La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2011 | FRANCE | N°10/01144

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 09 juin 2011, 10/01144


R. G : 10/ 01144

Décision du tribunal de commerce de Lyon Au fond du 12 janvier 2010

RG : 2009J2612
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 09 Juin 2011
APPELANTE :
SARL SEP 15 quai Romain Rolland 69005 LYON

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Maître Eric POUDEROUX, avocat au barreau de LYON

INTIME :

Patrick Y...né le 13 Juillet 1946 à CHATUZANGE LE GOUBET (DROME) ... 69300 CALUIRE-ET-CUIRE

représenté par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre, avoués à la Cour
assistÃ

© de Maître Yves REVELLIN, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2010/ 005995...

R. G : 10/ 01144

Décision du tribunal de commerce de Lyon Au fond du 12 janvier 2010

RG : 2009J2612
COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 09 Juin 2011
APPELANTE :
SARL SEP 15 quai Romain Rolland 69005 LYON

représentée par Me Christian MOREL, avoué à la Cour
assistée de Maître Eric POUDEROUX, avocat au barreau de LYON

INTIME :

Patrick Y...né le 13 Juillet 1946 à CHATUZANGE LE GOUBET (DROME) ... 69300 CALUIRE-ET-CUIRE

représenté par la SCP DUTRIEVOZ Eve et Jean-Pierre, avoués à la Cour
assisté de Maître Yves REVELLIN, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2010/ 005995 du 22/ 04/ 2010 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Lyon)
******

Date de clôture de l'instruction : 25 Mars 2011

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 13 Avril 2011
Date de mise à disposition : 09 Juin 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Michel GAGET, président-Christine DEVALETTE, conseiller-Philippe SEMERIVA, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Philippe SEMERIVA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
**** EXPOSÉ DU LITIGE

La société SEP est appelante du jugement qui a dit que M. Y...n'était pas seulement caution dans le cadre du protocole de vente du fonds de commerce de bar et restauration rapide appartenant à cette société, mais qu'il en était bien l'acquéreur, et recevable à ce titre à obtenir restitution des sommes versés avant la rupture de ce contrat.

Ce jugement a encore retenu que les conséquences tirées du défaut de respect des conditions du prix d'acquisition n'étaient pas opposables à M. Y..., que le contrat de location-gérance du fonds, passé avec l'ex-épouse de ce dernier, était sans lien avec le protocole de vente du fonds de commerce et que le cédant n'avait de surcroît jamais avisé M. Y...des difficultés de paiement de la locataire-gérante.
Il a en conséquence décidé que la société SEP avait engagé sa responsabilité et l'a condamnée à rembourser à M. Y...la somme de 53 500 euros payée au titre de la vente, outre intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2009 et à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
*

La société SEP maintient que le demandeur n'a pas qualité à agir, en ce qu'il est caution, ce qui était l'intention commune des parties au vu de l'interprétation que rend nécessaire la contradiction, dans l'acte de cession, entre le texte dactylographié qui le qualifie d'emprunteur et la mention manuscrite de cautionnement qui y figure in fine, et comme le montre en outre l'historique des relations entre les parties, notamment celui de la location-gérance consentie par la société SEP à Mlle A...avant, puis après son mariage avec M. Y...et leur divorce.

Sur le fond, elle fait valoir que M. Y...ne lui a réglé aucune fraction de la somme en litige et soutient :
- que selon le contrat, la défaillance de l'acquéreur entraîne " la rupture de plein droit " et que " les montants déjà versés seront alors perdus au profit du vendeur ",
- qu'aucune mise en demeure n'était nécessaire, que les faits donnant lieu à l'application de ces stipulations sont établis et que M. Y...a présenté sa réclamation alors que la rupture de plein droit s'était déjà produite,
- que ce dernier était parfaitement avisé de l'évolution de la situation et ne disposait pas, en toute hypothèse, des moyens financiers d'acquérir le fonds, toutes les sommes ayant été versées par Melle A....
La société SEP demande en conséquence d'infirmer le jugement, de dire M. Y...irrecevable en ses demandes, de les rejeter au fond, dans la mesure où les sommes en litige constituent des biens propres de Melle A...et de le condamner au paiement d'une somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles.
*

M. Y...soutient qu'il résulte clairement de l'acte de cession qu'il était acquéreur du fonds et caution de la locataire-gérante, et que la société SEP est à l'origine de la défaillance dans le respect des stipulations contractuelles, pour lui avoir caché la situation et laissé sans réponse ses demandes tendant à savoir si un arriéré existait.

Il en conclut qu'il a qualité à agir et que le vendeur, qui a provoqué la défaillance qui lui profite, ne peut s'en prévaloir.
M. Y...demande de dire l'appel irrecevable et mal fondé, de confirmer le jugement et de condamner la société SEP à lui payer les sommes de 10 000 euros pour résistance abusive et de 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
* *

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel est recevable, M. Y...ne formulant aucun argument à l'appui de sa contestation sur ce point et le dossier de la procédure ne conduisant pas à mettre en cause cette recevabilité.

La Cour partage en tout point l'analyse du tribunal en ce qui concerne la qualité d'acquéreur de M. Y....

Il convient seulement de souligner :
- que, certes, le contrat du 1er avril 2007 mentionne que " pour l'acquisition du fonds de commerce ci-dessus désigné, durant toute la durée du présent protocole, M. Y...Patrick et Mme A...Y...Céline resteront caution solidaire jusqu'au dernier versement " et la signature de M. Y...est accompagnée de la mention " bon pour caution ".
- que cependant, la stipulation citée n'a aucun sens en ce qui concerne Mlle A..., dont il n'est pas contesté qu'elle est acquéreur, de sorte qu'on ne peut conférer à une clause aussi maladroite une portée décisive quant à la qualification de l'engagement de M. Y...,
- que par ailleurs, selon le protocole ce sont " les signatures " qui auraient dû être suivies de la mention du " bon pour caution " ; le fait que seule celle de M. Y...porte cette précision manuscrite n'a guère d'autre portée que celle d'un oubli de la part de Melle A....
L'acte est ambigu, mais ces mentions ne peuvent fonder la thèse de la société SEP, dès lors que les autres stipulations, que le tribunal a rappelées, montrent que la qualité de coacquéreurs de M. Y...et de Melle A...est plusieurs fois affirmée et répétée en mêmes termes, ce qui ne peut être le fruit d'une erreur.

Quant à la prétendue pratique du contrat, on peut admettre, quelle que soit la généralité des termes employés par la page 13 du contrat de location-gérance, que la société SEP avait logiquement en vue de céder le fonds à Melle A..., locataire-gérante et exploitante de la licence de débit de boissons.

C'est d'ailleurs ce qu'envisageait un précédent protocole, du 16 novembre 2003, qui prévoit même une remise sur le prix pouvant être mise en relation avec cette qualité de locataire gérante.
Mais il ne s'en déduit pas que la société SEP se refusait en 2007 à consentir cette cession au couple que Melle A...formait alors avec M. Y..., d'ailleurs déjà caution des obligations résultant de cette location-gérance.
Enfin, les courriers dont elle se prévaut n'émanent que d'elle-même ou de Melle A..., mais non de M. Y..., de sorte qu'ils peuvent refléter la position de l'une ou de l'autre, mais non point celle de chacune des parties concernées, au point de caractériser leur intention commune au moment de l'engagement.

Il résulte donc des termes essentiels du contrat et des éléments propres à guider la recherche de l'intention commune des parties que M. Y...était coacquéreur du fonds, peu important qu'il ne soit pas inscrit au registre du commerce, la forme d'exploitation étant indifférente à cette qualité.

C'est dès lors en violation de cette convention que la société SEP n'a entretenu de relations qu'avec Melle A..., sans jamais informer M. Y...des difficultés de paiement des échéances prévues et sans donc lui permettre de régulariser la situation, de sorte qu'elle est à l'origine de la défaillance qui a conduit à la résolution de la vente.

Elle n'établit pas, notamment, compte tenu des observations déjà faites par le tribunal, et même au vu du témoignage de M. B..., que M. Y...aurait été concrètement avisé de la situation et mis en mesure d'y faire face ; en effet, à supposer même établis les faits relatés dans cette attestation, il en résulte qu'au cours du mois de décembre 2007, M. Y...a discuté avec la gérante de la société SEP, qu'il n'a pas manifesté le souhait d'exploiter le fonds et que sa situation financière était catastrophique ; mais ces considérations ne pallient pas les conséquences de l'absence d'information précise, chiffrant les arriérés et ouvrant un choix, d'autant que la rupture du contrat exposait l'acquéreur à une perte considérable et que la convention ne prévoyait pas de date précise au-delà de laquelle nulle régularisation ne serait plus possible, de sorte qu'à supposer que M. Y...ait traversé une mauvaise passe, le rétablissement de sa situation financière dans des délais raisonnables n'était pas à écarter à l'époque.

Dans ces conditions, la société SEP ne saurait se prévaloir à l'encontre de M. Y...de la stipulation fondant sa défense, selon laquelle " les montants déjà versés par l'acquéreur seront perdus au profit du vendeur " ; elle doit restituer les sommes en litige.

Outre qu'elle n'est pas recevable à opposer les droits prétendus de Melle A..., dont elle n'a pas l'exercice, elle ne saurait objecter que seule cette dernière aurait réglé les montant en litige, l'origine des paiements ne concernant que les rapports entre coacquéreurs.

En toute hypothèse, les explications fournies et les pièces produites à propos des disponibilités financières de M. Y...à l'époque de la vente ne permettent pas de considérer qu'il aurait été insolvable à cette époque, de sorte que la société SEP ne prouve pas le fait sur lequel elle fonde sa thèse.
Par ailleurs, le fait que le mandataire judiciaire n'a pas réclamé la restitution des fonds dans le cadre de la liquidation judiciaire est sans incidence sur le droit propre de M. Y...d'agir en ce sens.

Il convient donc de confirmer le jugement prononçant la condamnation de la société SEP au " remboursement ", en tout cas au paiement, de la somme de 53 500 euros.

Le courrier du 9 janvier 2008 ne constitue pas une mise en demeure de procéder à ce paiement, mais ne tend qu'à voir le vendeur indiquer si des échéances étaient impayées à cette date ; en conséquence, les intérêts moratoires ne sont dus qu'à compter de la mise en demeure, qui résulte, comme l'a retenu le tribunal, de l'assignation ; celle-ci n'est pas produite ; le tribunal la date du 8 septembre 2009, ce qui ne donne pas lieu à observations de la part des parties ; il y a lieu en conséquence, malgré l'indication d'une autre date dans l'exposé des faits figurant dans le jugement, de confirmer sa décision sur ce point.

Par ailleurs, compte tenu des circonstances, qui ont pu laisser croire à la société SEP que M. Y...ne donnerait aucune suite à une éventuelle proposition de régularisation des retards de paiement, sa résistance à la réclamation ne peut être qualifiée d'abusive.

Il n'y a pas lieu d'écarter l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'indemnité à ce titre devant cependant tenir compte du montant déjà arbitré sur ce point par le tribunal.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,
- Dit l'appel recevable,
- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, hors celle portant condamnation pour résistance abusive,
- Statuant à nouveau sur ce point, rejette la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société SEP à payer à M. Y...une somme complémentaire de 1 000 euros,
- La condamne aux entiers dépens, recouvrables selon les lois sur l'aide juridictionnelle, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Dutriévoz, avoué.
LE GREFFIERLE PRESIDENT

Joëlle POITOUXMichel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 10/01144
Date de la décision : 09/06/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Analyses

Pourvoi numéro R 1122759 du 09/08/2011 (AROB)


Références :

ARRET du 04 décembre 2012, Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 4 décembre 2012, 11-22.759, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-06-09;10.01144 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award