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25/01/2011 | FRANCE | N°08/01971

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 25 janvier 2011, 08/01971


R. G : 08/ 01971
Décision du Tribunal d'Instance de VILLEURBANNE Au fond du 11 janvier 2008
ch no RG : 2006/ 2508

X... Y...
C/
X...

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 25 Janvier 2011

APPELANTS :
Monsieur Marcel X...... 69780 SAINT PIERRE DE CHANDIEU
représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assisté de Me Fabienne BOGET, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2008/ 009635 du 29/ 05/ 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

Madame Patricia Y..

. épouse X...... 69780 SAINT PIERRE DE CHANDIEU
représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assistée ...

R. G : 08/ 01971
Décision du Tribunal d'Instance de VILLEURBANNE Au fond du 11 janvier 2008
ch no RG : 2006/ 2508

X... Y...
C/
X...

COUR D'APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRET DU 25 Janvier 2011

APPELANTS :
Monsieur Marcel X...... 69780 SAINT PIERRE DE CHANDIEU
représenté par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assisté de Me Fabienne BOGET, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2008/ 009635 du 29/ 05/ 2008 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

Madame Patricia Y... épouse X...... 69780 SAINT PIERRE DE CHANDIEU
représentée par la SCP DUTRIEVOZ, avoués à la Cour assistée de Me Fabienne BOGET, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :
Madame Viviane X... née le 28 juillet 1954 à Saint Cloud (Algérie)... 69800 SAINT PRIEST
représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour assistée de Me Bertrand BALAS, avocat au barreau de LYON

* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 19 Novembre 2010
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Novembre 2010
Date de mise à disposition : 11 Janvier 2011 prorogé au 25 Janvier 2011
Débats en audience publique du 30 novembre 2010 tenue par Pascal VENCENT, président de chambre, et Dominique DEFRASNE, conseiller, tous deux magistrats rapporteurs, sans opposition des parties dûment avisées, qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de Nicole MONTAGNE, greffier.
A l'audience, Dominique DEFRASNE a fait le rapport conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :- Pascal VENCENT, président-Dominique DEFRASNE, conseiller-Claude CONSIGNY, conseiller
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Pascal VENCENT, président, et par Nicole MONTAGNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
EXPOSE DU LITIGE
Madame Viviane X... est propriétaire d'une maison d'habitation sise... à Saint Pierre de Chandieu, occupée depuis 1988 par son frère Marcel et l'épouse de ce dernier.
Par jugement du 7 janvier 2004, devenu définitif, le tribunal de grande instance de Lyon a reconnu au profit des époux X... l'existence d'un bail verbal consenti par madame Viviane X... sur la maison d'habitation.
Le 29 décembre 2005, madame Viviane X... a fait délivrer aux époux X... un congé aux fins de reprise personnelle des lieux pour le 30 juin 2006.
Elle a fait ensuite assigner ses locataires devant le tribunal d'instance de Villeurbanne en validité de congé et expulsion. Les époux X..., de leur côté, ont soulevé la nullité du congé et sollicité reconventionnellement une expertise pour évaluer les travaux réalisés par eux dans la maison louée.
Par jugement du 11 janvier 2008, le tribunal d'instance a :
- fixé judiciairement au 16 mai 1988 la prise d'effet du bail entre les parties,
- annulé le congé pour reprise du logement,
- débouté madame Viviane X... de toutes ses demandes,
- débouté les époux X... de leur demande d'expertise et d'indemnisation des travaux,
- condamné madame Viviane X... aux dépens.
Ensuite du recours formé par les époux X..., la cour d'appel de Lyon par arrêt du 19 mai 2009 a :
- confirmé le jugement sur la fixation judiciaire de la date de prise d'effet du bail et sur l'annulation du congé,
y ajoutant,
- validé un nouveau congé aux fins de reprise pour habiter délivré par madame Viviane X... aux époux X... le 30 septembre 2008 pour le 16 mai 2009,
- ordonné l'expulsion des époux X... et fixé à 600 euros par mois l'indemnité d'occupation due par eux jusqu'à la libération des lieux,
- infirmé le jugement sur le rejet de la demande d'expertise et ordonné une expertise confiée à monsieur Z... avec notamment pour mission : * de rechercher si une demande de permis de construire a été déposée par la propriétaire, * de décrire les travaux réalisés dans les lieux par les époux X..., de les chiffrer et de déterminer la plus-value apportée à l'immeuble, * de déterminer la valeur locative de la maison avant et après travaux.
L'expert a déposé son rapport le 11 décembre 2009.
Les appelants demandent aujourd'hui à la cour :
- de condamner madame Viviane X... à leur payer les sommes suivantes : * 51. 278, 50 euros à titre de remboursement des travaux effectués par eux dans la maison, * 50. 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du trouble de jouissance qu'ils ont subi pendant toute la durée d'occupation du bail, * 80. 000 euros au titre de la plus value apportée au bien immobilier,
- de débouter madame X... de sa demande en paiement des loyers et de sa demande en paiement de dommages-intérêts.
Les époux X... qui se référent aux constatations de l'expert judiciaire expliquent que la propriétaire a signé une demande de permis de construire pour une extension de 80 m ² ce qui implique qu'elle a autorisé les transformations effectuées par eux dans la maison et qu'ils sont en droit sur le fondement des articles 1719 et 1720 du code civil de lui réclamer le remboursement du coût des aménagements importants réalisés pour améliorer le confort de la maison.
Ils indiquent par ailleurs que la demande en paiement de loyers formée aujourd'hui par madame X... dans le seul but d'opposer la compensation à leur propre demande se heurte à la prescription quinquennale et ne tient pas compte de leur demande.
Madame Viviane X... demande de son côté à la cour la condamnation des époux X... à lui payer : * 82. 813, 96 euros au titre des loyers dus pour la période du 16 mai 1988 au 16 mai 2009, * une indemnité d'occupation de 600 euros du 16 mai 2009 au 1er juillet 2010, date de remise effective des clefs, * 20. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, * 5. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Elle demande également que soit ordonnée la compensation des dites sommes avec celles pouvant être mises à sa charge.
Madame X... conteste la prescription des loyers qui lui est opposée en indiquant que la date d'exigibilité de la créance qui la fait courir est la date du jugement du 7 janvier 2004 constatant l'existence du bail.
Elle soulève de son côté la prescription de la demande des époux X... en remboursement du prix de leurs travaux au motif que ces travaux ont été achevés en 1999.
Par ailleurs, elle conteste le bien fondé de la demande en expliquant qu'il s'agit de transformation des locaux et des équipements sans l'accord du propriétaire, en contravention à l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 et non pas des travaux d'entretien à la charge du bailleur, qu'elle a toujours contesté avoir signé la demande de permis de construire, son frère Marcel ayant usurpé son identité à l'occasion de cette démarche administrative, que la preuve n'est pas rapporté par les époux X... du paiement effectif des travaux, Marcel ayant toujours été à sa charge et dans l'incapacité de faire face à ses propres dépenses familiales, qu'il n'est pas démontré que la maison était inhabitable avant les travaux.

MOTIFS DE LA DÉCISION
-I-Sur les travaux réalisés par les époux X...
Attendu que les demandes formulées à cet égard par les époux X..., initialement devant le tribunal d'instance par conclusions du 9 mars 2007 relèvent d'une action fondée sur l'enrichissement sans cause ;
Que contrairement aux prétentions de madame X..., ces demandes ne sont pas prescrites, demeurant soumises à l'ancien régime de la prescription trentenaire ;
Attendu que l'expert Z... après avoir visité la maison et pris connaissance des différentes factures et tickets de caisse produits par les époux X..., conclut que ces derniers, tout au long des années d'occupation entre 1988 et juillet 1999, ont exécuté des aménagements importants dans l'immeuble tels que la création d'une nouvelle entrée et d'un cellier, la création d'un auvent vers le séjour, la restructuration intérieure de la maison et l'installation d'une cuisine intégrée, la réfection complète de l'installation électrique, la création d'une cheminée à foyer fermé, le remplacement de la chaudière, le remplacement des volets, le ravalement des façades, des travaux en toiture, la construction d'un mur mitoyen, la construction d'un garage et d'un atelier, la construction d'un abri de jardin et d'un auvent pour voiture et la reprise des réseaux d'évacuations enterrés ; qu'il n'est pas sérieusement contestable que ces travaux excèdent les travaux d'entretien et de réparation incombant au locataire ;
Qu'il est constant qu'une demande de permis de construire a été régularisée le 16 février 1991 pour une extension de 80 m ² environ et que ce document au nom de madame Viviane X... comporte une signature semblable à celle qui figure d'autres documents établis par madame X... notamment un TIP du 6 août 1999 ;
Que l'expert judiciaire relève en outre dans son rapport qu'après l'obtention du permis de construire une déclaration d'ouverture de chantier est intervenue le 21 mai 1991 pour la réalisation d'une construction sur deux niveaux ;
Que madame X... a bien autorisé les transformations apportées à sa maison, ainsi que l'avait déjà relevé la cour dans son arrêt du 19 mai 2009 et n'apporte pas à ce jour d'éléments de preuve contraires ;

Attendu que les époux X... produisent devant la cour la plupart des factures et tickets de caisse précédemment soumis à l'expert, notamment des factures de l'entreprise " Charpentier de Mions " entre 1991 et 1993 ; qu'ils produisent aussi l'attestation d'un voisin, monsieur A... confirmant qu'ils ont réalisé tous les travaux dans la maison ;
Que madame X... qui soutient qu'elle a elle-même financé les travaux ne fournit aucune pièce attestant leur paiement mais seulement deux témoignages rédigés par ses tantes qui se contentent à cet égard de simples allégations ;
Que l'action des époux X... apparaît donc fondée ;
Attendu que l'expert Z... a évalué précisément les travaux réalisés par les époux X... à la somme totale de 51. 278, 50 euros TTC et la plus value apportée à l'immeuble par ces travaux à 80. 000 euros ;
Qu'en conséquence il y a lieu de faire droit à la demande en paiement des dites sommes ;

- II-Sur le préjudice de jouissance
Attendu que ni les pièces produites par les appelants, ni le rapport d'expertise ne révèlent que l'immeuble dans les premières années de la location était inhabitable ou présentait certains désordres le rendant impropre à sa destination ; qu'il n'est pas sans intérêt de noter que les époux X... et madame X... ont cohabité dans la maison pendant de nombreuses années avec des enfants mineurs ;
Que dans ces conditions, la demande en paiement de dommages-intérêts pour trouble de jouissance formée par les époux X... sur le fondement de l'article 1719 du code civil n'est pas justifiée et doit être rejetée ;

- III-Sur la dette locative
Attendu que madame X... réclame le paiement de loyers pendant la période du 16 mai 1988 au 16 mai 2009 ;

Attendu que l'action en paiement des loyers se prescrit par cinq ans tant en application de l'ancien article 2277 du code civil qu'en application de l'article 2224 dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 ;
Qu'en l'espèce, le tribunal de grande instance de Lyon par jugement définitif en date du 7 janvier 2004 a reconnu au profit des époux X... l'existence d'un bail verbal consenti par madame X... et consacré ainsi la créance de loyers de la bailleresse ;
Qu'il ressort des pièces de la procédure que madame X... n'a formulé une demande en paiement des loyers arriérés qu'au cours de l'instance d'appel, par conclusions signifiées le 9 mars 2010 ; que madame X... ne justifie pas d'une cause de suspension ou d'interruption de la prescription entre l'année 2004 et l'année 2010 alors que la créance de loyers était exigible ;
Qu'en conséquence l'action en paiement aujourd'hui formée devant la cour d'appel n'est recevable que pour la période non prescrite du 9 mars 2005 au 16 mai 2009, date d'effet du congé ;
Attendu que l'expert judiciaire a déterminé la valeur locative de la maison avant les travaux réalisés par les locataires en prenant pour base la somme de 2. 500 francs réglée par eux spontanément à la bailleresse et la valeur locative après les travaux en faisant toutefois remarquer que cette dernière ne pourrait s'appliquer que si c'était le propriétaire qui avait lui-même engagé et réglé les travaux ;
Que l'expert a aussi calculé les augmentations de loyers entre 1988 et 2009 en retenant la superficie des parties habitables ;
Que madame X... qui critique cette base de départ retient néanmoins le calcul de l'expert avec les augmentations de loyers précédemment indiquées, en déduisant les versements effectués par les époux X... depuis 1999 ;
Que ce mode de calcul, si ce n'est la période prescrite, n'est pas contesté par les appelants ;
Qu'en conséquence, madame X... au titre de la période utile du 9 mars 2005 au 16 mai 2009 est an droit de réclamer le paiement de la somme de 10. 886, 51 euros à titre d'arriéré de loyers ;
Attendu qu'il sera rappelé qu'il a été définitivement statué par la cour sur le montant de l'indemnité d'occupation due à la bailleresse à compter du 16 mai 2009 ;

- IV-Sur la résistance abusive reprochée aux époux X...
Attendu qu'il ne peut être fait grief aux époux X... d'avoir sollicité et obtenu auprès de la préfecture la suspension du concours de la force publique à titre humanitaire en raison de leur situation économique et de difficultés pour leur relogement ;
Que le fait qu'ils n'aient pas réglé totalement l'indemnité d'occupation mise à leur charge ne permet pas d'affirmer qu'ils ont délibérément voulu se soustraire à leurs obligations, compte tenu des éléments fournis à la cour sur leur situation personnelle et leurs difficultés économique ;
Que dans ces conditions, l'action en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive formée par madame X... ne peut prospérer ;
Attendu que chaque partie étant titulaire à l'encontre de l'autre d'une créance liquide et exigible, il convient d'ordonner la compensation judiciaire de ces créances ;
Attendu que les dépens y compris les frais de l'expertise seront mis à la charge de madame Viviane X..., à l'exception des frais d'exécution du congé du 30 septembre 2008 qui seront mis à la charge des époux X... ; qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 8ème chambre civile en date du 19 mai 2009,
Vu le rapport d'expertise de monsieur Z...,
Condamne madame Viviane X... à payer à monsieur Marcel X... et à madame Patricia Y... son épouse les sommes suivantes :
-51. 278, 50 euros en remboursement du coût des travaux effectués par eux dans la maison louée,
-80. 000 euros au titre de la plus value apportée à l'immeuble par ces travaux,
Condamne monsieur Marcel X... et madame Patricia Y... à payer à madame Viviane X... la somme de 10. 886, 51 euros à titre d'arriéré de loyers pour la période non prescrite du 9 mars 2005 au 16 mai 2009
Ordonne la compensation judiciaire entre les créances respectives des parties,
Déboute les époux X... et madame Viviane X... de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts complémentaire,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne madame Viviane X... aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise mais à l'exception des frais d'exécution du congé du 30 septembre 2008 qui seront mis à la charge des époux X..., et autorise la SCP d'avoués DUTRIEVOZ à recouvrer ceux des dépens dont ils auront fait l'avance sans avoir reçu de provision et recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 08/01971
Date de la décision : 25/01/2011
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-01-25;08.01971 ?
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