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06/04/2011 | FRANCE | N°10/02547

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 06 avril 2011, 10/02547


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





R.G : 10/02547





[Z]



C/

SAS SOCIETE D'IMPORTATION DE VEHICULES A MOTEUR







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 22 Mars 2010

RG : F 08/03713











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 06 AVRIL 2011







APPELANT :



[S] [Z]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Local

ité 6] (77)

[Adresse 3]

[Localité 4]



comparant en personne, assisté de Me Marie-Hélène CORBI, avocat au barreau de LYON









INTIMÉE :



SAS SOCIETE D'IMPORTATION DE VEHICULES A MOTEUR (SIVAM)

[Adresse 2]

[Localité 5]



représentée par Me Olivier G...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

R.G : 10/02547

[Z]

C/

SAS SOCIETE D'IMPORTATION DE VEHICULES A MOTEUR

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 22 Mars 2010

RG : F 08/03713

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 06 AVRIL 2011

APPELANT :

[S] [Z]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 6] (77)

[Adresse 3]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Marie-Hélène CORBI, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SAS SOCIETE D'IMPORTATION DE VEHICULES A MOTEUR (SIVAM)

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Olivier GAUCLERE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me BRUNAGEL, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Mars 2011

Présidée par Didier JOLY, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Sophie MASCRIER, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Didier JOLY, Président

Hervé GUILBERT, Conseiller

Mireille SEMERIVA, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 06 Avril 2011 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Didier JOLY, Président, et par Sophie MASCRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

[S] [Z] a été engagé par la S.A.S. Société d'importation de véhicules à moteur (SIVAM ) en qualité de conseiller en financement (employé, échelon 12) suivant contrat écrit à durée indéterminée du 14 juin 2004, soumis à la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile du 15 janvier 1981.

Sa rémunération comprenait :

un salaire fixe mensuel brut de 750 € pour 35 heures hebdomadaires de travail,

une prime de fin d'année égale à un mois, calculée prorata temporis, versée moitié fin juin et fin novembre,

des commissions sur le financement dont les modalités étaient fixées par une annexe du contrat de travail.

Selon l'article 5 de ce contrat, pour l'exercice de son activité professionnelle, [S] [Z] bénéficiait d'un véhicule de service qu'il pouvait utiliser à des fins personnelles. Cette tolérance pouvait être remise en cause à tout moment, avec un préavis de quinze jours en cas d'accidents répétitifs ou graves dont il serait la cause. En cas de maladie prolongée, la voiture de service serait reprise par l'employeur au bout de quinze jours d'absence. L'usage d'un véhicule de service pour les besoins personnels constituait un avantage en nature dont il était tenu compte tant sur le plan fiscal que pour le calcul des charges sociales.

Par note du 15 octobre 2004 à l'ensemble des équipes de vente de véhicules neufs et d'occasion, le directeur [B] [V] a confirmé à celles-ci la mise en place à partir du 11 octobre 2004 du nouvel horaire hebdomadaire 9h-12h / 14h-19h. Il a ajouté qu'afin de respecter la durée légale du travail de 35 heures hebdomadaires, une demi-journée de repos devrait être prise par roulement, selon un planning suivi par Messieurs [F] et [I].

Par lettre remise en main propre le 4 décembre 2007, la S.A.S. SIVAM a convoqué [S] [Z] le 12 décembre en vue d'un entretien préalable à une sanction disciplinaire.

Par lettre remise en main propre le 18 janvier 2008, elle lui a notifié un avertissement pour insuffisance de résultats.

Le 20 mars 2008, le médecin du travail a déclaré [S] [Z] 'inapte temporaire'. Le même jour, le médecin traitant du salarié a délivré à ce dernier un avis d'arrêt de travail jusqu'au 8 avril 2008.

Par lettre recommandée du 27 mars 2008, [S] [Z] a contesté l'avertissement en faisant valoir que la S.A.S. SIVAM lui avait retiré les moyens opérationnels notamment financiers, qui lui permettaient jusqu'alors de mener à bien sa mission.

Par lettre recommandée du 22 avril 2008, l'employeur a maintenu l'avertissement, les vendeurs n'étant nullement responsables des résultats catastrophiques de [S] [Z].

Alors que [S] [Z] se trouvait toujours en congé de maladie, la S.A.S. SIVAM l'a convoqué le 10 septembre 2008 en vue d'un entretien préalable à son licenciement. Une nouvelle convocation a été adressée au salarié pour le 15 septembre 2008.

Puis, par lettre recommandée du 19 septembre 2008, la S.A.S. SIVAM a notifié à [S] [Z] son licenciement pour faute grave en raison des faits suivants :

[...] Vous disposez également d'une carte essence dont l'usage est exclusivement réservé à des fins professionnelles conformément aux procédures en vigueur au sein de la société.

A ce titre, toute utilisation de la carte essence pendant les week-end et congés quels qu'ils soient est interdite.

Compte tenu de votre maladie prolongée (arrêt depuis le 21 mars 2008), vous avez restitué votre véhicule de fonction, et ce, le 23 avril 2008, néanmoins, vous avez conservé la carte essence.

Nous nous sommes aperçus courant août, et ce, malgré l'interdiction susvisée, que vous aviez utilisé à des fins personnelles et à plusieurs reprises, la carte essence mise à votre disposition, carte com 2.

Une telle faute est une atteinte à votre obligation de loyauté.

[Suit la liste des quatorze achats de carburant effectués par [S] [Z] du 3 juin au 28 août 2008, entre 8 heures 29 et 21 heures 15, dans les départements du Rhône, de l'Isère, de l'Aude, du Gard et de l'Hérault]

Lors de l'entretien préalable, vous avez dûment reconnu l'ensemble des faits.

Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave. [...]

[S] [Z] a saisi le Conseil de prud'hommes de Lyon le 16 octobre 2008.

* * *

LA COUR,

Statuant sur l'appel interjeté par [S] [Z] le 6 avril 2019 d'un jugement rendu le 22 mars 2010 par le Conseil de prud'hommes de LYON (section commerce) qui a :

- dit et jugé que le licenciement de [S] [Z] pour faute grave est justifié,

- dit et jugé que la preuve du respect, par la S.A.S. SIVAM, de la réduction du temps de travail à 35 heures n'est pas apportée,

- en conséquence, condamné la S.A.S. SIVAM à verser à [S] [Z] les sommes suivantes :

rappel de salaire pour heures supplémentaires 12 789,60 €

congés payés afférents1 278,96 €

outre les intérêts de droit à compter de la saisine du Conseil,

- rappelé que ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire conformément aux dispositions de l'article R 1454-28 du code du travail,

- condamné la S.A.S. SIVAM à verser à [S] [Z] la somme de 700,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté [S] [Z] du surplus de ses demandes,

- débouté la S.A.S. SIVAM de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales du 2 mars 2011 par [S] [Z] qui demande à la Cour de :

1°) dire et juger que le licenciement de [S] [Z] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ni a fortiori une faute grave,

2°) dire et juger qu'il est fondé dans l'intégralité de ses demandes,

3°) en conséquence, condamner la S.A.S. SIVAM à payer à [S] [Z] les sommes suivantes :

- dommages-intérêts pour licenciement non fondé sur une faute grave23 700,00 €

- préavis4 740,00 €

- congés payés sur préavis474,00 €

- indemnité de licenciement 2 370,00 €

- rappel de salaire pour heures supplémentaires 16 160,46 €

- congés payés afférents1 616,04 €

- indemnité pour travail dissimulé14 220,00 €

- article 700 du code de procédure civile 2 000,00 €

avec intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

Vu les conclusions régulièrement communiquées au soutien de ses observations orales par la S.A.S. SIVAM qui demande à la Cour de :

Confirmant le jugement entrepris :

A titre principal :

- dire et juger que [S] [Z] a commis une faute grave,

- dire et juger que le licenciement de [S] [Z] est justifié,

- débouter par conséquent [S] [Z] de l'ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire :

- dire et juger que [S] [Z] n'apporte pas la preuve d'un préjudice lié au caractère abusif de son licenciement,

- fixer à 1 416,53 € le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- ramener à l'équivalent de six mois de salaire les dommages-intérêts réclamés par [S] [Z] ;

Infirmant le jugement entrepris :

A titre principal :

- dire et juger que [S] [Z] ne rapporte pas la preuve d'avoir exécuté des heures supplémentaires,

A titre subsidiaire :

- dire et juger que l'infraction de travail dissimulé n'est pas constituée,

- débouter [S] [Z] de sa demande d'indemnité au titre de l'article L 8223-1 du code du travail ;

En tout état de cause :

- condamner [S] [Z] à verser à la S.A.S. SIVAM la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Sur la demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires :

Attendu qu'aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, le juge forme sa conviction au vu des éléments que l'employeur doit lui fournir pour justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande ;

Qu'il ressort, en l'espèce, de la note de service du 15 octobre 2004 que la réduction du temps de travail de 39 heures à 35 heures hebdomadaires devait prendre la forme d'une demi-journée de repos, prise par roulement suivant un planning de suivi ; que l'attestation de [E] [T], directeur commercial, selon lequel [S] [Z] travaillait du mardi au samedi et récupérait une journée par semaine, 'tout particulièrement le lundi', ne peut pallier l'absence de tout planning des jours de repos ; qu'en outre, aucun jour de repos n'a jamais été mentionné sur les bulletins de paie, dans la case 'Repos RTT' ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a alloué à [S] [Z] un rappel de salaire de 12 789,60 € pour les heures supplémentaires comprises entre la 36ème et la 39ème heure hebdomadaire, avec les congés payés afférents ; qu'en revanche, les attestations de clients qui n'ont eu avec l'appelant que des contacts commerciaux ponctuels et espacés ne peuvent rendre compte d'heures supplémentaires accomplies au-delà de la trente-neuvième heure hebdomadaire sur les instructions de l'employeur ou avec son accord implicite ; que le jugement entrepris sera encore confirmé en ce qu'il a débouté [S] [Z] du surplus de sa demande de rappel de salaire ;

Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé :

Attendu qu'aux termes de l'article L 324-10 (dernier alinéa) du code du travail, devenu L 8221-5, la mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué constitue, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord conclu en application du chapitre II du titre 1er du livre II de ce code, une dissimulation d'emploi salarié ;

Qu'en l'espèce, le caractère intentionnel de la dissimulation résulte de la connaissance par l'employeur de l'horaire collectif des commerciaux, qu'il avait lui-même fixé, et du défaut de planification des jours de repos, conforme à son engagement du 15 octobre 2004 ;

Attendu qu'aux termes de l'article L 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ;

Qu'en conséquence, la S.A.S. SIVAM sera condamnée à payer à [S] [Z] une indemnité de 14 220 € ;

Sur le motif du licenciement :

Attendu qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis ;

Attendu que la suspension du contrat de travail provoquée par la maladie ou l'accident, si elle dispense le salarié de son obligation de fournir sa prestation de travail, de sorte qu'il ne saurait être tenu durant cette période de poursuivre une collaboration avec l'employeur, ne dispense pas le salarié, tenu d'une obligation de loyauté, de restituer son véhicule de fonction à l'employeur qui lui en fait la demande ; que la S.A.S. SIVAM ne pouvait être tenue d'immobiliser un élément d'actif nécessaire à la poursuite de son activité à seule fin de permettre à [S] [Z] d'en faire un usage privé, dans des conditions rendues invérifiables par la suspension de son contrat de travail ; qu'au demeurant, la restitution du véhicule de fonction exigée par la S.A.S. SIVAM n'était que l'application d'une clause de ce contrat ; que l'utilisation d'une carte essence attribuée par l'employeur était indissociable du véhicule de fonction, le retrait de celui-ci privant le salarié de tout droit à l'usage de la carte ; qu'en utilisant néanmoins à quatorze reprises, et pendant deux mois et demi, la carte essence, qui lui avait été délivrée par la S.A.S. SIVAM, pour remplir de carburant le réservoir de véhicules non identifiés et se déplacer à titre privé sur différents points du territoire national, [S] [Z] a manqué à l'obligation de loyauté qui subsistait pendant la suspension de son contrat de travail ; qu'il a commis une indélicatesse qui rendait impossible son maintien dans l'entreprise et justifiait son licenciement pour faute grave ;

Qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé ;

Sur les frais irrépétibles :

Attendu qu'il ne serait pas équitable de laisser [S] [Z] supporter les frais qu'il a dû exposer, tant devant le Conseil de Prud'hommes qu'en cause d'appel et qui ne sont pas compris dans les dépens ; qu'une somme de 1 300 € lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà octroyée par les premiers juges ;

PAR CES MOTIFS,

Reçoit l'appel régulier en la forme,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [S] [Z] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé,

Statuant à nouveau :

Condamne la S.A.S. Société d'importation de véhicules à moteur (SIVAM )à payer à [S] [Z] la somme de quatorze mille deux cent vingt euros (14 220 €) à titre d'indemnité pour travail dissimulé, avec intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt,

Confirme les autres dispositions du jugement entrepris,

Y ajoutant :

Condamne la S.A.S. Société d'importation de véhicules à moteur (SIVAM )à payer à [S] [Z] la somme de mille trois cents euros (1 300 €) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés devant la Cour,

Condamne la S.A.S. Société d'importation de véhicules à moteur (SIVAM )aux dépens d'appel.  

Le greffierLe Président

S. [M]. [R]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 10/02547
Date de la décision : 06/04/2011

Références :

Cour d'appel de Lyon SA, arrêt n°10/02547 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-04-06;10.02547 ?
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