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01/07/2011 | FRANCE | N°08/07420

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 01 juillet 2011, 08/07420


R. G : 08/ 07420
Décision du Tribunal de Commerce de LYON Au fond du 10 octobre 2008

RG : 2007j1055 ch no

X... SARL PEGGY SAGE

C/
Z... Y... Société L'ONGLE D'OR-SARL

COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 1er JUILLET 2011
APPELANTES :
Mme Danièle X... née le 2 Mars 1948 à Annecy... 74130 BONNEVILLE

SARL PEGGY SAGE, représentée par ses dirigeants légaux domiciliés audit siège 295, rue des Hérons Cendrés 74130 BONNEVILLE

représentés par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistés de Maître PR

OUTEAU, avocat au barreau de Thonon les Bains
INTIMES :
Mme Corine Z... épouse Y...... 69780 MIONS

M. Luc Y..., exerçant ...

R. G : 08/ 07420
Décision du Tribunal de Commerce de LYON Au fond du 10 octobre 2008

RG : 2007j1055 ch no

X... SARL PEGGY SAGE

C/
Z... Y... Société L'ONGLE D'OR-SARL

COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 1er JUILLET 2011
APPELANTES :
Mme Danièle X... née le 2 Mars 1948 à Annecy... 74130 BONNEVILLE

SARL PEGGY SAGE, représentée par ses dirigeants légaux domiciliés audit siège 295, rue des Hérons Cendrés 74130 BONNEVILLE

représentés par Me André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistés de Maître PROUTEAU, avocat au barreau de Thonon les Bains
INTIMES :
Mme Corine Z... épouse Y...... 69780 MIONS

M. Luc Y..., exerçant sous l'enseigne NAILS ARTISTE, en redressement judiciaire, par jugement du 3 mars 2009... 69780 MIONS

représentés par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistés de la SELARL BRET et PINTI, avocats au barreau de LYON
Société L'ONGLE D'OR-SARL, représentée par son gérant Monsieur René B...... et... 13001 MARSEILLE

représentée par Me De FOURCROY, avoué à la Cour
INTERVENANTS :
M. Michel C..., agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL L'ONGLE D'OR... 13286 MARSEILLE CEDEX 06

représenté par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assisté de Me Anne-Marie REGNIER, avocat au barreau de LYON
Me Bruno E..., désigné mandataire judiciaire de Monsieur Luc Y..., Institut PEGGY SAGE, par jugement du Tribunal de commerce de Lyon du 3 mars 2009 qui a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de ce dernier puis liquidateur judiciaire désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 12 mai 2010... 69456 LYON CEDEX 06

représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
Me Claude F..., désigné administrateur de Monsieur Luc Y..., Institut PEGGY SAGE, par jugement du Tribunal de commerce de Lyon du 3 mars 2009 qui a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de ce dernier... 69001 LYON

défaillant
******
Date de clôture de l'instruction : 01 Mars 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 14 Avril 2011
Date de mise à disposition : 10 Juin 2011 prorogée au 17 Juin 2011, au 24 Juin 2011 et au 1er juillet 2011, les parties ayant été avisées Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Françoise CUNY, président-Alain MAUNIER, conseiller-Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, conseiller

assistés pendant les débats de Fabienne BEZAULT-CACAUT, greffier
en présence de M. BORRELY et H. GOULLIOUD, Juges consulaires au tribunal de commerce de Lyon
A l'audience, Alain MAUNIER a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt réputé Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Françoise CUNY, président, et par Christelle MAROT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
****
FAITS ET PROCÉDURE
La société PEGGY SAGE, qui a pour activité le négoce de produits de cosmétiques et de parfumerie, a créé trois centres de distribution et de formation, situés respectivement à Paris, Lyon et Marseille, exploités par des commerçants indépendants dans le cadre d'accords de distribution sélective et de licence de marque.
Par acte sous seing privé du 06/ 08/ 2002 les époux Y..., qui exploitaient déjà le centre de Lyon, ont acquis conjointement de Danièle X... Veuve H..., 2505 parts sur les 5000 composant le capital social la société L'ONGLE D'OR qui exploitait le centre de Marseille. Le même jour la cédante a signé à leur profit une promesse de cession portant sur 1995 parts supplémentaires. Les actes ont été signés sur la base d'un prix de 15, 2449 euros la part. Les 500 parts restantes, propriété d'un dénommé A..., ont été cédées le même jour à Madame Y....
Par acte du 10/ 07/ 2006, Madame Z... épouse Y... a acquis les 1995 parts restées propriété de Madame I... pour le prix d'un euro.
Le 30/ 09/ 2006, la société L'ONGLE D'OR a cédé à une société JENNYFER le droit au bail sur les locaux où elle exerçait son activité.
Par lettre du 03/ 10/ 2006, la société PEGGY SAGE, informant les époux Y... de ce qu'elle venait d'apprendre par hasard que par acte du 30/ 09/ 2006 ils avaient cédé le droit au bail de la société L'ONGLE D'OR, a notamment exigé la communication d'une copie de l'acte, et leur a fait savoir qu'en raison du transfert du point de vente sans l'accord du concédant en violation de l'article 7-1 des accords commerciaux, la lettre valait mise en demeure faisant courir le délai d'un mois prévu à l'article 20, avant résiliation de plein droit.
Le 05/ 10/ 2006, Madame Y..., informant Madame Veuve H... de la vente de leurs parts à un groupe financier, lui a adressé un chèque de 30 000 euros en règlement du prix de ses parts sociales afin " qu'il n'y ait aucun quiproquo ".
Par lettre du 19/ 10/ 2006, Madame X... a répondu qu'elle encaissait le chèque " à titre d'acompte " dans l'attente de la communication de l'acte de vente du droit au bail et des parts de la société.
Par lettre du 03/ 10/ 2006, la société PEGGY SAGE a sommé les époux Y... de lui communiquer la copie de l'acte de cession du bail, puis par courrier du 18/ 01/ 2007, a résilié les accords signés le 07/ 04/ 2003 avec la société L'ONGLE D'OR pour la distribution sélective et la licence de marque.
Par assignation délivrée les 23/ 03/ 2007 et 06/ 04/ 2007, Madame X... et la société PEGGY SAGE ont fait citer les époux Y... et la société L'ONGLE D'OR devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins de voir :- prononcer la nullité de l'acte de cession de parts du 10/ 07/ 2006,- ordonner une expertise aux fins d'évaluation du préjudice subi par Madame X... en sa qualité d'associée suite à la cession par la société L'ONGLE D'OR de son droit au bail,- ordonner une expertise aux fins de chiffrer le préjudice subi par la société PEGGY SAGE à la suite de la violation par la société L'ONGLE D'OR des accords commerciaux du 07/ 04/ 2003 et de la rupture brutale des relations commerciales,- condamner solidairement les défendeurs à payer à Madame I... la somme de 48 000 euros à valoir sur son préjudice matériel, et la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral,- condamner les défendeurs solidairement à payer à chacune des demanderesses diverses indemnités à titre de provision,- faire application en faveur des demanderesses des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 10/ 10/ 2008, le tribunal de commerce de Lyon les a déboutées de leurs demandes et a alloué aux époux Y... et à la société L'ONGLE D'OR la somme de 10 000 euros, chacun.
Madame X... et la société PEGGY SAGE ont interjeté appel le 27/ 10/ 2008.
Par jugement du 09/ 04/ 2009, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert le redressement judiciaire, puis par jugement du 12/ 05/ 2010, la liquidation judiciaire de Monsieur Luc Y..., désignant Maître E... comme mandataire liquidateur.
Par jugement du 14/ 09/ 2009, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé la liquidation judiciaire de la société L'ONGLE D'OR, désignant Maître C... comme mandataire liquidateur.
Par arrêt du 25/ 05/ 2010, la Cour de céans a invité les appelants à justifier de leurs déclarations de créance au passif de la société L'ONGLE D'OR et de Monsieur Y..., puis par arrêt du 30/ 09/ 2010 a ordonné la réouverture des débats et renvoyé l'affaire devant le conseiller de la mise en état.
Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le 04/ 01/ 2011, Madame I... Veuve H... et la société PEGGY SAGE demandent à la Cour d'infirmer le jugement déféré et en conséquence de :- prononcer la nullité de l'acte de cession du 10/ 07/ 2006 ;- condamner Madame Y... à payer à Madame I... la somme de 48 000 euros à titre d'indemnité provisionnelle à valoir sur son préjudice matériel, et la somme de 15 000 euros à titre d'indemnité provisionnelle à valoir sur son préjudice moral ;- fixer la créance de Madame X... à l'encontre de la société L'ONGLE D'OR et de Monsieur Y..., tous deux en liquidation judiciaire, à la somme de 48 000 euros au titre du préjudice matériel, et à la somme de 15 000 euros au titre du préjudice moral ;- désigner un expert aux fins de chiffrer le préjudice subi par Madame X... suite à la cession du droit au bail de la société L'ONGLE D'OR ;- fixer la créance de la société PEGGY SAGE sur Monsieur Luc Y... et la société L'ONGLE D'OR, tous deux en liquidation judiciaire et insolvables, au titre de l'atteinte portée à la marque, au titre de la perte du chiffre d'affaires et au titre de la désorganisation du réseau de distribution, à l'euro symbolique pour chacun de ses préjudices ;- condamner solidairement Madame Z... épouse Y..., Maître C... comme mandataire liquidateur de la société L'ONGLE D'OR et Maître E... comme mandataire liquidateur de Monsieur Luc Y... à payer à chacune des appelantes la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la cession de parts du 10/ 07/ 2006 au bénéfice de Madame Z... épouse Y..., elles font valoir que :- la cession a été faite et enregistrée au prix d'un euro, alors que les fonds propres de la société s'élevaient à 84 137, 73 euros au 30/ 09/ 2005, et que le droit au bail a été cédé en septembre 2006 pour le prix de 200 000 euros ;- en l'absence de prix, ou en présence d'un prix dérisoire, la vente est nulle pour défaut de cause ;- la cession du 10/ 07/ 2006 ne peut être prise comme la régularisation de la promesse de vente du 06/ 08/ 2002.

Elles ajoutent que Madame Y... a manqué aux engagements pris dans l'acte de cession de parts, qui s'analyse à la fois comme une stipulation pour autrui où Madame I... obtient de Madame Y... un engagement au profit de la société PEGGY SAGE, et comme une promesse de porte-fort par laquelle la cessionnaire garantit un engagement de la société L'ONGLE D'OR envers cette dernière.
Elles soutiennent que les époux Y... ont agi de manière frauduleuse en faisant croire qu'ils tentaient de relancer l'exploitation du centre de Marseille, alors qu'ils oeuvraient par ailleurs à la cession du droit au bail et à la captation de l'intégralité du prix de cession par l'acquisition des parts restées entre les mains de Madame X....
Sur la violation des accords commerciaux, la société PEGGY SAGE expose que :- aux termes de l'article 7. 1 " Tout transfert du point de vente... est soumis à l'autorisation préalable du concédant qui devra être informé deux mois à l'avance du transfert envisagé " ;- aux termes de l'article 20. 2 " En cas de cession à titre gratuit ou onéreux ou de licitation du point de vente agréé par le distributeur, les présents accords seront résiliés de plein droit " ;- en cédant le bail en violation des clauses contractuelles, la société L'ONGLE D'OR d'une part a engagé sa responsabilité et d'autre part a rompu brutalement les relations commerciales établies entre les parties.

Madame X... fait état du préjudice financier lié à sa qualité d'associée de la société L'ONGLE D'OR, et d'un préjudice moral résultant du fait qu'en signant l'acte de cession et elle a nui aux intérêts de son fils, André H..., gérant de la société PEGGY SAGE.
La société PEGGY SAGE se prévaut des accords commerciaux, qui prévoyaient une résiliation de plein droit en cas de cession du point de vente par le distributeur sans l'accord du concédant. Ensuite, elle réclame réparation du préjudice consécutif à la rupture brutale des relations commerciales imputable à la société L'ONGLE D'OR.
La société PEGGY SAGE fait état comme préjudice, notamment, d'une perte de chiffre d'affaires, de l'atteinte portée à la marque, de la désorganisation du réseau.
Les appelantes soutiennent que la responsabilité personnelle tant de Monsieur Y..., gérant de la société L'ONGLE D'OR, que de son épouse Madame Z..., est engagée à l'égard de chacune des appelantes en raison de la gravité de leurs fautes.
Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le 06/ 12/ 2010, Maître Michel C..., mandataire liquidateur de la société L'ONGLE D'OR, appelé en cause par exploit du 29/ 01/ 2010, demande à la Cour de :- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame X... et la société PEGGY SAGE de leurs demandes, et a mis à leur charge une indemnité pour frais d'instance ;- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société L'ONGLE D'OR de sa demande au titre de la rupture brutale par la société PEGGY SAGE des relations commerciales, et condamner celle-ci à lui payer à ce titre la somme de 100 000 euros.

Dans le corps de ses écritures, il forme une demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur la cession des parts du 10/ 07/ 2006, il explique le prix d'un euro symbolique par les difficultés économiques rencontrées par la société L'ONGLE D'OR, que connaissaient parfaitement les appelantes.
A l'appui de ses demandes reconventionnelles, il fait valoir que :- la rupture des relations commerciales par la société PEGGY SAGE, notifiée par lettre du 03/ 10/ 2006, a eu pour conséquence de placer la société L'ONGLE D'OR en état de cessation de paiement ;- la cession du droit au bail ne constituait pas une violation des relations commerciales ;- même si les dispositions contractuelles prévoyaient qu'un changement d'actionnariat mettra fin à la relation, il n'en reste pas moins que les conditions de la rupture ont entraîné un état de cessation de paiement et la liquidation judiciaire de la société L'ONGLE D'OR. Aux termes de ses dernières conclusions, signifiées le 07/ 12/ 2010, Maître E... en qualité de mandataire liquidateur de Monsieur Y..., demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame X... et la société PEGGY SAGE de leurs demandes et mis à leur charge une indemnité pour frais d'instance, et d'y ajouter en les condamnant au paiement de la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts et une indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En premier lieu, il s'étonne que Madame X... en poursuivant l'annulation de la cession de parts du 10/ 07/ 2006 choisisse ainsi, s'il est fait droit à la demande, d'avoir à restituer le prix de vente de 30 000 euros qu'elle a encaissé, pour récupérer les parts d'une société en liquidation judiciaire. Il explique le prix de vente d'un euro par la dispense du cédant de toute garantie d'actif et de passif, et par la situation économique dégradée de la société L'ONGLE D'OR. Il souligne que finalement la cession a eu lieu aux conditions financières prévues dans la promesse de vente de 2002, et précise que les époux Y... ont ensuite eux-mêmes cédé à la société ALIZÉE PARTICIPATION pour un euro l'intégralité des parts qu'ils détenaient dans la société L'ONGLE D'OR.
Il fonde sa demande de dommages-intérêts sur l'acharnement des appelantes à l'encontre de Monsieur Y....
Aux termes de ses dernières écritures, signifiées le 30/ 03/ 2010, Madame Z... épouse Y..., conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame X... et la société PEGGY SAGE de leurs demandes et mis à leur charge une indemnité pour frais d'instance, et à la condamnation des appelantes à lui payer la somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts et une indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait siens les arguments de Maître E... ès qualités en réponse à la demande en annulation de la cession du 10/ 07/ 2006, et, sur la recherche de sa responsabilité personnelle, conteste les fautes qui lui sont reprochées, soulignant que Madame X... a signé l'acte de cession du 10/ 07/ 2006 en toute connaissance de cause, que finalement la cession a été réalisée aux conditions prévues dans la promesse de 2002.
Elle fonde également sa demande de dommages-intérêts sur l'acharnement dont elle se dit victime.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 01/ 03/ 2011.
SUR CE
Sur l'exécution de l'arrêt du 25/ 05/ 2010
Les déclarations de créances de la société PEGGY SAGE d'une part et de Madame X... d'autre part au passif de Monsieur Y... ont été versées aux débats. Les demandes le concernant sont donc recevables.

En revanche, dans leur courrier de transmission en date du 17/ 06/ 2010, les appelantes font savoir que s'agissant de la société L'ONGLE D'OR il n'y a pas eu de déclaration de créance compte tenu de son caractère irrécouvrable. Les demandes formées à l'encontre de celle-ci sont donc irrecevables.
Sur les demandes de Madame X...
Sur la demande en annulation de l'acte de cession de parts du 10/ 07/ 2006
En application des dispositions de l'article 1131 du code civil : " L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ".
En l'espèce, il ressort des éléments au dossier que le 10/ 07/ 2006. Madame Y... a versé à Madame I... la somme de 1 euro pour prix des 1995 parts sociales cédées, sans qu'aucun complément de prix soit convenu. Le versement de la somme de 30 000 euros intervenu en octobre 2006 n'a été reçu par Madame I... qu'à titre d'acompte sur l'indemnité qu'elle estimait lui être due en réparation de ses préjudices.
Ce versement tardif constitue même l'aveu de la vileté du prix
La demande en annulation de la vente à ce titre est donc fondée.
Sur les demandes de dommages-intérêts
La demande n'est pas justifiée en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de Monsieur Y..., qui n'était pas partie à l'acte du 10/ 07/ 2006.
Il ressort des éléments au dossier, que le 10/ 07/ 2006, Madame Y... a acquis les parts restantes de la société L'ONGLE D'OR aux fins de détenir, avec son mari, l'intégralité du capital social de la Société, qu'ils ont ainsi pu céder le 17/ 07/ 2006 à une société tierce, la société ALIZÉE PARTICIPATION, pour le prix d'un euro selon l'acte de cession versé aux débats.
Madame X... fait état de la cession le 30/ 09/ 2006 par la société L'ONGLE D'OR du droit au bail au prix de 200 000 euros " à qu'elle croit savoir ", et se prévaut en conséquence d'un préjudice financier de 48 000 euros, correspondant selon ses écritures à sa part dans le prix de vente sur la base des 39, 9 % du capital social, après déduction de la somme reçue en octobre 2006.
Elle ne produit pas l'acte de cession du droit au bail, dont elle fait état, auquel elle n'a pas été partie, ni aucune des parties dans la cause, et n'a pas demandé au juge d'ordonner qu'il soit produit par les tiers qui le détiennent.
En l'état, La Cour relève que :- la cession de l'intégralité du capital social de la société L'ONGLE D'OR par les époux Y... a suivi immédiatement l'acquisition par eux de la participation de Madame X... ;- cette acquisition opérée pour l'euro symbolique ne correspondait pas à la levée de l'option prévue dans la promesse de vente du 06/ 08/ 2002 ; elle laissait entendre que la situation comptable nette de la société était négative ;- Madame Y... n'a versé à Madame I... la somme de 30 000 euros, le 05/ 10/ 2006, qu'après réception de la lettre de la société PEGGY SAGE en date du 03/ 05/ 2006, lui reprochant ainsi qu'à son mari la cession du droit au bail " pour la jolie somme de 200 000 euros " après avoir fait signé à Madame X... la cession des 40 % des parts qu'elle détenait encore dans la Société pour 1 euro symbolique dans des " conditions particulièrement malhonnêtes " ;- dans la lettre à Madame I... en date du 05/ 10/ 2006, accompagnant le versement du complément de prix, Madame Y... ne conteste pas la cession en septembre 2006 du droit au bail par la société L'ONGLE D'OR à " un groupe financier (qui) a fait ce qu'il avait à faire ", ni le prix de vente de 200 000 euros.

Du fait de ces manoeuvres Madame X... a été conduite en juillet 2006 à céder pour un euro symbolique sa participation dans une société, qui détenait en tout cas dans ses actifs un droit au bail d'une valeur de 200 000 euros.
Cependant, il est constant qu'en octobre 2006, elle a reçu une somme de 30 000 euros, qu'elle a acceptée à titre d'acompte sur les indemnités qu'elle estimait lui être dues en raison des agissements des époux Y..., et elle ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice plus important. En effet, l'actif net au bilan arrêté au 30/ 09/ 2005, versé aux débats, s'élevait à 163 652, 90 euros, ce qui valorisait alors la participation de Madame X... à 163 652, 90 euros x 39, 9 % = 65 297, 51 euros, mais il ressort des correspondances échangées entre les parties, versées aux débats, qu'au cours de l'exercice suivant la société a rencontré de graves difficultés, justifiant les interventions et conseils de Monsieur H..., et a vu sa situation se dégrader sérieusement. Ces éléments permettent de dire, sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise, qu'en juillet 2006, la participation de Madame X... n'avait pas une valeur supérieure à la somme de 30 000 euros qu'elle a encaissée.
De surcroît, il convient de rappeler qu'en juillet 2006, Madame Y... se trouvait au bénéfice d'une promesse de vente qui lui permettait d'acquérir la participation de Madame X... dans la société L'ONGLE D'OR pour le prix de 30 413, 57 euros (1995 x 15, 2449 euros) correspondant à peu de choses près à la somme finalement versée.
La demande de dommages-intérêts pour préjudice matériel sera donc rejetée.
En revanche, il lui sera alloué la somme de 5000 euros en réparation de son préjudice moral, en raison des relations de confiance qu'elle a entretenues jusque là avec Madame Y..., et dont celle-ci a abusé.
Sur les demandes de la société PEGGY SAGE
Comme exposé supra, les demandes la société PEGGY SAGE à l'encontre de la société L'ONGLE D'OR sont irrecevables.
En ce qui concerne, Monsieur Y..., dont la responsabilité personnelle est recherchée pour les fautes qu'il aurait commises comme gérant de la société L'ONGLE D'OR, la société PEGGY SAGE articule trois reproches :- ne pas avoir tenu ses engagements pris ;- avoir fait violer par la société L'ONGLE D'OR ses obligations contractuelles après la cession de parts du 10/ 07/ 2006 ;- avoir défiscalisé frauduleusement l'opération.

Ce dernier reproche est étranger au présent litige.
En droit, selon l'article L223-22, alinéa 1, du code de commerce : " Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société, ou envers les tiers,..., des fautes commises dans leur gestion ".

En l'espèce, il ressort des pièces au dossier qu'en qualité de gérant de la société L'ONGLE D'OR, Monsieur Y... avait connaissance des accords commerciaux du 07/ 04/ 2003 liant les deux sociétés, aux termes desquels, article 21-1 " La présente licence est concédée intuitu personae, en raison des liens particuliers qui existent entre la société L'ONGLE D'OR en la personne de ses associés, Monsieur et Madame Luc Y... et la société PEGGY SAGE. (...) Elle ne pourra en aucun cas être cédée (...) directement ou indirectement,... ". Il a donc commis une faute grave en cédant sans l'accord de la société PEGGY SAGE l'intégralité des parts qu'avec son épouse il détenait dans la société L'ONGLE D'OR, alors que cette cession était de nature à entraîner la résiliation des accords commerciaux.
Les deux premiers reproches sont donc justifiés.
Le préjudice de la société PEGGY SAGE est à tout le moins dans la perte d'une chance de se développer dans la région PACA.
En conséquence, la Cour fixera la créance de dommages-intérêts de la société PEGGY SAGE au passif de Monsieur Y... à un euro.
Sur les demandes de Maître C... ès qualités
Comme indiqué supra, la société L'ONGLE D'OR a violé la clause des accords commerciaux interdisant toute cession directe ou indirecte du capital en raison du caractère intuitu personae du contrat de licence.
En outre, Maître C... ès qualités ne justifie pas de ce que la cession du droit au bail est intervenue avec l'accord de la société PEGGY SAGE. Ce supposé accord ne saurait résulter de la prétendue immixtion récurrente de celle-ci dans la gestion de la société L'ONGLE D'OR.
En cédant le droit au bail sans l'accord de la société PEGGY SAGE, la société L'ONGLE D'OR a également violé l'obligation prévue à l'article 7 des accords commerciaux aux termes duquel : " Tout transfert du point de vente, rattaché à l'institut de beauté et au centre de formation de distributeur, de son lieu actuel d'exploitation dans un lieu de la même ville, ou d'une autre ville est soumis à l'autorisation préalable du concédant qui devra être informé au moins deux mois à l'avance ".
La société PEGGY SAGE a donc à bon droit mis fin au contrat en faisant jouer la clause de résiliation de plein droit après mise en demeure.
De surcroît, Maître C... ne démontre pas que la cessation de paiement de la société L'ONGLE D'OR, dont le capital a été cédé pour l'euro symbolique en juillet 2006, est la conséquence de la rupture des relations commerciales avec la société PEGGY SAGE.
En conséquence, il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts.
Sur les demandes de Maître E... ès qualités
Maître E... ès qualités ne justifie pas d'un acharnement fautif des appelantes à l'encontre de Monsieur Y.... Il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts.
Sur les demandes de Madame Y...
Madame Y... succombe sur la demande qui est formée à son encontre. Elle sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts au titre du prétendu acharnement des appelantes à son encontre.
Sur les demandes accessoires
Madame Y... sera condamnée à payer à Madame I... la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les autres demandes faites à ce titre seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société L'ONGLE D'OR et les époux Y...- Z... de leurs demandes de dommages-intérêts
L'infirme pour le surplus
Statuant à nouveau
Prononce la nullité de la vente du 10 juillet 2006 pour vileté du prix
Déboute Madame Danièle X... Veuve H... de sa demande de dommages-intérêts en ce qu'elle excède la somme de 30 000 euros qu'elle a déjà encaissée
La déboute de sa demande d'expertise
Déclare la société PEGGY SAGE irrecevable en ses demandes à l'encontre de la société L'ONGLE D'OR en liquidation judiciaire
Fixe la créance de la société PEGGY SAGE au passif chirographaire de Monsieur Luc Y... à la somme d'un euro
Déboute Madame Danièle X... Veuve H... de sa demande aux fins d'admission de sa créance de dommages-intérêts au passif de Monsieur Luc Y...
Condamne Madame Corine Z... épouse Y... à payer à Madame Danièle X... Veuve H... la somme de 5000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral
Condamne Madame Corine Z... épouse Y... à payer à Madame Danièle X... Veuve H... la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Déboute les autres parties de leurs demandes à ce titre
Condamne les intimés aux dépens de première instance et d'appel, et dit que pour ce qui concerne la société L'ONGLE D'OR et Monsieur Luc Y..., ils seront employés en frais de liquidation judiciaire
Dit que les dépens de l'instance d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT
F. BEZAULT-CACAUT, F. CUNY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 08/07420
Date de la décision : 01/07/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Analyses

POURVOI N°: H1124407 du 08/09/2011 ( AROB )


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-07-01;08.07420 ?
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