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08/04/2011 | FRANCE | N°10/05099

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 08 avril 2011, 10/05099


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 10/05099





[B]



C/

SAS TECHNIGERE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 26 Mai 2010

RG : F 09/00045















































COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 08 AVRIL 20

11



















APPELANT :



[Y] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]



comparant en personne,

assisté de Me Pierre ROBILLARD,

avocat au barreau de SAINT-ETIENNE









INTIMÉE :



SAS TECHNIGERE

[Adresse 3]

[Localité 2]



représentée par Me Eric DE BERAIL,

avocat au barreau de LYON









PARTIE






...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 10/05099

[B]

C/

SAS TECHNIGERE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 26 Mai 2010

RG : F 09/00045

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 08 AVRIL 2011

APPELANT :

[Y] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne,

assisté de Me Pierre ROBILLARD,

avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMÉE :

SAS TECHNIGERE

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Eric DE BERAIL,

avocat au barreau de LYON

PARTIE

PARTIES CONVOQUÉES LE : 28 Juillet 2010

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 11 Février 2011

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Hélène HOMS, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 Avril 2011, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

EXPOSE DU LITIGE

Le groupe PROMOGERE a comme filiales la société ACTIGERE et la société TECHNIGERE ; [Y] [B] a été embauché par la société ACTIGERE ; il a été licencié le 4 mai 2007 ; ce licenciement a donné lieu à la conclusion d'une transaction entre [Y] [B] et la société ACTIGERE.

[Y] [B], prétendant qu'il avait également été salarié de la société TECHNIGERE et que son contrat de travail avait été rompu, a saisi le conseil des prud'hommes de SAINT-ETIENNE ; il a réclamé des rappels de salaire, l'indemnité pour travail dissimulé, l'indemnité compensatrice de préavis, des dommages et intérêts pour rupture abusive, la remise des documents et une indemnité au titre des frais irrépétibles.

Par jugement du 26 mai 2010, le conseil des prud'hommes a débouté [Y] [B] de l'ensemble de ses demandes et l'a condamné à verser la somme de 700 € au titre des frais irrépétibles à la société TECHNIGERE et à acquitter les dépens de l'instance.

Le jugement a été notifié le 12 juin 2010 à [Y] [B] qui a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 6 juillet 2010.

Par conclusions reçues au greffe le 21 janvier 2011 maintenues et soutenues oralement à l'audience, [Y] [B] :

- expose que les sociétés ACTIGERE et TECHNIGERE ont le même dirigeant et ont leur siège social à la même adresse et qu'alors qu'il était salarié de la société ACTIGERE il lui a été demandé, à compter du mois de janvier 2005, de travailler en qualité de directeur pour la société TECHNIGERE,

- précise qu'il n'a pas été conclu de contrat et qu'il n'a perçu aucune rémunération,

- évalue son temps de travail à un mi-temps,

- réclame la somme de 84.100 € à titre de rappel de salaire, outre 8.410 € de congés payés afférents, et la somme de 17.400 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé

- qualifie la cessation des relations de travail survenue le 4 mai 2007 de licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

- réclame la somme de 8.700 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 870 € de congés payés afférents et la somme de 17.400 € à titre de dommages et intérêts,

- demande la remise des bulletins de paie, et, ce, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du présent arrêt,

- sollicite la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- demande les intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2007.

Par conclusions visées au greffe le 11 février 2011 maintenues et soutenues oralement à l'audience, la S.A.S. TECHNIGERE :

- dément qu'elle a fait travailler [Y] [B],

- conteste l'existence d'un lien de subordination,

- demande le rejet des prétentions de [Y] [B] et la confirmation du jugement entrepris,

- sollicite la somme de 1.500 € en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'existence d'un contrat de travail :

Le contrat de travail se caractérise par la réalisation d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les manquements.

Le 23 avril 2007, [Y] [B] a représenté la société TECHNIGERE, en qualité de directeur, lors d'une audience de conciliation tenue par le conseil des prud'hommes de SAINT-ETIENNE ; trois lettres d'embauche par la société TECHNIGERE en date des 23 février 2004, 7 février 2005 et 1er avril 2005 débutent en ces termes : 'Suite à l'entretien que nous avons eu en présence de messieurs [H] [T] et [Y] [B]' ; le 7 janvier 2005, la société TECHNIGERE a notifié un avertissement à un de ses salariés ; la lettre de notification débutait en ces termes : 'M.[B], votre supérieur hiérarchique, nous a signalé avoir eu à regretter de votre part les agissements fautifs suivants' ; le 10 novembre 2005, la société TECHNIGERE a notifié un avertissement à un de ses salariés ; la lettre de notification débutait en ces termes : 'Plusieurs faits nous conduisent à vous adresser ce courrier consécutif à votre attitude vis à vis de l'équipe et de votre supérieur hiérarchique, M.[B]'; en avril 2005, en mai et novembre 2006, [Y] [B] a signé et avalisé les rapports d'activité et de frais professionnels d'une salariée de la société TECHNIGERE.

Les 3 et 4 juillet 2007, [Y] [B] a signé des chèques tirés sur le compte de la société TECHNIGERE.

[Y] [B] a représenté la société TECHNIGERE lors de visites de chantiers du 28 août 2006, du15 janvier 2007, du 29 janvier 2007 et du 12 février 2007comme en attestent les comptes rendus.

Le chargé d'affaires du cabinet SOCOTEC atteste qu'il a eu comme interlocuteur [Y] [B] de la société TECHNIGERE pour quatre chantiers qui ont été réalisés entre 2005 et 2008 ; onze responsables d'entreprise du bâtiment attestent qu'il ont eu comme interlocuteur [Y] [B] de la société TECHNIGERE pour la mise en place de chantiers qui se sont déroulés en 2002, 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008 et 2009.

La société TECHNIGERE ne produit aucune pièce ; notamment, elle ne verse pas d'attestation de ses salariés.

Les documents et témoignages fournis par [Y] [B] démontrent que ce dernier a travaillé en qualité de directeur pour la S.A.S. TECHNIGERE.

[Y] [B] ne détenait aucun mandat au sein de la S.A.S. TECHNIGERE dont le dirigeant et le siège social sont identiques à ceux de la S.A.S. ACTIGERE.

[Y] [B] ne décidait pas des embauches et des sanctions disciplinaires des salariés ; il ne disposait donc pas d'un complet pouvoir de direction.

Il résulte de l'article R. 1453-2 du code du travail qui énumère limitativement les personnes habilitées à assister ou à représenter les parties devant le conseil des prud'hommes que [Y] [B] était nécessairement le salarié de la S.A.S. TECHNIGERE puisqu'il a pu la représenter à une audience de conciliation devant le conseil des prud'hommes.

En conséquence, l'existence d'un contrat de travail entre la S.A.S. TECHNIGERE et [Y] [B] doit être reconnue et le jugement entrepris doit être infirmé.

Les éléments de la cause et l'absence de toute contradiction objective élevée par la S.A.S. TECHNIGERE conduisent à admettre la période travaillée et le temps de travail indiqués par [Y] [B], à savoir du mois de janvier 2005 au mois d'avril 2007 inclus et un travail à mi-temps.

[Y] [B] percevait un salaire mensuel brut de 5.800 € pour un temps complet en qualité de directeur à la société ACTIGERE ; son statut de directeur de la S.A.S. TECHNIGERE justifie de retenir un salaire d'un même montant pour un temps complet, soit un salaire mensuel brut de 2.900 € pour un mi-temps.

[Y] [B] qui n'a jamais été rémunéré a droit à une rémunération s'élevant à la somme de 81.200 € (2.900 € x 28 mois).

En conséquence, la S.A.S. TECHNIGERE doit être condamnée à verser à [Y] [B] la somme de 81.200 € au titre des salaires, outre 8.120 € de congés payés afférents.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

L'article L. 8221-5 du code du travail répute travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour l'employeur de ne pas déclarer un salarié ou de ne pas lui délivrer un bulletin de paie ; en cas de rupture de la relation de travail, l'article L. 8223-1 du code du travail octroie au salarié dont le travail a été dissimulé une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

La S.A.S. TECHNIGERE qui a fait travailler [Y] [B] durant plusieurs années en qualité de directeur sans le déclarer, sans le rémunérer et sans lui remettre des bulletins de paie a sciemment dissimulé son emploi.

En conséquence, la S.A.S. TECHNIGERE doit être condamnée à verser à [Y] [B] la somme de 17.400 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur la rupture des relations de travail :

La S.A.S. TECHNIGERE n'a plus recouru aux services de [Y] [B] sans suivre la procédure de licenciement ; or, seul le licenciement autorise l'employeur à rompre un contrat de travail.

La cessation des relations de travail à l'initiative de l'employeur doit donc être qualifiée de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et le jugement entrepris doit être infirmé.

[Y] [B] a droit à une indemnité compensatrice de préavis.

La convention collective applicable à la cause fixe la durée du préavis à trois mois.

En conséquence, la S.A.S. TECHNIGERE doit être condamnée à verser à [Y] [B] la somme de 8.700 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 870 € de congés payés afférents.

La société TECHNIGERE emploie moins de onze salariés.

En application de l'article L. 1235-5 du code du travail, [Y] [B] peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice subi.

[Y] [B] ne verse pas de document sur sa situation ; il doit lui être alloué la somme de 8.700 €, soit trois mois de salaire, à titre de dommages et intérêts.

En conséquence, la S.A.S. TECHNIGERE doit être condamnée à verser à [Y] [B] la somme de 8.700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause.

Sur la remise des documents :

Il doit être enjoint à la S.A.S. TECHNIGERE de remettre à [Y] [B] les bulletins de salaires conformes à la présente décision.

Aucun élément ne laissant supposer une résistance de la S.A.S. TECHNIGERE à satisfaire à cette injonction, le prononcé d'une astreinte n'est pas nécessaire ; [Y] [B] doit être débouté de ce chef de demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de débouter la S.A.S. TECHNIGERE de ses demandes présentées en première instance et en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la S.A.S. TECHNIGERE à verser à [Y] [B] la somme de 2.500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

La S.A.S. TECHNIGERE qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris doit être infirmé.

Sur les intérêts :

En application de l'article 1153 du code civil, les intérêts courent au taux légal jusqu'à parfait paiement sur les rappels de salaire, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents à compter du 18 février 2009, date de l'audience de conciliation au cours de laquelle l'employeur qui n'avait pas reçu la convocation à cette audience a été informé des prétentions du salarié et qui vaut mise en demeure de payer.

En application de l'article 1153-1 du code civil les intérêts courent au taux légal jusqu'à parfait paiement sur les dommages et intérêts liés au licenciement, l'indemnité pour travail dissimulé et les frais de procédure à compter du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Reconnaît l'existence d'un contrat de travail entre la S.A.S. TECHNIGERE et [Y] [B] pour la période du mois de janvier 2005 au mois d'avril 2007 inclus,

Juge que [Y] [B] travaillait à mi-temps,

Condamne la S.A.S. TECHNIGERE à verser à [Y] [B] la somme de 81.200 € au titre des salaires, outre 8.120 € de congés payés afférents,

Condamne la S.A.S. TECHNIGERE à verser à [Y] [B] la somme de 17.400 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

Qualifie la cessation des relations de travail de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la S.A.S. TECHNIGERE à verser à [Y] [B] la somme de 8.700 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 870 € de congés payés afférents,

Condamne la S.A.S. TECHNIGERE à verser à [Y] [B] la somme de 8.700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause,

Enjoint à la S.A.S. TECHNIGERE de remettre à [Y] [B] les bulletins de salaires conformes à la présente décision,

Déboute [Y] [B] de sa demande d'astreinte,

Déboute la S.A.S. TECHNIGERE de ses demandes présentées en première instance et en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la S.A.S. TECHNIGERE à verser à [Y] [B] la somme de 2.500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Juge que les intérêts courent au taux légal jusqu'à parfait paiement sur les rappels de salaire, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents à compter du 18 février 2009 et sur les dommages et intérêts liés au licenciement, l'indemnité pour travail dissimulé et les frais de procédure à compter du présent arrêt,

Condamne la S.A.S. TECHNIGERE aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, Le Président,

Evelyne FERRIER Nicole BURKEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 10/05099
Date de la décision : 08/04/2011

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°10/05099 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-04-08;10.05099 ?
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