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13/01/2011 | FRANCE | N°09/04158

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 13 janvier 2011, 09/04158


R. G : 09/ 04158

Décision du tribunal de grande instance de Saint-Etienne Au fond du 03 juin 2009

1ère chambre
RG : 07/ 00135

COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 13 Janvier 2011

APPELANTS :
M. Maurice X... né le 18 Février 1927 à BEZIERS (HERAULT)...... 42600 SAVIGNEUX
représenté par Maître André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assisté de Maître Jean-Jacques PLANCHON, avocat au barreau de LYON

Mme Danielle Antoinette Y... épouse X... née le 18 Avril 1941 à MARSAC-EN-LIVRADOIS (PUY-DE-DOME)...... 42600

SAVIGNEUX
représentée par Maître André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistée de Maître Jean-Jacques PLANCHON, a...

R. G : 09/ 04158

Décision du tribunal de grande instance de Saint-Etienne Au fond du 03 juin 2009

1ère chambre
RG : 07/ 00135

COUR D'APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 13 Janvier 2011

APPELANTS :
M. Maurice X... né le 18 Février 1927 à BEZIERS (HERAULT)...... 42600 SAVIGNEUX
représenté par Maître André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assisté de Maître Jean-Jacques PLANCHON, avocat au barreau de LYON

Mme Danielle Antoinette Y... épouse X... née le 18 Avril 1941 à MARSAC-EN-LIVRADOIS (PUY-DE-DOME)...... 42600 SAVIGNEUX
représentée par Maître André BARRIQUAND, avoué à la Cour
assistée de Maître Jean-Jacques PLANCHON, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :
Société FRC-GIT-SARL-exerçant sous l'enseigne GIT IMMOBILIE Rond Point Colonna " Le Diamant " 42160 ANDREZIEUX-BOUTHEON
représentée par la SCP AGUIRAUD-NOUVELLET, avoués à la Cour
assistée de la SELARL PEYCELON GILLES, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 25 Juin 2010
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 24 Novembre 2010
Date de mise à disposition : 13 Janvier 2011
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :- Bernadette MARTIN, président-Christine DEVALETTE, conseiller-Philippe SEMERIVA, conseiller
assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier
A l'audience, Philippe SEMERIVA a fait le rapport, conformément à l'article 785 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Christine DEVALETTE, conseiller, faisant fonction de présidente de la 1ère chambre A, en remplacement de la présidente légitimement empêchée, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DU LITIGE

M. X... a acheté en 1961 une maison qui, après son mariage sous le régime de la séparation de biens en 1994, est devenue le logement familial.
Par acte du 2 septembre 2005, il a donné à la société FRC-GIT un mandat non exclusif de la vendre pour un prix demandé de 635 000 euros ; ce mandat a pris fin le 2 mars 2006.
Le 22 mars 2006, M. X... a passé un compromis de vente de ce bien, pour un prix de 537 700 euros, sans l'intervention du mandataire ; celui-ci a fait pratiquer une saisie conservatoire signifiée aux époux X... le 18 mai 2006, puis les a assignés en paiement de sa rémunération le 8 janvier 2007.

M. et Mme X... sont appelants du jugement qui, constatant la validité du mandat, a dit que la rémunération est due au mandataire, condamné M. X... à payer à la société FRC-GIT la somme de 20 000 euros TTC au titre de cette rémunération, ainsi que celle de 4 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier supplémentaire et distinct des intérêts de retard, rejeté leur demande de dommages-intérêts, débouté cependant la société FRC-GIT de sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice moral d'un tiers ainsi que de celle tendant au paiement des frais d'huissier pour saisie conservatoire et qui les a, enfin, condamnés au paiement d'une somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
* *
Ils font valoir :
- que le mandat de vendre la résidence de la famille, donné par un seul époux, contrevient à l'article 215, alinéa 3, du code civil et porte atteinte aux droits de Mme X...,
- que cette dernière peut intervenir à titre accessoire pour soutenir les prétentions de son conjoint et qu'il n'est prouvé, ni qu'elle a donné son accord, ni que M. X... aurait consenti au mandat s'il avait reçu des informations circonstanciées et avisées.
M. X... soutient en effet qu'en s'abstenant de l'informer des termes de l'article 215 précité, le mandataire a commis un dol à son égard, à tout le moins une faute au regard de son obligation de conseil, pour n'avoir pas vérifié si, agissant seul, il pouvait donner mandat de vendre.
M. et Mme X... demandent en conséquence l'annulation du mandat, et, à titre successivement subsidiaire, le paiement de dommages-intérêts équivalents au montant de la rémunération, la réduction à néant de cette dernière, voire sa simple réduction au regard des démarches minimes effectuées par la société FRC-GIT, le rejet de la demande de cette dernière en paiement de dommages-intérêts, la mise à sa charge des frais de saisie conservatoire sur le fondement de l'article 215, alinéa 1, du décret du 31 juillet 1992 et le paiement d'une indemnité de 3 000 euros pour leurs frais irrépétibles.
*
La société GRC-FIT expose qu'elle a présenté aux époux X... un acquéreur potentiel, M. Faure, pour un prix de 600 000 euros, qui n'a pas été accepté, puis fait valoir :
- que Mme X... était non seulement informée de l'intention de son époux, mais qu'elle l'a approuvée, de sorte que son consentement est certain au regard des exigences posées par l'article 215 du code civil,
- que de toute façon un mandat ne constitue pas un acte de disposition au sens de ce texte, puisqu'il n'anéantit pas les droits réels ou personnels de l'un des époux sur le logement familial, d'autant qu'il stipule que M. X... pouvait opposer un motif légitime pour refuser de conclure la vente,
- que Mme X... a eu connaissance du mandat dès le 2 septembre 2005 et n'a pas agi dans le délai d'un an prévu par le texte précité, d'où suit que son intervention volontaire à la présente procédure ne saurait faire revivre un droit éteint par forclusion,
- que M. X... détenait à tout le moins un mandat apparent,
- que l'agence n'a commis aucune faute, ni généré aucun préjudice,
- que c'est au contraire M. X... qui a commis une faute en signant un mandat alors qu'il savait que son épouse s'opposait à la vente et en profitant du travail de l'agence,
- qu'en effet, il a, dès l'expiration du mandat, repris contact avec l'acquéreur potentiel qu'elle lui avait présenté, puis conclu le compromis de vente avec lui,
- que sa rémunération doit en conséquence être assise sur le prix initialement proposé par ces derniers,
- que la délivrance de l'assignation après la saisie conservatoire a été retardée par l'ignorance de la nouvelle adresse de M. X....
La société FRC-GIT demande la confirmation du jugement en ce qu'il a dit le mandat de vente valable, retenu le droit à rémunération et condamné M. et Mme X... à lui payer une somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Pour le surplus, elle demande de le réformer en condamnant M. X... à lui payer la somme de 24 000 euros TTC au titre de sa rémunération, avec intérêts légaux à compter du 28 avril 2006 et celle de 896, 98 euros au titre des frais de saisie ; elle réclame paiement d'une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
* *

MOTIFS DE LA DÉCISION
Mme X... a intérêt à soutenir les contestations de son époux ; son intervention-en ce qu'elle a désormais pris un caractère accessoire-est recevable.
Il s'en déduit notamment que le jugement n'est pas contesté en ce qu'il rejette ses demandes personnelles en paiement de dommages-intérêts.
Les griefs de dol et de manquement aux obligations d'information, de renseignement et de conseil, adressés à la société FRC-GIT, sont dépourvus de portée dans la mesure où le mandat ne saurait être annulé sur le fondement de l'article 215 du code civil, M. X... l'ayant signé et Mme X... n'élevant plus de prétention propre à ce sujet mais admettant au contraire qu'elle n'a pas agi dans le délai fixé au troisième alinéa du texte précité.
Dès lors, si même l'agence avait commis une faute, M. X... ne subirait pas un préjudice consistant en son obligation d'honorer un engagement souscrit en méconnaissance de ce texte, car, faute que ce motif de nullité puisse être utilement invoqué, il s'est valablement obligé.
Par ailleurs, nulle difficulté pratique liée à l'éventuelle absence de consentement de Mme X... n'étant jamais survenue, M. X... ne subit aucun préjudice lié à l'ignorance des risques attachés à la méconnaissance des limites mises par la loi à sa faculté de disposer du bien, aucun de ces risques ne s'étant réalisé.
Si même on admet qu'il pourrait subir un préjudice moral en ce que, connaissant cette règle, il n'aurait pas souscrit le mandat, il conviendrait encore que Mme X... n'ait pas eu connaissance de cet engagement.
Or, Mme X... indique dans ses conclusions que, début 2005, son époux et elle-même songeaient à quitter leur villa, qu'elle a rencontré la société FRG-GIT et que " les vues du couple exposées ", cette dernière avait insisté pour faire visiter la villa ; elle était donc avisée des intentions de son époux et avait manifesté son accord, qu'elle a d'ailleurs formalisé par la suite en intervenant au compromis de vente du 22 mars 2006, la question du sort des meubles garnissant l'habitation, telle que posée en appel, étant hors de propos, dès lors que le mandat ne portait pas sur la vente d'une maison meublée.
Dans ces conditions, le consentement actif de l'épouse était acquis au moment de la conclusion du mandat ; à tout le moins l'acte potentiellement nul a été ratifié et, de toute façon, l'abstention reprochée à l'agence est demeurée sans conséquence.
Le mandat est valable.
La société FRC-GIT demande en conséquence le règlement de sa " rémunération ".
Mais celle-ci n'est pas due, le mandant n'étant tenu de la régler qu'à l'agent immobilier par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, peu important que l'acquéreur ait été précédemment présenté par le mandataire initial.
Toutefois, ses conclusions réclament également le paiement, " à titre de dommages-intérêts, des sommes qu'elle aurait perçues au titre du mandat ". Le mandataire est en effet en droit d'obtenir des dommages et intérêts s'il prouve une faute du mandant qui, de manière abusive et compte tenu des diligences accomplies, l'a privé de la conclusion effective de l'opération.
En l'espèce, l'abus est caractérisé, car le futur acquéreur, présenté au mandant pendant le temps du mandat, a offert un prix proche de celui demandé, supérieur à celui auquel la transaction a finalement été conclue et le compromis de vente a été passé quelques jours à peine après l'expiration du mandat. M. X... a ainsi bénéficié du travail de son mandataire et n'a retardé la conclusion de la vente que pour éviter le paiement de la rémunération convenue, comme le confirme un courrier de l'acquéreur à la société FRC-GIT, qui retrace ainsi les faits : " en 2006, le propriétaire a pris contact directement avec moi en m'indiquant que le mandat de vente qui le liait à l'agence immobilière était arrivé à terme, que par conséquent il était délié de ses engagements et que par suite il entendait reprendre les négociations de cette vente directement avec moi ".
L'agence ne justifie pas de diligences très poussées, faute notamment de production de bons de visite. Par ailleurs, le bien a été vendu à un proche voisin.
Mais, d'une part, la possibilité d'être informé de l'intention de vendre, en raison de ce voisinage, n'est qu'une hypothèse, d'autant plus fragile que M. X... indiquant que le père de l'acquéreur est l'un de ses amis, il a fallu pourtant l'intervention de l'agence pour mettre les parties en contact. D'autre part, les diligences ont été adéquates et suffisantes et ont permis de trouver l'acquéreur.
Dans ces conditions, M. X... est tenu à réparer le préjudice par paiement de dommages-intérêts dont il convient de fixer le montant, au vu de l'ensemble des circonstances, à la somme de 22 000 euros.
Il y a lieu et de faire application de la faculté ouverte par l'article 1153-1 du code civil et de fixer le point de départ des intérêts moratoires au 28 avril 2006, date de la mise en demeure.
Au contraire, il ne résulte d'aucun élément du débat que le retard de paiement aurait causé à l'agence un préjudice excédant celui que réparent ces intérêts moratoires.
Par ailleurs, la société FRC-GIT n'ayant pas assigné au fond dans le délai fixé à l'article 215, alinéa 1, du décret du 31 juillet 1992, les frais de la mesure conservatoire devenue caduque sont à sa charge.
Pour le surplus, M. X... succombe en ses prétentions, de même que Mme X..., dont l'intervention tendait à les soutenir ; les entiers dépens, autres que ces frais de saisie, sont à leur charge.
Aucune circonstance ne justifie que les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile soient écartées.

PAR CES MOTIFS :
Reçoit Mme X... en son intervention accessoire ;
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a dit que la rémunération du mandataire est due par le mandant et condamné M. X... à payer à la société FRC-GIT les sommes de 20 000 euros et de 4 000 euros ;
Statuant à nouveau de ces chefs ;
Condamne M. X... à payer à la société FRC-GIT une somme de 22 000 euros à titre de dommages-intérêts, avec intérêts légaux à compter du 28 avril 2006 ;
Rejette la demande de la société FRC-GIT tendant au paiement de dommages-intérêts au titre d'un préjudice distinct de celui que réparent les intérêts de retard ;
Condamne in solidum M. et Mme X... à payer à la société FRC-GIT une somme supplémentaire de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Les condamne in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel, hors les frais de saisie conservatoire, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Aguiraud-Nouvellet, avoué.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 09/04158
Date de la décision : 13/01/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2011-01-13;09.04158 ?
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