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14/02/2011 | FRANCE | N°09/06528

France | France, Cour d'appel de Lyon, 2ème chambre, 14 février 2011, 09/06528


R. G : 09/ 06528
décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 29 septembre 2009
RG : 06/ 12287 ch no 2- Cab. 3

X...
C/
Z...
COUR D'APPEL DE LYON
2ème chambre
ARRET DU 14 Février 2011
APPELANT :
M. Maurice Auguste X... né le 13 Septembre 1942 à LYON (69003) ...69740 GENAS

représenté par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assisté de Me Gwendoline ARNAUD, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Mme Michèle Z... épouse X... née le 31 Mars 1942 à LYON (69002) ...69740 GENAS

représentée par la SCP A

GUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Joëlle BEAUTEMPS, avocat au barreau de LYON
******
Date de clôture de...

R. G : 09/ 06528
décision du Tribunal de Grande Instance de LYON du 29 septembre 2009
RG : 06/ 12287 ch no 2- Cab. 3

X...
C/
Z...
COUR D'APPEL DE LYON
2ème chambre
ARRET DU 14 Février 2011
APPELANT :
M. Maurice Auguste X... né le 13 Septembre 1942 à LYON (69003) ...69740 GENAS

représenté par Me Annick DE FOURCROY, avoué à la Cour
assisté de Me Gwendoline ARNAUD, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Mme Michèle Z... épouse X... née le 31 Mars 1942 à LYON (69002) ...69740 GENAS

représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de Me Joëlle BEAUTEMPS, avocat au barreau de LYON
******
Date de clôture de l'instruction : 19 Novembre 2010
Date des plaidoiries tenues en Chambre du Conseil : 01 Décembre 2010

Date de mise à disposition : 14 Février 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Jean-Charles GOUILHERS, président-Marie LACROIX, conseiller-Françoise CONTAT, conseiller,

assistés pendant les débats de Christine SENTIS, greffier.
A l'audience, Marie LACROIX a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire, rendu publiquement, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
Signé par Jean-Charles GOUILHERS, président et par Christine SENTIS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement du 29 septembre 2009, le juge aux affaires familiales de Lyon a prononcé le divorce entre les époux Michèle Z... et Maurice X..., à leurs torts partagés, a notamment débouté M. X... de sa demande en dommages-intérêts et condamné M. X... à régler à Mme Z... 180 000 €, à titre de prestation compensatoire.

Monsieur X... a relevé appel de cette décision le 20 octobre 2009.
Par conclusions notifiées le 22 juin 2010 auxquelles il convient de se référer, il sollicite que le divorce soit prononcé aux torts de son épouse. Il demande que son épouse reprenne son nom de jeune fille. Il s'oppose au versement d'une prestation compensatoire. Il demande la condamnation de Mme Z... à lui verser 10 000 €, à titre de dommages-intérêts, 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux dépens avec distraction, au profit de son avoué.

Par conclusions notifiées le 4 octobre 2010 auxquelles il convient de se référer, Mme Z... forme appel incident, sollicitant que le divorce soit prononcé aux torts de son mari.
Elle demande 200 000 €, à titre de prestation compensatoire et la confirmation du jugement entrepris pour le surplus.
Elle sollicite la condamnation de M. X... à lui régler 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens avec distraction, au profit de son avoué.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 novembre 2010.
Discussion
Sur le divorce
Sur la demande principale du mari
Contrairement à l'appréciation du premier juge, M. X... rapporte suffisamment la preuve que son épouse entretient une relation adultère avec M. B..., et non une simple relation d'amitié comme alléguée par Mme Z....
En effet, le rapport de détective privé en date du 18 décembre 2007 (pièces 59 et 60) relève que Mme Z... et M. B...habitent dans le même immeuble, certes chacun à un étage, que Mme Z... est propriétaire des deux appartements, dont elle loue l'un à M. B..., qu'ils ont la clef des boîtes aux lettres réciproques, que Mme Z... dispose de la clef de l'appartement de M. B.... Ils ont été vus faisant leurs courses ensemble, adhèrent au même club de billard (pièce 105). C'est Mme Z... qui se charge de renouveler l'abonnement de M. B...à une revue (pièce 123).

Ils ont ensemble créé une société SCI VSO 821, le 8 janvier 2004, à l'insu de M. X..., alors que Mme Z... était déjà retraitée, société ayant pour objet la gestion et la location de biens immeubles. Sur les 100 parts qui composent cette société, 96 parts étaient à l'origine soumises à la tontine, clause de tontine qui a pris fin le 31 octobre 2008, au moment où Mme Z... a cédé toutes ses parts à M. B...(pièces 61 et 62).
Monsieur B...s'est porté caution du loyer que Mme Z... règle 42, ...à Genas, par suite d'un bail signé le 11 décembre 2006 (pièce 35 de l'intimé). Leurs intérêts financiers apparaissent étroitement liés.

Au demeurant, M. X... rapporte la preuve que son épouse a quitté le domicile conjugal le 7 septembre 2006, en ayant fait enlever par une entreprise de déménagement une très grande partie du mobilier meublant la maison.
Même si Mme Z... avait fait écrire à son mari par son avocate, dès le 16 juin 2006, pour l'informer qu'elle envisageait de demander le divorce (pièce 1 de l'intimée), cela ne justifiait pas d'un départ brutal, accompagné d'un déménagement, d'autant que la lettre de son avocate proposait une procédure amiable.
Au demeurant, même si Mme Z... a pu estimer les efforts, de son mari pour être plus à l'écoute de son épouse, insuffisants, il n'en avait pas moins réagi positivement en offrant à son épouse un voyage en Turquie, au mois d'août 2006 et ils devaient partir ensemble en octobre 2006, pour un nouveau voyage en Chine.
Le départ de Mme Z..., pour son mari, dans ces conditions, a été une surprise totale. Il faisait toute confiance à son épouse (pièces 56 et 57 de l'appelant).
Il y a un différend entre les époux sur la propriété du mobilier enlevé et sur sa valeur.
Le contrat de mariage passé entre les époux le 10 juin 1963 et instituant le régime de séparation de biens (pièce 49) énonce une présomption que les meubles appartiennent au propriétaire de l'immeuble (article 2ème III du contrat de mariage), or il n'est pas contesté que M. X... est propriétaire du domicile conjugal, sis ...à Genas. Toutefois cette présomption peut être combattue par la preuve contraire, à charge d'établir l'origine des objets, par tout moyen de preuve (article 2ème III in fine).
Au demeurant, M. X... prétend que lorsque son épouse a fait des mauvaises affaires à Nantes, il lui a racheté tous ses biens, y compris le mobilier, mais il ne verse aucune pièce à l'appui de cette prétention.
Madame Z..., qui prétend avoir remporté ses meubles et objets personnels pour une valeur de 114 576, 12 F et avoir laissé des meubles personnels chez son mari, à Corbeil, pour 89 946 F, verse divers justificatifs relatifs à l'achat du mobilier ou des objets emportés (pièces 29, 30, 31 et 32 de l'intimée).
Monsieur X... justifie que le mobilier occupant la maison était assuré pour un million de francs (soit 152 000 €) et avoir assuré lui-même le mobilier restant après le déménagement effectué par son épouse pour 30 500 € (pièces 21, 22 et 23 de l'appelant).
Même si cette différence entre les deux évaluations successives du mobilier assuré ne représente pas nécessairement la valeur du mobilier emporté, il n'en reste pas moins que Mme Z... a emporté la quasi-totalité du mobilier, comme cela résulte d'ailleurs des photos de la maison prises après son déménagement (pièce 35 de l'appelant).
L'évaluation faite par Mme Z... n'apparaît pas sérieuse puisqu'elle a assuré le mobilier emporté pour simplement 10 000 € (pièce 79 de l'intimé), alors qu'elle déclare elle-même avoir emporté du mobilier pour une valeur de 114 576, 12 F, à savoir 17 467 €.
Ces questions de la propriété et des meubles et de leur valeur seront réglées dans le cadre des opérations de partage.
En tout état de cause, comme relevé précédemment, le fait que Mme Z..., au retour d'un voyage en Turquie avec son mari, a déménagé la quasi-totalité du mobilier à l'insu de son mari, quels qu'en soient le propriétaire et la valeur, constitue une cause de divorce.
Par contre, comme l'a relevé à juste titre le premier juge, M. X... ne rapporte pas la preuve que son épouse aurait commis des détournements d'actifs de la SCI MIVET en percevant à des fins personnelles des loyers provenant de locaux loués par cette société.
En effet, les époux ont créé le 10 mai 1980, la SCI MIVET, société à responsabilité limitée dont le siège social était à l'époque fixé à la Guêpière, (fonds de commerce de lingerie exploitée par Mme Z...), centre commercial Radar à Limoges, société ayant pour objet l'acquisition, la propriété, la mise en valeur, la construction, l'administration et l'exploitation par bail ou autrement des biens et droits immobiliers, sis à Limoges, dans la ZAC de Beaubreuil, centre commercial Radar, et de ceux dont elle pourrait devenir propriétaire ultérieurement, pour un capital social de 190 000 F, répartis en 1 900 parts sociales de 100 F chacune, chacun des époux ayant 950 parts.
Dès l'origine, Mme Z... était la gérante de cette société. Dans le cadre de la procédure de divorce elle a démissionné de ses fonctions en octobre 2006, pour être remplacée par M. X....
À l'origine, la société était propriétaire des murs d'un fonds de commerce de pharmacie à Limoges.
Madame Z... exploitait divers magasins à Limoges, puis à Nantes. À la suite de mauvaises affaires de son épouse, M. X... lui a fourni des liquidités pour combler le passif, mais en contrepartie lui a racheté le 29 août 1988, un studio dont elle était propriétaire à Orléans, pour 150 000 F (pièce 7 de l'intimée) et lui a racheté 800 parts dans la société MIVET pour 80 000 F au cours d'une cession de parts, intervenues le 19 septembre 1988 (pièces 8 de l'intimée et 114 de l'appelant), 80 000 €, étant le montant des prêts d'argent consentis par M. X... à son épouse, au moyen de six chèques émis entre septembre 87 et juillet 88.
Madame Z... n'a alors détenu plus que 8 % des parts sociales de la société, son mari disposant des 92 % restants (ou plus précisément respectivement 7, 89 % et 92, 11 %).
Ce n'est que le 22 janvier et le 2 février 1999 que la SCI a fait l'acquisition de la maison appartenant en propre (depuis le 13 juin 1973) à M. X..., à Saint-Germain les Corbeil (Essonne), pour le prix de 800 000 F (pièce 11 de l'intimée).
Pour ce faire, la SCI a emprunté le 30 janvier 1999, la somme de 800 000 F, soit 121 959 €, moyennant un prêt in fine aux termes duquel la société devait simplement régler les intérêts pour 595, 39 € par mois, et le capital à la dernière échéance au 1er février 2007, soit 122 543, 60 € (pièces 12 et 26 de l'appelant).
Selon M. X..., les loyers du fonds de commerce de pharmacie de Limoges de 2 663, 49 € par mois (pièce 18 de l'appelant) devaient être capitalisés pour régler la dernière échéance au 1er février 2007.
Or Mme Z..., qui reconnaît avoir utilisé au fur et à mesure de leur encaissement les sommes versées à la SCI au titre des loyers de la pharmacie, prétend l'avoir fait avec l'accord de son mari, ces prélèvements lui permettant de subvenir aux besoins du ménage.
Elle prétend que M. X..., sur le prix de vente de 121 959 € dont la société MIVET s'est acquitté grâce au prêt, a pu conserver pour lui une somme de 250 000 F (38 113 €) et a placé le reste, soit 550 000 F (83 847 €), sur un contrat d'assurance-vie à son nom, dénommé Florige qui, au bout de huit ans, à l'échéance du prêt in fine, devait servir à rembourser le capital emprunté, que ce montage était particulièrement intéressant au niveau fiscal.
Bien que Mme Z... ne rapporte pas la preuve, et n'allègue d'ailleurs même pas, qu'une délibération de la société l'aurait autorisée à de tels prélèvements, il résulte suffisamment des pièces du dossier qu'un accord tacite existait entre les époux aux fins de tels prélèvements et que le remboursement du prêt in fine devait bien être réalisé par le contrat d'assurance-vie, contractée par M. X... à son nom.
Éric X..., leur fils aîné, actuellement âgé de 47 ans, témoigne que sa mère était autorisée à percevoir les loyers de la pharmacie de Limoges pour ses frais personnels (pièce 63).
Même si M. X... rapporte la preuve qu'il a contribué régulièrement aux charges du mariage en payant les assurances pour les véhicules, pour l'habitation, les frais de téléphone, de gaz, d'eau, les impôts, les taxes d'habitation, le prêt pour le domicile conjugal comme cela résulte des diverses factures et relevés bancaires produits (pièces réunies sous le no 38), les diverses dépenses d'alimentation, de vêtements, de scolarité, de loisirs, de voyages, de soins pharmaceutiques et esthétiques, de coiffeur etc. ont pu être réglés par le montant des loyers de la pharmacie, soit 2 663 € par mois, qui venait en complément de la contribution de Mme Z... aux frais du mariage dans la mesure où elle-même percevait une rémunération et devait y contribuer, et eu égard au train de vie important des époux.
Au demeurant, cette question fait l'objet d'une procédure devant le tribunal de grande instance sur assignation, au fond, délivrée par M. X..., Mme Z..., le 28 octobre 2008, (pièce 65 de l'intimée), après que M. X... a été débouté par le juge des référés d'une demande aux mêmes fins selon ordonnance du 14 mai 2007, rejet confirmé par la cour d'appel selon arrêt du 9 septembre 2008 (pièce 20 de l'intimée).
Sans préjuger de la décision que le tribunal de grande instance sera amené à rendre, on peut retenir dès à présent que M. X... qui avait acquis la maison de Saint-Germain, le 13 juin 1973, pour une somme de 195 250 F (29 765, 67 €), a pu la vendre à la SCI MIVET pour le prix de 800 000 F (121 959, 21 €), en étant exonéré d'impôt sur la plus-value, qu'alors qu'il possédait 92, 11 % du capital de la SCI, il s'agissait en quelque sorte d'une vente à lui-même permettant d'encaisser personnellement 800 000 F, tout en conservant la propriété indirecte et la maîtrise de son bien.
Le contrat de prêt au Crédit Agricole, en date du 30 janvier 1999, est clairement adossé à la souscription concomitante d'un contrat de capitalisation/ assurance-vie dénommé Florige, en date du 16 février 1999, pour une somme de 550 000 F (article 2. 2 du contrat). Il a été d'ailleurs ajouté une clause additive de nantissement d'un contrat Florige aux conditions du prêt au Crédit Agricole (pièce 13 de l'intimée).
Ce contrat Florige, au nom de M. X..., comporte un minimum garanti de rendement sur huit ans. Fiscalement, les retraits opérés au delà de 8 ans se trouvent de fait exonérés d'impôt sur le revenu, ce qui explique que la dernière échéance de remboursement du capital n'a pas eu lieu le 1er février 2007, date d'exigibilité du capital, mais a été différé de quelques mois, ce qui a probablement été fait de manière délibérée pour permettre à M. X... de bénéficier de l'exonération d'impôt au-delà de 8 ans (puisque le contrat d'assurance-vie a été passé le 16 février 1999, soit un peu moins de huit ans avant l'échéance du prêt au Crédit Agricole).
Outre la couverture du remboursement final de l'emprunt, le paiement par le biais du contrat Florige présentait l'avantage non négligeable de rendre la SCI débitrice d'une somme équivalente envers M. X..., ce qui diminue d'autant la valeur des parts sociales, ce qui est intéressant en cas de cession, et ce qui soustrait à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales (pièce 15 de l'intimée).
Le contrat d'assurance-vie a certes été conclu pour la durée de vie de son souscripteur, et non pour huit ans, mais il offre une faculté de rachat, particulièrement intéressante à partir de l'année 8, comme exposé précédemment.
Il n'est donc pas établi que Mme Z... aurait commis des détournements d'actifs de la SCI MIVET par la perception des loyers de la pharmacie qu'elle aurait utilisé à des fins personnelles.
Les deux premiers griefs étant établis, s'agissant de faits graves et renouvelés ayant rendu intolérable le maintien de la vie commune, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à la demande principale en divorce aux torts de l'épouse.
Sur la demande reconventionnelle de l'épouse
Si le constat produit par Mme Z... devant le premier juge dont il résultait que M. X... a été vu sur son bateau, avec une femme en maillot de bain, était insuffisant pour caractériser une relation extraconjugale, il résulte suffisamment des pièces produites devant la cour d'appel que M. X... a manqué au devoir de fidélité qui résulte de l'article 212 du Code civil. Le 30 septembre 2008 était relevé sur son répondeur téléphonique, un message ne laissant pas de doute sur les relations qu'il entretenait avec cette personne : Je t'adore, la passion l'emporte toujours, je t'embrasse (pièce 67 de l'intimée). Il héberge une femme à son domicile ...à Genas, dont le nom figure sur sa boîte aux lettres (pièce 88). En outre, sa compagne fait chambre d'hôte à son domicile à Genas (pièce 92).

Au demeurant, il est établi que M. X... est un homme indifférent à sa femme et à ses enfants, qui n'admet aucune remarque, autoritaire, capable de donner une violente gifle à son petit-fils, est un excellent homme d'affaires mais mène ses affaires familiales comme ses affaires professionnelles, sans états d'âme, et par un souci essentiellement de privilégier son patrimoine personnel, alors que son épouse est en difficulté (pièces 25, 26 et 27).
Il a privilégié sa carrière, au détriment de celle de son épouse, puisqu'il a imposé pas moins de 14 déménagements pendant la vie commune, et a particulièrement fait fructifier son patrimoine, au détriment de celui de son épouse.

En effet, M. X..., lors de la liquidation judiciaire du commerce exploité à Nantes, par son épouse, lui a certes, fourni des liquidités pour combler le passif, mais lui a fait payer cher cette opération puisqu'elle lui a cédé son studio pour 150 000 F, alors qu'elle l'avait acquis quatre ans auparavant 135 000 F, et surtout qu'elle a dû céder ses parts dans la SCI Mivet, pour une valeur notoirement minorée.

En effet, la somme de 80 000 F (12 196 €) correspondait à une valeur unitaire de 100 F, soit la valeur nominale existant à la constitution de la société qui a eu lieu en 1980, soit huit ans plus tôt.
Au moment de la session des 800 parts de Mme Z... à son époux, la SCI était propriétaire de locaux commerciaux loués à une officine pharmaceutique et le loyer mensuel était de 7 000 F, soit 1 067 € par mois ou 12 804 € par an. Considérant le taux de rendement moyen annuel d'un local commercial qui est fixé à 6 % de sa valeur et le montant annuel du loyer de 12 104 €, la valeur du local était de 213 400 €.
La valeur des 800 parts que Mme Z... possédait sur un total de 1 900 parts pouvait donc être chiffrée à 89 853 € (213 400 € x 800/ 1900).

Au demeurant, M. X... ne payait à la société Mivet que le montant des intérêts du prêt in fine, pour 7 012 € par an, pour l'occupation de cette maison, soit 584, 38 € par mois, alors que cette maison a été louée pour 1 550 € à un tiers, dès lors que M. X... l'a quittée, ce qui prouve l'importante capacité de M. X... à faire prévaloir ses intérêts, au détriment de son épouse.
Par contre Mme Z..., lorsqu'elle avait vendu son fonds de commerce " la guêpière ", le 22 mars 1984, avait donné à son mari 50 000 F (pièce 85 de l'intimée).
Au demeurant, M. X... a procédé à la vente de la maison de Saint-Germain les Corbeil, qui appartient à la SCI, sans le concours de sa femme qui détient pourtant 7, 89 % du capital.
Après sa retraite, Mme Z... pouvait légitimement espérer que son mari serait plus disponible, mais il s'est à nouveau investi dans une société qu'il a créée et a multiplié les activités associatives, délaissant affectivement son épouse.
Comme relevé par le premier juge, ce désintérêt affectif, son comportement négligent envers son épouse, ainsi que sa propension à privilégier son patrimoine personnel alors même que son conjoint est en difficulté constitue des violations graves et renouvelées des devoirs et obligations du mariage imputables au mari, et rendent intolérable le maintien de la vie commune, de sorte que le divorce a pu, à juste titre, être prononcé aux torts partagés.
Sur la demande de dommages-intérêts
La demande de dommages-intérêts fondée sur l'article 266 du Code civil est irrecevable, le divorce n'étant pas prononcé aux torts exclusifs de l'épouse.
La demande de dommages-intérêts formulée au visa des dispositions de l'article 1382 du Code civil est mal fondée.
Monsieur X... ne rapporte pas la preuve d'un préjudice particulier du fait du départ brutal de Mme Z... du domicile conjugal.
Les malversations financières ne sont pas prouvées. M. X... est malvenu de parler de dissimulation financière de la part de son épouse s'agissant de la constitution de son patrimoine personnel, alors qu'il a fait fructifier très utilement son patrimoine au détriment de celui de son épouse et se permet de vendre des biens, propriété de la SCI, sans en référer à son épouse, encore détentrice de parts.
Enfin sa notion de la fidélité n'est pas meilleure que celle de son épouse.
Il convient donc de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande de dommages-intérêts.
Sur la prestation compensatoire
Comme l'a relevé le premier juge par une motivation détaillée que la cour reprend, les deux époux, tous deux nés en 1942, sont à la retraite. M. X..., diplômé de l'école supérieure de commerce de Lyon et ayant suivi une formation à la distribution aux États-Unis, a mené une brillante carrière, l'amenant à déménager de multiple fois pour exercer des fonctions de direction, tandis que son épouse, titulaire d'une formation d'assistante de direction trilingue (anglais, italien et russe) a été elle aussi très entreprenante, mais a travaillé moins régulièrement, puisqu'elle a suivi son époux à plusieurs reprises.
Monsieur X... perçoit actuellement 4 649 € au titre de diverses retraites. Il avait perçu 47 150 € d'indemnité de départ à la retraite. Il a créé, le 16 mars 2006, une société SAS Trade Event dont il détenait 36 % des droits sociaux qu'il a cédé le 12 février 2008, pour 16 000 € à la société SFGPI dont le siège social est implanté à Bruxelles (pièce 100 de l'appelant), mais il est administrateur délégué de cette dernière société depuis le 10 janvier 2008, à titre gratuit (pièce 71 de l'intimée), fonction d'accompagnement à titre gratuit, consécutive à la vente en juin 2008, de ses actions Trade Event à la société SFGPI, qui les a elle-même revendues à un tiers, qu'il a cessé le 30 mai 2010 (pièce 122 de l'appelant).

Il avait accepté une collaboration avec la société SODEC, proposée le 28 octobre 2005, pour développer ou acquérir des ensembles commerciaux, mais a renoncé à cette collaboration par courrier du 19 février 2007, sans que cette collaboration n'ai eue le temps de jouer (pièce 47 de l'appelant).
La SCI Mivet dont il détient 92, 11 % des parts présente au 31 décembre 2009, un bénéfice de 79 987 €, alors que son bénéfice en décembre 2008, était de 4 237 €, et ce, compte tenu de produits exceptionnels pour 213 028 €, qui correspond au prix de vente de la maison de Saint-Germain les Corbeil (pièce 117 de l'appelant).
En effet la maison de Saint-Germain les Corbeil, patrimoine de la SCI, a été vendue le 23 décembre 2009 (pièce 118 de l'appelant).
L'assemblée générale du 6 mars 2008 avait autorisé la gérance à vendre cette maison pour un prix compris entre 150 000 et 200 000 €, délibération à laquelle Mme Z... s'était opposée car ne correspondant pas du tout au prix réel (pièces 76-3 et 76-4), puisque cette maison a été estimée à 306 000 € selon une estimation " prudente " (pièce 76-1) et que des biens similaires sont estimés entre 282 000 et 385 000 € (pièce 76-2). Madame Z... peut, à juste titre, soupçonner un prix de complaisance.
Dès lors que la SCI ne dispose plus d'aucun immeuble, les murs de la pharmacie de Limoges ayant déjà été précédemment vendus pour 440 000 €, la vente de la maison de Saint-Germain vide la société de son sens puisqu'elle ne possède plus aucun bien immobilier, ce qui laisse supposer sa dissolution, dans des conditions avantageuses pour M. X....
Monsieur X... dispose sur le compte courant de cette société d'une somme de 195 595, 74 €.
Madame Z..., quant à elle, dispose d'une retraite principale et de deux retraites complémentaires pour de 1 747, 69 € (pièce 82, 83 et 84 de l'intimée).
Les époux sont mariés sous le régime de séparation de biens.
Monsieur X... est propriétaire d'un tènement immobilier reçu en héritage de sa mère, situé ...à Genas, sur lequel sont édifiées deux maisons d'habitation avec une piscine, estimé entre 650 000 et 850 000 €, selon les évaluations faites par deux agents immobiliers (pièces 75 et 76 de l'intimée).
Il dispose donc, comme relevé précédemment, de 92, 11 % du capital de la SCI Mivet qui a vendu le local commercial de pharmacie à Limoges, pour 440 000 € et vendu la maison de Saint-Germain des Corbeil pour 213 008 €. Il a disposé du prix de vente de ses actions à la société Trade Event, non précisé.

Il a disposé du prix de vente de la maison de Saint-Germain les Corbeil pour 800 000 F (lorsqu'elle lui appartenait en propre et qu'il l'a vendue en 1999 à la SCI), prix de vente qu'il a gardé par devers lui pour 250 000 F (38 113 €) et qu'il a placé pour 550 000 F (83 847 €) sur un contrat d'assurance-vie Florige à son nom, fonds qui ont du depuis fructifier. (À défaut d'explication, il n'est pas exclu que partie de ce prix a servi à acheter des actions à la société Trade Event).
Madame Z... est propriétaire d'un bien immobilier sis ...à Genas, acquis le 25 octobre 2002, pour 177 000 €, financé au moyen d'un prêt aux mensualités de 1 069, 14 € qui s'achèvent en février 2011.

Elle occupe un des deux appartements de cet immeuble, le second étant en location pour un loyer de 550 € par mois. Elle est propriétaire d'un garage situé à Genas, acheté le 4 septembre 2007. Elle détient 7, 92 % des parts de la SCI Mivet. Elle a cédé à Olivier B..., le 31 octobre 2008, au prix de 500 € les 50 % de parts de la SCI VSO 821 qu'elle avait créé avec lui, le 8 janvier 2004, société qui a acheté le 4 septembre 2007 trois garages en état futur d'achèvement à Genas et un immeuble, situé à Saint-Julien sur Vey, le 27 mai 2008.

Il résulte clairement de l'analyse des situations respectives des parties qu'il existe une disparité importante, tant en ce qui concerne les ressources perçues par les parties au titre des retraites qu'en ce qui concerne leur patrimoine.
Comme l'a retenu le premier juge selon une motivation pertinente que la cour adopte, et y ajoutant, en fonction d'éléments débattus devant la cour, en dépit du régime matrimonial de séparation de biens choisis par les époux qui implique une volonté manifeste de maintenir des patrimoines distincts et l'acceptation d'une situation de fortune différente, voire déséquilibrée entre les conjoints, il est établi :
- que Mme Z... a exercé une activité professionnelle stable et source de rémunération pour la famille, dès 1963, alors que M. X... a occupé son premier emploi en1968, même si M. X... justifie de quelques modestes revenus pendant cette période,- que le déroulement de la vie professionnelle de Mme Z... a été affecté par des fréquentes mutations/ promotions de son mari, même si elle n'a pas systématiquement suivi son mari dans chacune de ces affectations,- qu'il en est résulté pour Mme Z... une durée totale de non emploi de neuf ans, alors que l'activité professionnelle et la promotion de M. X... ont toujours primé.

Pour évaluer la prestation compensatoire due par M. X... à Mme Z..., il n'y a pas lieu de tenir compte des accusations de détournement des actifs de la SCI Mivet, formulée par M. X... à l'encontre de son épouse qui les conteste, cette question relevant des opérations de liquidation du régime matrimonial des époux et de liquidation de la SCI.
En outre, comme relevé à juste titre par le premier juge, contrairement aux allégations de M. X..., la disparité majeure entre la situation matérielle des époux ne résulte pas d'une mauvaise gestion généralisée de ses biens par l'épouse dont il convient de rappeler qu'elle a fait l'objet d'une seule procédure de liquidation judiciaire, au cours de laquelle elle a apuré le passif, notamment en obtenant des liquidités auprès de son époux qui en a profité pour acquérir à un prix avantageux un immeuble situé à Orléans et 800 parts sociales à la SCI Mivet à leur valeur nominative et non réévaluées, mais de l'impossibilité pour cette dernière de poursuivre une carrière professionnelle dès lors que prévalait la réussite professionnelle du mari.
C'est donc à juste titre que le premier juge, après plus de 40 ans de mariage, a évalué à 180 000 € le capital du par le mari à son épouse, à titre de prestation compensatoire pour compenser la disparité existant entre les situations respectives des époux, du fait du divorce.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens
Chacune des parties succombant en ses prétentions, il y a lieu de dire que chacun conservera la charge de ses dépens et de ses frais non compris dans les dépens.

Par ces motifs

La cour,

Après débats en chambre du conseil, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens et de ses frais non compris dans les dépens,
Dit n'y avoir lieu à distraction des dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 09/06528
Date de la décision : 14/02/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-02-14;09.06528 ?
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