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03/12/2010 | FRANCE | N°10/02599

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 03 décembre 2010, 10/02599


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE







R.G : 10/02599





[K]



C/

SA TICLO

LA HAUTE AUTORITE DE LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET POUR L'EGALITE (LA HALDE)







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 24 Mars 2010

RG : F 08/00157











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2010









APPELANT :

>
[E] [K]

né le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 6]

[Adresse 7]

[Localité 4]



représenté par Me Roland VIGNON,

avocat au barreau de ROANNE





INTIMÉES :



SA TICLO

[Adresse 8]

[Localité 3]



M. [H] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir ...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 10/02599

[K]

C/

SA TICLO

LA HAUTE AUTORITE DE LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET POUR L'EGALITE (LA HALDE)

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE

du 24 Mars 2010

RG : F 08/00157

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 03 DECEMBRE 2010

APPELANT :

[E] [K]

né le [Date naissance 2] 1975 à [Localité 6]

[Adresse 7]

[Localité 4]

représenté par Me Roland VIGNON,

avocat au barreau de ROANNE

INTIMÉES :

SA TICLO

[Adresse 8]

[Localité 3]

M. [H] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir général

représentée par Me Olivier BARRAUT,

avocat au barreau de LYON,

Toque 1698

TIERS

LA HAUTE AUTORITE DE LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS ET POUR L'EGALITE (LA HALDE)

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Eladia DELGADO,

avocat au barreau de LYON

Toque 499

PARTIES CONVOQUÉES LE : 04 Mai 2010

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Novembre 2010

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel GAGET, Président de Chambre

Hélène HOMS, Conseiller

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Assistés pendant les débats de Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 03 Décembre 2010, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel GAGET, Président de Chambre, et par Evelyne DOUSSOT-FERRIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

Vu le jugement du 24 mars 2010 du Conseil de Prud'hommes de ROANNES qui déclare que le licenciement de [E] [K] repose sur une cause réelle et sérieuse, déboute le salarié de ses demandes de requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et d'indemnité de requalification, et condamne la SA TILCO au paiement des sommes suivantes :

150 € au titre de la prime de fin d'année 2007,

15 € au titre des congés payés afférents,

300 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né des jours fériés non récupérés,

420 € au titre des rappels de salaire pour les jours de congés payés de fractionnement,

42 € au titre des congés payés afférents,

2.730 € à d'indemnité compensatrice de préavis sous déduction des sommes déjà versées à ce titre par la SA TILCO,

1.5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'appel formé par [E] [K] par lettre recommandée avec accusé de réception du 06 avril 2010 reçue au greffe de la Cour le 07 avril 2010, et vu les conclusions déposées le 31 août 2010 soutenues à l'audience, dans lesquelles il sollicite la réformation de la décision attaquée en ce qu'elle a jugé que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, rejeté ses demandes de requalification des contrats de travail à durée indéterminée, limité à 150 € la somme allouée au titre de la prime de fin d'année, et sollicite la confirmation sur le surplus ;

Vu les mêmes conclusions dans lesquelles il réclame la condamnation de la SA TILCO au paiement de 1.061,67 € à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement, 1.365 € à titre d'indemnité de requalification, 32.760 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la violation de l'obligation de reclassement, et 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les conclusions en réponse de la SA TILCO déposées le 05 novembre 2010 et soutenues à l'audience, qui conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a reconnu la cause réelle et sérieuse du licenciement de [E] [K] et débouté ce dernier des demandes de requalification des contrats de travail à durée déterminée, et sollicite la réformation du même jugement pour le surplus, outre la condamnation de [E] [K] au paiement d'une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu la délibération n°2010-182 du 13 septembre 2010 de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité, saisie par [E] [K], qui a décidé de présenter ses observations à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 13 de la loi n°2004-1486 du 30 décembre 2004 ;

Vu les observations écrites de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité déposées le 04 novembre 2010 réitérées devant la Cour, relatives à l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur d'une part, et aux mesures appropriées pour maintenir un salarié handicapé dans son emploi d'autre part, caractérisant une discrimination au préjudice de [E] [K] fondée sur son état de santé ;

Les parties ont donné à l'audience du 05 novembre 2010, leurs explications orales explicitant leur argumentation et ont convenu qu'elles avaient, entre elles, communiqué, en temps utile et contradictoirement, leurs pièces et conclusions ;

Entendu les observations orales de l'avocat représentant la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité ;

DÉCISION

[E] [K] a été embauché par la SA TICLO par contrat de travail à durée déterminée à compter du 11 mai 1998 pour une durée initiale de quatre mois, renouvelée pour deux mois supplémentaires jusqu'au 7 novembre 1998.

Un second contrat de travail à durée déterminée a été conclu à compter du 20 mars 2000, pour une durée de trois mois et demi, renouvelé pour huit mois supplémentaires jusqu'au 03 mars 2001.

Le 12 mai 2007, [E] [K] a été victime d'un accident de travail, justifiant des arrêts de travail jusqu'au 15 juin 2007.

Il a par la suite été victime d'une rechute le 10 août 2007, justifiant un arrêt de travail du 20 septembre 2007 au 23 juillet 2008.

[E] [K] a sollicité son employeur durant la période la période de suspension de son contrat de travail afin de connaître les modalités d'une prime annuelle versée habituellement en fin d'année, et non en 2007.

La SA TICLO lui a répondu que cette prime était exceptionnelle et dépendante du pouvoir de direction, ce qui a conduit [E] [K], qui s'estimait victime d'une discrimination, à saisir la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité, ci-après dénommée HALDE.

Le médecin du travail a déclaré [E] [K] inapte à son poste le 23 juillet 2008 après une première visite de reprise, sous réserve d'une étude du poste et des possibilités d'aménagement, analyse réalisée antérieurement le 16 juin 2008.

A l'issue de la seconde visite, le salarié a été déclaré inapte à son poste habituel, mais apte à un poste ne nécessitant pas de port de charges lourdes ou l'élévation du bras gauche au-dessus de l'horizontal.

[E] [K] a été licencié pour inaptitude le 12 septembre 2008.

Il soutient que son licenciement est nul car lié à une attitude discriminatoire de l'employeur, et considère qu'en tout état de cause ce dernier n'a pas sérieusement recherché de solution de reclassement, manquement qui prive son licenciement de cause réelle et sérieuse.

La SA TICLO conteste et souligne notamment que les recherches de reclassement son restreintes à son seul magasin et ne s'étendent pas à l'entier groupe INTERMARCHE BRICOMARCHE MOUSQUETAIRES.

La HALDE expose, dans le cadre de son audition, que le périmètre de recherche du reclassement doit s'étendre à l'ensemble des sociétés qui forment le groupe MOUSQUETAIRES, compte ténu de l'enseigne BRICOMARCHE utilisée par la SA TICLO.

Elle confirme par ailleurs ses observations écrites relatives à l'existence d'une discrimination à l'égard de [E] [K].

Sur le contrat de travail à durée déterminée du 11 mai 1998

Vu les articles L.1242-1 et suivants du Code du travail.

Ce contrat de travail écrit a été conclu pour une durée initiale de quatre mois, au motif d'une activité saisonnière conformément aux dispositions précitées.

Son renouvellement a été accepté par le salarié pour une durée supplémentaire de deux mois, reportant ainsi son terme au 07 novembre 1998.

Le renouvellement de ce contrat est intervenu dans la limite maximale de 18 mois, pour un motif identique au motif de recours initial, dont [E] [K] ne démontre pas qu'il soit injustifié ou frauduleux.

Il n'y a donc pas lieu de prononcer la requalification de ce contrat en contrat de travail à durée indéterminée.

La Cour confirme le jugement entrepris et déboute [E] [K] de sa demande.

Sur le contrat de travail à durée déterminée du 20 mars 2000

Ce contrat de travail à durée déterminée a été conclu par pour une durée initiale de trois mois et demi, puis renouvelé par avenant du 27 juin 2000 pour une durée supplémentaire de huit mois.

Il ressort des pièces produites que ce contrat de travail à durée déterminée ne fait mention d'aucun motif spécifique de recours, en violation des dispositions des articles L.1242-1 et suivants du Code du travail.

L'embauche de [E] [K] en contrat à durée indéterminée dès le mois de novembre 2000, soit directement après le terme du contrat de travail à durée déterminée prolongé, n'est pas de nature à régulariser a posteriori la violation des dispositions précitées, dont il résulte nécessairement un préjudice pour le salarié.

Il convient donc de réformer la décision attaquée, et de faire droit à la demande de requalification du contrat de travail conclu le 20 mars 2000 en contrat de travail à durée indéterminée.

La Cour condamne la SA TICLO à payer à [E] [K] la somme de 1.365 € égale à un mois de salaire, en réparation de son préjudice.

Sur la prime annuelle

Vu les articles L.1132-1 et L.1133-3 du Code du travail.

[E] [K] a perçu depuis son embauche, une prime annuelle versée en novembre ou décembre, dont le montant était de :

900 francs pour l'année 2000,

750 francs pour l'année 2001,

150 euros pour l'année 2002,

150 euros pour l'année 2003,

150 euros pour l'année 2004,

60 euros pour l'année 2005,

50 euros pour l'année 2006.

A la demande écrite de [E] [K], la SA TICLO a affirmé que cette prime était une prime exceptionnelle, dont les modalités de fixation étaient définies annuellement sur la base de son seul pouvoir de direction, de telle sorte que le salarié n'était pas fondé à se prévaloir d'un quelconque rappel de prime ou même de contester l'absence de versement au titre de l'année 2007.

Pour sa part, [E] [K] considère que cette prime constitue un avantage général, constant et fixe, relevant du régime de l'usage, qui ne peut être remis en cause unilatéralement par l'employeur sans respecter les conditions de dénonciation et de délai de prévenance qui s'imposent.

Il ressort des pièces produites aux débats, et notamment des bulletins de paie de [E] [K] pour les mois de versement de la prime de novembre 2000 à décembre 2006, que le bénéfice de cette prime peut être considéré comme général, fixe et constant.

L'absence de [E] [K] pour maladie durant l'année 2007 ne permet pas à elle seule de justifier le non versement de la prime pour cette même année, et ce d'autant plus que l'absence du salarié fait suite à un accident survenu au temps et au lieu de travail.

La Cour confirme en conséquence la condamnation de la SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 150 € à titre de rappel pour l'année 2007.

S'agissant des sommes versées au titre des années 2005 et 2006, [E] [K] soutient que le faible montant de la prime qui lui est versé est dû aux multiples réclamations faites auprès de sa hiérarchie relatives à l'octroi d'un coefficient de classification conventionnelle.

[E] [K] expose que son attitude revendicative serait à l'origine d'une sanction de la part de son employeur, appliquée de manière discriminatoire sur le montant de sa prime, contrairement aux primes versées à ses collègues.

La HALDE, dans ses observations, souligne également la concordance de temps entre la période de revendication de la part du salarié auprès de sa hiérarchie, et le montant de la prime annuelle fortement réduit.

Cette même correspondance est observée entre la période d'absence du salarié pour raison de santé, et l'absence totale de versement de la prime.

La HALDE constate que ces faits permettent de faire supposer une pratique discriminatoire de la part de l'employeur au préjudice de [E] [K], fondée sur l'attitude revendicative du salarié, puis sur son état de santé.

La Cour relève sur ce point, que la SA TICLO ne répond pas à la demande de [E] [K] de justifier du montant des primes annuelles versées aux autres salariés de l'entreprise pour les années 2005 et 2006, notamment en produisant les bulletins de paie correspondant.

Il en résulte que face aux éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, la SA TICLO n'apporte pas les éléments qui permettraient à la Cour de vérifier si, pour les années concernées, la baisse du montant de la prime est appliquée à l'ensemble du personnel ou uniquement à [E] [K].

En conséquence, la Cour réforme le jugement et condamne le SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 90 € à titre de rappel de prime pour l'année 2005, et la somme de 100 € à titre de rappel de prime pour l'année 2006, outre les congés payés afférents.

Sur la récupération des jours fériés

Vu l'article 6 de la convention collective nationale du bricolage, qui prévoit que lorsque qu'une journée ou demi-journée de repos coïncide avec un jour férié, le salarié bénéfice d'une compensation en repos d'une même durée, en accord avec son employeur.

[E] [K] prétend que cette compensation au titre des jeudis de l'ascension pour les années 2002 à 2007 a été accordée à l'ensemble du personnel sauf à lui.

La SA TICLO répond que cette compensation n'a pas été accordée à [E] [K], dans la mesure où ce dernier était absent à la date de cette décision, et qu'il n'était pas en mesure de bénéficier effectivement de ses jours de repos.

La Cour considère cependant que la SA TICLO ne peut valablement opposer au salarié son absence pour maladie et le priver du bénéfice d'un avantage conventionnel, dès lors que l'absence de [E] [K] résulte d'un accident survenu à l'occasion de l'exécution de son contrat.

Ce refus de l'employeur est d'autant moins fondé que la compensation du repos doit être considérée comme acquise à la date de coïncidence avec le jour férié, soit chaque jeudi de l'ascension de chaque année concernée, à charge pour le salarié et son employeur de s'accorder sur la date à laquelle le repos pourra être reporté.

Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris, et de condamner la SA TICLO au versement de 300 € en réparation du préjudice subi par [E] [K].

Sur le fractionnement des jours de congés payés

Vu l'article L.3141-19 du Code du travail.

[E] [K] prétend pouvoir bénéficier de jours de congés de fractionnement, compte tenu des dates de prise de ses congés payés durant les années 2003, 2004, 2006, et 2007.

La SA TICLO reconnait que le salarié pouvait prétendre au bénéfice de 2 jours de fractionnement par année visée, mais qu'il n'en a jamais fait la demande.

La Cour, qui constate à la lecture des pièces produites que [E] [K] a effectivement été contraint de fractionner ses jours de congés payés conformément aux conditions visées par l'article L.3141-19 du Code du travail, peut prétendre au bénéfice de deux journées de congés supplémentaires par année concernée, soit :

2 jours au titre de l'année 2003,

2 jours au titre de l'année 2004,

2 jours au titre de l'année 2006,

2 jours au titre de l'année 2007.

Compte tenu du salaire moyen mensuel du salarié égal à 1.365 €, la Cour confirme la condamnation de la SA TICLO au versement de 420 € à titre de rappel de salaire pour les jours de fractionnement, outre 42 € au titre des congés payés afférents.

Sur le licenciement

Vu, ensemble, l'article L.1226-10 du Code du travail et l'article L.5213-6 du même code.

Le licenciement pour inaptitude de [E] [K] a été prononcé le 12 septembre 2008.

Cette rupture fait suite à l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail en date du 06 août 2008 :

« la reprise au poste habituel est impossible ; suite étude de poste du 16/06/2008 et suite réponse écrite employeur du 31/08/2008. Le salarié doit être considéré comme inapte définitif à son poste habituel mais APTE à un poste ne nécessitant pas de port de charges lourdes et l'élévation du membre sup gauche au-dessus de l'horizontale. »

Il ressort de cet avis que [E] [K] ne pouvait plus assurer ses fonctions telles qu'avaient été définies initialement dans son contrat de travail, mais qu'il pouvait poursuivre son activité au sein de l'entreprise à condition que l'employeur soit en mesure de proposer un aménagement de son poste ou un autre poste répondant aux prescriptions médicales citées.

La SA TICLO affirme dans le courrier recommandé de notification du licenciement, ne disposer d'aucun poste disponible dans l'entreprise satisfaisant aux prescriptions médicales du médecin du travail.

Or, il n'est pas démontré par la SA TICLO l'impossibilité de procéder à un aménagement du poste de vendeur de [E] [K], notamment au moyen de nacelles ou tout autre équipement permettant de substituer une aide mécanique à l'effort physique du salarié.

[E] [K] prétend par ailleurs que l'obligation de reclassement qui pèse sur la SA TICLO n'est pas restreinte au seul magasin qu'elle exploite, mais doit s'étendre aux établissements BRICOMARCHE du groupe auquel appartient la Société, à savoir le groupe LES MOUSQUETAIRES.

La Cour constate que la SA TICLO exploite un magasin de vente d'articles de bricolage sous l'enseigne BRICOMARCHE, marque appartenant au groupe LES MOUSQUETAIRES.

La SA TICLO se borne à affirmer qu'elle est une entreprise indépendante, sans apporter au débat les éléments de preuve précis sur la nature exacte des relations qu'elle entretient avec le groupe LES MOUSQUETAIRES.

La SA TICLO n'apporte à ce titre aucune explication sur les conditions financières relatives à l'autorisation d'exploitation de la marque BRICOMARCHE, ni sur les obligations contractées à l'égard de cette enseigne par l'exploitant.

Pour sa part, la Cour constate, à la lecture des seules pièces produites aux débats, que les contrats de travail et avenants conclus entre [E] [K] et la SA TICLO sont systématiquement réalisés sur des documents à entête BRICOMARCHE LES MOUSQUETAIRES.

De la même façon, les bulletins de paie délivrés à [E] [K] sont édités, depuis son embauche, sur un modèle du groupe LES MOUSQUETAIRES, accompagné du logo de l'enseigne. Un tel modèle de document laisse supposer, en l'absence totale d'explication contraire de l'employeur, qu'il été fourni par directement par les services administratifs centraux du groupe LES MOUSQUETAIRES, ce dont il s'évince une gestion globalisée des problématiques de gestion du personnel.

Les bons de commandes produits par [E] [K], édités par la SA TICLO, sont également des documents à entête exclusive BRICOMARCHE LES MOUSQUETAIRES, où figure le logo de l'enseigne.

La Cour considère à la lecture de ces éléments, et en l'absence de tout élément de preuve contraire produit par la SA TICLO, que cette dernière doit être considérée comme appartenant au groupe LES MOUSQUETAIRES, propriétaire de la marque BRICOMARCHE.

En conséquence, l'obligation de reclassement qui incombait à la SA TICLO à l'égard de [E] [K], s'étendait non seulement à son magasin, mais également aux magasins du groupe LES MOUSQUETAIRES avec lesquels une permutation du personnel pouvait être envisagée.

En limitant ses recherches de reclassement à son seul magasin BRICOMARCHE de PERREUX sans solliciter les autres magasins de l'enseigne BRICOMARCHE, la SA TICLO n'a pas respecté son obligation de reclassement à l'égard de [E] [K].

Son licenciement, prononcé le 12 septembre 2008, est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement est réformé.

Sur les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

Vu l'article L.1226-15 du Code du travail.

Vu le salaire mensuel moyen de [E] [K] fixé à 1.365 €.

La Cour considère, à la lecture des justificatifs produits par [E] [K] relatif aux difficultés de retour à l'emploi et à son invalidité, que le préjudice allégué par le salarié est établi.

La SA TICLO est donc condamnée à verser à [E] [K] la somme de 24.570 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnité spéciale de licenciement et sur l'indemnité de préavis

Vu l'article L.1226-14 du Code du travail.

S'agissant de l'indemnité versée en remplacement de l'indemnité compensatrice de préavis, les parties s'accordent sur son montant égal à deux mois de salaire, soit 2.730 €, mais s'opposent sur la question de l'assujettissement aux cotisations sociales.

L'indemnité versée à [E] [K] a été soumises à cotisations sociales.

Cette indemnité n'est pas versée en qualité d'indemnité compensatrice de préavis, mais vise à réparer le préjudice d'une privation d'indemnité compensatrice de préavis pour le salarié inapte à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Son versement ne justifie donc pas l'octroi d'une indemnité complémentaire compensatrice de congés payés, mais demeure soumis à cotisations sociales.

Le jugement est donc réformé en ce qu'il a condamné la SA TICLO au paiement d'une somme de 2.730 € sous déduction des sommes déjà versées au titre de cette indemnité.

S'agissant de l'indemnité spéciale de licenciement, [E] [K] apporte à la Cour les éléments de preuve qui établissent que le montant de cette indemnité s'élève à 5.702,67 €, soit deux fois le montant de l'indemnité légale de licenciement.

La SA TICLO, qui a versé à [E] [K] la somme de 4.641 € au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, doit donc être condamnée à lui verser la somme complémentaire de 1.061,67 €.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande de condamner la SA TICLO à payer à [E] [K] la une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SA TICLO qui succombe doit supporter les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [E] [K] de sa demande de requalification de son contrat de travail à durée déterminée en date du 11 mai 1998, et condamné la SA TICLO à verser à [E] [K] les sommes suivantes :

150 € au titre de la prime de fin d'année 2007,

15 € au titre des congés payés afférents,

300 € à titre de dommages et intérêts du préjudice né des jours fériés non récupérés

420 € au titre du rappel de salaire pour les jours de congés payés de fractionnement,

42 € au titre des congés payés afférents,

1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Réformant au surplus et statuant à nouveau,

Condamne la SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 1.365 € à titre de dommages et intérêts pour requalification du contrat de travail à durée déterminée du 20 mars 2000 en contrat de travail à durée indéterminée ;

Condamne la SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 190 € au titre des primes de fin d'année pour 2005 et 2006, outre la somme de 19 € au titre des congés payés afférents ;

Dit que le licenciement de [E] [K] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

Condamne la SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 24.570 € à titre de dommages et intérêts en réparation du licenciement abusif ;

Condamne la SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 1.061,67 € au titre de l'indemnité spéciale de licenciement ;

Dit que les sommes allouées au titre du rappel de prime de fin d'année et de complément d'indemnité spéciale de licenciement et congés payés afférents portent intérêts au taux légal à compter de la date du 13 novembre 2008, date réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de jugement du Conseil de prud'hommes ;

Dit que les sommes allouées au titre de la requalification du contrat de travail à durée déterminée et en réparation du licenciement abusif ainsi que celle allouée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile portent intérêts au taux légal à compter de la date du présent arrêt ;

Condamne la SA TICLO à remettre à [E] [K] une fiche de paie, une attestation destinée au Pôle emploi ainsi qu'un certificat de travail conformes au présent arrêt, étant indiqué que l'attestation destinée au Pôle emploi devra mentionner l'indemnité spéciale de licenciement versée à [E] [K] sans mentionner le préavis non effectué et payé ;

Condamne la SA TICLO à verser à [E] [K] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la SA TICLO aux dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier; Le Président,

Evelyne FERRIER Michel GAGET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 10/02599
Date de la décision : 03/12/2010

Références :

Cour d'appel de Lyon SC, arrêt n°10/02599 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-12-03;10.02599 ?
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