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06/09/2011 | FRANCE | N°09/07921

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 06 septembre 2011, 09/07921


R. G : 09/ 07921
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 06 Septembre 2011

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 24 novembre 2009

RG : 06/ 14519 ch no10

X...

C/
Y... QUILLET SOCIETE ASSURANCE MUTUELLE DES CONSTRUCTEURS

APPELANT :
Monsieur Yvan X... né le 21 Février 1954 à BRON (69500)... 05290 VALLOUISE

représenté par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assisté de Me Gilles DUTHEL, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Monsieur Bernard Y... né le 05 Février 1952 à LYON (

69007)... 69380 DOMMARTIN

représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assisté de Me Eric POUDEROUX, avocat au barreau...

R. G : 09/ 07921
COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 06 Septembre 2011

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 24 novembre 2009

RG : 06/ 14519 ch no10

X...

C/
Y... QUILLET SOCIETE ASSURANCE MUTUELLE DES CONSTRUCTEURS

APPELANT :
Monsieur Yvan X... né le 21 Février 1954 à BRON (69500)... 05290 VALLOUISE

représenté par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assisté de Me Gilles DUTHEL, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Monsieur Bernard Y... né le 05 Février 1952 à LYON (69007)... 69380 DOMMARTIN

représenté par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assisté de Me Eric POUDEROUX, avocat au barreau de LYON

Madame Mireille B... épouse Y... née le 04 Novembre 1955 à LYON (69007)... 69380 DOMMARTIN

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Me Eric POUDEROUX, avocat au barreau de LYON

SOCIETE ASSURANCE MUTUELLE DES CONSTRUCTEURS-AMC représentée par ses dirigeants légaux 95 rue d'Amsterdam 75008 PARIS

représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assistée de la SCP REFFAY et ASSOCIES, avocats au barreau de L'AIN représentée par Me CABANE, avocat
******

Date de clôture de l'instruction : 31 Janvier 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 31 Mai 2011
Date de mise à disposition : 06 Septembre 2011 Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Françoise CLEMENT, conseiller

assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Françoise CLEMENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
****
M. et Mme Y... ont acheté, selon acte notarié du 8 septembre 1994, à M. X... Yvan alors PDG de la société MAISONS AXIAL, une maison individuelle d'habitation, sise Zac Les Mazettes, 6 chemin des Asters à Dommartin (69), moyennant la somme TTC de 1. 070. 000, 00 francs.
La maison ayant fait l'objet d'un permis de construire délivré le 10 Janvier 1994 et d'une déclaration d'achèvement des travaux en date du 7 juillet suivant, un certificat d'assurance garantie globale de l'ouvrage no M 75700 0570750 049968, établi par la société AMC (ASSURANCE MUTUELLE DES CONSTRUCTEURS), daté du 28 Juillet 1994 était joint à l'acte de vente, et mentionnait que :
- la maison avait été édifiée par le constructeur MAISONS AXIAL,- la garantie obligatoire résultant de l'article 1792 du code civil était acquise au profit du maître d'ouvrage, M. X..., pour la réalisation de la construction moyennant un prix TTC de 289. 336, 00 francs,- la date d'ouverture du chantier prévue était fixée au mois de mai 1994.

M. et Mme Y... invoquant l'apparition de fissures en différents endroits de leur maison, se sont adressés à la société AMC selon déclarations de sinistre par lettres recommandées avec accusé de réception des 7 novembre 2000, 17 août 2001 et 13 novembre 2003.
La société ACS refusant la prise en charge des désordres allégués, M. et Mme Y... ont alors fait procéder à une expertise amiable, la société ACS initiant une mesure d'expertise confiée au cabinet Eurisk en novembre 2003.
Les parties ne parvenant pas à un accord, M. et Mme Y... ont alors saisi le juge des référés qui suivant décision du 24 mai 2005, a ordonné une expertise judiciaire confiée à monsieur C... qui a déposé son rapport le 16 Janvier 2006.
M. et Mme Y... ont ensuite fait citer la société AMC devant le tribunal de grande instance de Lyon, lequel par jugement en date du 24 novembre 2009 a :
- condamné la société AMC à payer à M. et Mme Y... les sommes suivantes :
-60. 356, 55 € TIC au titre des travaux de reprise, outre actualisation,-8210, 78 € TTC au titre du coût du suivi des travaux par un maître d'oeuvre, outre actualisation,

- dit que l'actualisation sera calculée suivant l'indice BT 01, le premier indice connu étant daté du 16 janvier 2006 et le second indice étant celui paru au jour de la décision à intervenir,
- dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de l'assignation, soit le 10 octobre 2006,
- débouté M. et Mme Y... du surplus de leurs demandes,
- condamné M. X... à garantir la société AMC pour toutes les condamnations prononcées contre elle en principal, intérêts et frais,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- condamné la société AMC à payer la somme de 1. 500, 00 € à M. et Mme Y... en application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. X... à garantir l'assurance du chef de cette condamnation,
- condamné la société AMC aux dépens de l'instance et condamné M. X... à garantir l'assurance du chef de cette condamnation.

Vu les conclusions signifiées le 15 février 2010 par M. Yvan X..., appelant selon déclaration du 16 décembre 2009 lequel demande à la cour de réformer le jugement susvisé, débouter les époux Y... et la société AMC de l'intégralité de leurs demandes dirigées à son encontre et condamner cette dernière ou qui mieux le devra, à lui payer une somme de 5. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre dépens,

Vu les conclusions signifiées le 14 décembre 2010 par M. et Mme Y... qui demandent à la cour de :

- confirmer partiellement le jugement du tribunal de grande Instance de Lyon en date du 24 novembre 2009 en ce qu'il a :
- dit que la prescription biennale au titre de l'article L. 144-1 du code des assurances n'était pas acquise, qu'ils étaient alors bien fondés à réclamer une indemnisation au titre des divers préjudices subis, à la société AMC,
- condamné la société AMC à leur payer la somme de 60. 356, 55 € TTC au titre des travaux de reprise, outre actualisation et la somme de 8. 210, 78 € TTC au titre du coût du suivi des travaux par un maître d'œ uvre, d'une part, outre actualisation suivant l'indice BT 01, le premier indice à prendre en compte étant celui connu au 16 janvier 2006, et le second chiffre étant celui paru au jour de la décision et d'autre part, suivant intérêt au taux légal à compter de l'assignation, soit le 10 octobre 2006,
- cumulé l'indexation du coût des travaux suivant indice BT 01 avec les intérêts légaux,
- réformer ledit jugement en toutes ses autres dispositions,
- constater que M. X... a la qualité de constructeur au sens de l'article 1792 du code civil, conformément à l'article 1792-1 du code civil,
- condamner M. X..., en sa qualité de constructeur au sens de l'article 1792-1 du code, in solidum avec AMC, pour l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de AMC, soit les sommes suivantes, selon le jugement entrepris,
- constater l'existence et la validité d'une police d'assurance AMC et en déduire que la société AMC en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage de M. X... est tenue de garantir les désordres affectant la maison vendue par lui à M. et Mme Y...,
- condamner in solidum M. X... et AMC à payer aux époux Y... la somme de 2. 057, 00 € au titre du coût de l'assurance afférente aux travaux qui seront repris, d'une part, outre actualisation suivant l'indice BT 01, le premier indice à prendre en compte étant celui connu au 16 janvier 2006, et le second chiffre étant celui paru au jour de la décision et d'autre part, suivant intérêt au taux légal à compter de l'assignation, soit le 10 octobre 2006,
- dire et juger que les modalités des déclarations de sinistre prévues par les dispositions des articles L 242-1 et L 243-1 du code des assurances ont été pleinement respectées par M. et Mme Y...,
- constater que AMC n'a pas pris position dans les soixante jours de réception de la déclaration de sinistre en contravention avec l'article t. 242-1 du code des assurances,
- dire et juger que l'indemnité versée par AMC aux époux Y... est majorée de plein droit d'un intérêt égal au double du taux de l'intérêt légal,
- condamner AMC à payer à M. et Mme Y... la somme de 5. 000, 00 € au titre des conséquences de la faute que AMC a commise dans l'exécution de ses obligations contractuelles et notamment du retard apporté à l'indemnisation de l'assuré,
- constater que AMC, pour refuser une quelconque indemnisation à M. et Mme Y..., s'est appuyée sur le rapport de son expert lequel a effectué une analyse inexacte de la nature des désordres affectant la construction en cause ainsi que les modalités éventuelles de réparations,
- dire et juger que AMC, en s'abstenant de préfinancer les travaux efficaces de nature à mettre fin aux désordres affectant la maison de M. et Mme Y... en se fondant sur le rapport insuffisant de son expert, a commis un manquement à ses obligations contractuelles, au sens de l'article 1147 du Code Civil, et doit dès lors être condamnée à indemniser les assurés les divers dommages immatériels subis,
- condamner in solidum M. X... et AMC à payer à M. et Mme Y... la somme de 9. 600, 00 € au titre des dommages immatériels, et particulièrement la privation de jouissance paisible,
- dire et juger que pour le cas où par impossible, il y aurait eu production de faux documents dans le cadre de l'acte de vente en date du 8 septembre 1994, M. X... restera tenu de l'ensemble des condamnations pour tromperie caractérisée,
- condamner in solidum M. X... et AMC à payer à M. et Mme Y... la somme de 10. 000, 00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. X... et AMC aux entiers dépens, en ce compris ceux exposés dans le cadre de la procédure de référé incluant les frais d'expertise judiciaire, ceux de la procédure au fond de première instance et ceux d'appel,

Vu les conclusions signifiées le 4 novembre 2010 par la société AMC qui demande à la cour de :

- réformer partiellement la décision déférée,
A titre principal :
- constater l'absence de validité et de caractère probant de l'attestation et de la quittance produites au débat en raison de leurs dates et du montant de la construction indiqué ainsi que de l'absence d'intervention sur le chantier de la société MAISONS AXIAL,
- constater que dans l'hypothèse où ces documents litigieux seraient admis comme établissant l'existence d'un contrat d'assurance dommages-ouvrage souscrit auprès de la
compagnie AMC sans que n'ait été produit de contrat d'assurance ni de contrat de construction entre M. X... et la société MAISONS AXIAL, la police serait nulle en raison d'une fausse déclaration du risque,
- constater encore que la déclaration du sinistre par M. et Mme Y... auprès de la société AMC est intervenue plus de deux ans après la prise de connaissance de celui-ci, de sorte que leurs demandes se heurtent à la prescription biennale de l'article L 114-1 du code des assurances, à laquelle la société AMC n'a en aucun cas renoncé,
En conséquence,
- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a fait partiellement droit aux prétentions de M. et Mme Y... et les débouter de l'intégralité de leurs demandes, quel qu'en soit le fondement,
A titre subsidiaire :
- dire et juger que la société AMC ne saurait être tenue au-delà du montant du coût de la construction visé par la police d'assurance dommages-ouvrage, soit 44. 108, 99 €, et des seuls dommages couverts par celui-ci, excluant tout préjudice immatériel et la souscription d'une assurance dommages-ouvrage,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article L242-1 du code des assurances ni au règlement de dommages et intérêts,
- dire et juger n'y avoir lieu à l'application des intérêts légaux et de l'actualisation du coût des travaux selon l'indice BT01, et réformer sur ce point la décision contestée en déboutant M. et Mme Y... de ces demandes,
- dire et juger à tout le moins n'y avoir lieu à l'application cumulée de ces deux mesures, et réformer le jugement en ce sens,
- rejeter le surplus des prétentions de M. et Mme Y...,
- constater que M. X... revêt, pour la construction litigieuse, la qualité de constructeur au sens des dispositions de l'article 1792-1 2o du code civil, et que sa responsabilité est engagée à ce titre en présence de désordres de caractère décennal,
- dire et juger que les man œ uvres dolosives dont il a usé pour tromper les autres parties sur l'identité réelle du constructeur le privent de toute possibilité de se prévaloir de la prescription décennale applicable en matière de construction,
En conséquence,
- condamner M. X... à relever et garantir la société AMC de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre en principal, frais, intérêts et dépens, quel qu'en soit le fondement juridique,
- débouter M. X... de l'ensemble de ses prétentions,
Dans tous les cas :
- condamner M. X..., ou qui mieux le devra, à payer à la société AMC la somme de 6. 000, 00 € au visa de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le même, ou qui mieux le devra, aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 janvier 2011.

MOTIFS ET DÉCISION

-I-Sur la nature des désordres :

Les conclusions de l'expert judiciaire C..., non sérieusement contestées par les parties permettent de déterminer que :
" Des fissurations importantes du type multimillimétriques traversantes ont été constatées notamment sur le murs Sud Ouest du garage et sur le mur de liaison garage/ logement. Ces fissures, voire lézardes pour certaines, qui compromettent la solidité de l'ouvrage, résultent d'un tassement différentiel au niveau des fondations.

De plus l'ouverture de la lézarde de 2 cm en haut du mur de liaison garage/ habitation au niveau du porche met en évidence un léger basculement du bâtiment habitation. Ces désordres générés par un tassement différentiel ont pour origine une erreur de conception notamment au niveau de l'assise des fondations.

L'erreur de conception est également à l'origine du désordre constaté au niveau du plafond du séjour qui a été fixé sur un support différent (béton et fermettes). Ces deux supports ayant une inertie et une souplesse très différente, il s'est produit une fissuration importante à leur jonction.
Les désordres concernant les murs de la construction peuvent se réparer par injection de résines gonflantes suivant le procédé URETEK sous les murs la zone Sud Ouest du garage et de l'habitation, sachant que le mur de jonction entre le garage et l'habitation devra être reconstruit.
Quant au plafond du séjour celui ci devra être partiellement repris, avec mise en œ uvre d'un couvre joint au droit de la délimitation des deux types de support.
L'ensemble des travaux de réparation est estimé à 57. 210, 00 € HT ".
L'expert ajoute que " Ce type de désordre, provoqué par un tassement différentiel au niveau des fondations du bâtiment, est certes un désordre évolutif, mais son évolution n'est pas linéaire. En effet, la présence d'eau importante dans le sol, de même qu'une période de forte sécheresse peuvent faire varier la capacité portante de ce type de sol de façon significative et générer des dégradations importantes dans un délai relativement court. Il a été constaté que la sécheresse de 2003 avait provoqué une aggravation des désordres et que la solidité de l'ouvrage a été compromise à partir de cette date ".
Ainsi que l'a décidé à juste titre le premier juge, la nature décennale des désordres constatés par l'expert, non discutée dorénavant en cause d'appel par les parties, doit manifestement être retenue au sens des dispositions de l'article 1792 du code civil, en ce que les fissures constatées sur l'ouvrage compromettent sa solidité ; les époux Y... ont manifestement agi dans le délai de 10 ans à compter du 7 juillet 1994, date d'achèvement des travaux fixant la date de réception tacite de l'ouvrage par M. X..., faute de procès-verbal de réception établi en l'espèce.

- II-Sur la garantie de la société AMC :

- Sur l'existence et la validité du contrat d'assurance dommages-ouvrage :
Aucun élément du dossier ne permet à la cour de constater que le document intitulé " certificat d'assurance garantie globale de l'ouvrage ", annexé à l'acte de vente de l'immeuble acquis par les époux Y..., n'aurait pas été établi ni signé par la société AMC, les indications portées apparaissant suffisamment précises pour permettre l'identification du chantier et son coût, du maître de l'ouvrage et de son constructeur ; l'attribution d'un numéro de police confirme encore la réalité du contrat, peu important l'absence de production au dossier par les parties y ayant intérêt.
Alors même que la date du 28 juillet 1994 figure comme date d'établissement du document, il apparaît que la date d'ouverture du chantier " 05/ 94 " y est expressément mentionnée, information démontrant que la couverture de l'assurance avait bien été donnée en toute connaissance de cause, préalablement à l'achèvement des travaux.
Alors même enfin qu'une discussion oppose les parties sur la qualité de constructeur de M. X..., il convient de constater que même à supposer cette qualité à ce dernier plutôt qu'à la société MAISONS AXIAL ou conjointement avec cette dernière dont il était PDG à l'époque de la construction de la villa, il apparaît que dans la mesure où ce sont en tout état de cause les artisans travaillant pour le compte de cette société de construction qui sont intervenus sur le chantier, sous la surveillance des salariés D... et E... intervenant pour le compte de la société MAISONS AXIAL selon les attestations que ces derniers versent au dossier, aucune modification du risque n'était donc apportée en l'espèce contrairement à ce que soutient à tort la société AMC.
Aucune fausse déclaration n'est donc établie qui pourrait justifier la nullité du contrat.

- Sur la prescription biennale :

La dernière lettre recommandée avec accusé de réception déclarative de sinistre auprès de la société AMC adressée par les époux Y... a été envoyée le 13 novembre 2003, soit dans le délai de 10 ans de la garantie susvisée, ces derniers agissant ainsi à bref délai à la suite de la constatation de l'aggravation des désordres affectant leur maison d'habitation ensuite de la sécheresse de l'été 2003 ; un expert a été désigné par l'assureur le 20 novembre 2003 et M. et Mme Y... ont ensuite assigné en référé la société AMC et M. X... par acte d'huissier du 6 avril 2005, une ordonnance étant rendue le 24 mai suivant, les demandeurs introduisant l'instance au fond par assignation du 10 octobre 2006.
Un nouveau délai de deux années a donc recommencé à courir les 20 novembre 2003 et 24 mai 2005 ; la prescription biennale issue des dispositions de l'article L 114-1 du code des assurances ne peut donc pas être opposée à M. et Mme Y..., confirmant en cela la décision critiquée.

- Sur la limite de la garantie des dommages matériels :

En l'absence de production du contrat d'assurance dommages-ouvrage au dossier, aucune limitation du montant de la garantie souscrite n'apparaît avoir été convenue entre les parties ; la société AMC est donc tenue à garantir M. et Mme Y..., acquéreurs bénéficiaires de plein droit de la garantie souscrite en application des dispositions des articles L 242-1 et L242-2 du code des assurances, de l'intégralité des travaux de réparation.
Le montant de ces derniers, défini par l'expert judiciaire alors même que leur description coïncide avec celle des experts choisis par les parties, s'élève à la somme non discutée de 60. 356, 55 € TTC à laquelle il convient d'ajouter celle de 8. 210, 78 € TTC correspondant au coût du suivi indispensable des travaux par un maître d'oeuvre.
Comme l'a retenu à juste titre le premier juge, une actualisation sera appliquée suivant l'indice BT 01 de la construction, le premier indice connu devant être fixé au 16 janvier 2004 et le second au jour du jugement.

- Sur le doublement du taux d'intérêt en application de l'article L242-1 du code des assurances :

L'article L 242-1 alinéa 5 du code des assurances dispose que l'assureur a un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat ; si l'assureur ne respecte pas ce délai, l'indemnité due par l'assureur défaillant sera majorée de plein droit d'un intérêt calculé au double du taux légal.
En l'espèce il ressort des documents produits au dossier que la première déclaration de sinistre opérée par les époux Y... n'a pas été faite au siège de la société d'assurance, aucun effet déclaratif ne pouvant donc lui être reconnu.
La deuxième déclaration de sinistre faite par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 août 2001, réceptionnée le lendemain par son destinataire a donné lieu à une réponse négative de l'assureur invoquant la prescription biennale de l'action selon lettre recommandée avec accusé de réception du 27 février 2002, après réception seulement le 23 février précédent, de la fiche de renseignements obligatoires adressée à l'assuré en retour de son courrier du 17 août 2001 ; aucun dépassement du délai de 60 jours ne peut donc être retenue.
La troisième déclaration de sinistre faite par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 novembre 2003, réceptionnée le 17 novembre suivant par la société AMC, comportant l'ensemble des renseignements obligatoires visés à l'article A 243-1 de l'annexe II du code des assurances, a donné lieu à la désignation d'un expert le 20 novembre suivant, copie du rapport de ce dernier étant adressée à l'assuré par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 janvier 2004 et réponse de refus de prise en charge du sinistre étant envoyée le 19 janvier suivant.
Le délai de 60 jours courant à compter du 17 novembre 2003 n'a donc pas été respecté par la société AMC qui a fait connaître à son assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu de sa garantie le 20 janvier 2004.
La majoration du taux d'intérêt de l'indemnité d'assurance allouée à M. et Mme Y... doit donc être appliquée, réformant en cela la décision du premier juge.
Les sommes susvisées porteront donc intérêts au double du taux légal à compter de l'assignation du 10 octobre 2006, l'actualisation par l'effet de l'indexation, qui compense la dépréciation monétaire entre le jour où la créance est évaluée et le jour du paiement, et les intérêts moratoires, qui indemnisent seulement le retard dans le paiement de la somme due, pouvant être cumulativement accordés sans qu'il soit procédé à une double indemnisation du préjudice.

- Sur les dommages immatériels :

En invoquant d'une part le surcoût lié à la conclusion d'un contrat d'assurance dommages-ouvrage au titre des travaux de reprise, d'autre part un préjudice de jouissance et enfin le coût de nombreuses dépenses spécifiques liées aux travaux de reprises, les époux Y... sollicitent l'indemnisation de dommages immatériels.
L'article L242-1 du code des assurances, en ne visant que la réparation de l'ouvrage, exclut toute prise en compte de désordres extérieurs à la réparation de l'ouvrage lui-même et donc toute prise en compte des dommages immatériels sauf à l'assureur de réparer le préjudice immatériel consécutif à des travaux de réfection qui se sont révélés insuffisants ou inexistants par suite d'un rapport d'expertise défectueux.
Il ressort du courrier en date du 19 janvier 2004 que AMC a refusé sa garantie en s'appuyant sur le rapport de son expert contractuel qui s'est avéré partiellement erroné ensuite des constatations et conclusions de l'expert judiciaire C... qui a retenu notamment que la solidité de l'ouvrage était compromise depuis l'été 2003 ; il n'est d'ailleurs pas indifférent de constater que malgré les préconisations de son expert EURISK RHONE ALPES qui retenant une problématique d'adéquation du type de fondation retenu avec la nature et la typologie du sol, sollicitait des investigations complémentaires afin de préciser le diagnostic et les méthodes réparatoires, l'assureur AMC n'a initié aucun complément d'expertise, se bornant à tort, à contester devoir sa garantie en invoquant la prescription biennale de l'action contre l'assureur.
Ce faisant, l'assureur a manqué à ses obligations contractuelles en laissant perdurer le préjudice de jouissance et augmenter le coût des dépenses de protection et nettoyage de la

maison des époux Y..., préjudice qui devra être indemnisé à hauteur des sommes suivantes :

-7. 000, 00 € au titre du préjudice de jouissance incluant la privation de la jouissance paisible de leur maison et le coût des dépenses supplémentaires engagées en raison de la survenance des désordres,
-2. 057, 00 € au titre du coût de l'assurance dommages-ouvrage afférente aux travaux de réparation, outre d'une part actualisation suivant l'indice BT 01, le premier indice à prendre en compte étant celui connu au 16 janvier 2006, et le second chiffre étant celui paru au jour du jugement et d'autre part, suivant intérêt au taux légal à compter de l'assignation, soit le 10 octobre 2006.

- Sur la demande en dommages-intérêts pour non respect par l'assureur de ses obligations :

Indépendamment d'une part du retard pris par la société AMC dans la notification de sa prise de position, compensé par la majoration du taux d'intérêt dans les conditions susvisées et d'autre part du manquement de l'assureur à ses obligations contractuelles ayant entraîné le préjudice de jouissance de l'assuré désormais indemnisé, aucun autre préjudice né d'un autre manquement ou comportement déloyal de la société d'assurance n'est caractérisé en l'espèce par le simple fait d'une prise de position contraire à celle de son assuré.
Aucun dommages-intérêts supplémentaires n'ont donc lieu d'être accordés en la matière, confirmant en cela la décision du premier juge.

- III-Sur les demandes dirigées à l'encontre de M. X... Yvan par M. et Mme Y... :

Il résulte de l'ensemble des documents produits au dossier que :

- la société MAISONS AXIAL a déposé la demande de permis de construire de la villa acquise par les époux Y...,
- la grande majorité des factures ou bons de commande émis par les artisans ayant participé à la construction de la villa ont été édités au nom de la société MAISONS AXIAL, aucun élément du dossier ne permettant de constater que M. X... lui-même ait réglé directement ces derniers,
- M. D... et M. E..., anciens salariés responsables de travaux au sein de la société MAISONS AXIAL, attestent avoir suivi le chantier X... pour le compte de leur employeur,
- l'attestation d'assurance jointe à l'acte de vente de la maison en septembre 1994, désigne expressément le constructeur comme la société MAISONS AXIAL,
- aucun contrat de construction d'une maison individuelle n'a jamais été souscrit entre M. X... et la société MAISONS AXIAL.
Il est ainsi clairement établi, que par l'intermédiaire de la société MAISONS AXIAL qu'il dirigeait, M. X... a fait construire pour son propre compte la maison qu'il a immédiatement vendue aux époux Y... dès l'achèvement des travaux.
L'article 1792-1 2o du code civil dispose qu'est réputé constructeur notamment toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire.
M. X... doit donc être considéré comme constructeur de la maison vendue à M. et Mme Y..., confirmant en cela la décision du premier juge.
Les désordres susvisés relevant de la garantie légale instituée par les dispositions de l'article 1792 du code civil, la responsabilité présumée de M. X... doit donc être retenue et ce dernier condamné in solidum avec la société AMC à payer aux époux Y... les sommes susvisées de 60. 356, 55 € TTC au titre des travaux de réfection retenus par l'expert, 7. 000, 00 € à titre de dommages-intérêts pour privation de jouissance et 2. 057, 00 € au titre de l'assurance dommages-ouvrage complémentaire, outre actualisation dans les mêmes conditions que ci-dessus et intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

- IV-Sur le recours subrogatoire de la société AMC à l'encontre de M. X... Yvan :

M. X... conclut à la prescription de l'action en garantie décennale à son encontre si sa qualité de constructeur est retenue.
La société d'assurance AMC soutient d'abord que M. X... a renoncé au moins tacitement à l'exception de prescription ; elle invoque ensuite la faute dolosive de ce dernier qui n'a cessé de contester sa qualité de constructeur en usant de manoeuvres organisées destinées à tromper les parties.
La qualité de constructeur a été reconnue à M. X... sans que la cour ni le tribunal n'aient été amenés à se prononcer sur la qualité de constructeur de la société MAISONS AXIAL qui n'a pas été attraite à la procédure.
Il ressort des documents du dossier que si la compagnie d'assurance AMC a été interpellée à plusieurs reprises dans le délai décennal par les acquéreurs, M. X... n'a pour sa part été assigné en référé expertise par les époux Y... que le 6 avril 2005 et au fond que le 10 octobre 2006, soit hors du délai de garantie décennale prévu par l'article 1792-4-3 du code civil, expirant le 8 juillet 2004.
Alors même que la prescription aujourd'hui invoquée était déjà acquise, M. X... n'a cependant jamais fait état de celle-ci dans le cadre des procédures de référé expertise, référé provision ou encore au fond, en première instance, ayant toujours assisté ou été représenté au cours des opérations d'expertise ; il doit donc être considéré comme ayant tacitement renoncé à se prévaloir de ce moyen, en application des dispositions de l'article 2251 du code civil.
En sa qualité de constructeur, il doit être condamné à relever et garantir l'assureur dommages-ouvrage AMC, dont la seule vocation est d'assurer un préfinancement des travaux, de l'intégralité des condamnations susvisées prononcées à son encontre, à l'exception du doublement du taux de l'intérêt légal.

- V-Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Il convient d'allouer aux époux Y..., à la charge in solidum de la société AMC et de M. X... Yvan, une somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; M. X... devra garantir la société AMC de ladite condamnation.
Les demandes supplémentaires de ce chef doivent être rejetées.

PAR CES MOTIFS LA COUR

Réformant le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 24 novembre 2009 et y ajoutant,
Condamne in solidum la société AMC et M. X... Yvan à payer à M. Y... Bernard et Mme B... épouse Y..., les sommes de :

-60. 356, 55 € TTC au titre des travaux de reprise, outre actualisation,-8. 210, 78 € TTC au titre du coût du suivi des travaux par un maître d'oeuvre, outre actualisation,

Dit que l'actualisation sera calculée suivant l'indice BT 01, le premier indice connu étant daté du 16 janvier 2006 et le second indice étant celui paru au jour du jugement,
Dit que ces sommes porteront intérêt au double du taux légal à compter de l'assignation, soit le 10 octobre 2006, en ce qui concerne la société AMC et au taux légal en ce qui concerne M. X...,
Condamne in solidum la société AMC et M. X... Yvan à payer à M. Y... Bernard et Mme B... épouse Y..., les sommes de :
-7. 000, 00 à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice de jouissance,
-2. 057, 00 € au titre du coût de l'assurance dommages-ouvrage afférente aux travaux de réparation, outre d'une part actualisation suivant l'indice BT 01, le premier indice à prendre en compte étant celui connu au 16 janvier 2006, et le second chiffre étant celui paru au jour du jugement et d'autre part, suivant intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit le 10 octobre 2006,
Condamne M. X... Yvan à garantir la société AMC pour toutes les condamnations prononcées contre elle, en principal intérêts et accessoires, sauf doublement du taux légal des intérêts,
Confirme le jugement susvisé pour le surplus,
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,
Condamne in solidum la société AMC et M. X... Yvan à payer à M. Y... Bernard et Mme Mireille B... épouse Y... la somme de 3. 000, 00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamne M. X... Yvan à relever et garantir la société AMC de cette condamnation,
Condamne in solidum la société AMC et M. X... Yvan aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui comprendront notamment les frais d'expertise et seront distraits au profit de Me MOREL en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et condamne M. X... Yvan à relever et garantir la société AMC de cette condamnation.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/07921
Date de la décision : 06/09/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-09-06;09.07921 ?
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