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07/06/2011 | FRANCE | N°10/01507

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 07 juin 2011, 10/01507


R. G : 10/ 01507

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 12 janvier 2010
RG : 2008/ 05390 ch no3

X... Y...
C/
Z... SA MAAF ASSURANCES A...

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 07 Juin 2011

APPELANTS :
Monsieur Paolo X... né le 05 Juillet 1962 à NAPLES (ITALIE)... 69300 CALUIRE ET CUIRE
représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de Me DUFOUR, avocat au barreau de LYON

Mademoiselle Agnès Y... née le 31 Mai 1967 à BOURG-EN-BRESSE (01000)... 69300 CALUIRE-ET-CUIRE r>représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me DUFOUR, avocat au barreau de LYON

IN...

R. G : 10/ 01507

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON Au fond du 12 janvier 2010
RG : 2008/ 05390 ch no3

X... Y...
C/
Z... SA MAAF ASSURANCES A...

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 07 Juin 2011

APPELANTS :
Monsieur Paolo X... né le 05 Juillet 1962 à NAPLES (ITALIE)... 69300 CALUIRE ET CUIRE
représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assisté de Me DUFOUR, avocat au barreau de LYON

Mademoiselle Agnès Y... née le 31 Mai 1967 à BOURG-EN-BRESSE (01000)... 69300 CALUIRE-ET-CUIRE
représentée par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me DUFOUR, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

SA MAAF ASSURANCES représentée par ses dirigeants légaux Chauray 79036 NIORT CEDEX
représentée par la SCP BAUFUME-SOURBE, avoués à la Cour
assistée de Me DESCOUT, avocat au barreau de LYON

Maître Bernard A... ès qualités de liquidateur judiciaire de la Monsieur Marc Olivier Z... exerçant sous l'enseigne PLOMBERIE Z... ...69003 LYON 03

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 01 Avril 2011
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 12 Avril 2011
Date de mise à disposition : 07 Juin 2011 Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Catherine ZAGALA, conseiller
assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Pascal VENCENT a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Les consorts X... et Y... ont acquis en indivision un appartement sis dans un immeuble ... à CALUIRE (69300) courant 2006.
Ils en ont entrepris la réfection totale, le lot plomberie sanitaire étant confié à monsieur Z... lequel leur a remis un devis d'un montant de 12. 999, 99 euros portant ensuite par deux avenants à la somme de 15. 203. 89 euros
Il était convenu entre les parties que l'entreprise Z... devait achever le chantier le 15 octobre 2006 afin que les consorts X... et Y... puissent emménager dans leur appartement fin octobre 2006.
A la date initialement prévue de fin de chantier, l'entreprise Z... a reçu des règlements d'un montant de 11. 915 euros. Mais les maîtres de l'ouvrage ont dû constater d'une part, le non achèvement des travaux et d'autre part, un nombre important de malfaçons et de désordres.
Suivant ordonnance du 13 février 2007, le juge des référés du tribunal de grande instance de LYON, sollicité par les maîtres de l'ouvrage, a désigné monsieur Raymond D... en qualité d'expert, avec mission habituelle en pareille matière.

L'expert judiciaire a souhaité que l'assureur de monsieur Z... soit appelé dans la cause.
Les consorts X... et Y... ont donc assigné la MAAF ASSURANCES, ès qualités d'assureur de monsieur Z... afin que les opérations d'expertise confiées à monsieur D... lui soient déclarées communes et opposables.
Cet expert a déposé son rapport le 23 janvier 2008.
Les maîtres de l'ouvrage ont ensuite saisi le juge du fond aux fins d'obtenir condamnation solidaire de monsieur Z... et de son assureur MAAF à leur payer :-27. 867 euros au titre des travaux de reprise,-3. 210, 83 euros au titre de la direction et de la surveillance des travaux de remise en état,

-27. 700 euros au titre des préjudices techniques,-10. 962 euros (sauf à parfaire) au titre des préjudices moraux.
Par jugement rendu le 12 janvier 2010, le tribunal de grande instance de LYON après avoir mis hors de cause la compagnie MAAF au motif que les désordres n'étaient pas éligibles à la garantie décennale faute de réception a :- condamné monsieur Z... à payer aux consorts X.../ Y... la somme de 63. 446, 73 euros en principal et 2. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné les consorts X.../ Y... à payer à monsieur Z... la somme de 2. 002, 85 euros au titre du solde du chantier,- ordonné l'exécution provisoire de la décision,- débouté les parties du surplus de leurs prétentions.
Les consorts X.../ Y... ont régulièrement interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a mis hors de cause la MAAF, assureur de Monsieur Z... et en ce que la juridiction aurait minoré le préjudice moral de monsieur X... et de mademoiselle Y... en le chiffrant à la seule somme de 6. 000 euros.
Il est soutenu en substance qu'il y a eu au minimum réception tacite des travaux le 3 novembre 2006 par la mise en route du chauffage et emménagement dans les locaux des meubles du couple.
A la date du 3 novembre 2006, monsieur X... et mademoiselle Y... auraient démontré leur volonté non équivoque d'accepter l'ouvrage.
Au plan financier, même si on devait retenir que monsieur X... et mademoiselle Y... n'avaient en définitive réglé que la somme de 11. 915 euros, il n'en demeurerait pas moins, selon les appelants, que cela représente près de 86 % du montant total des travaux.
Compte tenu de ce paiement quasi intégral et au regard de la jurisprudence en vigueur sur la réception tacite, il devrait être considéré qu'il y a bien eu une réception de l'ouvrage.
Monsieur X... et mademoiselle Y... demandent à la Cour de fixer à la somme forfaitaire de 15. 000 euros le montant de leurs préjudices moraux.
Par jugement en date du 24 mars 2010, le tribunal de commerce de Lyon a déclaré monsieur Z..., exerçant sous l'enseigne PLOMBERIE Z... en liquidation judiciaire et a désigné maître A... en qualité de liquidateur judiciaire.
Ce dernier régulièrement assigné n'a pas constitué avoué.

De son côté, la compagnie MAAF conclut à la confirmation de ce jugement de mise hors de cause et demande à la cour de constater, en effet, que les maîtres d'ouvrage ont réceptionné avec réserves le 28 octobre 2006 l'installation de chauffage central outre les prestations de monsieur Z... concernant l'installation d'eau sanitaire, constater que tous les désordres étaient apparents et que de nombreux ouvrages n'étaient pas terminés, débouter les consorts X.../ Y... de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions en tant que dirigées à l'encontre de MAAF assurances.
A titre reconventionnel, il est demandé 3. 000 euros et 4. 000 euros pour des frais irrépétibles exposés tant devant les premiers juges que devant la cour en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il est soutenu à l'appui de ces prétentions sur l'absence de garantie mobilisable au titre du contrat assurance construction qu'il est manifeste qu'aucun procès-verbal de réception n'a été régularisé entre les parties.

Sur la prétendue réception tacite, les consorts E... Y... auraient indiqué à plusieurs reprises, à ce sujet, une prise de possession des lieux le 28 octobre 2006 et contre toute attente, dans leurs dernières écritures, et après plus de quatre ans de procédure, ils prétendent désormais, et pour la première fois, que la prise de possession des lieux n'est pas intervenue le 28 octobre 2006, mais le 3 novembre 2006.
L'assureur soutient que pas plus que pour le 28 octobre la preuve ne serait rapportée d'une véritable prise de possession à cette date car les ouvrages n'ont pas été réceptionnés sans réserve puisqu'il ressortirait des faits de la cause que monsieur Z... a abandonné le chantier après avoir tenté de remédier aux désordres, non conformités et inachèvements que les maîtres de l'ouvrage lui avaient signalés.
Selon cet assureur, le paiement du prix ou la prise de possession ne peut suffire et ne caractérise pas la réception tacite si d'autres éléments sont signes d'équivoque. Il ne peut y avoir, sans se contredire, une réception tacite sans réserves malgré la non terminaison des travaux et le nombre important de réserves.
Au reste, le paiement du prix serait loin d'être intégral. En effet les appelants justifieraient avoir réglé une somme de 11. 915 euros pour des travaux qui s'élèvent à la somme totale de 15. 203, 90 euros, soit un règlement de 78 % de la somme totale due à monsieur Z....

SUR QUOI LA COUR
Le premier juge a fait une juste et saine appréciation de la réalité des désordres attribués à monsieur Z... et dans la fixation du montant des réparations soit 27. 867, 00 euros au titre des travaux de reprise, 1. 879, 73 euros au titre du surcoût dans la réalisation des travaux de reprise, 27. 700, 00 euros au titre des préjudices techniques.
Ces montants résultant du rapport de l'expert sont en réalité indiscutés.
Reste la demande au titre d'un préjudice moral qui est réel en l'état de l'insalubrité de l'immeuble laissé sans chauffage et des déménagements incessants que les maîtres de l'ouvrage ont du supporter pendant tout le temps que ce chauffage est resté inefficace.
Il convient de porter la condamnation de ce chef à la somme de 10. 000 euros et de réformer la décision en conséquence.
Reste à savoir si monsieur Z... doit voir sa responsabilité recherchée sur le fondement de l'article 1792 après réception ou sur un fondement contractuel pour fautes qui sont en tout état de cause avérées en présence de très nombreuses infractions aux règles de l'art comme relevé à la fois par l'expert et le premier juge.
Il est constant qu'aucune réception écrite et expresse n'est intervenue avant le départ de monsieur Z... du chantier litigieux.
Les maîtres de l'ouvrage font donc appel à la notion de réception tacite laquelle est effectivement admise en droit sous la triple condition cumulative d'une entrée dans les lieux avec une volonté avérée et non équivoque des maîtres de l'ouvrage de recevoir l'ouvrage, du paiement de l'essentiel du prix du marché et de l'absence de réserves nombreuses et importantes.
En l'espèce peu importe que les maîtres de l'ouvrage pour des raisons qui leur appartiennent trouvent opportun de demander à la cour de prendre en considération la date du 3 novembre 2006 aux lieu et place du 28 octobre jusqu'à présent retenue ; seul importe de savoir si au 3 novembre les conditions cumulatives énoncées étaient ou non réunies.
Les appelants sont les premiers à reconnaître que la date de leur emménagement dans leur appartement de CALLUIRE correspond à la fin du préavis légal qu'ils devaient au propriétaire du logement qu'ils quittaient.
Concrètement les intéressés n'avaient pas d'autre issue pour se loger que d'entrer dans leur appartement ce qui obère sérieusement le caractère spontané de leur emménagement et leur volonté de s'approprier par cette démarche les travaux réalisés. La contrainte matérielle et financière de cette arrivée n'échappe pas à la cour.
Concernant les désordres, il est avéré comme résultant de la propre lettre des appelants en date du 28 octobre que l'appartement était considéré par eux comme insalubre pour n'avoir ni chauffage ni sanitaire. A l'évidence à cette date les travaux n'étaient pas susceptibles d'être réceptionnés.
Certes monsieur Z... serait intervenu dans les jours qui suivaient et spécialement donc le 3 novembre, date que les appelants voudraient voir retenir comme correspondant à la réception tacite de ces travaux.
Mais les consorts E... Y... sont encore une fois les premiers à reconnaître dans leur correspondance à monsieur Z... du 8 novembre 2006 que si le chauffage a été mis en fonctionnement c'est en infraction totale avec les règles de l'art les plus élémentaires puisque certains radiateurs n'étaient même pas fixés au mur et fuyaient, aucun équilibrage de l'installation n'avait été réalisée certains radiateurs marchant au détriment des autres, le circuit n'avait pas été purgé et était encombré de gravats et matière boueuse et finalement la chaudière se mettait très rapidement en sécurité rendant à nouveau l'appartement sans chauffage.
De cette même correspondance on comprend que monsieur Z... va sur plusieurs jours tenter diverses manoeuvres de sauvetage sans aucun succès pour faire fonctionner l'installation et s'attacher à finir l'installation sanitaire qui n'était manifestement pas finie le 3 novembre. En définitive ne parvenant pas à faire fonctionner l'installation monsieur Z... finira par abandonner le chantier ce qui est exclusif de toute notion de réception expresse ou tacite.
En réalité l'expert judiciaire a mis en évidence le fait que l'intégralité de l'installation est atteinte de vices tellement graves et rédhibitoires qu'elle ne peut pas fonctionner et doit être reprise intégralement d'où un coût des travaux de reprise sans commune mesure avec le montant du marché signé entre les parties.
De cet ensemble et de ce dernier constat il se déduit que aucune réception tacite n'a pu intervenir, que ce soit le 28 octobre, le 3 novembre ou tout autre jour subséquent, pour la bonne et simple raison que les travaux n'étaient tout simplement pas réceptionnables.
Il peut être enfin noté que le montant total des travaux s'est élevé à la somme de 15. 203, 89 euros et que sur cette somme, les consorts X.../ Y... apparaissent bien n'avoir réglé qu'une somme de 11. 915 euros ce qui est loin de représenter l'essentiel du prix comme exigé par la jurisprudence pour la validation d'un réception tacite.
En définitive, à la suite du premier juge, la cour considère que les éléments nécessaires à la validation d'une réception tacite ne sont aucunement réunis.
Partant, monsieur Z... doit bien être condamné à réparations sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil et non sur le fondement de la garantie décennale de l'article 1792 du code civil faute de toute réception des ouvrages.
Partant encore, c'est à bon droit qu'il a été dit que la compagnie MAAF qui est l'assureur responsabilité décennale de monsieur Z... ne peut être recherchée par les consorts X.../ Y... dans le cadre d'une action directe pour suppléer la carence de monsieur Z....
L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Maître A... ès qualités de liquidateur de monsieur Z... doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré en ce qu'il retient la responsabilité de monsieur Z... au titre des désordres affectant l'installation de chauffage/ sanitaire de l'appartement des consorts X.../ Y... sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil,
Arbitre à 27. 867, 00 euros au titre des travaux de reprise, 1. 879, 73 euros au titre du surcoût dans la réalisation des travaux de reprise, 27. 700, 00 euros au titre des préjudices techniques, le montant des réparations,
Met hors de cause la compagnie MAAF assureur décennal de l'entreprise Z...,
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Fixe à 10. 000 euros le préjudice moral des consorts E... Y...,
Dit n'y avoir lieu à condamnation chiffrée à l'encontre de monsieur Z... en liquidation judiciaire et de maître A..., ès qualités de liquidateur de l'entreprise,
Fixe simplement la créance des consorts E... Y... aux sommes ci-dessus dégagées dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de cette entreprise ce y compris les frais et honoraires de l'expert judiciaire.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne maître A..., ès qualités de liquidateur de monsieur Marc Olivier Z..., aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP d'avoués AGUlRAUD NOUVELLET conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 10/01507
Date de la décision : 07/06/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-06-07;10.01507 ?
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