aliéna du code de procédure civile.
Audience en audience publique le 08 Juin 2011, tenue par Michel GAGET, président et Christine DEVALETTE, conseiller, qui ont ainsi siégé sans opposition des avoués dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Michel GAGET a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile. Composition de la Cour lors du délibéré :- Michel GAGET, président-Christine DEVALETTE, conseiller-Philippe SEMERIVA, conseiller
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du 05 février 2009 rendu par le tribunal de grande instance de Lyon qui :
1o) condamne, in solidum, les sociétés Sa Smurfit Socar, Sa Raynaud et Sa Ipodec à verser aux consorts X..., en leur qualité d'héritiers de Rafaela X..., décédée le 14 septembre 2005, d'une part, la somme de 48. 733, 51 euros à titre de dommages intérêts en réparation des actes de contrefaçon, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, et, d'autre part, celle de 5. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
2o) dit que la Sa Smurfit Socar et la Sa Raynaud supporteront chacune 45 % des condamnations, alors que la Sa Ipodec doit supporter 10 % des condamnations ;
3o) déboute la Sa ORNVI de toutes ses demandes ;
Vu les conclusions des consorts X... en date du 27 avril 2011 qui concluent à la réformation de la décision attaquée quant aux sommes allouées et qui réclament le paiement :
- soit : 1- de la somme de 300. 122 euros plus 81. 785 euros de préjudice moral,
- soit : 2- de la somme de 187. 338 euros plus 81. 785 euros de préjudice moral,
- outre intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 1995, date de l'assignation et avec capitalisation,
- et plus 10. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, et les frais de la saisie contrefaçon de 7. 000 euros, et ceux de l'expertise de 20. 000 euros qui doivent être inclus dans les dépens ;
Le tout aux motifs que les premiers juges auraient dû calculer le préjudice sur le chiffre d'affaires et non sur la marge bénéficiaire, et, d'autre part, que l'intérêt au taux légal doit commencer à courir, non pas à la date du jugement mais au jour de l'assignation, compte tenu des circonstances de l'espèce ;
Vu les conclusions de la société Smurfit Socar, en date du 04 mai 2011, dans lesquelles la réformation de la décision attaquée est à titre principal demandée aux motifs que les consorts X... sont irrecevables à agir et mal fondés en toutes leurs demandes, et dans lesquelles, à titre subsidiaire, il est soutenu qu'ils n'ont droit qu'à la somme de 9. 440, 33 euros ;
Vu les mêmes conclusions dans lesquelles il est sollicité la condamnation des consorts X... à verser à la société Smurfit Socar la somme de 70. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et leur condamnation aux dépens.
Vu les conclusions de la société Ipodec en date du 1er février 2011 qui soutient, à titre principal, l'irrecevabilité des demandes des consorts X... en se fondant sur l'article 8 du contrat de licence du 22 octobre 1990 et sur le fait qu'ils n'ont pas déclaré leur créance à la procédure collective de la société ORNVI ; et qui fait valoir à titre subsidiaire, le mal fondé des demandes des consorts X... ;
Vu les mêmes conclusions dans lesquelles, à titre très subsidiaire, il est soutenu :
1o la créance ne saurait excéder la somme de 77. 564, 61 euros ;
2o la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Raynaud à garantir la société Ipodec ;
3o la déclaration que la société Ipodec ne doit supporter que 10 % de la charge finale des condamnations ;
4o l'infirmation du jugement attaqué en ce qu'il a rejeté la demande formée par Ipodec en restitution par la société Raynaud de la somme de 26. 219, 88 euros, avec intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 29 juin 2006, et avec capitalisation des intérêts ;
5o le paiement de la somme de 5. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions de la Sas Raynaud en date du 13 mai 2011 qui soutient, à titre principal, l'irrecevabilité et le mal fondé de toutes les demandes des consorts X... ; et qui fait valoir, à titre subsidiaire, que Rafaela X... n'a subi aucun préjudice ;
Vu les mêmes conclusions dans lesquelles elle conclut au mal fondé de l'appel incident de la société Ipodec et à la répartition des condamnations prononcées in solidum à raison de 45 % pour Smurfit Socar Sas et la société Raynaud Sas et 10 % pour Ipodec Normandie, réclamant aux consorts X... la somme de 5. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
Vu l'ordonnance de clôture en date du 27 mai 2011 ;
A l'audience du 08 juin 2011, les parties ont présenté leurs observations orales après le rapport de Monsieur le Président Michel Gaget.
DECISION
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 25 février 2004, confirmant le jugement rendu le 05 juillet 2002 par le tribunal de grande instance de Paris ;
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Lyon en date du 10 juillet 2002 statuant sur l'appel d'un jugement du tribunal de grande instance de Lyon du 30 août 1999 ;
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 07 juillet 2004 ;
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 28 avril 2006 rendu après cassation partielle de l'arrêt du 10 juillet 2002 ;
Vu l'arrêt rendu le 25 février 2010 par la cour d'appel de Douai notamment entre les consorts X... et la société Smurfit Socar ;
Vu le rapport d'expertise d'André Y... en date du 26 décembre 2000 ;
Concernant le brevet français numéro 8609412
Un jugement en date du 05 juillet 2002 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 25 février 2004 a annulé ce brevet pour insuffisance de description.
Vu l'article L. 613. 27 du code de la propriété intellectuelle, cette décision d'annulation a un effet absolu et toutes demandes en rapport avec le brevet sont irrecevables.
Il ressort des conclusions des consorts X... qu'ils ne réclament pas de préjudice sur le fondement de ce brevet.
Concernant le brevet européen numéro 0251. 945, déposé le 19 juin 1987 et délivré le 02 mai 1991
Ils réclament, sur le fondement de ce brevet et en raison des actes de contrefaçon, commis entre le mois d'avril 1994 et le mois de septembre 1999, ayant permis la fabrication par l'entreprise Smurfit Socar de 1. 727. 048 cartons contrefaits, revendus à la société Raynaud qui les a cédés, en partie à Ipodec, la réparation du préjudice économique causé à Rafaela X..., leur auteur, et propriétaire du brevet exploité par la société ORNVI qui était titulaire d'une licence exclusive du 22 octobre 1990.
L'action en contrefaçon initiée par la société ORNVI et Rafaela X... fait l'objet d'une instance qui a donné lieu à un arrêt de cette cour en date du 10 juillet 2002, suite à un jugement de première instance du 30 août 1999.
Il résulte des décisions successives : le jugement du 30 août 1999, l'arrêt de la cour d'appel du 10 juillet 2002 et l'arrêt de la Cour de Cassation du 07 juillet 2004 qui ne casse l'arrêt du 10 juillet 2002 que sur les appels en garantie de la société Ipodec Normandie à l'encontre de la société Raynaud et de la société Raynaud à l'encontre de la société Smurfit Socar, les éléments suivants :
1- la société ORNVI était irrecevable à agir en contrefaçon au titre du brevet européen dont Rafaela X... était propriétaire.
2- les sociétés Smurfit Socar, Sa Ipotec et Sa Raynaud ont bien contrefait le brevet européen.
3- l'action en contrefaçon et en réparation de Rafaela X... a bien été reçue comme recevable, en ce qu'elle porte atteinte à ses droits d'inventeur.
4- une provision globale est allouée à la société ORNVI et à Rafaela X... que la cour d'appel porte à 130. 000 euros.
5- une expertise est organisée et confiée à André Y... dont la mission est de déterminer le préjudice de Rafaela X... et de la société ORNVI.
L'expert André Y... a déposé son rapport le 26 décembre 2000.
Il retient une masse confrefaisante de 1. 727. 048 cartons qui correspond à ce que Smurfit Socar a vendu pour la période considérée et il détermine une perte de marge directe du fait des actes de contrefaçon pour la société licenciée à concurrence de 4. 567. 026 francs, soit 696. 238, 63 euros.
Concernant le préjudice économique
Les consorts X... reprochent aux premiers juges d'avoir calculé leur préjudice sur la marge bénéficiaire perdue et reconnue par l'expert aux lieu et place du chiffre d'affaires et d'avoir fixé le point de départ des intérêts à compter du jugement alors que ceux-ci doivent être calculés depuis l'assignation du 10 janvier 1995.
Les sociétés Smurfit Kappa Holding Socar, Ipodec et Raynaud concluent à l'irrecevabilité de la demande en réparation du préjudice de Rafaela X..., propriétaire du brevet européen dont elle avait confié l'exploitation à la société Ornvi en lui concédant une licence exclusive le 22 octobre 1990 dans laquelle figure la clause numéro 8 suivante :
" Dans le cas où l'on se trouverait en présence de contrefaçon des conteneurs compris dans le domaine, Z... sera seul juge de l'opportunité de poursuivre les contrefacteurs. Z... supporterait tous les frais de semblables poursuites et en retirerait seule les bénéfices, s'il y a lieu ".
Mais cette clause n'exclut nullement à l'égard des contrefacteurs qui ne sont pas parties au contrat de licence le droit du propriétaire du brevet concédé de leur réclamer réparation du préjudice qu'il subit, soit directement, soit indirectement, du fait des actes de contrefaçon qui portent atteinte à son monopole et à ses droits d'inventeur.
Car cette clause ne contient, à l'évidence, aucune renonciation à agir en contrefaçon et en réparation à l'égard des contrefacteurs. Car cette clause ne contient pas non plus une renonciation à bénéficier des royalties qu'elle aurait dû normalement percevoir en exécution du contrat de licence sur les produits fabriqués.
De plus Rafaela X... a bien été admise et déclarée recevable en sa demande de réparation dans les décisions antérieurement prises, notamment dans l'arrêt du 10 juillet 2002.
Et il importe peu que l'expert dont c'était la mission n'est pas expressément chiffré le dommage de Rafaela X... qui, pourtant, était partie à l'instance judiciaire et représentée devant lui.
Les consorts X... sont donc bien recevables à réclamer l'indemnisation du préjudice de leur auteur, comme les premiers juges l'ont admis, sur le fondement du brevet européen.
Il convient d'en déterminer l'ampleur et l'étendue.
Ce préjudice n'est pas inexistant ou égal à zéro, dans la mesure où il est identifiable, aisément, par l'application du contrat de licence, peu important le fait que l'action en contrefaçon et en réparation de la société ORNVI soit déclarée irrecevable.
En effet, le contrat de licence exclusive prévoyait une rémunération, en son article 4 de 7 % du chiffre d'affaires généré jusqu'à 7 millions de francs, par la fabrication et la vente des articles.
Les consorts X... soutiennent, à bon droit, que le raisonnement des premiers juges ne peut être retenu en ce qu'il calcule les 7 % sur la marge directe.
Cette manière de faire ne caractérise par le préjudice subi par l'inventeur qui n'a pas pu percevoir toutes les royalties qu'il espérait de l'exécution du contrat de licence et qui a été privé des royalties qu'il aurait dû recevoir sur les fabrications contrefaites.
Ils proposent deux méthodes de travail : l'une donnant une perte de 300. 122 euros de royalties, calculée sur le chiffre d'affaires perdu du fait des actes de contrefaçon et sur celui perdu sur les ventes de la société ORNVI dont la baisse d'activité a été générée par la contrefaçon, et l'autre fondée sur les seules pertes de royalties en rapport avec les actes de contrefaçon ayant permis la fabrication et la vente de 1. 727. 048 cartons, soit une perte de 187. 338 euros.
La société Smurfit Socar propose, à titre subsidiaire, une somme de 9. 440, 33 euros correspondant aux ventes faites par Ipodec, soit 2. 700 cartons pour la période considérée, au motif que les consorts X... ont déjà été indemnisés dans le cadre d'autres procédures pour des produits fabriqués par elle et revendus par d'autres sociétés.
La Sas Raynaud conclut que le préjudice en rapport avec la masse contrefaisante doit être fixé à 48. 733, 51 euros pour une perte de marge directe de 696. 238 euros pour la période considérée.
La société Ipodec conclut que le préjudice ne saurait excéder la somme de 77. 564, 61 euros correspondant au montant déclaré au passif de la société ORNVI.
Compte tenu de l'arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 25 février 2010, des constatations et observations de l'expert Y..., de la masse contrefaisante pour la période d'avril 1994 à septembre 1999, caractérisée par une fabrication par l'entreprise Socar de 1. 727. 048 cartons pour lesquels le titulaire du brevet contrefait n'a pas reçu de royalties équivalentes à celles qu'il aurait reçues si ces objets avaient été fabriqués dans le respect de la licence concédée à la société ORNVI et dans le respect de ses droits d'inventeur, titulaire d'un brevet dont la validité a été reconnue, le préjudice des consorts X... qui viennent aux droits de leur mère Rafaela X... doit être justement, eu égard aux circonstances de l'espèce, évalué à la somme de 187. 338 euros correspondant à un chiffre d'affaires perdu de 2. 676. 258 euros sur lequel Rafaela X... aurait perçu des royalties à proportion de 7 %.
L'intérêt au taux légal sur cette somme de 187. 338 euros court à compter de sa liquidation, soit à compter de ce jour.
Et les consorts X... qui sollicitent la réparation du préjudice personnel de leur auteur, propriétaire du brevet, ne peuvent pas se voir opposer une déclaration de créance faite dans le cadre de la procédure collective de la société ORNVI à concurrence de 77. 564, 61 euros pour des créances dues par la société en liquidation et en exécution du contrat de licence.
Concernant le préjudice moral
Les consorts X... réclament la somme de 81. 785 euros au titre du préjudice moral, prévu dans l'article 13. 1. a de la directive, et consistant dans l'atteinte à la réputation de l'entreprise, victime de la contrefaçon.
Ils ajoutent que la cour d'appel de Douai, dans sa décision du 25 février 2010, a évalué ce préjudice à 7. 500 euros pour les faits de contrefaçon qu'elle a retenus et qui faisait l'objet de l'instance ouverte devant cette cour.
Ils réclament un préjudice moral global des contrefaçons, déduction faite de la somme de 7. 500 euros (89. 285-7. 500).
Ils soutiennent que leur auteur Rafaela X... a bien subi un préjudice moral qui lui est personnel, en ce que la contrefaçon lui a bien causé une perte réelle de royalties qu'elle aurait perçues de la société ORNVI si la contrefaçon n'avait pas existé.
La société Socar, anciennement dénommée Smurfit Socar, conclut, en revanche, à l'irrecevabilité de la demande en réparation du préjudice moral, évalué dans les dernières conclusions du 20 avril 2010.
Elle fait valoir trois moyens d'irrecevabilité :
1- elle a été présentée, pour la première fois, en cause d'appel et donc l'article 564 du code de procédure civile doit recevoir application.
2- elle se heurte à l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Douai dans son arrêt du 25 février 2010.
3- elle est une double indemnisation du même préjudice dans la mesure où l'arrêt du 25 février 2010 rendu entre les mêmes parties, pour une même identité de cause et pour une même identité d'objet, déclare que le préjudice moral de Rafaela X..., propriétaire du brevet et bailleur de licence est totalement réparé par l'allocation d'une somme de 7. 500 euros.
Mais, observation faite que les dispositions nouvelles relatives à la réparation des atteintes portées aux droits de propriété intellectuelle et aux critères de fixation du montant des dommages et intérêts, issues de la directive 2004/ 48. CE en date du 29 avril 2004, transposée en octobre 2007, n'ont pas vocation à rétroagir et à s'appliquer à des faits de contrefaçon dont les plus récents ont eu lieu en 1999, la demande des consorts X... en réparation d'un préjudice moral est nouvelle en appel pour ne pas avoir été faite en première instance par leur auteur ou eux-mêmes et pour avoir été formée, pour la première fois en cours de procédure d'appel, dans leurs différentes conclusions d'appel dont seules celles du 20 avril 2010 portent un montant.
Cette demande est donc irrecevable par application de l'article 564 du code de procédure civile.
D'autre part, et à titre surabondant, la cour observe que l'arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 25 février 2010, statuant entre les mêmes parties, prises en même qualité, sur les mêmes actes de contrefaçon du même brevet du fait de la fabrication et de la commercialisation des mêmes produits, a accordé un préjudice moral de 7. 500 euros correspondant à la réparation totale de l'atteinte portée aux droits de Rafaela X... qui avait concédé l'exploitation du brevet à l'entreprise ORNVI, venant aux droits de la société Z... qui, aux termes du contrat de licence, était seule titulaire de l'action en contrefaçon.
Les consorts X... sont donc bien irrecevables à agir, en réparation d'un préjudice moral né des faits de contrefaçon invoqués dans cette instance.
Sur le partage des responsabilités
L'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 28 avril 2006 statuant sur renvoi après cassation partielle de l'arrêt rendu le 10 juillet 2002 par la cour d'appel de Lyon sur appel du jugement du 30 août 1999 doit recevoir application en ce qu'il répartit les condamnations prononcées in solidum à raison de 45 % pour la Sa Smurfit Socar, de 45 % pour la Sas raynaud et de 10 % pour Ipodec Normandie Sa, et en ce qu'il déclare que la Sas Raynaud garantira la société Ipodec des sommes supérieures à la part mise à sa charge et que la société Smurfit Socar garantira la société Raynaud des sommes supérieures à la part mise à sa charge.
Sur la demande de la Sa Ipodec à l'encontre de la Sa Raynaud
Il est demandé le remboursement d'un trop versé de 26. 219, 88 euros dans la mesure où la Sa Ipodec a versé une somme de 37. 493, 88 euros le 26 août 2002, alors qu'elle ne doit supporter que 10 % des condamnations prononcées, soit en l'espèce un principal de 18. 733, 00 euros plus les frais et dépens.
Et il appartiendra à la Sa Raynaud qui était distributeur des conteneurs argués de contrefaçon et vendus à Ipodec de régulariser les comptes dans les rapports entre les codébiteurs solidaires en exécution de cet arrêt qui liquide le préjudice.
Le jugement attaqué doit être réformé sur ce point.
Sur l'équité
L'équité commande d'allouer aux consorts X... la somme de 8. 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et à verser in solidum par les trois sociétés qui ont participé à la contrefaçon.
Sur les frais et dépens
Les sociétés Smurfit Socar, Raynaud et Ipodec Normandie doivent supporter tous les frais d'expertise et de saisie contrefaçon, plus tous les dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS,

La Cour,
- réforme partiellement le jugement du 05 février 2009 en ce qui concerne le montant des dommages intérêts alloués aux consorts X..., et en ce qui concerne la demande de la Sa Ipodec à l'égard de la Sa Raynaud ;
- confirme, pour le surplus, toutes les dispositions du jugement du 05 février 2009 sauf celles portant condamnation in solidum du principal et en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, et celle déboutant la société Ipodec à l'égard de la Sa Raynaud ;
Statuant à nouveau ;
- condamne, in solidum, la Sa Smurfit Socar, la Sa Raynaud et la Sa Ipodec à payer aux consorts X..., pris en leur qualité d'héritiers de Rafaela X... la somme de CENT QUATRE VINGT SEPT MILLE TROIS CENT TRENTE HUIT EUROS (187. 338 EUROS) de préjudice économique et financier, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour et celle de HUIT MILLE EUROS (8. 000 EUROS) en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne les mêmes et sous la même solidarité à rembourser les frais d'expertise et les frais de saisie contrefaçon ;
- condamne les mêmes, in solidum, aux dépens d'appel ;
- autorise les avoués de la cause à les recouvrer aux formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;
- dit que ces condamnations prononcées in solidum se répartissent, entre les codébitrices obligées, dans les recours entre elles à proportion de 45 % pour la Sa Smurfit Socar, à proportion de 45 % pour la Sa Raynaud et à proportion de 10 % pour Ipodec Normandie ;
- déclare recevable la demande en remboursement formée par la société Ipodec à l'encontre de la Sa Raynaud de la part en trop versée ;
- dit que la Sa Raynaud devra, le cas échéant, reverser le trop versé reçu le 26 août 2002 sur la somme de TRENTE SEPT MILLE QUATRE CENT QUATRE VINGT TREIZE EUROS QUATRE VINGT HUIT CENTS (37. 493, 88 EUROS) ;
- déclare que les consorts X... irrecevables en leur demande de réparation d'un préjudice moral causé à l'inventeur du brevet.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT.
Joëlle POITOUX, Michel GAGET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 09/02271
Date de la décision : 29/09/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Analyses

La clause d'un contrat de licence qui prévoit que la société bénéficiaire d'une licence d'exploitation sera seule juge de l'opportunité de poursuivre des éventuels contrefacteurs n'exclut pas à l'égard de contrefacteurs qui ne sont pas parties au contrat de licence le droit du propriétaire du brevet concédé de leur réclamer réparation du préjudice qu'il subit, soit directement, soit indirectement, du fait des actes de contrefaçon qui portent atteinte à son monopole et à ses droits


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-09-29;09.02271 ?
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